THE SHELDON L. KATES DESIGN GROUP LIMITED

Décisions


THE SHELDON L. KATES DESIGN GROUP LIMITED
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-91-141

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le lundi 20 juillet 1992

Appel n o AP-91-141

EU ÉGARD À un appel entendu le 1er juin 1992 en vertu de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15, dans sa version modifiée;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national, le 21 juin 1991, au sujet d'un avis d'opposition signifié en vertu de l'article 81.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

THE SHELDON L. KATES DESIGN GROUP LIMITED Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté.


Charles A. Gracey ______ Charles A. Gracey Membre présidant

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre

W. Roy Hines ______ W. Roy Hines Membre

Robert J. Martin ______ Robert J. Martin Secrétaire





L'appelant est un fabricant de matelas et d'oreillers, titulaire d'une licence. Le processus de production comprend les étapes suivantes : couper les tissus sur mesure, les coudre et installer des fermetures à glissière. On insère ensuite de la mousse dans les enveloppes cousues afin de faire des oreillers ou des matelas, puis on coud la fermeture à glissière. La seule question visée par cet appel est de déterminer si l'appelant est un fabricant ou un producteur en vertu de la Loi sur la taxe d'accise.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Il n'y a aucun doute que l'appelant fabrique des oreillers et des matelas dans ses installations et qu'il est un fabricant en vertu de la Loi sur la taxe d'accise. Le Tribunal conclut donc que les activités de l'appelant ne sont pas des activités de fabrication marginales puisque l'appelant fait plus que préparer les marchandises pour la vente en «les assemblant, fusionnant, mélangeant, coupant sur mesure, diluant, embouteillant, emballant ou remballant, ou en les enduisant ou les finissant». Étant un fabricant au sens ordinaire du mot, l'appelant ne peut donc invoquer l'exemption prévue à l'alinéa 2(1)f) qui exclut une personne qui «prépare... des marchandises dans un magasin de détail afin de les y vendre exclusivement et directement aux consommateurs».

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 1 er juin 1992 Date de la décision : Le 20 juillet 1992
Membres du Tribunal : Charles A. Gracey, membre présidant Arthur B. Trudeau, membre W. Roy Hines, membre
Avocat pour le Tribunal : Gilles B. Legault
Greffier : Janet Rumball
Ont comparu : Sheldon L. Kates, pour l'appelant Alain Préfontaine, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté en vertu de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi) relativement à une décision rendue par le ministre du Revenu national laquelle modifiait une cotisation établie le 25 juillet 1990.

L'appelant, The Sheldon L. Kates Design Group Limited, est un fabricant titulaire d'une licence. Il exerce ses activités sous les appellations commerciales Kates & Company et The Foam & Fabric Shoppe. L'appellation commerciale Kates & Company agit en tant que magasin de mobilier de maison au détail, tandis que l'appellation commerciale The Foam & Fabric Shoppe transforme des tissus et de la mousse en oreillers et en matelas. Les deux appellations exercent leurs activités dans les mêmes locaux.

Le 25 juillet 1990, l'appelant a fait l'objet d'une cotisation de 10 950,41 $, y compris la taxe de vente impayée, l'intérêt et les pénalités. La période de cotisation s'étend du 1er août 1986 au 30 avril 1990. L'appelant s'est opposé à la cotisation modifiée dans la décision rendue par l'intimé le 21 juin 1991. Cette décision a fait l'objet d'un appel devant le Tribunal.

Au début de l'audience, le représentant de l'appelant, Sheldon L. Kates, également propriétaire de l'entreprise appelante, a présenté une requête en vue de participer à l'audience à titre de co-appelant. Étant donné que la Loi ne contient aucune disposition à cet égard, la requête a été refusée. En fait, la Loi limite la participation à un appel à la personne qui a signifié un avis d'opposition, à l'acheteur des marchandises dans des circonstances particulières (dans un cas de ce genre, le vendeur peut également intervenir) et finalement, à un intervenant qui a un intérêt substantiel et direct dans la matière faisant l'objet de l'appel. Le Tribunal a estimé qu'aucune de ces circonstances ne s'appliquait à M. Kates. Premièrement, M. Kates n'a pas signifié d'avis d'opposition et, deuxièmement, les marchandises n'ont pas été achetées par lui. Troisièmement, bien que le Tribunal reconnaisse que M. Kates soit le seul propriétaire et actionnaire de The Sheldon L. Kates Design Group Limited, ce fait a amené le Tribunal à conclure que M. Kates lui-même ne pourrait ajouter de faits nouveaux ou différents à cet appel. De l'avis du Tribunal, M. Kates n'avait donc pas d'intérêts substantiels et directs dans la matière faisant l'objet de l'appel, soit de déterminer si l'appelant est un fabricant ou un producteur en vertu de la Loi.

