CANADIAN THERMOS PRODUCTS INC.

Décisions


CANADIAN THERMOS PRODUCTS INC.
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-92-095

TABLE DES MATIÈRES
Ottawa, le vendredi 23 juillet 1993

Appel n o AP-92-095

EU ÉGARD À un appel entendu le 15 janvier 1993 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À des décisions du ministre du Revenu national datées du 27 mai 1992, concernant un avis d'opposition signifié aux termes de l'article 81.17 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

CANADIAN THERMOS PRODUCTS INC. Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté.


John C. Coleman ______ John C. Coleman Membre présidant

Desmond Hallissey ______ Desmond Hallissey Membre

Lise Bergeron ______ Lise Bergeron Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





L'appelant, un fabricant titulaire de licence aux termes de la Loi sur la taxe d'accise, exerce l'activité de fabrication et d'importation de bouteilles qu'il vend sous sa marque de commerce «Thermos». La principale question qui se pose dans le présent appel consiste à déterminer si les marchandises en cause, des bouteilles vendues par l'appelant sous sa marque de commerce «Thermos», sont exemptes de la taxe de vente fédérale aux termes de l'alinéa 2k) de la partie I de l'annexe III de la Loi sur la taxe d'accise. De plus, l'intimé a soulevé deux questions subsidiaires relativement au montant de la demande de remboursement de l'appelant. Il s'agit, premièrement, de déterminer si la partie de la demande de l'appelant portant sur les taxes payées plus de deux ans avant le dépôt de ses deux demandes de remboursement en cause est frappée de prescription aux termes de l'article 68 de la Loi sur la taxe d'accise, et, deuxièmement, si l'appel est admis, de faire régler par une vérification ultérieure la question du montant.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Le Tribunal est d'avis que l'alinéa 2k) de la partie I de l'annexe III de la Loi sur la taxe d'accise doit être interprété en tenant compte des autres alinéas de l'article 2, du reste de la partie I de l'annexe III et de l'objet général de la Loi sur la taxe d'accise. À cet égard, les contenants décrits dans les alinéas a) à j) de l'article 2 sont utilisés dans l'industrie alimentaire pour la production et l'emballage de marchandises exemptes de taxe. L'alinéa 2k), dans le contexte de l'article 2 pris dans son ensemble et en tant qu'élément de la partie I de l'annexe III, est clairement destiné à être lu dans un contexte commercial. En outre, le Tribunal est d'avis que les articles en question, pour être visés par l'exemption prévue à l'article 2, doivent contenir des marchandises exemptes de taxe au moment de la vente, et ne pas être vendus vides. Si l'appel n'est pas rejeté sur la seule base de l'interprétation du texte de loi, il doit l'être sur la base des faits. L'appelant n'a pas produit d'éléments de preuve concluants quant au fait que les bouteilles thermos sont des contenants «ordinaires» destinés à contenir des aliments ou des boissons exempts de taxe, ou qu'elles sont utilisées «exclusivement» à cette fin.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 15 janvier 1993 Date de la décision : Le 23 juillet 1993
Membres du Tribunal : John C. Coleman, membre présidant Desmond Hallissey, membre Lise Bergeron, membre
Avocat pour le Tribunal : Hugh J. Cheetham
Greffier : Dyna Côté
Ont comparu : Dennis A. Wyslobicky et Robert G. Kreklewetz, pour l'appelant John B. Edmond, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi) à l'égard de décisions rendues par le ministre du Revenu national (le Ministre) le 27 mai 1992.

L'appelant, un fabricant titulaire de licence aux termes de la Loi, exerce l'activité de fabrication et d'importation de bouteilles qu'il vend sous sa marque de commerce «Thermos». Ces bouteilles ont un revêtement de verre ou d'acier, ou sont munies d'un isolant en mousse. Elles sont beaucoup plus hautes que larges, et leur goulot est plus étroit que leur corps. En outre, l'étui protecteur et le bouchon constituent des pièces nécessaires d'une bouteille thermos.

