EMPIRE HOMES LTD.

Décisions


EMPIRE HOMES LTD.
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-91-270

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le vendredi 19 mars 1993

Appel n o AP - 91 - 270

EU ÉGARD À un appel entendu le 22 octobre 1992 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 23 décembre 1991 concernant un avis d'opposition signifié aux termes de l'article 81.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

EMPIRE HOMES LTD. Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté.


Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre présidant

Sidney A. Fraleigh ______ Sidney A. Fraleigh Membre

Desmond Hallissey ______ Desmond Hallissey Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise à l'égard d'une décision rendue par le ministre du Revenu national le 23 décembre 1991. La question en litige consiste à déterminer si la cotisation de 20 472,96 $, comprenant intérêts et pénalité, imposée par l'intimé à l'appelant pour taxes impayées pour la période comprise entre le 1 er mars 1987 et le 31 août 1990, est correcte. Si la cotisation est jugée correcte, en tout ou en partie, le Tribunal doit déterminer s'il possède la compétence nécessaire pour libérer l'appelant du paiement de toutes les taxes impayées, des intérêts et de la pénalité portant sur la période à l'étude du fait qu'il aurait été mal renseigné par les représentants du ministère du Revenu national.

DÉCISION : L'appel est rejeté. L'appelant n'a pas prouvé que la cotisation était erronée, conformément à la Loi sur la taxe d'accise, et il ne peut être libéré du paiement de la taxe de vente fédérale du fait qu'il a été mal renseigné par les représentants du ministère du Revenu national.

Lieu de l'audience : Edmonton (Alberta) Date de l'audience : Le 22 octobre 1992 Date de la décision : Le 19 mars 1993
Membres du Tribunal : Arthur B. Trudeau, membre présidant Sidney A. Fraleigh, membre Desmond Hallissey, membre
Avocat pour le Tribunal : Shelley Rowe
Greffier : Dyna Côté
Ont comparu : Dwight Kuhn, pour l'appelant Linda J. Wall, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi) à l'égard d'une décision rendue par le ministre du Revenu national (le Ministre) le 23 décembre 1991. La question en litige consiste à déterminer si la cotisation de 20 472,96 $, comprenant intérêts et pénalité, imposée par l'intimé à l'appelant pour taxes impayées pour la période comprise entre le 1er mars 1987 et le 31 août 1990, est correcte. Si la cotisation est jugée correcte, en tout ou en partie, le Tribunal doit déterminer s'il possède la compétence nécessaire pour libérer l'appelant du paiement de toutes les taxes impayées, des intérêts et de la pénalité portant sur la période à l'étude du fait qu'il aurait été mal renseigné par les représentants du ministère du Revenu national (Revenu Canada).

L'appelant est un fabricant de maisons modulaires titulaire de licence et, à ce titre, il pouvait acheter des marchandises en franchise de la taxe de vente fédérale (TVF). Cependant, plusieurs de ses fournisseurs ont refusé de lui vendre des marchandises en franchise de la TVF. En conséquence, il a acheté les marchandises et a acquitté la TVF à ces fournisseurs et a par la suite récupéré la TVF en la déduisant de son propre chef des montants qu'il devait verser, prétextant qu'il avait droit à un remboursement de la TVF payée.

M. Dwight Kuhn, qui a témoigné au nom de l'appelant, a fait valoir que le 11 décembre 1985, avant la vérification qui a donné lieu au présent appel, il a rencontré M. S. Virani, vérificateur de Revenu Canada, pour examiner le cas de l'appelant. M. Virani savait que l'appelant n'avait pas été capable d'acheter toutes les fournitures en franchise de la TVF et il a aidé M. Kuhn à calculer le montant de la TVF que devait acquitter l'appelant, en tenant compte de la déduction effectuée par ce dernier de son propre chef. Cette déduction a été obtenue en déduisant 25 p. 100 du prix d'achat du grossiste et en multipliant le résultat par le facteur fiscal applicable. M. Kuhn a fait part de la réponse de l'appelant au mémoire de l'intimé et, plus particulièrement, à la copie jointe du Mémorandum de l'Accise ET 313 [2] (Mémorandum ET 313) et au papier ruban de l'additionneuse, qui portaient tous deux la marque de M. Virani, prouvant ainsi que M. Virani avait conseillé à l'appelant une méthode d'établissement de la déduction et l'avait approuvée.

Entre 1985 et 1990, l'appelant a continué d'acheter des marchandises en acquittant la TVF et en effectuant de son propre chef des déductions en soustrayant 25 p. 100 du prix d'achat du grossiste et en multipliant le résultat par le facteur fiscal applicable.

M. Hanif Amlani, qui a effectué la vérification donnant lieu au présent appel, a comparu et a déposé des éléments de preuve au nom de l'intimé. Il a invoqué le paragraphe 17 du Mémorandum de l'Accise ET 105 [3] (Mémorandum ET 105) qui prévoit qu'il est interdit à un fabricant titulaire de licence qui peut acheter des marchandises en franchise de la TVF de déduire de son propre chef la TVF payée aux fournisseurs. Ainsi, il a conclu que même si l'appelant a déduit la TVF de son propre chef, il n'était pas autorisé à le faire, car il était un fabricant titulaire de licence qui l'exemptait du paiement de la TVF. Cependant, vu que les fournisseurs qui étaient les demandeurs admissibles du remboursement n'ont pas déposé de demandes de remboursement, et pour éliminer la paperasse et ne pas obliger l'appelant à s'adresser à nouveau à ses fournisseurs pour obtenir un remboursement, il a décidé d'autoriser l'appelant à effectuer des déductions de son propre chef, mais non sur la base de calcul précitée.

