ELECTRIC MOBILITY (CANADA) CORP.

Décisions


ELECTRIC MOBILITY (CANADA) CORP.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
POUR LES DOUANES ET L'ACCISE
Appel no AP-92-182

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le vendredi 7 janvier 1994

Appel n o AP-92-182

EU ÉGARD À un appel entendu les 16 et 19 avril 1993 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise le 8 octobre 1991, concernant une demande de réexamen présentée aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

ELECTRIC MOBILITY (CANADA) CORP. Appelant

ET

LE SOUS - MINISTRE DU REVENU NATIONAL

POUR LES DOUANES ET L'ACCISE Intimé

L'appel est admis.

Lise Bergeron ______ Lise Bergeron Membre présidant

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre

Charles A. Gracey ______ Charles A. Gracey Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard d'une décision rendue par le sous - ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi sur les douanes. Les questions en litige consistent à déterminer si 1) le triporteur «Rascal ConvertAble» est «d'une classe ou d'une espèce non faite au Canada» et, par conséquent, exonéré conformément au code 2530 de l'annexe II du Tarif des douanes des droits prescrits aux positions n os 87.13 et 87.14; et 2) s'il existe une quantité importante de chaises d'invalides faites au Canada de la même classe ou espèce que celle du triporteur «Rascal ConvertAble».

DÉCISION : L'appel est admis. Le triporteur «Rascal ConvertAble» est «d'une classe ou d'une espèce non faite au Canada» en raison de sa conception unique qui lui donne la possibilité d'être converti d'un appareil à trois roues en un appareil à quatre roues, ce qui le rend plus facile à manoeuvrer dans des endroits restreints que les triporteurs à trois roues fabriqués au Canada. Étant donné qu'aucun triporteur fabriqué au Canada ne possède cet élément de conversion, il n'existe aucun triporteur de la même classe ou espèce que le «Rascal ConvertAble» et, par conséquent, il n'existe aucune quantité importante de triporteurs de la même classe ou espèce que le «Rascal ConvertAble» fabriqué au Canada.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Dates de l'audience : Les 16 et 19 avril 1993 Date de la décision : Le 7 janvier 1994
Membres du Tribunal : Lise Bergeron, membre présidant Arthur B. Trudeau, membre Charles A. Gracey, membre
Avocat pour le Tribunal : Shelley Rowe
Greffier : Janet Rumball
Ont comparu : Dean A. Peroff, pour l'appelant Ian McCowan, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] (la Loi) à l'égard d'une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise en application du paragraphe 63(3) de la Loi. Les deux parties ont convenu que le triporteur «Rascal ConvertAble» (le triporteur Rascal), un appareil permettant à des personnes souffrant d'un handicap physique de se déplacer, et ses parties connexes importés par l'appelant étaient correctement classés dans les positions nos 87.13 et 87.14 de l'annexe I du Tarif des douanes [2] à titre de «Fauteuils roulants et autres véhicules pour invalides, même avec moteur ou autre mécanisme de propulsion» et de parties de ces véhicules. Les questions en litige consistent à déterminer si le triporteur Rascal est une chaise d'invalide ou une chaise percée, destinée à être utilisée par une personne handicapée, «d'une classe ou d'une espèce non faite au Canada» et, par conséquent, exonéré conformément au code 2530 de l'annexe II du Tarif des douanes des droits prescrits aux positions nos 87.13 et 87.14, et si une quantité importante de chaises d'invalides d'une même classe ou espèce que celle du triporteur Rascal est fabriquée au Canada.

Sept modèles différents du triporteur Rascal ont été importés, soit les modèles 210, 220, 230 et 240, qui sont des modèles à trois roues, et les modèles 250 et 270, qui sont des modèles à quatre roues. Tous les triporteurs Rascal sont conçus de manière qu'un train avant à une ou à deux roues puisse être fixé au train arrière. Le train avant à une roue est muni d'un mécanisme de commande de direction à deux poignées, en forme de T, appelé barre, et le train avant à deux roues comporte une barre à une poignée plus compacte, montée sur le côté.

Quatre témoins ont comparu pour le compte de l'appelant : M. Michael Flowers, président de la société appelante et de la firme Electric Mobility Corporation aux États-Unis; Mme Catherine Kissick, ergothérapeute; Mme Darlene Speers, physiothérapeute; et M. William Brown, utilisateur du triporteur Rascal.