L'appelant, dans la demande de remboursement no 50421 datée du 29 avril 1991, a demandé un remboursement au montant de 116 094,08 $ en ce qui a trait à la taxe de vente fédérale (TVF) payée relativement à certaines des marchandises en cause fabriquées ou importées entre le 1er mars 1989 et le 31 décembre 1990. Dans la demande de remboursement no 50992 datée du 13 juin 1991, l'appelant a demandé un remboursement au montant de 1 349 379,23 $ en ce qui a trait à la TVF payée relativement à certaines autres marchandises en cause fabriquées ou importées entre le 1er mai 1989 et le 31 décembre 1990 [2] . Dans les avis de détermination datés du 15 octobre 1991, le Ministre a rejeté ces demandes de remboursement. Par des avis d'opposition datés du 18 novembre 1991, l'appelant s'est opposé à ces déterminations. Dans des avis de décisions datés du 27 mai 1992, le Ministre a rejeté les oppositions de l'appelant et confirmé les déterminations initiales. Les deux appels de l'appelant ont été réunis en un seul par le Tribunal sous le numéro AP-92-095.

La principale question qui se pose dans le présent appel consiste à déterminer si les marchandises en cause, des bouteilles vendues par l'appelant sous sa marque de commerce «Thermos», sont exemptes de la TVF aux termes de l'alinéa 2k) de la partie I de l'annexe III de la Loi. De plus, l'intimé a soulevé deux questions subsidiaires relativement au montant de la demande de l'appelant. Il s'agit, premièrement, de déterminer si la partie de la demande de l'appelant portant sur les taxes payées plus de deux ans avant le dépôt de ses deux demandes de remboursement en cause est frappée de prescription aux termes de l'article 68 de la Loi, et deuxièmement, si l'appel est admis, de faire régler par une vérification ultérieure la question du montant.

Les articles 1 et 2 de la partie I de l'annexe III de la Loi se lisent comme suit :

ENVELOPPES OU CONTENANTS

1. Enveloppes ordinaires ou contenants ordinaires achetés ou importés par un fabricant ou producteur devant lui servir exclusivement à envelopper ou à contenir des marchandises qu'il a fabriquées ou produites et qui ne sont pas assujetties à la taxe de consommation ou de vente, mais à l'exclusion des enveloppes ou contenants conçus pour la distribution de marchandises lors de la vente ou conçus pour un usage répété.

2. Toutes les enveloppes ordinaires ou les contenants ordinaires suivants devant servir exclusivement à envelopper ou à contenir des marchandises non assujetties à la taxe de consommation ou de vente :

a) des tonneaux et boîtes pour le poisson, des caisses à claire - voie pour le homard, des sacs pour pétoncles;

b) des tonneaux, boîtes, paniers et caisses à claire - voie pour l'emballage des fruits et légumes;

c) des bouteilles et des bidons pour le lait et la crème;

d) des boîtes, caisses et cartons pour oeufs;

e) des boîtes à beurre et à fromage;

f) des boîtes et des sacs isolés, pour crème glacée;

g) des boîtes de papier gaufré pour le pain;

h) des fûts et boîtes métalliques pour le miel;

i) des sacs à farine;

j) des caisses à claire - voie, des cages et des boîtes destinées au transport de la volaille vivante;

k) des bouteilles pour aliments ou boissons.

