WEIL COMPANY LIMITED

Décisions


WEIL COMPANY LIMITED
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL POUR LES DOUANES ET L'ACCISE
Appel no AP-92-096

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le lundi 10 mai 1993

Appel n o AP-92-096

EU ÉGARD À un appel entendu le 18 janvier 1993 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise le 13 juillet 1992 concernant une demande de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

WEIL COMPANY LIMITED Appelant

ET

LE SOUS - MINISTRE DU REVENU NATIONAL

POUR LES DOUANES ET L'ACCISE Intimé

L'appel est rejeté.


W. Roy Hines ______ W. Roy Hines Membre présidant

Michèle Blouin ______ Michèle Blouin Membre

Robert C. Coates, c.r. ______ Robert C. Coates, c.r. Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





L'appelant importe des fours à pain automatiques qui exécutent toutes les fonctions du processus de panification, à savoir le mélange des ingrédients, le pétrissage de la pâte et la cuisson. La question dans le présent appel consiste à déterminer si les fours à pain automatiques importés par l'appelant doivent être classés à titre d'«Appareils électromécaniques à moteur électrique incorporé, à usage domestique - Autres appareils» dans le numéro tarifaire 8509.80.00, comme l'a prétendu l'appelant, ou à titre d'«autres appareils électrothermiques pour usages domestiques [...] -- Autres» dans le numéro tarifaire 8516.79.00, comme l'a soutenu l'intimé.

DÉCISION : L'appel est rejeté. De l'avis du Tribunal, la caractéristique essentielle des marchandises en question réside dans la cuisson ou fonction électrothermique. Les marchandises en question sont donc plus correctement classées dans la position qui mentionne cette caractéristique, comme il est précisé à la Règle 3 b) des Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé et à la Note 3 du Chapitre 85 des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 18 janvier 1993 Date de la décision : Le 10 mai 1993
Membres du Tribunal : W. Roy Hines, membre présidant Michèle Blouin, membre Robert C. Coates, c.r., membre
Avocat pour le Tribunal : Hugh J. Cheetham
Greffier : Janet Rumball
Ont comparu : Wayne Learn, pour l'appelant Geoffrey S. Lester, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] (la Loi) à l'égard d'une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise (le Sous-ministre) le 13 juillet 1992 aux termes de l'article 63 de la Loi.

L'appelant importe des fours à pain automatiques de marque MultiChef, modèle BM-1 (le four à pain). Le four à pain exécute toutes les fonctions du processus de panification, à savoir le mélange des ingrédients, le pétrissage de la pâte et la cuisson. La chambre de cuisson est chauffée par un élément chauffant électrique. Le guide de l'utilisateur du four à pain indique de quelle façon, en plus de fabriquer du pain, l'appareil peut pétrir et faire lever la pâte pour produire des pains spéciaux et des petits pains. La lame pétrisseuse est mue par un petit moteur électrique. Le four à pain pèse moins de 20 kg et il est principalement vendu à des consommateurs aux fins d'utilisation à la maison.

L'importation des marchandises en question a fait l'objet de cinq expéditions distinctes en 1990 et en 1991 conformément au numéro tarifaire 8509.80.00 du Tarif des douanes [2] . Initialement, l'intimé a classé les marchandises en question dans le numéro tarifaire 8516.60.00 à titre d'«Autres fours; cuisinières, réchauds (y compris les tables de cuisson), grils et rôtissoires». L'appelant a déposé des demandes de réexamen pour chacune des expéditions et, aux termes d'une décision datée du 13 juillet 1992, le Sous-ministre a reclassé les marchandises dans le numéro tarifaire 8516.79.00.

La question dans le présent appel consiste à déterminer si les marchandises en question doivent être classés à titre d'«Appareils électromécaniques à moteur électrique incorporé, à usage domestique -Autres appareils» dans le numéro tarifaire 8509.80.00, comme l'a prétendu l'appelant, ou à titre d'«autres appareils électrothermiques pour usages domestiques [...] -- Autres» dans le numéro tarifaire 8516.79.00, comme l'a soutenu l'intimé.

