AIRWAY SURGICAL APPLIANCES LTD.

Décisions


AIRWAY SURGICAL APPLIANCES LTD.
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-91-149

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le vendredi 10 avril 1992

Appel n o AP-91-149

EU ÉGARD À un appel entendu le 2 mars 1992 en vertu de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15, dans sa version modifiée;

ET EU ÉGARD À une décision du ministre du Revenu national datée du 28 juin 1991 au sujet d'un avis d'opposition signifié en application de l'article 81.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

AIRWAY SURGICAL APPLIANCES LTD. Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis. Le Tribunal conclut que les collets cervicaux en question doivent être considérés comme des «supports de l'épine dorsale et autres supports orthopédiques» au sens de l'article 20 de la partie VIII de l'annexe III de la Loi sur la taxe d'accise.


Sidney A. Fraleigh ______ Sidney A. Fraleigh Membre présidant

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre

W. Roy Hines ______ W. Roy Hines Membre

Robert J. Martin ______ Robert J. Martin Secrétaire





Le présent litige porte sur la question de savoir si certains «collets cervicaux» constituent des «supports de l'épine dorsale et autres supports orthopédiques» au sens de l'article 20 de la partie VIII de l'annexe III de la Loi sur la taxe d'accise, ce qui les rendrait admissibles à l'exemption de taxe visée à l'article 51 de la Loi sur la taxe d'accise.

Les marchandises en question comprennent une douzaine de modèles de collets cervicaux qui se distinguent selon leurs matériaux constitutifs, leurs dimensions, leur conception et le degré de soutien qu'ils assurent. Les collets sont faits de mousse de polyuréthane recouverte de mousseline pour bonneterie extensible qui absorbe la transpiration et utilise cette humidité comme système de refroidissement. Les collets cervicaux sont maintenus en place à l'aide de languettes de velcro, ce qui permet de les ajuster selon les dimensions du cou. Ils sont de conception variable et offrent divers degrés de rigidité de manière à traiter différentes blessures à la colonne cervicale.

DÉCISION : L'appel est admis. Le Tribunal conclut que les collets cervicaux en question doivent être considérés comme des «supports de l'épine dorsale et autres supports orthopédiques» au sens de l'article 20 de la partie VIII de l'annexe III de la Loi sur la taxe d'accise.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 2 mars 1992 Date de la décision : Le 10 avril 1992
Membres du Tribunal : Sidney A. Fraleigh, membre présidant Arthur B. Trudeau, membre W. Roy Hines, membre
Avocat pour le Tribunal : David M. Attwater
Greffier : Dyna Côté
Ont comparu : Michael A. Kelen, pour l'appelant Gilles Villeneuve, pour l'intimé





Le présent litige porte sur la question de savoir si certains «collets cervicaux» constituent des «supports de l'épine dorsale et autres supports orthopédiques» au sens de l'article 20 de la partie VIII de l'annexe III de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi), ce qui les rendrait admissibles à l'exemption de taxe visée à l'article 51 de la Loi.

Les marchandises en question comprennent une douzaine de modèles de collets cervicaux qui se distinguent selon leurs matériaux constitutifs, leurs dimensions, leur conception et le degré de soutien qu'ils assurent. Les collets sont faits de mousse de polyuréthane recouverte de mousseline pour bonneterie extensible qui absorbe la transpiration et utilise cette humidité comme système de refroidissement. Les collets cervicaux sont maintenus en place à l'aide de languettes de velcro, ce qui permet de les ajuster selon les dimensions du cou. Ils sont de conception variable et offrent divers degrés de rigidité de manière à traiter différentes blessures à la colonne cervicale.

Les collets cervicaux sont normalement prescrits par des médecins spécialisés en orthopédie ou en médecine d'urgence. Le collet soutient la colonne cervicale, ce qui empêche le patient de fléchir ou d'allonger le cou (mouvements de haut en bas de la tête) ou de faire des rotations (mouvements de gauche à droite de la tête). Le collet sert également à contrer l'effet du balancement résiduel pendant la guérison de la colonne cervicale. Si l'emploi du collet cervical est prescrit par un médecin spécialisé en orthopédie, le patient se voit remettre une ordonnance que peut exécuter un magasin spécialisé dans la fourniture d'appareils médicaux.

