EILEEN M. NIELSON

Décisions


EILEEN M. NIELSON
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
POUR LES DOUANES ET L'ACCISE
Appel no AP-92-025

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le vendredi 27 novembre 1992

Appel n o AP-92-025

EU ÉGARD À un appel entendu le 29 septembre 1992 en vertu de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise le 23 janvier 1991 concernant une demande de réexamen conformément à l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

EILEEN M. NIELSON Appelante

ET

LE SOUS - MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

POUR LES DOUANES ET L'ACCISE

L'appel est admis. Le Tribunal conclut que la Dodge Caravan 1990, importée par l'appelante pour son usage personnel pendant son séjour de deux ans au Canada, est plus correctement classée dans le numéro tarifaire 9803.00.00 à titre de «Moyens de transport [...] importés temporairement par un non-résident du Canada pour son usage personnel au Canada».

Kathleen E. Macmillan ______ Kathleen E. Macmillan Membre présidant

Sidney A. Fraleigh ______ Sidney A. Fraleigh Membre

Robert C. Coates, c.r. ______ Robert C. Coates, c.r. Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





L'appelante, M me Eileen M. Nielson, est une citoyenne américaine qui a vécu au Canada pendant cinq ans avant de retourner aux États - Unis en 1985. En septembre 1990, elle est revenue au Canada avec sa famille, son conjoint ayant obtenu un emploi temporaire au pays. Les Nielson avaient l'intention de regagner les États - Unis à la fin du mandat de deux ans de M. Nielson. L'appelante a conservé son emploi aux États - Unis et a fait, chaque jour, la navette entre Nepean (Ontario) et Ogdensburg (New York). Elle a fait l'acquisition d'une Dodge Caravan 1990 avant son retour au Canada et elle a dû payer des taxes et des droits sur ce véhicule à la frontière. Puisque l'appelante était considérée comme une ancienne résidente du Canada qui revenait au pays pour y reprendre résidence, le véhicule a été classé dans le numéro tarifaire 9805.00.00.

DÉCISION : L'appel est admis. Le Tribunal conclut que la Dodge Caravan 1990, importée par l'appelante pour son usage personnel pendant son séjour de deux ans au Canada, est plus correctement classée dans le numéro tarifaire 9803.00.00 à titre de «Moyens de transport [...] importés temporairement par un non - résident du Canada pour son usage personnel au Canada».

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 29 septembre 1992 Date de la décision : Le 27 novembre 1992
Membres du Tribunal : Kathleen E. Macmillan, membre présidant Sidney A. Fraleigh, membre Robert C. Coates, c.r., membre
Avocat pour le Tribunal : David M. Attwater
Greffier : Janet Rumball
Ont comparu : Eileen M. Nielson, pour l'appelante Linda J. Wall, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté en vertu de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] (la Loi) à la suite d'une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise conformément à l'article 63 de la Loi. Cette décision confirmait le classement d'une Dodge Caravan 1990 importée dans le numéro tarifaire 9805.00.00 de l'annexe I du Tarif des douanes [2] . Au moment de l'importation du véhicule, l'appelante avait été informée qu'elle serait tenue de payer la somme de 2 180,52 $, soit 697,15 $ en droits de douane, 1 383,37 $ au titre de la taxe de vente fédérale et 100,00 $ au titre de la taxe d'accise. Dans le présent appel interjeté en vertu de l'article 67 de la Loi, seul le classement tarifaire du véhicule importé est en litige.

Dans le présent appel, on cherche à déterminer :

a) si la Dodge Caravan a été correctement classée dans le numéro tarifaire 9805.00.00 et assujettie à des droits de douane selon le numéro tarifaire 8703.23.00, comme le prétend l'intimé;

b) si l'allégation de l'appelante, selon laquelle elle aurait été mal renseignée par les fonctionnaires des douanes, peut soustraire cette dernière à l'obligation de verser les droits exigibles en vertu de la Loi.

Les numéros tarifaires pertinents au classement de l'intimé sont les suivants :

87.03 Voitures de tourisme et autres véhicules automobiles principalement conçus pour le transport de personnes (autres que ceux du n o 87.02), y compris les voitures du type «break» et les voitures de course.

