MUSTANG ENGINEERING AND CONSTRUCTION LIMITED

Décisions


MUSTANG ENGINEERING AND CONSTRUCTION LIMITED
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-92-059

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mardi 2 mars 1993

Appel n o AP-92-059

EU ÉGARD À un appel entendu le 20 octobre 1992 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 12 juin 1992 concernant un avis d'opposition signifié aux termes de l'article 81.17 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

MUSTANG ENGINEERING AND CONSTRUCTION LIMITED Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté.

Desmond Hallissey ______ Desmond Hallissey Membre présidant

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre

Sidney A. Fraleigh ______ Sidney A. Fraleigh Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Pour l'essentiel, le présent appel porte sur des pièces servant à réparer des engins mécaniques de chantier utilisés dans les projets de construction de l'autoroute de Slocan et du barrage de la rivière Oldman. L'appelant a présenté quatre demandes de remboursement de la taxe de vente fédérale qu'il avait acquittée sur des pièces de matériel divers, alléguant qu'elles ne sont pas assujetties à cette taxe aux termes de l'alinéa 1l) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi sur la taxe d'accise. Il faut que le Tribunal détermine que les engins mécaniques de chantier en cause sont visés par les dispositions des alinéas 1a), e) ou j) pour que les pièces servant à réparer ce matériel ne soient pas assujetties à la taxe conformément à l'alinéa 1l) de la partie XIII de l'annexe III et au paragraphe 51(1) de la Loi sur la taxe d'accise.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Le Tribunal considère qu'aux termes de l'alinéa 1a) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi sur la taxe d'accise, celui qui achète ou importe les machines ou les appareils visés doit être celui qui fait le travail entraînant la fabrication ou la production de marchandises. Comme ce n'est pas le cas, l'appelant ne satisfait pas aux conditions de l'alinéa 1a). Le Tribunal estime en outre que les activités de l'appelant ne consistent pas à fabriquer ou à produire des marchandises. De l'avis du Tribunal, l'argile, le sable, le gravier ou la pierre ne représentent pas des «minéraux» au sens de l'alinéa 1j) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi sur la taxe d'accise. Comme les camions transportant de la pierre en cause sont utilisés pour le transport de matériaux depuis la source jusqu'au lieu de dépôt, ils ne servent pas «exclusivement» aux mines et aux carrières.

Lieu de l'audience : Edmonton (Alberta) Date de l'audience : Le 20 octobre 1992 Date de la décision : Le 2 mars 1993
Membres du Tribunal : Desmond Hallissey, membre présidant Arthur B. Trudeau, membre Sidney A. Fraleigh, membre
Avocat pour le Tribunal : David M. Attwater
Greffier : Dyna Côté
Ont comparu : Doug Densmore, pour l'appelant Linda Wall, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi) à l'égard de quatre déterminations du ministre du Revenu national (le Ministre). Pour l'essentiel, le présent appel porte sur des pièces servant à réparer des engins mécaniques de chantier utilisés dans les projets de construction de l'autoroute de Slocan et du barrage de la rivière Oldman. L'appelant a présenté quatre demandes de remboursement de la taxe de vente fédérale qu'il avait acquittée sur des pièces de matériel divers, alléguant qu'elles ne sont pas assujetties à cette taxe aux termes de l'alinéa 1l) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi. Le Ministre a partiellement rejeté ces demandes.

Le matériel que les pièces servaient à réparer comprend des camions transportant de la pierre (camions à pierre), des niveleuses, des chargeuses, des bouteurs et des pelles rétrocaveuses. Quant aux pièces, elles comprennent une vaste gamme de pièces de rechange, notamment des soupapes, des manchons, des joints d'étanchéité, des vérins, un solénoïde, un compresseur, un injecteur, un moteur et une transmission. Le témoin de l'appelant était M. Hal Beauclair, actuellement vice-président directeur de Matthews Contracting Inc. (MCI), société qui, a-t-il expliqué, chapeaute la société appelante et certaines autres. M. Beauclair a témoigné que c'était à MCI qu'appartenaient les engins mécaniques de chantier. Toutefois, l'appelant a acheté les pièces pour réparer le matériel et a donc demandé d'être remboursé des taxes qu'il avait acquittées sur ces pièces.

