RIGHT WAY AUTO DECOR & SIGNS LTD.

Décisions


RIGHT WAY AUTO DECOR & SIGNS LTD.
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-91-231

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, vendredi le 22 janvier 1993

Appel n o AP-91-231

EU ÉGARD À un appel entendu le 20 octobre 1992 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 27 novembre 1991 concernant un avis d'opposition signifié en vertu de l'article 81.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

RIGHT WAY AUTO DECOR & SIGNS LTD. Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis en partie et l'affaire est renvoyée au ministre du Revenu national pour qu'il la réexamine en tenant compte des motifs du Tribunal.


Desmond Hallissey ______ Desmond Hallissey Membre présidant

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre

Sidney A. Fraleigh ______ Sidney A. Fraleigh Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel a pour but d'établir le pourcentage approprié à déduire du prix de vente de l'appelant à l'égard du coût d'installation dans le cadre du calcul du prix de vente des marchandises assujetties à la taxe conformément à l'article 50 de la Loi sur la taxe d'accise.

DÉCISION : L'appel est admis en partie et l'affaire est renvoyée au ministre du Revenu national pour qu'il la réexamine en tenant compte des motifs du Tribunal.

Lieu de l'audience : Edmonton (Alberta) Date de l'audience : Le 20 octobre 1992 Date de la décision : Le 22 janvier 1993
Membres du Tribunal : Desmond Hallissey, membre présidant Arthur B. Trudeau, membre Sidney A. Fraleigh, membre
Avocat pour le Tribunal : Shelley Rowe
Greffier du Tribunal : Dyna Côté
Ont comparu : Emil Alexander Sawchuk, pour l'appelant Linda Wall, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté conformément à l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi) à la suite d'une décision rendue par le ministre du Revenu national (le Ministre).

La question en litige porte sur l'établissement du pourcentage approprié à déduire du prix de vente de l'appelant à l'égard du coût d'installation dans le cadre du calcul du prix de vente des marchandises assujetties à la taxe conformément à l'article 50 de la Loi. Elle découle d'une vérification des livres de l'appelant que le ministère du Revenu national (Revenu Canada) a effectuée en septembre 1990 pour la période comprise entre le 1er décembre 1987 et le 25 juillet 1990, date à laquelle il a été déterminé que l'appelant n'avait pas droit à la déduction de 50 p. 100 du prix de vente des lettres de vinyle personnalisées (décalques) à l'égard des frais d'installation admissibles, comme il l'a fait pendant toute la période visée par la vérification. En se fondant sur la vérification, l'intimé a statué que l'appelant n'avait droit de déduire que 25 p. 100 du prix de vente à l'égard du coût d'installation, conformément aux dispositions du Règlement sur le coût d'érection ou d'installation [2] (le Règlement). L'intimé a changé d'opinion à ce sujet, comme en témoigne le mémoire, et il a soutenu que l'appelant avait droit de déduire 33 p. 100 du prix de vente à l'égard du coût d'installation.

Le président de Right Way Auto Decor & Signs Ltd., M. Emil Alexander Sawchuk, a comparu et a témoigné au nom de l'appelant. Il a précisé de quelle façon l'appelant produit des décalques conçus par ordinateur et découpés dans des rouleaux de vinyle autocollant. Le prix de vente des décalques en cause comprenait l'installation (fournitures et installation). M. Sawchuk a déclaré que ses activités de fournitures et d'installation représentent entre 58 et 60 p. 100 de son chiffre d'affaires.

M. Sawchuk a produit une série de photographies (pièce A-2) pour expliquer que le procédé d'installation nécessite le nettoyage de la surface, la disposition des lettres, leur essorage sur la surface et, enfin, l'application de chaleur sur les lettres. Les décalques peuvent être installés sur des véhicules, du matériel, des panneaux d'affichage, des fenêtres, etc. M. Sawchuk a soutenu que le coût d'installation varie sensiblement d'un décalque à l'autre, en fonction de sa taille et de sa forme, et de la surface sur laquelle il est appliqué.

