SCHEEL WINDOW LIMITED

Décisions


SCHEEL WINDOW LIMITED
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-92-023

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, jeudi le 11 février 1993

Appel n o AP-92-023

EU ÉGARD À un appel entendu le 23 novembre 1992 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 1er avril 1992 concernant un avis d'opposition signifié conformément à l'article 81.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

SCHEEL WINDOW LIMITED Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté.

Kathleen E. Macmillan ______ Kathleen E. Macmillan Membre présidant

Sidney A. Fraleigh ______ Sidney A. Fraleigh Membre

Michèle Blouin ______ Michèle Blouin Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





L'appelant détient un permis pour fabriquer des fenêtres, des portes panoramiques coulissantes et des cadres de fenêtre, qu'il livre à ses clients à l'aide de véhicules qu'il possède. L'appelant a fait certaines déductions du prix de vente de ses marchandises, prétendument en raison de certains frais de transport engagés par lui pour la livraison des marchandises en question. Ces déductions ont été refusées en partie par l'intimé pour le motif que l'appelant n'avait pas bien étayé sa demande d'exemption.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Le Tribunal conclut que l'appelant n'a pas, comme il aurait dû, établi clairement s'il avait droit à l'exemption demandée.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 23 novembre 1992 Date de la décision : Le 11 février 1993
Membres du Tribunal : Kathleen E. Macmillan, membre présidant Sidney A. Fraleigh, membre Michèle Blouin, membre
Avocat du Tribunal : Hugh J. Cheetham
Greffier : Janet Rumball
Ont comparu : William Scheel, pour l'appelant Frederick Woyiwada, pour l'intimé





Le présent appel d'une cotisation est interjeté en vertu de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi). Scheel Window Limited détient un permis pour fabriquer des fenêtres, des portes panoramiques coulissantes et des cadres de fenêtre, qu'il livre à ses clients à l'aide de véhicules qu'il possède. En remettant la taxe de vente pour la période allant du 1er septembre 1989 au 31 décembre 1990, l'appelant a fait certaines déductions du prix de vente des marchandises qu'il fabriquait, prétendument pour tenir compte de la part du prix de vente que représentent les frais de transport. Ces déductions ont eu pour effet de réduire de 7 044 $ la taxe de vente payable par l'appelant. Par un avis de cotisation daté du 12 juin 1991, l'appelant s'est vu imposer une cotisation de 3 881,69 $ pour la taxe de vente impayée, soit la taxe de vente à acquitter sur la part de ses déductions pour ses frais de transport que le ministre du Revenu national (le Ministre) a jugée non fondée. Par un avis d'opposition daté du 24 juin 1991, l'appelant s'est opposé à la cotisation. Par un avis de décision daté du 1er avril 1992, le Ministre a rejeté l'opposition de l'appelant et confirmé la cotisation.

Dans cet appel, il s'agit de déterminer si l'appelant a bien étayé sa demande visant à soustraire à la taxe de vente les frais de transport des marchandises vendues.

Les dispositions pertinentes de la Loi se trouvent à la division 46c)(ii)(B), qui stipule que :

Pour déterminer la taxe de consommation ou de vente exigible en vertu de la présente partie :

...

c) dans le calcul du prix de vente de marchandises fabriquées ou produites au Canada, peuvent être inclus :

...

(ii) dans les circonstances que le gouverneur en conseil peut prescrire par règlement, une somme représentant :

...

(B) soit le coût du transport des marchandises supporté par le fabricant ou producteur lorsque le prix de vente de celles-ci comprend ce coût de transport ou bien en transportant les marchandises entre les locaux commerciaux du fabricant ou producteur au Canada, ou bien en les livrant de ses locaux commerciaux au Canada à l'acheteur,

calculé de la façon que le gouverneur en conseil peut prescrire par règlement.

Les dispositions pertinentes du Règlement sur l'exclusion du coût du transport aux fins de la taxe de vente [2] sont les suivantes :

3. Sous réserve de l'article 4, aux fins de la taxe de consommation ou de vente exigible en vertu de la Partie V de la Loi sur le prix de vente des marchandises fabriquées ou produites au Canada, le montant représentant le coût du transport de ces marchandises, qui peut être exclu en vertu du paragraphe 26(6) [ [3] ] de la Loi dans le calcul du prix de vente des marchandises doit être établi à l'aide des factures, relevés, registres ou livres de compte du fabricant ou producteur des marchandises et conformément aux principes comptables généralement reconnus.

4.(2) Lorsque les marchandises sur lesquelles la taxe de consommation ou de vente est exigible en vertu de la Partie V de la Loi sont acheminées par un moyen de transport appartenant au fabricant ou au producteur des marchandises ou loué par lui, le montant exclu au titre du coût du transport ne doit comprendre que les frais engagés à titre de propriétaire ou de locataire et reliés à l'exploitation du moyen de transport, qui sont affectés aux marchandises selon les principes comptables généralement reconnus, appliqués avec uniformité, notamment :

a) les frais d'exploitation tels les droits de permis, les primes d'assurance, les frais d'essence, d'huile et de lubrification, les frais d'entretien et de réparation et le salaire des chauffeurs;

b) la dépréciation; et

c) les frais de location.

M. William Scheel, vice-président et actionnaire de Scheel Window Limited, a représenté l'appelant à l'audience. La compagnie est située à Arnprior (Ontario). Ses ventes s'élèvent à environ 1,5 million de dollars annuellement et elle emploie de sept à vingt personnes, selon la saison.