8703.23.00 --D'une cylindrée excédant 1.500 cm 3 mais n'excédant pas 3.000 cm 3

9805.00.00 Marchandises importées par un membre des Forces canadiennes, un employé du gouvernement du Canada, ou par un ancien résident du Canada qui revient résider au pays après avoir résidé dans un autre pays pendant au moins un an ou par un résident qui revient au pays après une absence du Canada d'au moins une année, et acquises par lui pour son usage personnel ou domestique et lui ayant effectivement appartenu à l'étranger et ayant été en sa possession et à son usage pendant au moins six mois avant son retour au Canada.

L'appelante, Mme Eileen M. Nielson, est une citoyenne américaine qui a vécu au Canada avec sa famille pendant cinq ans avant de retourner aux États-Unis en 1985. Elle a obtenu le statut d'immigrant admis au Canada environ deux ans avant son retour aux États-Unis. Son conjoint, M. Lloyd Nielson, est citoyen canadien.

En mars 1990, M. Nielson a obtenu un emploi temporaire au Canada à titre de participant au recensement des services agricoles canadiens. Au début, il a été embauché pour une période de six mois, période dont la durée a été prolongée à deux ans. Mme Nielson a déclaré dans son témoignage que sa famille a toujours eu l'intention de retourner aux États-Unis à la fin du mandat de son époux au Canada.

Étant donné l'emploi temporaire de son mari, Mme Nielson a demandé à son employeur, le U.S. Department of Health and Human Services, d'être mutée de Denver (Colorado) à Ogdensburg (New York) et a fait la navette, chaque jour, entre cette ville et Nepean (Ontario). Pendant son séjour au Canada, elle a conservé son régime d'assurance-maladie aux États-Unis, et la famille a loué une maison. Au moment de l'audience, M. Nielson était retourné aux États-Unis, les autres membres de sa famille et leurs possessions devant suivre le 15 octobre 1992.

Mme Nielson a déclaré dans son témoignage que, lorsqu'elle est arrivée au Canada, on lui a remis un permis de visiteur temporaire et donné des directives de communiquer avec des responsables de l'immigration à Ottawa pour obtenir un statut plus permanent. Elle a été avisée qu'elle pourrait se voir refuser l'entrée au Canada avec un permis temporaire et que celui-ci ne serait pas renouvelé indéfiniment. Comme elle se rendait aux États-Unis tous les jours pour son travail, elle a de nouveau demandé le statut d'immigrant admis. Mme Nielson a été informée que, de cette façon, l'accès au Canada ne pourrait lui être refusé. Au moment de l'audience, elle n'avait pas encore obtenu le statut d'immigrant admis.

Comme le poste qu'occupait M. Nielson au Canada était temporaire, la famille avait dû assumer les frais de déménagement et prendre en charge toutes les formalités administratives nécessaires à l'envoi de ses possessions au Canada. Avant son retour au Canada, c'est-à-dire le 13 juillet 1990, Mme Nielson a appelé le ministère du Revenu national, Douanes et Accise, pour obtenir de l'information concernant le déménagement de ces biens au Canada. Elle prétend s'être renseignée afin de savoir si des droits et des taxes s'appliqueraient au véhicule qu'elle avait l'intention d'acheter aux États-Unis.

Mme Nielson a témoigné que les normes d'émission de la Environmental Protection Agency (EPA) s'appliquant aux véhicules sont plus sévères à Denver qu'en Ontario. Leur ancien véhicule, une Dodge Aries 1982 ou 1983, a été achetée au Canada et ramenée aux États-Unis avec la famille en 1985. Comme ce véhicule n'était pas conforme aux normes d'émission de l'EPA, la famille a obtenu une exonération unique pour le ramener aux États-Unis. Mme Nielson a déclaré que, comme la famille avait l'intention de retourner aux États-Unis, elle a décidé d'y acheter un nouveau véhicule qu'elle pourrait ramener avec elle à son retour sans avoir à y apporter des modifications coûteuses, une seconde exonération n'étant pas possible.