Les dispositions pertinentes de la Loi se lisent comme suit :

51. (1) La taxe imposée par l'article 50 ne s'applique pas à la vente ou à l'importation des marchandises mentionnées à l'annexe III.

ANNEXE III

PARTIE III

MATÉRIEL DE PRODUCTION, MATIÈRES DE

CONDITIONNEMENT ET PLANS

1. Tous les articles suivants :

a) les machines et appareils vendus aux fabricants ou producteurs ou importés par eux pour être utilisés par eux principalement et directement :

(i) soit dans la fabrication ou la production de marchandises,

[...]

e) les camions automobiles montés sur roues munies de pneus en caoutchouc pour servir hors du réseau routier public et exclusivement aux mines et aux carrières;

[...]

j) les machines et appareils, y compris le câble métallique, les trépans et le tubage du trou de tir pour sismographe, utilisés dans les travaux d'exploration, de découverte ou de mise en valeur du pétrole, du gaz naturel ou des minéraux;

[...]

l) les pièces pour des marchandises visées aux alinéas a) à k);

[...]

mais à l'exclusion :

[...]

q) des véhicules automobiles, sauf ceux visés aux alinéas e) et h).

Dans le présent appel, la question est donc de déterminer si les engins mécaniques de chantier sont visés par les dispositions des alinéas 1a), e) ou j) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi, de sorte que les pièces ne soient pas assujetties à la taxe conformément à l'alinéa 1l) de la partie XIII de l'annexe III et au paragraphe 51(1) de la Loi.

Aux chantiers de construction, l'appelant utilisait des camions à benne basculante de modèle Terex 3309 et des camions de chantier de modèle Caterpillar 769, les deux types étant appelés des camions à pierre. Les camions sont destinés à servir hors du réseau routier public; on ne peut obtenir de permis pour les utiliser sur les voies publiques. Dans le projet de construction du barrage de la rivière Oldman, les camions servaient à transporter de la pierre (de diverses catégories et tailles), ainsi que du sable et du remblai granulaire. Des travaux d'excavation se faisaient à diverses carrières situées jusqu'à 7 km du barrage et de l'évacuateur de crues, du chenal d'approche et des déversoirs, où le roc était foré, fendu ou dynamité avant d'être transporté jusqu'au barrage. Le projet de construction de l'autoroute de Slocan consistait à refaire 5,9 km d'autoroute dans un terrain montagneux. Le contrat prévoyait les activités suivantes : déblaiement et essouchement, forage et dynamitage, excavation, préparation de la pente et asphaltage. Les camions à pierre servaient à transporter la roche à la zone d'utilisation le long de l'autoroute. Il s'agit de camions automobiles montés sur roues munies de pneus en caoutchouc. L'appelant a soutenu que les camions relèvent de l'alinéa 1e) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi, la question étant de savoir s'ils ont servi «exclusivement aux mines et aux carrières».

L'appelant a allégué que les chantiers de construction de l'autoroute de Slocan et du barrage de la rivière Oldman, y compris les chemins de service, correspondent à des «carrières». Des travaux d'excavation ont eu lieu à différents emplacements sur le chantier, les camions servant à transporter les marchandises produites de la zone de production à la zone d'utilisation [2] .

De son côté, l'avocate de l'intimé a fait valoir que rien ne prouve que les camions à pierre servent exclusivement aux mines et aux carrières. Elle a déclaré que, comme ils sont utilisés pour transporter des matériaux d'une zone d'emprunt ou d'excavation à une zone d'utilisation, il faut que le Tribunal détermine que l'ensemble du chantier de construction du barrage ou de l'autoroute correspondait à une mine ou à une carrière. Elle a soutenu que les éléments de preuve n'étayaient pas cette proposition.

Au sujet des niveleuses, M. Beauclair a témoigné qu'elles servaient à l'aménagement et à l'entretien d'un chemin temporaire sur le chantier de construction. Sans ces niveleuses, a-t-il fait remarquer, il faudrait probablement deux fois plus de temps pour transporter les matériaux, et les frais d'entretien du matériel seraient probablement quatre fois plus élevés. Le représentant de l'appelant a signalé que ce matériel correspondait à celui visé aux alinéas 1a) ou j) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi. En ce qui concerne l'alinéa 1a), il a allégué que la production de terre à remblai ou de roc dynamité exige que les chemins de service soient bien entretenus, de sorte que les camions à pierre et les décapeuses automotrices puissent transporter ces matériaux de la zone d'excavation à la zone d'utilisation. Pour ce qui est de l'alinéa 1j), on a fait valoir que l'argile, le sable, le gravier ou la roche dynamitée sont des minéraux et que la mise en valeur de ces minéraux exige l'aménagement de routes d'accès à la mine ou à la carrière d'où ils proviennent.