Le premier témoin de l'appelant a été M. James Symons. M. Symons a travaillé pour l'appelant pendant 43 ans jusqu'à sa retraite, en 1989. Pendant ces années, il s'est occupé des différents aspects des opérations de fabrication, son dernier poste ayant été celui de directeur de la fabrication. Pendant le reste de la période visée par l'appel, M. Symons a poursuivi ses relations avec l'appelant à titre de consultant. Le témoin a d'abord indiqué les pièces qui composent chacun des produits en question, puis expliqué comment ceux-ci sont fabriqués. M. Symons a également expliqué que l'utilisation de boissons gazeuses dans les bouteilles thermos n'était pas conseillée parce que ces bouteilles ne sont pas conçues pour maintenir la pression inhérente à ce type de boisson. Il a ajouté que l'introduction de ce genre de liquide dans les bouteilles pouvait conduire à une fuite ou à l'implosion de la bouteille de verre qui se trouve dans le contenant. Enfin, le témoin a déclaré que les bouteilles thermos n'ont jamais été appelées autres choses que bouteilles pendant le temps qu'il travaillait chez l'appelant.

Le deuxième témoin de l'appelant a été M. Hugh J. McDonald. M. McDonald est vice-président directeur des ventes et de la commercialisation chez l'appelant, et son premier dirigeant au Canada. Il a indiqué qu'il était responsable de l'administration générale de l'appelant et qu'il occupait ce poste depuis 1978. Le témoignage de M. McDonald a porté surtout sur les utilisations des marchandises en question et sur le rapport entre ces utilisations et l'approche adoptée par l'appelant en matière de commercialisation. Il a déclaré que les produits étaient destinés à recevoir des boissons chaudes et froides ainsi que des aliments. Il a estimé que les marchandises en question sont utilisées dans 75 p. 100 à 90 p. 100 des cas pour du café, et, dans les autres cas, pour du thé, du lait, de l'eau glacée, des jus de fruits, des soupes, des ragoûts et d'autres aliments et boissons exempts de taxe. Le témoin n'a pu dire de façon catégorique que les marchandises en question n'étaient pas utilisées dans une certaine mesure pour des boissons non exemptes de taxe, comme le Kool-Aid et d'autres boissons du même genre. En réponse à des questions quant à savoir si les marchandises en question pouvaient être utilisées pour des boissons alcoolisées, M. McDonald a déclaré que l'appelant ne destinait pas ses marchandises à cet usage et qu'il ne voudrait en rien y être associé. Enfin, le témoin a déclaré que les marchandises en question se prêtaient parfois à certains usages extrêmement rares, tels que la conservation de semence congelée de taureau et d'oxygène congelé.

Les avocats de l'appelant ont fondé la cause de leur client sur la règle d'interprétation législative consistant à prendre les termes dans leur «sens courant» et «dans leur contexte global». Ils ont résumé cette approche en disant qu'elle signifiait que les mots d'un texte de loi doivent être lus dans leur contexte entier et compris dans leur sens courant et grammatical, en harmonie avec l'économie et l'objet de la Loi ainsi qu'avec l'intention du législateur. Ils ont également plaidé que lorsque les mots en cause sont clairs, il faut leur accorder, de même qu'à leur contexte immédiat, plus de poids qu'à des assertions relatives à l'intention du législateur.

Les avocats de l'appelant ont fait valoir que le libellé de l'alinéa 2k) de la partie I de l'annexe III de la Loi est clair et sans ambigu F‹té. Alors que l'article 1 de la partie I de l'annexe III de la Loi se rapporte à la fabrication, à la production et à la vente et est ainsi situé dans un contexte commercial, l'article 2 de ladite partie ne dit rien sur ces questions. Il n'est pas nécessaire que les bouteilles pour aliments ou boissons soient remplies, au moment de la vente, de marchandises exemptes de taxe. Tout ce que la disposition exige, selon les avocats de l'appelant, c'est que les contenants soient «ordinaires», qu'ils soient des «bouteilles», que ces bouteilles soient pour «aliments ou boissons» et qu'elles soient destinées à «servir exclusivement à envelopper ou à contenir des marchandises non assujetties à la taxe de consommation ou de vente».