M. Flowers a expliqué que tous les modèles du triporteur Rascal comportent l'élément de conversion qui a été breveté sous le numéro de brevet canadien 1,301,664 et appelé «Véhicule personnel à ossature démontable» (le brevet). Selon lui, le triporteur Rascal à quatre roues présente un empattement plus petit, soit environ 19,5 po depuis le centre des roues avant jusqu'au centre des roues arrière, et un rayon de braquage de 31,3 po, comparativement aux triporteurs à trois roues fabriqués au Canada dont l'empattement est compris entre 30,0 po et 35,0 po et dont le rayon de braquage est plus grand, se situant entre 40,0 po et 45,0 po. En raison d'un rayon de braquage plus petit, le triporteur Rascal peut tourner selon un angle plus raide, ce qui permet à l'utilisateur de s'approcher davantage des objets comme les bureaux, les tables et les comptoirs. Enfin, M. Flowers a expliqué que le triporteur Rascal a une capacité de charge nominale de 400 lb et que cet appareil, contrairement aux triporteurs fabriqués au Canada, peut être utilisé par des personnes plus lourdes en raison de son cadre en aluminium moulé sous pression, plutôt que soudé, ainsi que de la base et de la tige du siège qui augmentent tous la durabilité du triporteur.

Mme Kissick a expliqué son rôle à titre de membre de l'équipe d'évaluation des appareils de déplacement (EEAD) de la Direction des appareils et accessoires fonctionnels (DAAF). Cette équipe a été chargée d'évaluer le triporteur Rascal entre décembre 1990 et janvier 1991 afin de déterminer si ce dernier était admissible à une aide financière dans le cadre du Programme d'appareils et accessoires fonctionnels (PAAF) du ministère de la Santé de l'Ontario. Elle s'est reportée aux conclusions de son évaluation clinique mentionnées dans son rapport en date du 8 janvier 1991 dans lequel elle a affirmé que, pour ce qui est du rendement et de la durabilité, le triporteur Rascal [traduction] «offre une caractéristique unique, le train avant ordinaire et la barre à deux poignées pouvant être convertis en un train avant de faible encombrement muni d'une barre à une poignée montée sur le côté. Cette capacité d'adaptation améliore la manoeuvrabilité dans les espaces restreints et encombrés». Elle a affirmé en outre que le triporteur Rascal facilite le transfert sans aide, qu'il peut être adapté pour les espaces restreints à l'intérieur ou les vastes espaces à l'intérieur et à l'extérieur et que le train avant plus petit et la barre étaient idéals pour s'approcher des surfaces de travail. Elle a fait savoir, en général, que la capacité de conversion en un appareil à quatre roues réduit la longueur du triporteur et son rayon de braquage, ce qui en augmente la manoeuvrabilité. Au moment du dépôt de son rapport, elle ne connaissait aucun triporteur fabriqué au Canada qui présentait l'élément facilitant la manoeuvrabilité à l'intérieur aux fins d'accès aux surfaces de travail ou un court rayon de braquage.

Mme Speers, experte dans l'évaluation des besoins des personnes handicapées et dans la prescription d'appareils fonctionnels et anciennement consultante auprès du PAAF, a affirmé que, à son avis, la capacité de conversion d'un train avant à une roue en un train avant à deux roues plus court, la barre maniable à une seule poignée du train avant à deux roues et la plus grande capacité de charge du triporteur Rascal étaient des caractéristiques non offertes par les triporteurs fabriqués au Canada. Elle a formulé cet avis après avoir assisté à des séminaires et à des salons professionnels présentés par des fabricants et des vendeurs, après avoir consulté les documents commerciaux publiés par les fabricants et après avoir examiné le triporteur Rascal lui-même. Elle connaissait le triporteur Carrette fabriqué par Everest & Jennings Canadian Limited (Everest & Jennings) et les triporteurs 2000FS et 2001LX fabriqués par Fortress Scientific Limited (Fortress), mais, à son avis, ces triporteurs ne présentaient pas les mêmes caractéristiques que celles du triporteur Rascal. Elle ne connaissait pas les triporteurs fabriqués par Ranger Scooters Ltd. (Ranger), puisque ces derniers n'étaient pas approuvés à l'époque en vertu du PAAF. Elle a convenu que les triporteurs Rascal à trois roues des modèles 210, 220, 230 et 240 avec un train avant à une roue présentent un rayon de braquage qui est comparable à celui des autres triporteurs offerts sur le marché canadien.