En règle générale, le prix demandé par l'appelant pour l'installation correspond au double du coût du décalque avant l'installation. Cependant, M. Sawchuk a précisé que les frais d'installation englobent : 1) le coût de la main-d'oeuvre (y compris le nettoyage de la surface avant l'installation) qui prend la forme d'une commission de 30 à 35 p. 100 du prix de vente (fournitures et installation) aux employés et aux entrepreneurs indépendants; 2) le coût de l'outillage (c'est-à-dire les chalumeaux à air chaud, les lampes à rayonnement infrarouge, les solvants, les serviettes spéciales, les échelles et les échafaudages loués, etc.); 3) les véhicules; 4) les déplacements au lieu d'installation; et, en dernier lieu, 5) les bénéfices. Au cours du contre-interrogatoire mené par l'avocate de l'intimé, M. Sawchuk a déclaré qu'il n'a pas conservé de document sur le coût d'installation de chaque décalque, mais qu'il pouvait en vérifier l'exactitude à partir des documents comptables de l'entreprise.

On a produit la pièce A-3, un plan d'étage de l'usine de l'appelant située à l'angle de la 178e Rue et de la 109e Avenue, à Edmonton (Alberta), pour démontrer que sur une superficie totale de 4 890 pi2, 3 210 pi2 sont consacrés aux services d'installation et le reste, soit 1 680 pi2, est occupé par les bureaux et le service de fabrication. M. Sawchuk a affirmé que son entreprise occupait d'autres locaux au moment de la vérification. Il a toutefois ajouté que l'ancienne usine, située sur la rue Spruce, à Spruce Grove (Alberta), était plus vaste.

L'avocate de l'intimé a cité un témoin, M. Cameron George Tees, agent de vérification au service de Revenu Canada depuis trois ans, qui a vérifié les livres de l'appelant. M. Tees a expliqué que, dans le cadre de sa vérification, il a examiné un échantillon des ordres d'exécution de l'appelant, qui sont semblables à la pièce A-1 produite par l'appelant, et a précisé qu'il n'a pas trouvé de preuve du coût réel d'installation. Il a donc décidé d'effectuer une vérification sélective, en choisissant l'année 1989. Il a examiné les coûts réels de main-d'oeuvre, à partir du sommaire d'un formulaire T-4, et les frais de sous-traitance et des services publics, ainsi que les frais d'utilisation des véhicules; il a pu ainsi déterminer les frais d'installation admissibles, selon les dispositions des articles 5 et 7 du Règlement et celles du Mémorandum de l'accise ET 205 [3] . M. Tees a ensuite comparé les frais d'installation totaux admissibles et les ventes totales (fournitures et installation) à partir des factures de l'appelant, ce qui lui a permis d'établir que l'appelant avait droit à une déduction de 25 p. 100 du prix de vente au titre du coût d'installation.

Lorsque l'avocate lui a demandé d'expliquer pourquoi il a fait passer le pourcentage de 25 à 33 p. 100, M. Tees a déclaré qu'un agent des litiges au Ministère lui a demandé d'examiner les données portant sur l'appelant. Il a affirmé qu'à l'issue de la deuxième vérification, il a décidé d'ajouter d'autres coûts aux frais d'installation totaux admissibles, comme l'assurance-automobile, les réparations, l'entretien, le crédit-bail, les services publics et la location d'outils, qu'il a pu déterminer à partir des états financiers de l'appelant.

Au cours du contre-interrogatoire effectué par M. Sawchuk, il a été établi qu'aux fins du calcul des frais d'installation totaux admissibles, M. Tees n'a pas tenu compte du loyer et d'autres frais généraux liés à l'installation, comme les frais d'administration et de garantie.

Dans son plaidoyer, M. Sawchuk a rappelé que seulement le tiers des activités de l'appelant portent essentiellement sur les fournitures. Vu qu'une si grande partie des activités de l'appelant ont trait à l'installation, il a soutenu que le pourcentage à déduire du prix de vente à l'égard du coût d'installation ne devrait pas être 25 p. 100, ni même 33 p. 100, comme l'a proposé l'intimé, mais au moins 50 p. 100. Il a fait valoir que, dans le cadre de la vérification de M. Tees, ce dernier n'a pas tenu compte d'une partie des frais généraux, comme le loyer et les frais d'administration et de garantie, et qu'une partie de ces frais devrait être imputée au coût d'installation. Pour appuyer son affirmation, il s'est reporté à l'alinéa 5(1)q) du Règlement, qui précise ce qui suit :

un montant représentant les frais généraux, calculé selon les principes comptables généralement reconnus, dans la mesure où ces frais ont été engagés au chapitre de certains postes particuliers qui sont considérés comme des frais d'installation admissibles.

