LES HUILES IDÉAL INC.

Décisions


LES HUILES IDÉAL INC.
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-92-222

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le lundi 4 octobre 1999

Appel n o AP-92-222

EU ÉGARD À un appel entendu le 1er mars 1999 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. 1985, c. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 4 septembre 1992 concernant un avis d'opposition signifié aux termes de l'article 81.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

LES HUILES IDÉAL INC. Appelante

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté.


Pierre Gosselin ______ Pierre Gosselin Membre présidant

Raynald Guay ______ Raynald Guay Membre

Anita Szlazak ______ Anita Szlazak Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





La question en litige dans le présent appel se limite à savoir si l'appelante pouvait continuer d'utiliser l'Autre méthode de rendre compte de la taxe (l'Autre méthode) après le 1er juin 1985. L'intimé soumet que l'appelante a continué d'utiliser l'Autre méthode après le 1er juin 1985 et ce, jusqu'à la fin de la période de cotisation, ce qui ne lui était pas permis. L'appelante, au contraire, prétend qu'elle s'est dûment acquittée de son obligation fiscale en payant les taxes de vente et d'accise à ses fournisseurs lors de l'achat de produits pétroliers, ce que les agents de l'intimé l'ont autorisé à continuer à faire même après le 1er juin 1985.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Le Tribunal est d'avis que l'appelante n'a pas fait la preuve que la cotisation a été établie incorrectement. L'appelante admet qu'elle était redevable de la taxe en vertu de la Loi sur la taxe d'accise. Or, si l'appelante était redevable de la taxe en vertu de la Loi sur la taxe d'accise, le Tribunal n'est pas autorisé à en changer l'application. Les seuls motifs que l'appelante soulève à cet égard sont : qu'elle était autorisée à continuer d'appliquer l'Autre méthode après le 1er juin 1985; que des représentants du ministère du Revenu national l'ont, d'une part, mal informée de ses obligations fiscales après le 1er juin 1985 et, d'autre part, qu'ils ont refusé d'enquêter davantage lors de la vérification bien qu'ils savaient que l'appelante avait continué de payer la taxe à ses fournisseurs après cette date; qu'il est possible qu'il y ait double imposition si tous fournisseurs, ou certains de ces derniers, ont remis au ministère du Revenu national les montants ainsi payés par l'appelante; qu'un délai déraisonnable s'est écoulé entre le moment de son opposition à la cotisation et la date de la décision de l'intimé; que dans l'affaire Alpha Fuels c. Ministre du Revenu national, le Tribunal a accepté l'appel d'une cotisation vu qu'une méthode de remettre la taxe autre que celle prévue par la Loi sur la taxe d'accise avait été acceptée par le ministère du Revenu national; qu'il y a des doutes quant à l'équité dans la façon dont la cotisation a été établie. De l'avis du Tribunal aucun de ces arguments n'est déterminant.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 1 er mars 1999 Date de la décision : Le 4 octobre 1999
Tribunal : Pierre Gosselin, membre présidant Raynald Guay, membre Anita Szlazak, membre
Avocat pour le Tribunal : Gilles B. Legault
Greffier : Anne Turcotte
Ont comparu : Philippe H. Trudel, pour l'appelante Louis Sébastien, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.10 de la Loi sur la taxe d'accise [1] à l'égard d'une décision du Ministre du Revenu national relativement à un avis d'opposition signifié à l'endroit d'un avis de cotisation daté du 22 juillet 1987.

Le mémoire de l'appelante ainsi que l'avis de cotisation font état d'une somme totale réclamée de 178 201,86 $ pour la période du 1er septembre 1984 au 31 décembre 1986, soit 91 896,39 $ pour le non-paiement de la taxe de vente fédérale, 59 008,76 $ à titre de taxe d'accise impayée ainsi que 29 365,58 $ pour l'intérêt et la pénalité (un montant de 2 068,87 $ étant par ailleurs payable à l'appelante).

Au début de l'audience, une discussion s'est engagée à savoir quelle était exactement la nature de la question en litige dans le présent appel. Il serait long et fastidieux d'en faire état dans le présent document, d'autant plus que les parties se sont finalement entendues. Le Tribunal juge toutefois opportun de noter son étonnement qu'un dossier vieux de près de 15 ans n'ait pu faire l'objet d'une meilleure préparation afin d'éviter au Tribunal un débat inutile.