M. Brown, utilisateur du triporteur Rascal de modèle 240, a expliqué que, avant d'acheter son triporteur en juin 1991, il s'était familiarisé avec les triporteurs fabriqués par Fortress et Everest & Jennings, mais qu'il avait choisi le triporteur Rascal parce que, à cette époque, il pesait 439 lb et que ce triporteur était le seul qui, à son avis, présentait une capacité de charge suffisante. Aucune des brochures préparées par divers fabricants de triporteur qu'il a lues n'indiquait que les triporteurs pouvaient transporter plus de 350 lb et aucun des fabricants ne garantissait leur appareil s'il était utilisé par une personne pesant plus de 350 lb. La brochure sur le triporteur Rascal précisait que ce triporteur avait une capacité de charge de 400 lb au plus, mais l'appelant a garanti le triporteur acheté par M. Brown pendant un an. M. Brown a également fait savoir que la capacité de conversion l'intéressait, car elle pourrait lui être utile s'il retournait au travail ou si, en raison d'une aggravation de son incapacité, il était tenu d'utiliser le triporteur à l'intérieur.

Les témoins et de l'intimé et de l'appelant ont convenu que le triporteur Rascal présentait des caractéristiques uniques non offertes par les triporteurs fabriqués au Canada, notamment l'élément de conversion, l'empattement plus court et le rayon de braquage plus faible, ce qui assure une plus grande manoeuvrabilité à l'intérieur, mais ils ont estimé que ces caractéristiques ne faisaient pas du triporteur Rascal un appareil qui appartient à une classe ou à une espèce différente de celle des triporteurs fabriqués au Canada.

Le Tribunal a été saisi du témoignage de M. Steve Elder, expert dans les aspects tant techniques que cliniques de l'évaluation des appareils de déplacement et qui était responsable de l'EEAD qui a évalué le triporteur Rascal. Il a confirmé avoir adopté dans le rapport d'évaluation clinique les déclarations et les conclusions formulées par Mme Kissick, mais il était d'avis que le triporteur Rascal n'offrait pas différentes fonctions, mais seulement différentes caractéristiques qui ne le distinguaient pas des triporteurs ordinaires fabriqués au Canada qu'il connaissait, soit le triporteur Carrette, les triporteurs Fortress des modèles 2000FS et 2001LX ainsi que les triporteurs Ranger. Il a fait remarquer que les attributs différents du triporteur Rascal étaient, en ce qui a trait aux modèles à trois roues, l'appuie-pied anti-bascule monté sur le côté ainsi que la barre maniable, et, en ce qui a trait aux modèles à quatre roues, l'appuie-pied monté devant les roues, la barre à une seule poignée montée sur le côté ainsi que l'empattement et le rayon de braquage plus courts. Pour ce qui est de la capacité de charge, il a affirmé qu'il existe habituellement une différence entre la capacité indiquée dans une brochure et la capacité réelle d'un triporteur et qu'il est toujours possible de modifier un appareil en vue d'en augmenter la capacité de charge.

Trois représentants de fabricants canadiens de triporteurs ont comparu pour le compte de l'intimé et ont affirmé que les triporteurs de leurs sociétés concurrencent le triporteur Rascal. M. Gregg McBurnie, président de Ranger, entreprise qui vend des triporteurs uniquement en Colombie-Britannique et en Alberta, a affirmé ne jamais avoir refusé de vendre un appareil à un client pour des raisons de poids et que la société Ranger avait modifié au moins un appareil de manière qu'il puisse être utilisé par une personne pesant 450 lb. Il a indiqué également que toutes les barres des triporteurs Ranger peuvent être maniées d'une seule main, sont réglables de façon continue, sont durables et peuvent résister à des pressions considérables.

M. Drew Gibney, directeur de la recherche-développement et de l'ingénierie de produits auprès d'Everest & Jennings, a traité des qualités du triporteur Carrette. Il a confirmé que la capacité de charge est inférieure à celle du triporteur Rascal et, à son avis, la société Everest & Jennings n'a jamais fourni de triporteur à une personne de poids supérieur aux poids recommandés. Il a décrit la barre comme étant une barre droite en T à angle réglable. Il a convenu que le triporteur Carrette n'est pas aussi facile à manoeuvrer à l'intérieur que le triporteur Rascal, mais qu'il peut être employé tant à l'intérieur qu'à l'extérieur.

M. William Zerter, vice-président, Finances, auprès de Fortress, et ingénieur ainsi que comptable agréé, a expliqué que Fortress fabrique quatre modèles de triporteur, soit les modèles 2000FS, 2001LX, 1700FS et 1704FS. Les modèles 1700FS et 1704FS peuvent être transformés, mais ils n'étaient pas sur le marché au cours de la période visée par le présent appel. Fortress fabrique également des fauteuils roulants manuels et électriques. Selon M. Zerter, le triporteur Rascal est en concurrence avec les fauteuils roulants électriques de bas de gamme. Quant à la capacité de charge, il a affirmé que les triporteurs pouvaient être adaptés de manière à supporter des poids plus élevés.