Toutefois, afin de déterminer si l'appelant est un fabricant ou un producteur en vertu de la Loi, le Tribunal a reçu des éléments de preuve de M. Kates à titre de propriétaire de The Sheldon L. Kates Design Group Limited. Il a appris au Tribunal que les locaux de l'appelant sont divisés en installations d'entreposage et en ateliers et qu'ils comprennent un bureau ainsi qu'une salle d'exposition. Quelques machines à coudre, une table de coupe et des étagères sont installées dans les ateliers. L'appelant achète les marchandises, tels des lits, qui sont vendues dans son magasin de détail. Il achète également des paquets de mousse qu'il transforme en matelas et en oreillers afin de les vendre directement aux consommateurs. M. Kates a concédé que les matériaux bruts, comme la mousse et les tissus utilisés dans la fabrication de ces produits, ont été achetés exempts de taxe grâce à la licence de taxe de vente de fabricant que détient l'appelant. Le processus de production comprend la coupe des tissus sur mesure, la couture des enveloppes et, s'il y a lieu, l'installation de fermetures à glissière. La mousse est insérée dans les enveloppes de tissus afin de fabriquer des oreillers ou des matelas.

L'avocat de l'intimé a soutenu que les activités de l'appelant en ce qui concerne la transformation des paquets de mousse et des tissus en oreillers et en matelas sont des activités de fabrication aux termes de la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Her Majesty the Queen v. York Marble, Tile and Terrazzo Limited [2] . Selon lui, l'appelant donne de nouvelles formes, qualités et propriétés ou combinaisons au matériel qu'il utilise et est donc un fabricant. L'avocat a prétendu, d'autre part, que l'appelant ne peut invoquer l'exemption prévue à l'alinéa 2(1)f) qui exclut un fabricant marginal qui «prépare... des marchandises dans un magasin de détail afin de les y vendre exclusivement et directement aux consommateurs». De l'avis de l'avocat, l'appelant n'est pas un fabricant marginal en vertu de l'alinéa 2(1)f), mais un véritable fabricant au sens propre du mot. En somme, l'appelant est un fabricant au sens ordinaire de ce terme et ne peut invoquer l'exemption prévue à l'alinéa 2(1)f).

L'appelant a soulevé plusieurs arguments; toutefois, de l'avis du Tribunal, aucun de ces arguments ne porte sur l'objet de l'appel. L'appelant a prétendu, tout d'abord, que la vérification et la cotisation étaient illégales. Toutefois, à l'audience, l'appelant a admis qu'il s'est servi d'une licence de fabricant pour acheter ses matériaux bruts. Le Tribunal est donc convaincu que l'intimé avait tous les pouvoirs prévus par la Loi pour vérifier les activités de l'appelant et pour établir une nouvelle cotisation. L'appelant a également prétendu être victime de discrimination et de traitement injuste et a invoqué la violation de ses droits constitutionnels en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte). Le Tribunal note d'abord qu'il n'a pas reçu d'éléments de preuve à l'appui de l'argument de l'appelant à cet égard. De plus, l'appelant a prétendu que ses droits en vertu de la loi et des principes d'égalité prévus aux articles 7 et 15 de la Charte ont été violés, ces droits ayant trait à la personne physique et non à une société [3] comme l'appelant. Finalement, le Tribunal est d'avis qu'il n'est pas nécessaire d'examiner davantage l'un ou l'autre des arguments de l'appelant basés sur la Charte pour déterminer, comme c'est son devoir en vertu de la Loi, si l'appelant est un fabricant ou un producteur. Par conséquent, le Tribunal conclut qu'aucun des arguments invoqués par l'appelant en vertu de la Charte ne s'applique à cette affaire.

Le Tribunal estime donc que la décision relative à l'objet unique de cet appel doit être en faveur de l'intimé. De l'avis du Tribunal, la définition de l'expression «fabricant ou producteur» à l'article 2 de la Loi n'est pas exhaustive. Son objet est de traiter des situations particulières où on estime que certaines personnes ou entités sont considérées comme le fabricant ou le producteur de marchandises aux fins de la Loi. L'alinéa 2(1)f) traite de ce que l'on appelle la fabrication marginale. Toutefois, les activités de transformation exercées par l'appelant ne sont pas des activités de fabrication marginales conformément à l'alinéa 2(1)f). En fait, l'appelant fait plus que simplement préparer les marchandises à la vente en «les assemblant, fusionnant, mélangeant, coupant sur mesure, diluant, embouteillant, emballant ou remballant, ou en les enduisant ou les finissant». De l'avis du Tribunal, la transformation de la mousse et des tissus en oreillers et en matelas par l'appelant correspond à la définition d'une activité de fabrication selon l'interprétation de la décision de la Cour suprême dans l'affaire York Marble [4] . Étant un fabricant au sens ordinaire du mot, l'appelant ne peut donc invoquer l'exemption prévue à l'aliéna 2(1)f) et prétendre qu'il «prépare... des marchandises dans un magasin de détail afin de les y vendre exclusivement et directement aux consommateurs». L'appelant est donc tenu de payer la taxe de vente conformément au paragraphe 50(1) de la Loi.

Pour les raisons qui précèdent, l'appel est rejeté.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E-15, dans sa version modifiée.

2. [1968] R.C.S. 140.

3. Voir Thomson Newspapers Ltd. c. Canada (Directeur des enquêtes et recherches, Commission sur les pratiques restrictives du commerce), [1990] 1 R.C.S. 425; et Organisation nationale anti - pauvreté c. Canada (Procureur général (C.A.), [1989] 3 C.F. 684.

4. Supra, note no 2.


Publication initiale : le 27 juin 1997