L'avocate de l'intimé a soutenu qu'aux fins de l'application de la Loi, les méthodes de calcul des frais d'installation admissibles sont précisées dans le Règlement. Vu que l'appelant ne vend pas de marchandises sans les installer, ce qui correspond à ses marchandises installées, son coût d'installation doit être calculé conformément aux articles 5 à 7 du Règlement. L'avocate a ajouté qu'il incombe à l'appelant de prouver que tous les postes qu'il prétend être des coûts d'installation sont visés aux articles 5 à 7 du Règlement. En plus de préciser ces postes, l'appelant doit également justifier sa demande à l'aide de preuves documentaires, comme l'exige l'article 8 du Règlement et comme en a décidé le Tribunal dans les causes Meubles M.S. Enr. c. Le ministre du Revenu national [4] et Les Cuisines M.S. Inc. c. Le ministre du Revenu national [5] . En outre, l'avocate a déclaré qu'il incombe à l'appelant de prouver que la cotisation était inexacte et qu'en conséquence il doit faire la preuve qu'il y a eu erreur, omission ou oubli dans le cadre de la vérification sur laquelle se fonde la cotisation. L'avocate s'est reportée à la décision rendue par le Tribunal dans la cause Sarto Plante Inc. c. Le ministre du Revenu national [6] pour appuyer son argument, à savoir que pour contester la vérification, l'appelant ne doit pas se limiter à prétendre qu'il y a eu erreur; il doit fournir des explications et des preuves de ces erreurs et lacunes. L'avocate a soutenu que, dans les deux cas, l'appelant n'a pas réussi à fournir de preuves satisfaisantes.

L'avocate de l'intimé a fait remarquer que le loyer et la garantie ne sont pas précisés à l'article 5 du Règlement. En outre, elle a soutenu que l'on ne peut prétendre que les frais généraux englobent le loyer et la garantie, car, selon l'alinéa 5(1)q) du Règlement, les frais généraux doivent porter sur les frais d'installation admissibles énoncés aux alinéas 5(1)a) à p). Vu que le loyer, les garanties et les frais d'administration ne sont pas énoncés de façon explicite parmi les frais d'installation admissibles, l'avocate a soutenu que les frais généraux rattachés à ces éléments ne peuvent donner droit à une déduction en vertu de l'alinéa 5(1)q) du Règlement. De plus, en ce qui touche l'allégation de l'appelant voulant que les frais de garantie doivent être pris en compte, l'avocate a prétendu que les frais de protection contre les éventualités ne doivent pas être inclus. Elle a également ajouté que les garanties ne peuvent être intégrées aux frais généraux, car elles sont négociables et que leur durée et le montant de la protection sont variables.

Aux termes de la division 46c)(ii)(A) de la Loi, le coût d'installation des marchandises fabriquées ou produites au Canada peut être exclu du calcul de leur prix de vente. Le Règlement prévoit quatre méthodes de calcul de la déduction de ce coût. Lorsque le fabricant ou le producteur ne vend pas régulièrement des marchandises identiques à un prix n'englobant pas l'installation, le coût d'installation correspond au coût total des divers postes énoncés à l'article 5 du Règlement. Par ailleurs, l'article 7 du Règlement prévoit que le coût d'installation peut être déterminé par l'application d'un pourcentage du prix de vente qui correspond au coût d'installation de toutes les marchandises vendues, exprimé en un pourcentage du total des prix de vente de ces marchandises au cours du dernier exercice. L'article 8 du Règlement assujettit ces deux méthodes à une condition : tous les frais d'installation précisés aux articles 5 à 7 du Règlement doivent être justifiés par des preuves documentaires. Enfin, au lieu des trois méthodes susmentionnées, le coût d'installation peut être établi selon les dispositions de l'annexe du Règlement qui précise que les marchandises, comme celles en cause, donnent droit à une déduction de 10 p. 100 à l'égard des frais d'installation.

Étant donné que l'appelant ne vend pas régulièrement des marchandises identiques à un prix n'englobant pas l'installation, le coût d'érection ou d'installation doit être calculé conformément à l'article 5 ou à l'article 7 du Règlement. Dans le cas qui nous intéresse, le coût d'installation a été établi selon l'article 5 du Règlement qui prévoit que le coût d'installation correspond au total des coûts réels de main-d'oeuvre, de transport, d'hébergement, d'outillage, des matériaux, de la location, des services publics, de l'amortissement et des frais généraux.