Somme toute, après accord des parties, la question en litige dans le présent appel se limite à déterminer si l'appelante pouvait continuer d'utiliser l'Autre méthode de rendre compte de la taxe (l'Autre méthode) après le 1er juin 1985 [2] . Dans son mémoire, l'intimé soumet que l'appelante a continué d'utiliser l'Autre méthode même après le 1er juin 1985 et ce, jusqu'à la fin de la période de cotisation, ce qui ne lui était pas permis. L'appelante, au contraire, prétend qu'elle s'est dûment acquittée de son obligation fiscale en payant les taxes de vente et d'accise lors de l'achat des produits pétroliers de ses fournisseurs et que les agents du ministère du Revenu national (Revenu Canada) l'ont autorisé à continuer d'utiliser l'Autre méthode.

À l'audience, le Tribunal a entendu le témoignage de M. Maurice Beaulieu, propriétaire-exploitant de la société Les Huiles Idéal Inc., une entreprise de distribution de produits prétroliers, notamment de l'essence et du diesel. M. Beaulieu a expliqué qu'il a été informé, dans une lettre du 15 juillet 1985 de Revenu Canada, que l'appelante ne pouvait plus utiliser l'Autre méthode de rendre compte de la taxe à compter de « 00h01 le 1er juin 1985 ». Toutefois, puisqu'il était entendu que les actifs de l'appelante seraient vendus le 30 novembre 1985, le témoin a expliqué qu'il avait demandé de continuer à rendre compte de la taxe de la même manière, soit en payant les taxes dues à l'achat directement de ses grossistes sur réception des chargements et en avait obtenu l'autorisation lors d'une conversation téléphonique avec un représentant de Revenu Canada. La vente de l'entreprise ayant été retardée jusqu'au printemps 1986, M. Beaulieu a rappelé Revenu Canada et un représentant lui aurait de nouveau confirmé de poursuivre de la même manière en autant que les montants de taxes payées soient indiqués sur les factures et correspondent aux chèques faits aux fournisseurs de l'appelante. La vente de l'entreprise ayant été retardée une fois de plus, M. Beaulieu a entrepris le même type de démarche et encore une fois, selon ses dires, on lui a confirmé qu'il pouvait continuer de payer les taxes dues de la même façon. Malgré ses demandes répétées, M. Beaulieu n'a jamais obtenu de confirmations écrites de ses interlocuteurs de Revenu Canada. Ce n'est qu'après une vérification des livres de l'appelante par Revenu Canada que M. Beaulieu a été informé que les fournisseurs de l'appelante n'avaient pas remis les montants payés comme taxes sur les factures.

Le Tribunal a, par ailleurs, entendu le témoignage d'un représentant de Revenu Canada, M. Marcel Bouthillier, qui, bien que n'ayant pas effectué lui-même la vérification des livres de l'appelante, avait pris connaissance du dossier de vérification. Il ressort du témoignage de M. Bouthillier que le principal changement apporté le 1er juin 1985 était que le prix de vente des produits pétroliers n'avait plus d'importance, la taxe devenant exigible en fonction de la quantité vendue selon un taux en vigueur. En somme, selon M. Bouthillier, la nouvelle politique de Revenu Canada avait pour objectif de mettre fin à l'ambiguïté de l'Autre méthode, laquelle permettait aux entreprises de payer les taxes à l'achat ou au moment de la vente, l'ambiguïté résidant dans le fait que le montant de taxe à verser différait selon qu'elle était remise sur le prix d'achat par le détaillant ou sur le prix de vente aux consommateurs. Selon la nouvelle directive, les détaillants comme l'appelante devaient obtenir une licence de vendeur de produits pétroliers leur permettant, d'une part, d'acheter ces produits en franchise de taxe puis, d'autre part, de l'imposer lors de la vente pour éventuellement la remettre à Revenu Canada. Pour M. Bouthillier, cette nouvelle façon de calculer la taxe éliminait donc l'Autre méthode comme moyen de rendre compte de la taxe. Selon M. Bouthillier, l'expression « ce choix [pour parler de l'Autre méthode] de comptabiliser la taxe ne sera plus nécessaire », qui est contenue dans le Communiqué de l'Accise [3] du 23 mai 1985 ainsi que dans la lettre du 15 juillet 1985 de Revenu Canada, signifie tout simplement qu'il n'y avait plus de choix à faire puisque la taxe devenait due uniquement à partir de la vente par le détenteur de licence de vendeur de produits pétroliers. Ces changements étaient aussi bien indiqués dans l'avis de voies et moyens du gouvernement à l'époque que dans le budget qui s'y rattachait. En conséquence, la cotisation de l'appelante a été établie sur la quantité de produits pétroliers vendus dont le total a été pris à même ses factures de ventes.