L'appelant a convoqué un témoin, Mme Penelope Brown, vice-présidente à l'Administration de Weil Company Limited. Mme Brown a indiqué qu'elle travaille pour la société appelante depuis près de 20 ans et qu'elle connaît très bien le fonctionnement du four à pain parce qu'elle l'a elle-même utilisé. Elle a expliqué de quelle façon le four à pain fonctionne et a donné son opinion sur les raisons pour lesquelles les consommateurs l'achètent. Elle a insisté notamment sur les fonctions de la confection de la pâte et du pétrissage, fonctions particulièrement importantes pour les acheteurs. Elle a fait remarquer que ces fonctions accaparent une plus grande partie du processus de panification que l'étape de la cuisson. Elle a également signalé que 11 des 12 recettes présentées dans le guide de l'utilisateur du four à pain exigent le recours à un four conventionnel pour la cuisson. Au cours du contre-interrogatoire, Mme Brown a confirmé que son point de vue sur les raisons qui incitent les consommateurs à acheter les marchandises en question est personnel et qu'il n'est étayé d'aucun sondage de mise en marché ni d'aucune autre source de renseignements sur le marché. En réponse aux questions du Tribunal, elle a confirmé que d'autres produits de consommation, par exemple le Mix Master, pourraient confectionner la pâte et la pétrir; le témoin a convenu que ce qui distingue le four à pain de ces appareils, c'est sa capacité de cuisson.

Le représentant de l'appelant a amorcé son argument en énonçant quatre classements tarifaires que le Tribunal pourrait envisager en l'espèce, c'est-à-dire les numéros tarifaires 8509.40.90, 8509.80.00, 8516.79.00 et 8543.80.40. Il a déclaré que le classement effectué conformément au Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [3] doit débuter au niveau de la position tarifaire, avec renvois aux Notes de Sections et de Chapitres pertinentes. Il a fait valoir que l'interprétation de la Note 3 du Chapitre 85 constitue l'élément primordial du classement éventuel des marchandises en question parce qu'il est précisé à la dernière partie de la Note que la position no 85.09 ne s'applique pas aux appareils électrothermiques; suit alors, entre parenthèses, la position no 85.16. De l'avis du représentant, cet énoncé n'indique pas clairement si cela signifie que la Note a trait aux appareils qui sont uniquement électrothermiques ou principalement électrothermiques. Il a donné ensuite des exemples de marchandises classées dans la position no 85.09, comme des cireuses à parquets munies d'un élément chauffant servant à liquéfier la cire qui possèdent toutes des propriétés électrothermiques et électromécaniques. À partir de cette analyse, il a invité le Tribunal à ne pas exclure la position no 85.09 comme position où pourrait être classé le four à pain.

Le représentant de l'appelant a ensuite examiné la position no 85.16. Il a soutenu que l'énoncé «autres appareils électrothermiques pour usages domestiques» que l'on retrouve dans cette position est très général et qu'il n'exige pas, à première vue, qu'un produit soit uniquement ou principalement électrothermique. Il a également fait remarquer que dans les Notes explicatives [4] relatives à cette position, certaines marchandises, comme des tables roulantes munies d'éléments chauffants, sont exclues de la position no 85.16 parce qu'elles sont précisément visées à une autre position. Il en a donc conclu que cet élément prouve que la position no 85.16 n'est pas aussi précise que la position no 85.09 et que, par conséquent, aux termes de la Règle 1 des Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé [5] (les Règles générales), les marchandises en question sont plus correctement classées dans la position no 85.09. Dans sa réponse, le représentant a affirmé que si le Tribunal conclut que le four à pain ne peut être classé aux termes de la Règle 1, 3 a) ou 3 b) des Règles générales et qu'il invoque alors la Règle 3 c), il devrait donc envisager la possibilité de classer les marchandises en question dans le numéro tarifaire 8543.80.40. Il a également déclaré qu'à cette étape des travaux, le numéro tarifaire le plus pertinent pour les marchandises en question est le numéro tarifaire 8509.40.90 -«Broyeurs et mélangeurs pour aliments; presse-fruits et presse-légumes --- Autres».

L'avocat de l'intimé a reconnu que le four à pain peut exercer une fonction double ou mixte. Il a fait valoir que la Note 3 du Chapitre 85 oblige le Tribunal à déterminer si la fonction principale des marchandises en question est électrothermique ou électromécanique. Il a soutenu que si le Tribunal décide que la fonction principale est électrothermique, les marchandises ne peuvent alors être classées dans la position no 85.09 en raison de leur exclusion à la dernière partie du libellé de la Note 3. L'avocat a prétendu que le témoin de l'appelant a seulement expliqué comment les marchandises fonctionnent et ce qu'elles font; elle n'a pas précisé leur fonction principale. L'avocat a déclaré que l'appelant ne s'est donc pas acquitté du fardeau de la preuve et que, pour ce seul motif, le Tribunal pouvait rendre une décision en faveur de l'intimé.