Les avocats de l'appelant ont fait remarquer que les différences entre le texte de loi qui a pris effet en 1985 et celui qui était en vigueur auparavant étaient importantes. Dans la version antérieure, les articles 1 et 2 de la version actuelle de la partie I de l'annexe III de la Loi étaient effectivement combinés en un article qui liait les différentes exemptions de contenants pour aliments et boissons à la production et à la vente de marchandises exemptes de taxe. Les avocats ont cité la déclaration du juge Laskin dans la cause Bathurst Paper Limited c. Le ministre des Affaires municipales de la province du Nouveau - Brunswick, et selon laquelle «Il est raisonnable de croire que les modifications aux lois ont un but, à moins que des indices intrinsèques, ou des indices extrinsèques recevables, démontrent qu'on n'ait voulu qu'en polir le style [3] ». Les avocats ont émis l'hypothèse que, le législateur ayant délibérément séparé l'article 2 de l'article 1 et ne les ayant pas placés dans un contexte commercial, la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans la cause Les Entreprises Kato Inc. c. Le sous - ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [4] , sur laquelle l'intimé se fondait, n'était pas applicable parce qu'elle avait été rendue sur la base d'un texte de loi antérieur à 1985.

Les avocats de l'appelant se sont ensuite penchés sur les conditions énoncées à l'article 2 de la partie I de l'annexe III de la Loi, en faisant valoir les points suivants sur chacun des éléments.

1) Le terme «ordinaires» signifie destinés à une utilisation courante. Citant la décision rendue par le Tribunal dans la cause Guelph Paper Box Company Limited c. Le ministre du Revenu national [5] , les avocats ont plaidé que «ordinaires» signifiait d'une façon conforme à l'objet des marchandises et à leur utilisation prévue. Les bouteilles thermos sont destinées à contenir des aliments et des boissons exempts de taxe, et la plus grande partie de leur utilisation de fait vise cette fin. Si elles ont été utilisées de temps à autre pour des marchandises non exemptes de taxe, cette utilisation a été minimale.

2) Les définitions de dictionnaire du mot «bouteille» recouvrent les produits en question; les définitions de «thermos» font référence au mot «bouteille». Les mots «thermos» et «bouteille» sont couramment liés dans le langage commercial.

3) Les pratiques de commercialisation et de publicité relatives aux marchandises en question font état d'«aliments ou boissons» exempts de taxe et mettent en garde contre l'utilisation du produit avec des boissons gazeuses, qui ne sont pas exemptes de taxe.

4) L'expression «devant servir» ne signifie pas qu'au moment de la vente aux grossistes ou aux détaillants qui forment la clientèle de l'appelant, les bouteilles thermos doivent contenir des aliments ou des boissons exempts de taxe. Ceci ne serait pas conforme au sens courant de l'article 2, qui ne mentionne rien quant au niveau du circuit de distribution ou à l'utilisateur du contenant.

Les avocats de l'appelant ont plaidé que le libellé de l'article 2 peut être distingué de celui des autres articles et parties de l'annexe III de la Loi, comme l'article 2 de partie I, l'alinéa 1a) de la partie XIII et l'article 8 de la partie XVIII. Par conséquent, il ne serait pas approprié de limiter l'application de l'article 2 en y attachant un sens ou en y voyant la présence implicite de mots limitatifs. Quant au fait que les marchandises doivent servir «exclusivement», l'avocat a suivi le raisonnement indiqué au point 1) ci-dessus, en citant également la cause Singer Sewing Machine Co. of Canada Ltd. c. Le ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [6] , pour soutenir que «exclusivement» doit être interprété en rapport avec la conception des marchandises et non avec l'usage auquel l'acheteur pourrait les adapter. L'utilisation prévue des bouteilles thermos est de contenir des aliments ou des boissons exempts de taxe.