En fait, selon M. Bouthillier, le tableau de vérification produit à l'onglet 4 du mémoire de l'intimé illustre, pour la période de cotisation, la taxe de ventes fédérales et la taxe d'accise qui étaient redevables, les remises effectuées par l'appelante et la différence à payer dans les deux cas, soit 89 738,39 $ pour la taxe de vente fédérale et 59 008,76 $ pour la taxe d'accise. M. Bouthillier a précisé, notamment, que ces deux montants se rapportaient aux ventes effectuées à compter du 1er juin 1985, le reste de la cotisation ne s'appliquant que pour la période allant du 1er septembre 1984 au 31 mai 1985 et ne couvrant que des ventes de diesel coloré, pour lesquelles l'intimé a d'ailleurs accordé une ristourne pour ventes à des agriculteurs détenteurs d'un permis d'achat en vrac. De plus, M. Bouthillier a précisé que seules les remises faites par l'appelante ont été considérées. Il n'a pas été tenu compte des remises qu'auraient pu faire les fournisseurs de l'appelante et, à cet égard, M. Bouthillier a noté qu'il aurait été possible pour cette dernière de récupérer ces sommes, soit en faisant une réclamation à Revenu Canada soit en demandant à ses fournisseurs de les lui rembourser. M. Bouthillier a admis en contre-interrogatoire qu'il est possible qu'un fournisseur ait remis la taxe à Revenu Canada, auquel cas la taxe pourrait se trouver à être remise deux fois si le Tribunal est d'avis que la cotisation est bien fondée. M. Bouthillier a aussi précisé qu'il pouvait toujours y avoir, après le 1er juin 1985 d'autres méthodes de remise de taxes qui soient similaires à ce que l'Autre méthode prévoyait, mais pour des secteurs d'activités commerciales différents.

L'avocat de l'appelante a prétendu, sur la foi du témoignage de M. Bouthillier et des documents soumis à l'appui du mémoire de l'intimé, qu'il était toujours possible pour l'appelante de rendre compte de la taxe en utilisant l'Autre méthode après le 1er juin 1985. D'ailleurs, selon l'avocat, les représentants de Revenu Canada ont eux-mêmes avisé à plusieurs reprises M. Beaulieu que l'appelante pouvait continuer d'utiliser l'Autre méthode jusqu'à la vente définitive de l'entreprise. De plus, bien que les représentants de Revenu Canada connaissaient la situation de l'appelante au moment de la vérification, ils ont quand même décidé de ne pas poursuivre leur enquête, notamment quant aux paiements de la taxe que celle-ci avait faits à ses fournisseurs. L'avocat a ajouté que, si la cotisation est maintenue, il est possible que des taxes puissent être perçues en double si l'on accepte que des fournisseurs de l'appelante peuvent avoir remis à Revenu Canada la taxe que l'appelante leur avait payée lors de ses achats de produits pétroliers. L'avocat a aussi souligné qu'il n'y pas d'interdiction dans la Loi sur l'utilisation de l'Autre méthode et, en fait, qu'il serait surprenant qu'il y en ait une puisque cette façon de remettre la taxe relevait d'une concession administrative. Or, le législateur ne viendrait pas interdire l'utilisation d'une concession administrative par une modification à la Loi. De plus, l'avocat a prétendu qu'un délai déraisonnable s'était écoulé entre le moment de la cotisation et de l'opposition et la date de la décision de l'intimé. Enfin, s'appuyant sur la décision du Tribunal dans l'affaire Alpha Fuels c.Ministre du Revenu national [4] , l'avocat a prétendu que le Tribunal avait accepté l'appel d'une cotisation puisqu'une méthode de remettre la taxe autre que celle prévue par la Loi avait été acceptée par Revenu Canada. L'avocat, enfin, a soulevé la question d'équité, soulignant que la façon dont avait été établie la cotisation était, à cet égard, discutable.