M. Garth Teskey, applicateur du Tarif auprès de l'Unité des produits spéciaux du ministère du Revenu national, a été le dernier témoin convoqué par l'intimé. Son témoignage a porté sur la question de déterminer si des marchandises d'une même classe ou espèce que le triporteur Rascal sont fabriquées au Canada en «quantités importantes» conformément au paragraphe 12(1) du Tarif des douanes. Comme l'indique le Décret de 1987 sur le pourcentage de la consommation canadienne normale pour qu'une quantité de marchandises soit considérée comme importante [3] , l'expression «quantité importante» signifie au moins 10 p. 100 de la consommation canadienne normale des marchandises en cause.

M. Teskey a examiné les statistiques commerciales publiées en décembre 1991 par Statistique Canada qui ont trait à la sous-position no 8713.90 visant les véhicules pour invalides, y compris les fauteuils roulants, même avec moteur ou autre mécanisme de propulsion, ainsi que des renseignements obtenus auprès de Fortress, Everest & Jennings et Ranger. Il a conclu qu'advenant une décision selon laquelle le triporteur Rascal et les triporteurs fabriqués au Canada sont considérés comme étant de la même classe ou espèce, le pourcentage de triporteurs fabriqués au Canada serait supérieur à 10 p. 100.

Bien qu'aucun élément de preuve n'ait été présenté quant à la capacité au gravissement, les deux avocats ont convenu que, depuis la décision rendue dans la cause Aisco Industrial Safety Apparel c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [4] et l'importation en cause, certains triporteurs canadiens fabriqués par Fortress et Ranger possèdent des capacités au gravissement semblables et qu'il importe que les triporteurs puissent gravir des pentes douces.

L'avocat de l'appelant a renvoyé précisément à quatre décisions rendues par la Commission du tarif. Il a soutenu que, pour déterminer si le triporteur Rascal était d'une classe ou d'une espèce non faite au Canada, le Tribunal devait se pencher 1) sur la question d'établir si cet appareil possède une propriété unique découlant de sa conception, tel que discuté dans l'affaire Billiton - Canada Ltd. c. Le sous - ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [5] , 2) sur la question d'établir si cet appareil remplit la même fonction de la même manière que les marchandises fabriquées au Canada, tel que discuté dans l'affaire Golden Boy Sales of Alberta Ltd. c. Le sous - ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [6] , et 3) sur la question d'établir si les caractéristiques essentielles du triporteur Rascal diffèrent de celles des marchandises fabriquées au Canada, tel que discuté dans l'affaire Canadian Canners Limited c. Le sous - ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [7] .

L'avocat de l'appelant a prétendu que la décision du Tribunal doit surtout s'inspirer des conclusions rendues par la Commission du tarif dans l'affaire Aisco selon lesquelles un triporteur importé a été jugé d'une classe ou d'une espèce non faite au Canada parce que ses caractéristiques relatives au poids, à la puissance, à la traction et, plus précisément, à sa capacité au gravissement, le distinguaient des triporteurs fabriqués au Canada.

De l'avis de l'avocat de l'appelant, le triporteur Rascal satisfait à tous les critères lui permettant d'être considéré comme un triporteur d'une classe ou d'une espèce non faite au Canada. Il a prétendu que le triporteur Rascal pr 9‚sente une fonction entièrement nouvelle pour la mobilité intérieure dans des espaces restreints, comme en font foi les déclarations de Mme Kissick dans son rapport et à l'audience, déclarations qui ont été retenues par M. Elder et adoptées dans le cadre du PAAF. L'avocat a prétendu que le brevet est un élément de preuve important qui atteste du caractère unique de la conception du triporteur Rascal. En ce qui a trait à la capacité de charge du triporteur Rascal, il a reporté le Tribunal aux observations formulées par M. Elder selon lesquelles il ne connaissait pas de triporteur fabriqué au Canada qui puisse répondre aux besoins spéciaux d'utilisateurs lourds comme M. Brown, et à l'élément de preuve présenté par M. Flowers concernant la durabilité accrue du cadre moulé sous pression du triporteur Rascal.