M. Scheel a expliqué que l'appelant non seulement fabrique des fenêtres, mais aussi assemble et distribue des produits connexes comme des portes panoramiques coulissantes, des portes de garage et des cadres de fenêtre fabriqués par d'autres fabricants. Environ 70 p. 100 de ses ventes sont destinées aux membres de son réseau, qui comprend quelque 65 concessionnaires; le reste va aux utilisateurs finals. Il vend ces produits aussi loin qu'à Toronto et à Sault Ste. Marie. Dans son argumentation, M. Scheel a déclaré que l'appelant assurait la livraison de tous ses produits et il a fait valoir que la rapidité du transport et du service était essentielle au maintien de la compétitivité de l'appelant. Comme il l'alléguait dans son mémoire, cela aide à expliquer pourquoi les frais de transport de l'appelant sont aussi importants dans son activité commerciale.

M. Scheel a décrit comment il est parvenu aux chiffres utilisés pour demander la déduction des frais de transport. Pour les cinq véhicules à l'égard desquels l'exemption a été demandée, soit deux fourgonnettes, un camion de 5 tonnes, un camion de 1,5 tonne et une voiture, les frais réels engagés pour les assurances, les permis, le carburant, les repas, les réparations, les intérêts sur prêts et les paiements de location ont été réclamés comme déductions pour la période en cause.

Certains calculs ont été nécessaires pour déterminer les salaires liés au transport des marchandises. D'après M. Scheel, huit employés ont été affectés à la livraison des marchandises au cours de la période en cause. Pour certains employés, le salaire complet a été réclamé à titre de déduction de frais de transport. Pour d'autres, notamment M. Scheel, son frère Robert, Mme Sylvia Hodgins, directrice des ventes, et M. A. Campbell, superviseur de la compagnie, seule une partie du salaire annuel a été demandée comme déduction, soit la partie proportionnelle correspondant au temps consacré à la livraison. Le montant total de salaires attribué ainsi aux activités de transport était de 105 856 $.

En contre-interrogatoire, M. Scheel a reconnu que Mme Hodgins consacrait une grande partie de son temps à la vente plutôt qu'à la livraison. Mme Hodgins était seule à conduire une des fourgonnettes, qu'elle utilisait pour retourner chez elle le soir et qu'elle avait à sa disposition pour les fins de semaine.

M. Preston Gallant, actuellement gestionnaire par intérim d'un service de vérification du ministère du Revenu national (Revenu Canada), a comparu comme témoin de l'intimé. M. Gallant était un vérificateur principal durant la période en cause et a procédé à trois vérifications auprès de l'appelant et s'est ainsi rendu sur place, dans les locaux de l'appelant. M. Gallant a témoigné qu'en dépit de l'absence de registres de transport et d'autres pièces justificatives, la plupart des frais de l'appelant réclamés comme déductions de frais de transport ont été acceptés par Revenu Canada. Certains salaires liés au transport ont, par contre, été recalculés. Trois aspects de la demande de l'appelant ont été rejetés.

Premièrement, Revenu Canada a admis seulement 50 p. 100 des coûts liés à la fourgonnette conduite par Mme Hodgins. Deuxièmement, seulement 50 p. 100 des frais relatifs aux véhicules conduits par M. William Scheel et par M. Robert Scheel ont été acceptés. Troisièmement, seulement 25 p. 100 du salaire de M. Campbell a été admis comme déduction de frais de transport. Ainsi, la déduction de frais de transport demandée par l'appelant, qui s'élevait à 159 819 $, a été ramenée à 114 867,71 $. C'est de cette différence que vient la détermination, par l'intimé, de la taxe de vente à acquitter.

M. Gallant a également témoigné qu'au cours de ses visites dans les locaux de l'appelant, il n'a vu ni M. William Scheel ni son frère faire des livraisons. À son avis, ils utilisaient leurs véhicules pour aller au travail et en revenir. De plus, ni le superviseur ni Mme Hodgins ne semblaient faire des livraisons.

Dans son argumentation, l'avocat de l'intimé a fait valoir que la jurisprudence établit que le contribuable doit prouver clairement qu'il a droit à une exemption et doit bien étayer sa demande. Il a soutenu que, dans l'affaire en instance, cela n'a pas été fait. Il a ajouté que Revenu Canada avait été généreux envers l'appelant en ce qu'il avait accepté plusieurs déductions qui n'étaient pas étayées de manière détaillée.

En rendant son jugement, le Tribunal fait observer que la déduction de frais de transport prévue à la division 46c)(ii)(B) de la Loi vise la livraison des marchandises à l'acheteur à partir des locaux du fabricant ou du producteur. Elle ne s'applique pas à l'usage du véhicule à des fins personnelles ou à d'autres fins commerciales comme la vente ou la promotion. M. Scheel a reconnu à l'audience que certains des véhicules en question servaient à des fins autres que la livraison. En conséquence, le Tribunal conclut qu'il n'y a pas lieu d'accepter que le total des frais liés à ces véhicules soit déduit du prix de vente des marchandises en cause, comme l'a fait l'appelant.

En outre, de l'avis du Tribunal, l'appelant n'a pas, comme il aurait dû le faire, prouvé que tous les éléments constitutifs nécessaires pour avoir droit à l'exemption étaient présents et qu'il avait rempli toutes les conditions requises en vertu de la disposition d'exemption [4] . Outre ce qui précède, le Tribunal fait remarquer que l'appelant n'a pu fournir de preuve documentaire, sous forme de registre par exemple, pour étayer ses importantes demandes de déductions de frais de transport.

Pour ces motifs, l'appel est rejeté.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E-15.

2. DORS/83-95, le 21 janvier 1983, Gazette du Canada Partie II, vol. 117, n o 3, à la p. 497.

3. Maintenant l'alinéa 46 c ) de la Loi.

4. Walter G. Lumbers v. The Minister of National Revenue , [1943] R.C. de l'É. 202, confirmé dans [1944] R.C.S. 167.


Publication initiale : le 11 juin 1997