De son côté, l'avocat de l'intimé a souligné que la cotisation se passe de commentaires et qu'elle est présumée valide tant que le Tribunal n'a pas été convaincu du contraire. L'avocat de l'intimé a admis que le texte de la Loi en vertu duquel la cotisation a été établie n'a pas été déposé devant le Tribunal et que cela pouvait poser un problème. Il a toutefois ajouté que, compte tenu du Communiqué de l'accise, on peut comprendre pourquoi la politique a changé soudainement. À cet égard, l'avocat s'est appuyé sur le témoignage de son témoin, M. Bouthillier, qui a expliqué qu'il n'était plus « nécessaire » d'utiliser l'Autre méthode à compter du 1er juin 1985 puisque la taxe était dorénavant imposée sur les quantités. De plus, l'avocat a prétendu que ce changement découle de ce qui est clairement prévu dans la Loi. Selon l'avocat, l'appelante a été informée de ces changements. Quant aux prétentions de l'appelante, qui affirme avoir été mal informée par des représentants de Revenu Canada, l'avocat s'est appuyé sur la décision du Tribunal dans l'affaire Walbern Agri-Systems c. Ministre du Revenu national [5] où le Tribunal a conclu, en se fondant sur la décision de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Joseph Granger c. Commission de l'emploi et de l'immigration [6] , qu'il est un principe de droit bien établi que « [l]e fait d'être mal renseigné par un fonctionnaire du Ministère n'est pas une excuse et ne justifie pas le non-paiement de la taxe » [7] . Enfin, l'avocat a souligné que le Tribunal ne pouvait appliquer des principes d'équité et que Revenu Canada n'avait aucunement à enquêter sur les paiements de taxes faits par l'appelante à ses fournisseurs.

Dans l'ensemble, le Tribunal est d'accord avec la position de l'intimé et est d'avis que l'appel doit être rejeté. Par contre, il est heureux pour l'intimé que l'appelante ait admis avoir l'obligation d'acquitter les taxes de vente et d'accise conformément aux paragraphes 23(1) et 50(1) de la Loi, car, comme l'avocat de l'intimé l'a admis, il n'a pas communiqué au Tribunal les dispositions législatives invoquées contrairement u sous-alinéa 35(2)(iv) des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur [8] . Bien que, en vertu de la Loi sur la preuve au Canada [9] , les lois fédérales sont admises d'office sans qu'elles ne soient spécialement plaidées, c'est une chose de citer de façon générale des dispositions législatives sans les communiquer, c'en est une toute autre de référer à l'avis des voies et moyens du gouvernement, au budget du ministre des Finances et à des documents administratifs tels que les Nouvelles de l'Accise et les Communiqués de l'Accise. En effet, c'est le texte de loi qui s'impose. Cela est d'autant plus vrai dans une affaire où essentiellement ce qui est reproché au contribuable, c'est d'avoir continué à utiliser une méthode de remise de la taxe pourtant permise administrativement jusqu'à ce que l'annonce d'amendements éventuels à la Loi viennent changer la façon de faire. Le Tribunal note à cet égard que ces amendements à la Loi n'ont été sanctionnés qu'en mars 1986 [10] , avec effet rétroactif au 1er juin 1985 pour la taxe de vente et au 3 septembre 1985 pour la taxe d'accise. Il semble donc que l'application de l'Autre méthode a cessé administrativement près de 9 mois avant l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions législatives et ce, en fonction de ce que le gouvernement avait annoncé dans ses documents budgétaires..