En ce qui concerne l'alinéa 1a) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi, l'avocate de l'intimé a soutenu que les niveleuses ne sont pas des machines utilisées par l'appelant principalement et directement dans la fabrication ou la production de marchandises. Le matériel servait à la construction de la route et du barrage. Elle a allégué que la terre à remblai et la roche ne sont pas des «marchandises» qui ont ét 9‚ «fabriquées ou produites» au sens de la Loi. Plus exactement, dans le cadre de ses activités de construction, l'appelant creusait simplement le sol et réincorporait la roche et le remblai à la route ou au barrage, ce qui n'est pas la même chose. Les engins mécaniques de chantier n'étaient pas non plus utilisés «principalement et directement» dans la fabrication ou la production de marchandises. De plus, aux termes de l'alinéa 1a), les machines et les appareils doivent être vendus à celui qui les utilise pour fabriquer ou produire des marchandises. L'avocate a rappelé au Tribunal que les engins mécaniques de chantier appartenaient à MCI et non à l'appelant. En conséquence, ils n'ont pas été vendus à celui qui les utilisait.

Pour ce qui est de l'alinéa 1j) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi, l'avocate a fait valoir que, si la construction et l'entretien de chemins de service peuvent être nécessaires pour transporter le personnel et le matériel à une carrière ou à une mine, cette activité ne fait toutefois pas partie de la découverte, de la mise en valeur ou de l'exploration des minéraux.

Le troisième groupe d'engins mécaniques de chantier comprenait des chargeuses, des bouteurs et des pelles rétrocaveuses utilisés dans le projet de construction de l'autoroute de Slocan. Le témoin de l'appelant a expliqué que, dans le cadre du projet, il fallait élargir bon nombre des corniches longeant les flancs de la montagne que l'autoroute traversait. Il fallait notamment prendre des débris de roche dans la montagne en forant et en dynamitant. La roche abattue était ensuite intégrée au nouveau tracé routier. Le témoin de l'appelant a expliqué que le matériel habituellement utilisé pour dégager et charger ces débris de roche après le dynamitage comprenait des pelles rétrocaveuses, des bouteurs et des chargeuses. Les camions à pierre servaient exclusivement à transporter la roche aux zones de remblai.

Le représentant de l'appelant a allégué que les chargeuses, les bouteurs et les pelles rétrocaveuses relèvent de l'alinéa 1a) ou j) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi. Il a fait valoir que la décision dans la cause Poulin a établi que le fait d'abattre de la roche constitue une activité de production et que le lieu où cette activité se déroule peut être considéré comme une carrière. Il a fait remarquer que le paragraphe 51(1) de la Loi traite des «marchandises mentionnées à l'annexe III», ce qui veut dire que tout ce qui est mentionné à l'annexe III correspond à la signification des «marchandises» dont il est question dans la Loi. À cet égard, il s'est référé à la partie X de l'annexe III de la Loi, intitulée «Mines et carrières», laquelle énumère des matériaux comme la pierre concassée et le gravier concassé, le sable, les moellons et la pierre des champs, ce qui veut dire que la roche abattue peut être considérée comme des «marchandises» aux fins de la Loi. Il a été signalé que la production de roche abattue nécessite des chargeuses, des bouteurs et des pelles rétrocaveuses, car on doit enlever la roche qui se détache avant de pouvoir poursuivre la production.

Au sujet de l'alinéa 1j) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi, on a soutenu que les bouteurs et les pelles rétrocaveuses servaient à enlever certains matériaux pour pouvoir accéder à un certain type de roc. Ces machines ainsi que les chargeuses étaient également utilisées pour enlever les déblais des carrières et des gravières. Elles ont donc servi à la mise en valeur de minéraux.