M. Amlani a placé l'appelant dans la même position que ses fournisseurs, si ces derniers avaient demandé un remboursement; il a ensuite permis à l'appelant de déduire le montant que les fournisseurs auraient été autorisés à déduire plutôt que de demander un remboursement. Vu qu'il ne connaissait pas le prix d'achat payé par les fournisseurs, il a établi qu'il ne pouvait pas appliquer la formule qui a déjà été utilisée, soit celle fondée sur le prix d'achat. Il a donc calculé les déductions effectuées par l'appelant en se fondant sur le prix de vente des fournisseurs, conformément aux dispositions du paragraphe 11 du Mémorandum ET 313 [4] , c'est-à-dire le prix de vente réduit de 50 p. 100 et multiplié par le facteur fiscal applicable. M. Amlani a déclaré qu'on aurait pu également rejeter intégralement les déductions effectuées directement par l'appelant.

L'appelant a soutenu que M. Amlani n'a pas agi correctement en utilisant la formule du prix de vente. Vu que l'appelant a acheté les fournitures à des grossistes et à des revendeurs, il aurait tout simplement eu à déduire 25 p. 100 avant d'appliquer le facteur fiscal pour établir le montant de la déduction effectuée de son propre chef. Pour étayer sa position, l'appelant a invoqué le fait que M. Virani lui a indiqué la façon de remplir la déclaration de juillet 1986 et l'a autorisé à effectuer de son propre chef une déduction en retranchant 25 p. 100 du prix d'achat du grossiste, comme le prévoyait l'ancien paragraphe 8 [5] du Mémorandum ET 313. En outre, l'appelant a soutenu qu'il avait droit d'appliquer la formule fondée sur le prix d'achat du grossiste aux termes du paragraphe 8 du Mémorandum ET 313 parce qu'il a acheté ses fournitures à des grossistes et non à des détaillants. L'appelant a prétendu qu'il avait toujours été autorisé à effectuer des déductions de son propre chef.

L'intimé a soutenu qu'il incombe à l'appelant de prouver que la cotisation qu'il lui a imposée est erronée, que l'appelant doit établir sans équivoque qu'il est admissible à un traitement fiscal différent de celui proposé par l'intimé dans l'avis de cotisation et, enfin, que l'appelant ne peut se fonder sur les renseignements prétendument erronés que lui ont fournis les représentants ou mandataires de l'intimé pour se soustraire au paiement de la taxe. De l'avis de l'intimé, l'appelant n'a pas fourni de preuves à cet égard et n'a pas déposé les renseignements requis pour appuyer sa position, à savoir que la cotisation est erronée.

Il incombe au contribuable de prouver qu'une cotisation imposée aux termes de la Loi est erronée, comme en fait foi la décision de la Cour suprême dans la cause Roderick W. S. Johnston v. The Minister of National Revenue [6] . En conséquence, à moins que l'appelant puisse établir, au moyen d'éléments de preuve, que les allégations d'erreurs commises lors de l'établissement d'une cotisation sont fondées en regard des dispositions de la Loi, le Tribunal ne peut accueillir le présent appel.

Après avoir examiné tous les éléments de preuve et avoir tenu compte des arguments des deux parties, le Tribunal conclut que l'appel doit être rejeté parce que l'appelant n'a fourni ni preuve ni argument qui permettraient au Tribunal de conclure que la cotisation est erronée; en conséquence, l'appelant ne s'est pas acquitté du fardeau de la preuve, comme l'exige la loi.

Le Tribunal fait remarquer que même si les conseils que M. Virani a fournis à l'appelant étaient erronés, la jurisprudence canadienne précise que l'argument de l'«estoppel» ne peut être appliqué contre l'État lorsque les représentations sont contraires aux dispositions de la loi. Dans la cause Joseph Granger c. la Commission de l'emploi et de l'immigration [7] , le juge Lacombe a déclaré ce qui suit :

En droit fiscal canadien, la jurisprudence est constante à l'effet que la Couronne n'est pas liée par les représentations faites et les interprétations données aux contribuables par les représentants autorisés du fisc, si telles représentations et interprétations sont contraires aux dispositions claires et impératives de la loi [8] .

Bien que le Tribunal sympathise grandement avec l'appelant, il est tenu d'appliquer la loi dans les circonstances. Il incombait à l'appelant d'exercer son activité conformément aux dispositions de la Loi sans tenir compte du fait qu'il ait pu recevoir des renseignements ou des conseils trompeurs ou erronés de la part de M. Virani. Le Tribunal fait également remarquer que les représentations de M. Virani portaient sur une période non visée par la cotisation qui a donné lieu au présent appel.

En conséquence, le Tribunal confirme la cotisation initiale et la décision du Ministre, et rejette l'appel.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E-15.

2. Remboursements, Ministère du Revenu national, Douanes et Accise, le 1er décembre 1975, modifié le 18 novembre 1988.

3. Déductions, Ministère du Revenu national, Douanes et Accise, le 29 novembre 1988. Ancien paragraphe 13 du Mémorandum ET 105 du 1er août 1978.

4. Le paragraphe 11 est devenu le paragraphe 31 dans le Mémorandum ET 313 du 18 novembre 1988.

5. Le paragraphe 8 est devenu le paragraphe 28 dans le Mémorandum ET 313 du 18 novembre 1988.

6. [1948] R.C.S. 486.

7. [1986] 3 C.F. 70 (C.A.F.); confirmé [1989] 1 R.C.S. 141.

8. Ibid. à la p. 86.


Publication initiale : le 3 juillet 1997