Comme solution de rechange, l'avocat a fait valoir que si le Tribunal conclut que les éléments de preuve selon lesquels les marchandises en question possèdent des propriétés électrothermiques et électromécaniques sont suffisants et qu'il ne peut déterminer laquelle de ces propriétés donne aux marchandises leur caractère essentiel, il doit donc, aux termes de la Règle 3 c) des Règles générales, conclure en faveur de l'intimé parce qu'il a présenté la dernière des positions classées par ordre numérique dont il faut dûment tenir compte. L'avocat a fait remarquer que même si l'appelant a mentionné la position no 85.43 dans son mémoire, la seule position présentée sérieusement à l'audience est la position no 85.09 qui paraît avant la position no 85.16.

Le Tribunal est d'avis que les marchandises en question sont correctement classées dans le numéro tarifaire 8516.79.00 à titre d'«autres appareils électrothermiques pour usages domestiques [...] -- Autres». Le Tribunal en vient à cette conclusion compte tenu du fait que ce sont la loi et les principes applicables à l'interprétation de la loi, y compris ceux qui sont énoncés dans les Règles générales, qui doivent régir le classement des marchandises en question. Le Tribunal connaît particulièrement bien la Règle 1 des Règles générales. Comme il l'a fait remarquer dans la cause York Barbell Co. Ltd. c. Le sous - ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [6] , la Règle 1 des Règles générales est d'une extrême importance pour le classement des marchandises effectué conformément au Système harmonisé. La Règle 1 des Règles générales précise que le classement est d'abord déterminé par les termes des positions tarifaires et des Notes de Sections ou de Chapitres pertinentes.

Le Tribunal convient avec les parties qu'en l'espèce, pour invoquer la Règle 1 des Règles générales, il doit tenir compte de la Note 3 du Chapitre 85. De l'avis du Tribunal, la Note 3 n'empêche pas le classement des appareils à fonction double ou mixte dans la position no 85.09. Le Tribunal est également d'avis que le four à pain possède à la fois des fonctions ou propriétés électrothermiques et électromécaniques. En conséquence, le Tribunal estime que la Note 3 ne suffit pas pour lui permettre de classer les marchandises en question; il doit également s'en remettre à la Règle 3 des Règles générales.

La première phrase de la Règle 3 a) des Règles générales précise que «[l]a position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d'une portée plus générale». Comme il est indiqué ci-dessus, le Tribunal est d'avis que les marchandises en question possèdent à la fois des fonctions ou propriétés électrothermiques et électromécaniques. Vu que la description fournie à chacune des positions à l'étude mentionne une, mais non les deux propriétés ou fonctions, le Tribunal considère que les deux positions sont aussi spécifiques l'une que l'autre aux fins de l'application de la Règle 3 a) des Règles générales, et il doit donc s'en remettre à la Règle 3 b) des Règles générales.

La Règle 3 b) des Règles générales précise, en partie, que les ouvrages composés de matières différentes dont le classement ne peut être effectué en application de la Règle 3 a) des Règles générales seront classés d'après l'article qui leur confère leur caractère essentiel. Le Tribunal conclut que le caractère essentiel du four à pain a trait à sa capacité de cuisson ou fonction électrothermique. C'est cette capacité qui distingue les marchandises en question des autres appareils, par exemple le Mix Master qui peut être utilisé pour confectionner la pâte et la pétrir. Le Tribunal ayant décidé que les marchandises peuvent être envisagées comme des marchandises de nature essentiellement électrothermique, il convient d'invoquer la Note 3 du Chapitre 85, à savoir que les appareils électrothermiques sont exclus de la position no 85.09, et de classer les marchandises en question comme il est indiqué dans cette Note, c'est-à-dire dans la position no 85.16.

En conséquence, l'appel est rejeté.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

2. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

3. Conseil de coopération douanière, 1ère éd., Bruxelles, 1986.

4. Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, Conseil de coopération douanière, 1ère éd., Bruxelles, 1986.

5. Supra, note 2, annexe I.

6. Appel no AP-91-131, le 16 mars 1992.


Publication initiale : le 17 juin 1997