L'avocat de l'intimé a plaidé, tout d'abord, que les exemptions de la partie I de l'annexe III de la Loi ne s'appliquent que lorsqu'il y a production et commerce de marchandises exemptes de taxe, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Il a cité la cause Les Entreprises Kato à l'appui de cette position. Les marchandises en question ne sont pas utilisées en conjonction avec le commerce de marchandises exemptes de taxe, mais sont vendues vides aux consommateurs qui décident de ce qu'ils y mettront. De plus, l'alinéa 2k) de la partie I de l'annexe III de la Loi devrait tirer son sens des autres objets énumérés dans l'article 2, qui tous, contrairement aux bouteilles thermos en question, sont, sans ambiguïté, des contenants servant dans l'industrie alimentaire pour l'emballage de produits exempts de taxe.

Le deuxième argument principal de l'avocat de l'intimé a été que l'appelant n'avait pas prouvé que les marchandises en question sont destinées à servir «exclusivement» à contenir des marchandises exemptes de taxe. Même en ce qui a trait à l'utilisation prévue des marchandises, la publicité de l'un des produits en question visant les enfants semble montrer une boisson de fruits artificiels. Le concept d'utilisation minimal était destiné à s'appliquer à des articles comme la semence de taureau et l'oxygène liquide, et non à des utilisations qui pourraient représenter de 10 p. 100 à 25 p. 100 de l'utilisation totale.

Le troisième argument de l'avocat de l'intimé a eu trait au concept de «contenant ordinaire». Il a rapproché les marchandises en question de l'exemple donné par le Tribunal dans la cause Guelph Paper Box, dans laquelle une distinction a été établie entre la margarine vendue dans un contenant de marque Tupperware (qui n'est pas un contenant «ordinaire») et la margarine vendue dans des contenants de plastique sans marque (contenants «ordinaires»).

À l'appui de la thèse selon laquelle les bouteilles thermos ne sont pas des contenants «ordinaires» en matière de ventes d'aliments ou de boissons exempts de taxe, l'avocat de l'intimé s'est également reporté aux politiques administratives pertinentes du ministère du Revenu national énoncées le Mémorandum de l'Accise ET 302 [7] (le Mémorandum ET 302), et selon lesquelles les contenants conçus pour un usage domestique ou de consommation ne sont pas des enveloppes ou des contenants ordinaires aux fins de la Loi.

Le Tribunal considère que la présente cause roule sur l'interprétation du texte de loi pertinent et, en particulier, sur la question de déterminer si les bouteilles thermos peuvent être interprétées, aux termes de l'alinéa 2k) de la partie I de l'annexe III de la Loi, comme étant des enveloppes ou des contenants «ordinaires» devant servir «exclusivement» pour des aliments ou des boissons non assujettis à la taxe de vente.

Le Tribunal convient avec l'appelant que l'approche consistant à prendre les mots dans leur «sens courant» et à les mettre «dans leur contexte global» est celle qui convient en matière d'interprétation des textes de loi.

Cependant, l'application de ce principe ne conduit pas le Tribunal à lire l'alinéa 2k) de la partie I de l'annexe III de la Loi en lui-même et indépendamment des autres alinéas de l'article 2, du reste de la partie I de l'annexe III de la Loi ou, en fait, de l'objet général de la Loi. Ce n'est pas seulement la lettre, mais aussi l'objet et l'esprit de la Loi que le Tribunal doit examiner lorsqu'il interprète le texte législatif. La loi porte sur des transactions commerciales faisant intervenir la production, la vente et la consommation de marchandises. Elle ne s'intéresse pas aux utilisations privées et domestiques des marchandises.

