BARRY RODKO GOLDSMITHS LTD.

Décisions


BARRY RODKO GOLDSMITHS LTD.
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-92-277

TABLE DES MATIERES

Ottawa, le vendredi 10 mars 1995

Appel n o AP - 92-277

EU ÉGARD À un appel entendu le 25 octobre 1994 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 31 décembre 1991 concernant un avis d'opposition signifié aux termes de l'article 81.17 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

BARRY RODKO GOLDSMITHS LTD. Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis en partie.


Charles A. Gracey ______ Charles A. Gracey Membre présidant

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre

Lyle M. Russell ______ Lyle M. Russell Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





L'appelant fabrique, répare et vend des articles de bijouterie à partir de son inventaire de pierres précieuses et semi - précieuses, d'attaches et de fermoirs. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l'appelant a droit à un remboursement de la taxe de vente fédérale à l'inventaire. Plus précisément, le Tribunal doit déterminer si les marchandises en question sont admissibles à titre de marchandises libérées de taxe figurant à l'inventaire le 1 er janvier 1991 et destinées à la fourniture taxable par vente à d'autres dans le cours normal de l'entreprise de l'appelant.

DÉCISION : L'appel est admis en partie. De l'avis du Tribunal, seuls les articles de bijouterie qui ont été vendus aux clients de l'appelant dans l'état où ils ont été acquis étaient destinés à la vente séparément à d'autres dans le cours normal de l'entreprise de l'appelant et, à ce titre, sont admissibles à un remboursement de la taxe de vente fédérale à l'inventaire. Les éléments de preuve montrent que ces ventes représentent environ 10 p. 100 des activités de l'appelant. Le Tribunal conclut donc que l'appelant a droit à 10 p. 100 du montant réclamé dans sa demande de remboursement.

Lieu de l'audience : Saskatoon (Saskatchewan) Date de l'audience : Le 25 octobre 1994 Date de la décision : Le 10 mars 1995
Membres du Tribunal : Charles. A. Gracey, membre présidant Arthur B. Trudeau, membre Lyle M. Russell, membre
Avocat pour le Tribunal : Hugh J. Cheetham
Greffier : Anne Jamieson
Ont comparu : Barry Rodko, pour l'appelant Christopher Rupar, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi) à l'égard d'une détermination du ministre du Revenu national (le Ministre) qui a eu pour effet de rejeter la demande de remboursement de la taxe de vente fédérale (TVF) à l'inventaire faite par l'appelant aux termes de l'article 120 de la Loi [2] .

L'appelant fabrique, répare et vend des articles de bijouterie. Aux termes du régime de la TVF, l'appelant a acheté les marchandises à son inventaire, consistant en pierres précieuses et semi-précieuses, en attaches et fermoirs, en colliers, etc., à l'acquittée. Le fait que la TVF a été payée au moment de l'achat n'est pas un point en litige dans le présent appel.

Le 28 février 1991, l'appelant a demandé le remboursement de 5 256,43 $ au titre de la TVF à l'inventaire relativement aux marchandises figurant à son inventaire le 1er janvier 1991. Sur le montant réclamé, 553,10 $ ont été admis, mais le solde de 4 703,33 $ a été refusé pour le motif que les marchandises figurant à l'inventaire étaient destinées par l'appelant à un complément d'ouvraison.

La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l'appelant a droit à un remboursement de la TVF à l'inventaire. Plus précisément, le Tribunal doit déterminer si les marchandises en question sont admissibles à titre de marchandises libérées de taxe figurant à l'inventaire le 1er janvier 1991 et destinées à la fourniture taxable par vente à d'autres dans le cours normal de l'entreprise de l'appelant.

Par suite de récentes modifications à la Loi, le terme «inventaire» est défini, en partie, comme suit :

120.(1) Les définitions qui suivent s'appliquent au présent article.