Les éléments admissibles du coût d'installation sont énoncés aux alinéas 5(1)a) à p) du Règlement. La portée de l'expression «frais généraux», à l'alinéa 5(1)q), est limitée par la phrase «dans la mesure où ces frais ont été engagés au chapitre de certains postes particuliers qui sont considérés comme des frais d'installation admissibles». Les postes particuliers à l'égard des frais d'installation admissibles sont énoncés aux alinéas 5(1)a) à p). Le Tribunal considère les termes et expressions de l'alinéa 5(1)q) dans leur sens courant et en vient à la conclusion qu'ils signifient qu'il doit exister une certaine relation entre les frais d'installation admissibles et le poste des frais généraux que l'appelant considère comme un coût d'installation.

De l'avis du Tribunal, les frais d'administration, comme ceux rattachés aux services de secrétariat et à la commande de fournitures, et les frais liés à l'immeuble, comme le loyer, sont des frais afférents aux frais d'installation admissibles et qui sont prévus à ce «chapitre». Le Tribunal reconnaît que le loyer et les frais d'administration ne sont pas précisés aux alinéas 5(1)a) à p) du Règlement; cependant, certains frais d'administration sont rattachés au versement de la rémunération, à l'assurance-chômage, à l'assurance collective, aux régimes de pension, aux indemnisations des accidents du travail, à la location de l'outillage et à l'amortissement. En outre, l'immeuble dans lequel l'appelant exploite son entreprise est nécessaire à titre d'infrastructure du procédé d'installation qui englobe tous les frais d'installation admissibles. Ce point de vue est conforme à la définition de l'expression anglaise «overhead» dans The New Lexicon Webster's Dictionary of the English Language [7] :

due to charges necessary to the carrying on of a business

...

expenses which are a general charge to a business and cannot be allotted to a particular job or process (e.g. rent, light, depreciation, administration, insurance, as opposed to materials, wages etc.).

([traduction] frais nécessaires à l'exploitation d'une entreprise

[...]

dépenses de nature générale que l'entreprise ne peut imputer à une fonction ou à un procédé en particulier [p. ex. le loyer, l'électricité, l'amortissement, l'administration, l'assurance, par opposition aux matériaux, à la rémunération, etc.].)

Le Tribunal n'est pas d'accord avec l'interprétation de l'intimé au sujet de l'alinéa 5(1)q) du Règlement, à savoir notamment que tous les frais généraux admissibles se limitent aux éléments précisés aux alinéas 5(1)a) à p). Il croit plutôt qu'en consultant l'alinéa 5(1)q), le lecteur est porté à envisager les frais généraux non visés par les alinéas 5(1)a) à p), dans la mesure où ces frais ont été engagés au chapitre de postes particuliers considérés comme des frais d'installation admissibles et qu'ils sont calculés selon les principes comptables généralement reconnus. Les frais généraux constituent un élément accepté des frais admissibles et il serait insensé de les isoler sous une rubrique distincte, à moins qu'ils ne se rapportent aux postes particuliers qui ne sont pas précisés aux alinéas 5(1)a) à p) du Règlement.

Le Tribunal est d'avis que les frais généraux énoncés à l'alinéa 5(1)q) du Règlement peuvent et devraient être interprétés comme englobant des coûts tels le loyer et les frais d'administration, mais que seule la partie de ces frais qui a trait au processus d'installation doit être prise en compte.

En conséquence, l'appel est admis en partie, et la cotisation et la vérification sur lesquelles il est fondé sont renvoyées au Ministre pour qu'il réexamine le pourcentage approprié à déduire du prix de vente (fournitures et installation) de l'appelant à l'égard du coût d'installation. Plus précisément, il est ordonné à l'intimé de réexaminer les frais généraux de l'appelant en vue d'en inclure une partie dans le calcul des coûts réels d'érection et d'installation assumés par l'appelant.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E - 15.

2. DORS/83-136, Gazette du Canada Partie II, vol. 117, no 4, p. 625, le 4 février 1983.

3. Ministère du Revenu national, Douanes et Accise, le 29 mars 1989.

4. Appel no AP-90-215, le 20 novembre 1991.

5. Appel no AP-90-216, le 20 novembre 1991.

6. Appel no AP-90-017, le 16 mars 1992.

7. New York, Lexicon Publications, Inc., 1987, p. 715.


Publication initiale : le 2 juillet 1997