Les dispositions suivantes de la Loi s'appliquent au présent appel.

51. (1) La taxe imposée par l'article 50 ne s'applique pas à la vente ou à l'importation des marchandises mentionnées à l'annexe III ...

ANNEXE III

PARTIE VIII

SANTÉ

...

20. Membres artificiels, mécanisés ou non, et tous leurs accessoires et dispositifs; supports de l'épine dorsale et autres supports orthopédiques; appareils fabriqués sur commande pour une personne souffrant d'une infirmité ou d'une difformité du pied ou de la cheville; pièces de ce qui précède.

L'avocat de l'appelant a soutenu que les mots entrant dans le libellé d'une loi doivent être interprétés dans leur sens ordinaire ou usuel mais que, si un mot a été employé dans une loi dans le sens que lui donne le jargon ou la langue familière d'une région donnée, d'une certaine partie de la population, d'un secteur de l'industrie ou d'un domaine particulier, ils doivent être interprétés dans ce sens [2] . À ce propos, l'avocat a déclaré qu'un profane considérerait les collets comme des supports. Il a cependant fait remarquer que M. William Dickinson, le vice-président, Administration et finances, de l'entreprise appelante, a déclaré dans son témoignage que l'industrie considérait les collets comme des supports. De même, Mme Jeanne Robichaud, une employée de la firme Ontario Medical Supply qui détient un certificat d'ajusteuse de collets cervicaux émis par le ministre de la Santé de l'Ontario dans le cadre du Programme d'appareils et de prothèses, et le docteur Edward Austin Day, spécialiste en médecine physique et en réadaptation et professeur adjoint en médecine de réadaptation à la faculté de médecine de l'Université d'Ottawa, ont tous deux déclaré dans leur témoignage qu'ils considéraient les collets cervicaux comme des supports. L'avocat a également soutenu que les collets répondaient à la définition de «support» contenue dans la plupart des dictionnaires de médecine.

L'avocat a fait remarquer que la version française de la disposition de la Loi, à savoir le passage «supports de l'épine dorsale et autres supports orthopédiques», se traduit en gros par «dorsal spine support or other orthopaedic support». Il s'est reporté au témoignage du docteur Day, qui a précisé que l'orthopédie est la science des os, y compris de la colonne vertébrale. L'avocat a soutenu qu'un support orthopédique désignerait notamment un support de la colonne cervicale. Il a déclaré que les collets cervicaux étaient conçus pour soutenir et immobiliser partiellement la tête et le cou pour assurer le traitement des lésions des tissus mous ou le traitement post-opératoire d'une fracture du cou.

L'avocat de l'intimé a soutenu que le litige consistait à déterminer non pas si les collets cervicaux en question sont des supports, mais bien s'ils sont des supports au sens de la Loi. L'avocat a déclaré que les exemptions fiscales doivent être interprétées de manière restrictive et qu'il incombait à l'appelant de démontrer que sa demande de remboursement est conforme aux dispositions d'exemption pertinentes de la Loi [3] .

L'avocat a soutenu que, d'après le catalogue des produits de l'appelante, les marchandises en question sont des collets, et non des supports. Les dictionnaires de médecine établissent une distinction entre les collets et les supports. Par exemple, Dorland's Illustrated Medical Dictionary [4] précise qu'un collet est «an encircling band, generally around the neck», le mot «band» étant défini comme «an object or appliance that confines or restricts while allowing a limited or desired degree of movement». Par conséquent, comme les deux mots ont des sens différents, l'avocat a soutenu que les collets en mousse de polyuréthane en question n'étaient pas des supports au sens de l'article 20.