Il est vrai que l'article 2 de la partie I de l'annexe III de la Loi ne mentionne pas spécifiquement la fabrication, la production ou la vente de marchandises, comme le fait l'article 1. Cependant, les contenants décrits dans les alinéas a) à j) de l'article 2 sont utilisés dans l'industrie alimentaire pour la production et l'emballage de marchandises exemptes de taxe. L'alinéa 2k), dans le contexte de l'article 2 pris dans son ensemble et en tant qu'élément de la partie I de l'annexe III, est clairement destiné à être lu dans un contexte commercial. Le Tribunal ne peut concevoir dans quel intérêt public le législateur aurait pu former l'intention que des produits comme les bouteilles thermos vides ou les contenants Tupperware devraient être exempts de taxe dès qu'il peut être prouvé que, lorsque remplis par le consommateur, ils contiennent exclusivement des aliments ou des boissons exempts de taxe. Le Tribunal est plutôt d'avis que le législateur avait pour intention que les articles en question, pour être visés par l'exemption prévue à l'article 2 de la partie I de l'annexe III de la Loi, doivent contenir des marchandises exemptes de taxe au moment de la vente, et ne pas être vendus vides. En outre, les dispositions du Mémorandum ET 302, bien qu'elles ne soient pas déterminantes, vont dans le sens d'une interprétation de l'article 2 dans un contexte commercial.

Si l'appel n'est pas rejeté sur la seule base de l'interprétation du texte de loi, il doit l'être sur la base des faits. L'appelant n'a pas produit d'éléments de preuve concluants quant au fait que les bouteilles thermos sont des contenants «ordinaires» destinés à contenir des aliments ou des boissons exempts de taxe, ou qu'elles sont utilisées «exclusivement» à cette fin. Les bouteilles thermos sont des contenants relativement spécialisés pour aliments et boissons, que ces derniers soient exempts de taxe ou non. Les cruches, les pots, les contenants de plastique, les assiettes et autres articles du même genre seraient des contenants domestiques plus ordinaires destinés à contenir des aliments ou des boissons exempts de taxe.

Quoi qu'il en soit, en se penchant sur la question de l'exclusivité, le Tribunal doit examiner l'usage actuel, et non seulement l'usage intentionnel. L'existence d'utilisations véritablement minimales des bouteilles thermos en rapport avec des liquides non exempts de taxe, comme la semence de taureau congelée et l'oxygène liquide congelé, ne serait pas compatible avec l'intention générale voulant que les marchandises contiennent seulement des aliments ou des boissons exempts de taxe. Cependant, les témoins de l'appelant n'ont pu faire la ventilation des utilisations des bouteilles thermos pour des aliments ou des liquides exempts de taxe autres que le café, lequel représente, selon leur estimation, de 75 p. 100 à 90 p. 100 de l'utilisation totale. En l'absence d'éléments de preuve montrant qu'à peu près toutes les marchandises sont utilisées pour contenir des aliments ou des boissons exempts de taxe, le Tribunal ne peut conclure que le critère d'exclusivité a été observé. Les déclarations de l'appelant au sujet de l'utilisation prévue des bouteilles thermos ne sont pas suffisantes en elles-mêmes.

Pour ces raisons, le Tribunal rejette l'appel. Le Tribunal fait remarquer que s'il avait rendu une décision en faveur de l'appelant sur la question principale, il aurait, conformément à des décisions antérieures rendues par lui, limité la demande de l'appelant à la partie des taxes qui ont été payées dans un délai de deux ans avant la date des demandes de remboursement de l'appelant, et qu'il aurait renvoyé l'affaire à l'intimé avec l'instruction de calculer le montant dû à l'appelant sur cette base.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E - 15.

2. L'appelant a abandonné sa réclamation relative aux «Snak Jars» pour la raison que ces contenants sont des bocaux et non des bouteilles. L'appelant déclare que ces bocaux représentent environ 20 000,00 $ du montant total de sa demande.

3. [1972] R.C.S. 471 à 477.

4. [1984] 1 C.F. 827.

5. 5 T.C.T. 1045, Tribunal canadien du commerce extérieur, appel n o AP-90-145, le 7 janvier 1992.

6. Non publié, Commission du tarif, appel n 2951, le 21 juillet 1988.

7. Contenants et enveloppes, ministère du Revenu national, le 16 mars 1989.


Publication initiale : le 17 juin 1997