«inventaire» État descriptif des marchandises libérées de taxe d'une personne à un moment donné qui figurent à l'inventaire de la personne au Canada à ce moment et qui, à ce même moment, selon le cas :

a) sont destinées à être vendues ou louées séparément pour un prix ou un loyer en argent, dans le cours normal d'une activité commerciale de la personne.

En outre, le paragraphe 120(2.1) de la Loi limite encore la définition du terme «inventaire» de la façon suivante :

(2.1) Pour l'application de l'alinéa a) de la définition de «inventaire» au paragraphe (1), la partie des marchandises libérées de taxe qui figurent à l'inventaire d'une personne au Canada à un moment donné qui sera vraisemblablement consommée ou utilisée par la personne est réputée ne pas être destinée, à ce moment, à la vente ou à la location.

L'appelant était représenté par son président, M. Barry Rodko, qui a témoigné en faveur de l'appelant. M. Rodko a déclarE9‚ qu'avant l'adoption de la taxe sur les produits et services, il avait prévu accroître les activités de fabrication de l'appelant et avait demandé une licence de fabricant. Il a également déclaré que son comptable l'avait informé que, sans licence de fabricant, l'appelant pourrait avoir des difficultés à obtenir un remboursement de la TVF à l'inventaire.

En dépit des efforts de M. Rodko, l'appelant n'a pas obtenu de licence de fabricant pour le motif qu'il était un détaillant et non un fabricant. M. Rodko a déclaré qu'il trouvait étrange que, puisque l'appelant n'était pas considéré comme un fabricant lorsqu'il a demandé une licence de fabricant, sa demande de remboursement de la TVF à l'inventaire avait été rejetée pour le motif que les marchandises figurant à l'inventaire étaient destinées à un complément d'ouvraison.

Au cours de son témoignage, M. Rodko a entrepris de décrire la nature des activités de l'appelant et, en particulier, l'utilisation des marchandises figurant à son inventaire. Il ressort de ce témoignage et des réponses de M. Rodko à des questions du Tribunal que les activités de l'appelant consistent en ce qui suit :

1) la réparation de bijoux, qui est son activité la plus importante, et qui consiste à recevoir des articles de bijouterie d'autres joailliers et à les réparer. L'appelant effectue ces réparations en déposant les pièces endommagées et en les remplaçant par des pièces neuves provenant de son stock de pierres, d'attaches et de fermoirs;

2) le façonnement ou la fabrication de nouveaux articles de bijouterie par combinaison de différents éléments provenant de son inventaire libéré de taxe;

3) la vente au détail de marchandises figurant à son inventaire en leur état d'acquisition. En d'autres termes, les marchandises sont vendues «telles quelles» et ne font pas l'objet d'un complément d'ouvraison de la part de l'appelant.

En réponse à d'autres questions du Tribunal, M. Rodko a déclaré que 65 p. 100 des activités de l'appelant entrent dans la catégorie de la réparation, 25 p. 100 dans celle de la fabrication de nouveaux bijoux au moyen des marchandises figurant à son inventaire, et les 10 p. 100 restants dans celle de la vente de marchandises figurant à son inventaire dans leur état d'origine, c'est-à-dire dans l'état où elles ont été acquises. M. Rodko n'a pas produit de ventilation détaillée de la cession des pièces figurant à son inventaire pour justifier cette distribution.

L'avocat de l'intimé a soutenu que l'appelant ne s'était pas vu accorder de licence de fabricant parce qu'il exploitait un point de vente au détail qui n'était pas matériellement séparé des locaux où il exerçait ses activités de fabrication. En outre, l'avocat a plaidé que la question de l'octroi d'une licence était laissée à la discrétion du Ministre et que, de toute façon, des motifs avaient été donnés à l'appelant relativement au rejet de sa demande de licence.