L'avocat de l'intimé a soutenu que le triporteur Rascal fait partie d'une catégorie comprenant tous les triporteurs fabriqués au Canada et qu'aucune de ses caractéristiques, notamment l'élément de conversion et sa capacité de charge, ne suffisent pour qu'il soit considéré comme faisant partie d'une classe ou d'une espèce différente de la classe générale des triporteurs. Il a prétendu que la décision rendue par la Commission du tarif dans l'affaire McClellan Derkoch Enterprises Inc. et al. c. Le sous - ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [8] relative à des fauteuils roulants était plus utile que celle rendue dans l'affaire Aisco. Dans la décision précitée, il a été établi que les roues, les jantes de manoeuvre, les sièges, les roulettes et les pneus de différentes dimensions que l'on peut se procurer ne faisaient pas qu'un certain fauteuil roulant était considéré comme appartenant à une classe ou à une espèce non faite au Canada. Il a prétendu que les différences entre le triporteur Rascal et les triporteurs fabriqués au Canada sont semblables à celles abordées dans l'affaire McClellan et qu'en conséquence, le Tribunal doit, par analogie, conclure que le triporteur Rascal n'appartient pas à une classe ni à une espèce non faite au Canada. En présumant que la classe ou l'espèce comprend tous les triporteurs, l'avocat a soutenu que le critère concernant les quantités importantes est satisfait car, comme l'a indiqué M. Teskey, les triporteurs fabriqués au Canada représentent beaucoup plus que 10 p. 100 du marché canadien de triporteurs.

Après avoir examiné les éléments de preuve et tenu compte des arguments présentés, le Tribunal conclut que le triporteur Rascal est d'une classe ou d'une espèce non faite au Canada et que, par conséquent, le présent appel doit être admis. Le triporteur Rascal est muni d'un élément qui permet de le convertir d'un appareil à trois roues en un appareil à quatre roues, caractéristique que ne présente aucun triporteur vendu sur le marché canadien. Le Tribunal conclut que l'élément de conversion breveté est une caractéristique de conception unique qui offre aux utilisateurs les avantages d'un triporteur à trois roues classique, comme ceux fabriqués au Canada, ainsi que ceux d'un triporteur à quatre roues qui, en raison de sa conception, offre une manoeuvrabilité supérieure dans les espaces restreints à celle des triporteurs fabriqués au Canada. Il est également ressorti des éléments de preuve présentés que le triporteur Rascal offre un choix différent au consommateur canadien. Le concept des «deux véhicules en un» permet à l'utilisateur qui a acheté le triporteur Rascal muni de l'élément de conversion de jouir d'une plus grande manoeuvrabilité à l'intérieur tout en étant en mesure d'obtenir un rendement à l'extérieur qui est comparable à celui des triporteurs à trois roues fabriqués au Canada. Les éléments de preuve dont a été saisi le Tribunal ont montré qu'aucun triporteur fabriqué au Canada n'était aussi facile à manoeuvrer à l'intérieur que le triporteur Rascal.

Que le triporteur Rascal soit importé dans le modèle à trois roues ou à quatre roues ou à la fois avec le train avant à une roue et à deux roues, il appartient à une classe ou à une espèce non faite au Canada en raison de sa conception unique qui permet de le convertir d'un appareil à trois roues en un appareil à quatre roues, caractéristique que ne possède aucun autre triporteur fabriqué au Canada. Étant donné qu'aucun autre triporteur fabriqué au Canada ne possède cet élément de conversion, il n'existe aucun triporteur qui appartienne à la même classe ou espèce que celle du triporteur Rascal et, par conséquent, il n'existe pas de quantités importantes de triporteurs de la même classe ou espèce que celle du triporteur Rascal fabriqué au Canada.

Le Tribunal ne partage pas l'avis selon lequel le triporteur Rascal dans le modèle à quatre roues devrait être comparé à un fauteuil roulant électrique. Plusieurs témoins ont traité des différences entre le modèle à quatre roues du triporteur Rascal et un fauteuil roulant électrique et ont laissé entendre que ces deux appareils ont des applications différentes. Le fauteuil roulant électrique est conçu pour des utilisateurs qui ont une moins grande mobilité, qui ont des exigences particulières quant au siège ou qui doivent utiliser un dispositif spécial pour faire fonctionner l'appareil, par exemple, un mécanisme actionné par la bouche. De plus, il est évident que les fauteuils roulants électriques appartiennent à une classe différente de marchandises.

Par conséquent, l'appel est admis.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2 e suppl.).

2. L.R.C. (1985), ch. 41 (3 e suppl.).

3. DORS/88-81, le 31 décembre 1987, Gazette du Canada Partie II, vol. 122, n o 2 à la p. 843.

4. (1987), 12 R.C.T. 247.

5. (1984), 9 R.C.T. 297.

6. (1984), 9 R.C.T. 217.

7. (1988), 13 R.C.T. 104.

8. (1984), 9 R.C.T. 249.


Publication initiale : le 5 juin 1997