Aux fins de cette catégorie d'engins mécaniques de chantier, l'avocat de l'appelant a adopté les arguments présentés contre le classement des niveleuses aux termes de l'alinéa 1a) ou j) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi.

Encore une fois, il faut que le Tribunal détermine que les engins mécaniques de chantier en cause sont visés par les dispositions des alinéas 1a), e) ou j) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi pour que les pièces servant à réparer ce matériel ne soient pas assujetties à la taxe conformément à l'alinéa 1l) de la partie XIII de l'annexe III et au paragraphe 51(1) de la Loi. Après avoir examiné les éléments de preuve et les arguments des parties, le Tribunal rejette l'appel.

En ce qui a trait à l'alinéa 1a) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi, pour que l'exemption s'applique, les conditions suivantes doivent être remplies :

a) les machines ou les appareils doivent être vendus ou importés par un fabricant ou par un producteur;

b) ce fabricant ou ce producteur doit utiliser les machines ou les appareils principalement et directement dans la fabrication ou la production de marchandises.

D'après le témoin de l'appelant, M. Beauclair, les engins mécaniques de chantier appartenaient à MCI. L'appelant a procédé aux travaux de construction et a acheté les pièces pour réparer le matériel. Le Tribunal considère qu'aux termes de l'alinéa 1a) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi, celui qui achète ou importe les machines ou les appareils doit être celui qui fait le travail entraînant la fabrication ou la production de marchandises. Comme ce n'est pas le cas, l'appelant ne satisfait pas aux conditions de l'alinéa 1a).

Le Tribunal n'estime pas non plus que les activités de l'appelant correspondent à la fabrication ou à la production de marchandises. Le Tribunal n'a pas eu le loisir d'examiner un exemplaire du contrat régissant les activités professionnelles de l'appelant. Toutefois, d'après les éléments de preuve apportés verbalement par le témoin de l'appelant, il semblerait que l'appelant ait été payé principalement pour enlever des matériaux d'un point du chantier de construction et pour les transporter et les déposer en un second point, que ce soit le barrage ou une zone d'utilisation le long de l'autoroute. Durant toute la période en cause, le matériel appartenait à l'organisme contractant, et l'appelant a été payé selon le volume de déblais transportés au chantier. Que ce soit du roc foré, fendu ou dynamité ou du sable, de l'argile ou d'autre remblai granulaire excavé qui a été transporté dans une zone d'utilisation, le Tribunal ne considère pas cette activité comme équivalant à la production de marchandises.

Pour ce qui est de l'alinéa 1e) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi, le Tribunal n'estime pas que les camions à pierre ont été utilisés «exclusivement» aux mines et aux carrières. Il aurait fallu que l'usage des camions soit restreint ou limité aux mines ou aux carrières, ou que les camions soient utilisés uniquement aux mines ou aux carrières. D'après le témoin de l'appelant, les camions servaient à transporter des matériaux sur une distance pouvant atteindre 7 km entre un point source et le barrage ou sur une certaine distance entre un point source et la zone d'utilisation le long de l'autoroute de Slocan. Comme l'a soutenu l'avocate de l'intimé, il faudrait que le Tribunal détermine, ce qu'il ne pouvait pas faire, que l'ensemble du chantier de construction correspondait à une mine ou à une carrière pour que les camions à pierre soient visés par les dispositions de cet alinéa.

En ce qui a trait à l'alinéa 1j) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi, le Tribunal n'a pas entendu de témoignage sur la signification des termes «exploration», «découverte» ou «mise en valeur» dans l'industrie de la construction. De même, le représentant de l'appelant n'a fourni que quelques définitions à l'appui de son point de vue voulant que l'argile, le sable et la pierre soient des «minéraux». Cependant, le Tribunal ne considère pas que ces matériaux constituent des minéraux au sens de l'alinéa j).

Pour ces motifs, l'appel est rejeté.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E-15.

2. À l'appui de cette allégation, le représentant de l'appelant a cité deux décisions : Arthur A. Voice Construction Co. Ltd. c. Le ministre du Revenu national , Tribunal canadien du commerce extérieur, appel n o AP-89-123, le 24 octobre 1990; et G.H. Poulin Contractor Ltd. c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise (1985), 10 R.C.T. 170.


Publication initiale : le 12 juin 1997