Ceci étant dit, le Tribunal est d'avis que l'appelante n'a pas fait la preuve que la cotisation a été établie incorrectement. L'appelante, en effet, admet qu'elle était redevable de la taxe en vertu de la Loi. Elle ne conteste pas non plus que la taxe de vente fédérale sur l'essence et le diesel est devenue imposable sur la base de la quantité vendue après le 1er juin 1985 [11] . Or, si l'appelante est redevable de la taxe en vertu de la Loi, le Tribunal n'est pas autorisé à en changer l'application [12] .

Les seuls motifs que l'appelante soulève à cet égard sont : qu'elle était autorisée à continuer d'appliquer l'Autre méthode après le 1er juin 1985; que des représentants de Revenu Canada l'ont, d'une part, mal informée de ses obligations fiscales après le 1er juin 1985 et, d'autre part, qu'ils ont refusé d'enquêter davantage lors de la vérification bien qu'ils savaient que l'appelante avait continué de payer la taxe à ses fournisseurs après cette date; qu'il est possible qu'il y ait double imposition si tous les fournisseurs, ou certains de ces derniers, ont remis à Revenu Canada les montants ainsi payés par l'appelante; qu'un délai déraisonnable s'est écoulé entre le moment de son opposition à la cotisation et la date de la décision de l'intimé; que, dans l'affaire Alpha Fuels, le Tribunal a accepté l'appel d'une cotisation vu qu'une méthode de remettre la taxe autre que celle prévue par la Loi avait été acceptée par Revenu Canada; et, enfin, qu'il y a des doutes quant à l'équité dans la façon dont la cotisation a été établie.

De l'avis du Tribunal, aucun de ces arguments n'est déterminant. Relativement à l'obligation fiscale de l'appelante, le Tribunal rappelle que, dans l'affaire Walbern Agri-Systems citée par l'intimé, l'appelante, bien qu'ayant admis sa responsabilité fiscale, soutenait qu'elle devait être exonérée du montant de taxe exigé parce que les fonctionnaires de Revenu Canada l'avaient mal informée sur l'assujettissement à la taxe et parce qu'elle n'avait pas reçu le numéro de Nouvelles de l'Accise annonçant les changements apportés à l'application de la taxe de vente par suite de modifications à la Loi. Or, le Tribunal a conclu dans cette affaire que le fait qu'un contribuable est mal renseigné par un fonctionnaire de Revenu Canada ne justifie pas le non-paiement de la taxe.

Le Tribunal note également, même si ce n'est pas nécessaire pour trancher la question compte tenu de la décision citée dans l'affaire Walbern Agri-Systems, qu'il n'y a aucune preuve indépendante au dossier pouvant corroborer le témoignage de M. Beaulieu. De plus, bien qu'il soit possible d'envisager que certains fonctionnaires à qui M. Beaulieu a parlé l'aient informé qu'il pouvait continuer à remettre la taxe comme il le faisait pour une courte période de temps, compte tenu que la vente de son entreprise semblait imminente et que la Loi n'avait pas encore été amendée au moment où ces conversations auraient été tenues, il demeure que l'appelante n'a pas été en mesure de démontrer que la cotisation n'a pas été établie conformément à la Loi rétroactive lors de vérification effectuée en 1987, soit après son entrée en vigueur en mars 1986.

Quant à l'obligation légale qu'auraient eue les représentants de Revenu Canada de vérifier auprès des fournisseurs de l'appelante si ces derniers avaient remis à Revenu Canada les montants payés par l'appelante à titre de taxes sur leurs livraisons de produits pétroliers, le Tribunal n'en voit malheureusement aucune. Cet argument, selon le Tribunal, rejoint l'autre argument qu'a fait l'avocat de l'appelante à l'effet qu'il y a des doutes quant à l'équité entourant l'établissement de la cotisation. Encore là, la Loi ne contient pas d'obligation légale en matière d'équité susceptible d'être examinée par le Tribunal dans le cadre d'un appel en vertu de la Loi. Le Tribunal n'a pas non plus le pouvoir d'appliquer des principes d'équité. Comme il l'a souligné dans l'affaire Walbern Agri-Systems « [l]e Tribunal n'est pas autorisé à faire valoir le principe d'équité ni à accepter des considérations humanitaires » [13] dans le règlement de ces appels. Le Tribunal fait d'ailleurs remarquer que, dans l'affaire Alpha Fuels cité par l'avocat de l'appelante, le Tribunal s'est d'abord clairement prononcé sur le mérite de l'appel en disposant de l'affaire avant de discuter plus librement des principes d'équité [14] . Enfin, quant à la décision du Tribunal sur le bien-fondé de l'affaire Alpha Fuels et son application au présent cas, le Tribunal note que, dans Alpha Fuels, la période de cotisation était différente et donc que les dispositions de la Loi qui étaient applicables étaient aussi différentes de celles applicables dans le présent appel, du moins pour une bonne partie de la période de cotisation. Le Tribunal note également que, dans Alpha Fuels, la question de l'utilisation d'une autre méthode de rendre compte de la taxe n'a jamais été mise en doute alors que, en l'espèce, l'appelante a bel et bien été informée des changements à la politique administrative même si elle en a été prétendument avisée différemment lors d'entretiens téléphoniques.