Mme Nielson prétend qu'un fonctionnaire des douanes l'a avisée que parce qu'elle était citoyenne américaine et qu'elle avait été hors du pays pendant cinq ans, elle pouvait faire entrer le véhicule au Canada sans payer de taxes ni de droits. Le véhicule a été acheté le 13 juillet 1990, soit la date de la conversation téléphonique avec ledit fonctionnaire. Il a été importé au Canada le 17 septembre 1990. À ce moment-là, l'appelante a été informée qu'elle aurait à payer la somme de 2 180,52 $ pour les droits de douane, la taxe de vente fédérale et la taxe d'accise.

L'appelante a fait valoir que les droits et les taxes qu'elle a payés devraient lui être remboursés, étant donné qu'elle s'est fiée aux renseignements erronés que lui ont fournis, à son détriment, les fonctionnaires des douanes. Elle a également mis en doute la conclusion selon laquelle elle était revenue au Canada pour y reprendre résidence, critère dont on s'est servi pour classer son véhicule dans le numéro tarifaire 9805.00.00.

L'avocate de l'intimé a fait remarquer que, au moment de l'importation de la Dodge Caravan, l'appelante était une ancienne résidente du Canada qui y revenait après une absence de cinq ans. Elle avait déjà résidé au Canada avec sa famille. Ainsi, l'avocate a fait valoir que les Nielson ne satisfaisaient pas à la définition de «immigrant», telle qu'elle est établie dans le règlement s'appliquant au numéro tarifaire 9807.00.00 [3] . Pour ces motifs, le numéro tarifaire 9807.00.00 ne s'applique pas aux marchandises en cause dans le présent appel.

Dans son mémoire, l'intimé a fait valoir que le numéro tarifaire 9813.00.00 [4] ne peut s'appliquer parce que le véhicule en cause n'est pas originaire du Canada. Toutefois, au cours de l'audience, il est ressorti que le véhicule a été fabriqué à Windsor (Ontario) et exporté aux États-Unis. L'avocate de l'intimé a attiré l'attention du Tribunal sur la note 11b) du Chapitre 98 de l'annexe I du Tarif des douanes et a indiqué que la Dodge Caravan ne pouvait être classée dans le numéro tarifaire 9813.00.00 «sauf sur le paiement des droits de douane auxquels [elle aurait été assujettie si elle n'avait pas été exportée] hors du Canada». Le Tribunal a avisé l'avocate qu'il n'avait pas besoin d'entendre d'autres arguments sur ce point.

L'avocate a fait valoir que, à titre d'ancienne résidente revenant au Canada, l'appelante est visée par le numéro tarifaire 9805.00.00 et que la Dodge Caravan figure au nombre des «marchandises» classées dans ce numéro tarifaire. Les marchandises ont été achetées après le 31 mars 1977. En vertu de la note 7c)i) du Chapitre 98 de l'annexe I du Tarif des douanes, des droits sont payables sur la valeur en douane qui excède 10 000 $. Le numéro tarifaire 8703.23.00 décrit le taux de droit de douane applicable aux marchandises.

L'avocate a soumis en outre que l'allégation de l'appelante, selon laquelle elle a été mal renseignée par les fonctionnaires des douanes ne lui permet pas d'être soustraite de l'application des dispositions du Tarif des douanes. Elle a indiqué que le Tarif des douanes, à titre de loi fiscale, ne peut pas être interprétée de façon équitable et que le Tribunal n'a pas compétence pour exonérer les marchandises de l'appelante de l'application tarifaire.

Au cours de l'audience, le lieu de résidence réel de l'appelante a été mis en doute et la question du caractère applicable du numéro tarifaire 9803.00.00 a été soulevée. Ce numéro tarifaire est libellé comme suit :

Moyens de transport et bagages importés temporairement par un non - résident du Canada pour son usage personnel au Canada.

Dans le Règlement sur l'importation temporaire de bagages et de moyens de transport par un non - résident [5] (le Règlement), le terme «résident» est défini comme suit :

Personne qui, dans son cadre de vie habituel, établit son domicile, réside et est ordinairement présente au Canada.

La définition de «résident temporaire» est également pertinente et se lit comme suit :

a) Personne qui n'est pas un résident et qui réside temporairement au Canada pour:

(i) y travailler pendant une période d'au plus 36 mois,

(ii) y étudier dans un établissement d'enseignement;

b) le conjoint et les enfants de la personne visée à l'alinéa a).