L'avocat de l'intimé a fait valoir que les marchandises figurant à l'inventaire pour lesquelles l'appelant demandait un remboursement de la TVF à l'inventaire ne pouvaient être considérées comme figurant «à l'inventaire» au sens de l'article 120 de la Loi que si elles étaient vendues «telles quelles». Il a également soutenu que l'aspect «réparation» des activités commerciales de l'appelant doit être traité de la même manière que l'aspect «fabrication» parce que les marchandises qui servent à la réparation d'un article de bijouterie particulier quittent les locaux commerciaux de l'appelant sous une forme différente de celle sous laquelle elles sont entrées dans l'inventaire de l'appelant. Pour ce qui est des modifications à la Loi qui influent sur la présente cause, l'avocat a renvoyé le Tribunal aux observations qu'il a faites dans deux décisions antérieures [3] .

Quoique le Tribunal comprenne les préoccupations de l'appelant concernant le rejet de sa demande de licence de fabricant, cette question ne se rapporte pas directement à la question que doit trancher le Tribunal. Pour ce qui est de l'opinion de l'appelant selon laquelle la décision de l'intimé de ne pas lui accorder de licence de fabricant est incompatible avec la position de l'intimé selon laquelle les marchandises figurant à son inventaire sont destinées à un complément d'ouvraison, le Tribunal fait remarquer que les petits fabricants n'étaient pas tenus d'obtenir une licence de fabricant et que l'octroi d'une licence était, dans tous les cas, assujetti à certaines conditions (en particulier dans le cas des fabricants de bijoux qui vendaient également des marchandises au détail), et que cela n'a pas non plus directement trait à la question qui consiste à déterminer si des marchandises destinées à un complément d'ouvraison au sens de l'article 120 de la Loi figurent à l'inventaire d'un fabricant.

Le Tribunal accepte la ventilation faite par l'appelant de ses activités en trois grandes catégories, soit 1) la réparation de bijoux, 2) la fabrication de bijoux et 3) la vente directe d'articles de bijouterie dans l'état où ils ont été acquis. Pour ce qui est de la question qui consiste à déterminer si certaines des marchandises figurant à l'inventaire de l'appelant dans chacune de ces catégories sont destinées à la vente séparément à d'autres dans le cours normal des activités commerciales de l'appelant, les éléments de preuve montrent que les marchandises figurant à l'inventaire qui entrent dans la première et dans la deuxième catégorie (c.-à-d. la réparation et la fabrication de nouveaux articles de bijouterie) sont destinées à un complément d'ouvraison, ce qui constitue une forme de fabrication. De fait, ce genre d'activité est expressément réputé être de la fabrication aux termes de l'article 43 de la Loi. Ainsi, ces marchandises ne peuvent être considérées comme étant destinées séparément à la vente «telles quelles», et cette partie de l'appel doit être rejetée.

Le Tribunal fait remarquer qu'avant les modifications à la Loi, le Tribunal avait, dans plusieurs causes, adopté la position selon laquelle le complément d'ouvraison de marchandises figurant à l'inventaire n 2'était pas pertinent pour ce qui est de la question du droit à un remboursement. Cependant, les modifications apportées à la Loi ont manifestement changé cette situation.

La question qu'il reste à trancher est celle des quelque 10 p. 100 des activités de l'appelant qui comportent la vente de marchandises figurant à l'inventaire «telles quelles». Cette partie de la demande de l'appelant doit de toute évidence être admise pour le motif que les marchandises étaient destinées séparément à la vente dans le cours normal des activités commerciales de l'appelant. Le Tribunal conclut donc que l'appelant a droit à 10 p. 100 du montant réclamé dans sa demande de remboursement.

Par conséquent, l'appel est admis en partie.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E - 15.

2. L.C. 1990, ch. 45, art. 12, modifiée par L.C. 1993, ch. 27, art. 6.

3. Jostens Canada Ltd. et Jostens du Québec Ltée c. Le ministre du Revenu national , appel n o AP - 92 - 195, le 28 avril 1994; et Harry M. Gruenberg, la Cie. Synoda Co. c. Le ministre du Revenu national , appel n o AP - 92 - 252, le 5 avril 1994.


Publication initiale : le 10 octobre 1996