L'avocat a déclaré que les dispositions d'exemption de l'article 20 devaient être lues comme un tout. Le Parlement a regroupé les membres artificiels, les supports de l'épine dorsale et autres supports orthopédiques et les appareils fabriqués sur commande pour une personne souffrant d'une infirmité ou d'une difformité du pied ou de la cheville sous une même disposition. Étant donné que le législateur a choisi de regrouper ces trois catégories de marchandises, le sens du mot «support» est nuancé par les deux autres. Il a déclaré que, pour constituer des supports, les marchandises devaient :

1. être fabriquées spécialement en fonction des besoins et des exigences du patient;

2. servir au traitement d'une infirmité grave; et

3. servir à surmonter une déficience physique, c'est-à-dire remplir une fonction palliative plutôt que curative.

À ce propos, l'avocat a soutenu que les collets sont préfabriqués et ajustés au moyen d'une languette de velcro. Ils sont utilisés pour traiter des traumatismes légers de la colonne cervicale ou, comme il est précisé dans le catalogue des produits de l'appelant, pour traiter des lésions bénignes de la colonne cervicale ou pour empêcher le patient d'effectuer des mouvements brusques et douloureux du cou. Aucun élément de preuve ne montre qu'ils servent à corriger une invalidité grave, comme la perte d'un membre. Enfin, les collets sont utilisés dans le cadre du processus de guérison, lequel doit être considéré de nature curative. En conséquence, les collets cervicaux ne sont pas des supports au sens de l'article 20.

Quant aux expressions «support de l'épine dorsale» et «supports orthopédiques» utilisées dans la version française de l'article 20, l'avocat a soutenu qu'elles ne figuraient dans aucun dictionnaire médical français et qu'il convenait donc de ne pas en tenir compte.

Pour interpréter l'expression «supports de l'épine dorsale et autres supports orthopédiques» utilisée à l'article 20, le Tribunal s'en remet à l'approche moderne aux fins d'interprétation des lois fiscales. Comme le souligne le juge MacGuigan de la Cour d'appel dans l'affaire Lor - Wes Contracting Ltd. c. La Reine [5] :

Le seul principe d'interprétation reconnu aujourd'hui consiste à examiner les termes dans leur contexte global en vue de découvrir l'objet et l'esprit des dispositions fiscales [6] .

En l'instance, le Tribunal adopte cette approche pour interpréter une disposition d'exemption de la Loi.

En fait, l'avocat de l'intimé a soutenu que, d'après le contexte global de la partie VIII de l'annexe III et, plus particulièrement, la structure et le libellé de l'article 20 de la partie VIII, l'expression «supports de l'épine dorsale et autres supports orthopédiques» devait être interprétée de manière restrictive afin de préciser, à son avis, ce qui était sous-entendu par le Parlement. Or, le Tribunal ne peut retenir cet argument. Aucun élément de la structure ou du contenu de la partie VIII ou, plus particulièrement, de l'article 20 ne justifie l'ajout de mots restrictifs à une expression claire et dépourvue d'ambiguïté.

Selon les éléments de preuve fournis par les témoins de l'appelant, lesquels n'ont pas été contestés, les collets cervicaux du type de ceux en question sont considérés comme des supports par l'industrie et par les spécialistes de la médecine fournissant de tels appareils. Ils servent à protéger la colonne cervicale des mouvements brusques ou exagérés et soutiennent la tête pendant la période de guérison.

En conséquence, l'appel est admis. Le Tribunal conclut que les collets cervicaux en question doivent être considérés comme des «supports de l'épine dorsale et autres supports orthopédiques» au sens de l'article 20 de la partie VIII de l'annexe III de la Loi sur la taxe d'accise.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E-15, dans sa version modifiée.

2. Pfizer Co. Ltd. c. Le sous-ministre du Revenu national (Douanes et Accise), [1973] C.F. 3, p. 7.

3. Gustavson Drilling (1964) Limited c. Le ministre du Revenu national, [1977] 1 R.C.S. 271, p. 277.

4. Dorland's Illustrated Medical Dictionary, 27e édition, Philadelphie, W.B. Saunders Company, 1988, pp. 187 et 357.

5. [1986] 1 C.F. 346 (C.F.A.).

6. Ibid., page 352.


Publication initiale : le 27 juin 1997