Enfin, quant à l'argument de la double-imposition, le Tribunal note que, comme dans l'affaire Pétroles J. & G. Gauthier c. Ministre du Revenu national [15] , l'appelante n'a présenté aucun élément de preuve quant à la double imposition alléguée. Le fait que le témoin de l'intimé ait admis qu'il est possible que certains fournisseurs de l'appelante puissent avoir remis à Revenu Canada des montants au titre de la « taxe » payée par l'appelante à ces derniers lors de l'achat de produits pétroliers ne constitue pas une preuve en soi que des sommes ont ainsi été versées et que la cotisation conduit en tout ou en partie à une double imposition.

Le Tribunal note finalement que, dans son mémoire, l'avocat de l'appelante a demandé au Tribunal, à titre de solution de rechange, que la pénalité et les intérêts à payer soient modifiés compte tenu que les dispositions législatives à la base de la cotisation sont entrées en vigueur en 1986. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut qu'il n'existe aucune base législative pour faire droit à cette demande.

Pour toutes ces raisons, l'appel est rejeté.





Ottawa, le vendredi 29 octobre 1999

Appel n o AP-92-222

EU ÉGARD À un appel entendu le 1er mars 1999 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. 1985, c. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 4 septembre 1992 concernant un avis d'opposition signifié aux termes de l'article 81.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

LES HUILES IDÉAL INC. Appelante

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

Dans les motifs de la décision, dans le premier paragraphe à la page 1, l'article de la Loi sur la taxe d'accise doit se lire « l'article 81.19 ».

Dans le premier paragraphe à la page 4, le sous-alinéa des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur doit se lire « sous-alinéa 35(2)(b)(iv) ».

La note 7 doit se référer à la note 5 à la page 5, la note 13 doit se référer à la note 5 et la note 14 doit se référer à la note 4.

Le présent corrigendum ne s'applique qu'à la version française des motifs de la décision puisque la version anglaise incorporera ces modifications lors de la publication.

Par ordre du Tribunal,


Michel P. Granger

Secrétaire du Tribunal


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), c. E-15 [ci-après Loi].

2. Transcription de l’audience publique (AP-92-222), aux p. 23 à 25.

3. Ministère du Revenu national, Douanes et Accise à la p. 4.

4. (Le 6 avril 1992), AP-89-264 (T.C.C.E.) [ci-après Alpha Fuels].

5. (Le 21 décembre 1989), 3000, (T.C.C.E.) [ci-après Warlbern Agri-Systems].

6. [1986] 3 C.F. 70 [ci-après Joseph Granger].

7. Supra note 4 à la p. 6.

8. D.O.R.S./91-499.

9. L.R.C. 1985, c. C-5, art. 18.

10. L.C. 1996, c. 9, art. 16 et paragr. 48(1), 48(3), 50(1) et 50(2).

11. Le Tribunal note que, selon toute apparence, la taxe d'accise sur l'essence était déjà imposable sur le litre d'essence avant le 1er juin 1985.

12. Esselte Pendaflex Canada c. Ministre du Revenu national, (le 9 août 1993) AP-91-187 (T.C.C.E.) à la p. 3.

13. Supra note 4 à la p. 1.

14. Supra note 3 à la p. 7.

15. (Le 17 mars 1992), 2970 (T.C.C.E.) à la p. 2.


Publication initiale : le 1 novembre 1999