Il est impossible pour le Tribunal de considérer l'appelante comme une «résident[e]» du Canada, étant donné qu'il ne juge pas que son séjour au pays fasse partie de «son cadre de vie habituel». Les faits confirment cette conclusion du Tribunal. L'appelante et sa famille avaient l'intention de retourner aux États-Unis : Mme Nielson a conservé son emploi au gouvernement fédéral américain, se déplaçant chaque jour pour s'y rendre; elle a conservé son régime d'assurance-maladie aux États-Unis; sa famille a choisi de louer une maison pour une courte période au lieu de l'acheter; et l'appelante a fait l'acquisition d'un véhicule aux États-Unis en sachant que celui-ci respectait les normes d'émission de l'EPA et pouvait être ramené aux États-Unis sans qu'il soit nécessaire d'y apporter des modifications coûteuses. Le Tribunal ne croit pas non plus que l'appelante soit retournée au Canada pour y «résider», au sens que l'entend le numéro tarifaire 9805.00.00.

De même, il est évident que M. Nielson répondrait aux critères de la définition «résident temporaire», étant donné qu'il séjournait au Canada dans le but d'«y travailler pendant une période d'au plus 36 mois», sa période d'emploi ayant été de 24 mois seulement. En outre, l'appelante, qui n'est pas une résidente et qui est la conjointe d'un résident temporaire, pourrait être qualifiée de résidente temporaire aux termes du paragraphe b) de cette définition. Elle avait l'intention de conserver la Dodge Caravan pendant une période temporaire seulement, c'est-à-dire pendant le séjour de sa famille au Canada, et ce, pour son usage personnel.

Le Règlement [6] définit également l'expression «moyen de transport» comme «Tout véhicule [...] servant au transport des personnes ou des marchandises», les caravanes de plus de 2,6 mètres de largeur étant exclues. De toute évidence, la Dodge Caravan 1990, importée par l'appelante, est conforme à cette définition.

Ayant pris connaissance des numéros tarifaires pertinents ainsi que des règles de droit et des notes visant leur interprétation, et plus particulièrement du Règlement concernant l'interprétation du numéro tarifaire 9803.00.00, le Tribunal conclut que le véhicule importé est plus correctement classé dans le numéro tarifaire 9803.00.00. À la lumière de cette conclusion, le Tribunal n'a pas examiné la seconde question soulevée dans l'appel.

Compte tenu de ce qui précède, l'appel est admis.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2 e suppl.).

2. L.R.C. (1985), ch. 41 (3 e suppl.).

3. Le numéro tarifaire 9807.00.00 comprend les «Marchandises, définies par les règlements établis par le Ministre, importées par un immigrant pour son usage domestique ou personnel, si réellement elles lui ont appartenu, ont été en sa possession et lui ont servi avant son arrivée au Canada pour prendre résidence permanente, conformément aux règlements que peut prendre le Ministre». L'article 2 du Règlement sur la définition de «immigrant» aux fins du numéro tarifaire 9807.00.00 , DORS/90-266, Gazette du Canada Partie II , vol. 124, n o 9, à la p. 1437, le 5 avril 1990, est libellé comme suit : 2. Pour l'application du numéro tarifaire 9807.00.00 de l'annexe I du Tarif des douanes, «immigrant» s'entend de toute personne qui entre au Canada pour y prendre, pour la première fois, résidence pour une période d'au moins 12 mois, à l'exclusion des personnes qui entrent au Canada pour y résider : a) soit à des fins d'emploi pour une période temporaire ne dépassant pas 36 mois; b) soit pour études dans une maison d'enseignement .

4. «Marchandises, y compris les contenants ou les enveloppes remplis ou vides, originaires du Canada, après avoir été exportées hors du Canada, si les marchandises doivent être retournées sans avoir reçu de plus-value ni d'amélioration dues, entre autres choses, à un procédé de fabrication quelconque, ou sans avoir été unies à un autre article quelconque à l'étranger, conformément aux règlements que peut prendre le Ministre».

5. DORS/87 - 720, Gazette du Canada Partie II , vol. 121, n o 26, à la p. 4693, le 10 décembre 1987.

6. Modifié en vertu de l'enregistrement DORS/88 - 542, Gazette du Canada Partie II , vol. 122, n o 23, à la p. 4451, le 18 octobre 1988.


Publication initiale : le 11 juin 1997