THE KINGSTON BREWING COMPANY LIMITED

Décisions


THE KINGSTON BREWING COMPANY LIMITED
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-93-073

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le lundi 7 mars 1994

Appel n o AP-93-073

EU ÉGARD À un appel entendu le 22 novembre 1993 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 11 mars 1993 concernant un avis d'opposition signifié aux termes de l'article 81.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

THE KINGSTON BREWING COMPANY LIMITED Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis en partie. Le Tribunal renvoit la cotisation au ministre du Revenu national pour qu'il ajuste les montants de la taxe de vente fédérale, de la pénalité et des intérêts exigibles.

Kathleen E. Macmillan ______ Kathleen E. Macmillan Membre présidant

W. Roy Hines ______ W. Roy Hines Membre

Robert C. Coates, c.r. ______ Robert C. Coates, c.r. Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise à l'égard d'une cotisation établie par le ministre du Revenu national pour la période allant du 1 er janvier 1988 au 31 décembre 1990. Une cotisation d'un montant de 19 960,24 $ pour les taxes impayées, de 4 001,86 $ pour la pénalité et de 7 446,75 $ pour les intérêts a été établie à l'égard de l'appelant parce que ses ventes ont dépassé 50 000 $ pour chacune des années en cause, l'assujettissant ainsi au paiement de la taxe de vente fédérale. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l'appelant, un petit pub - brasserie qui brasse de la bière pression vendue et consommée sur place, est exempté du paiement de la taxe de vente fédérale en application de l'article 50 de la Loi sur la taxe d'accise, en qualité de «petit fabricant», conformément à l'article 2 du Règlement exemptant certains petits fabricants ou producteurs de la taxe de consommation ou de vente.

DÉCISION : L'appel est admis en partie. La valeur de la bière pression vendue par l'appelant à ses clients dans ses locaux a dépassé 50 000 $ pour chacune des années 1988, 1989 et 1990. Par conséquent, l'appelant n'était pas exempté du paiement de la taxe de vente fédérale aux termes de l'article 2 du Règlement exemptant certains petits fabricants ou producteurs de la taxe de consommation ou de vente. Le Tribunal renvoit la cotisation au ministre du Revenu national afin qu'il ajuste les montants de la taxe de vente fédérale, de la pénalité et des intérêts exigibles conformément au paragraphe 81.11(2) de la Loi sur la taxe d'accise, qui prévoit que «l'établissement des cotisations à l'égard d'une taxe, d'une pénalité, d'intérêts ou d'une autre somme se prescrit par quatre ans après que la taxe, la pénalité, les intérêts ou la somme sont devenus exigibles en application de la présente loi».

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 22 novembre 1993 Date de la décision : Le 7 mars 1994
Membres du Tribunal : Kathleen E. Macmillan, membre présidant W. Roy Hines, membre Robert C. Coates, c.r., membre
Avocat pour le Tribunal : Shelley Rowe
Greffier : Anne Jamieson
Ont comparu : Paul L. Debenham, pour l'appelant James Stringham, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi) à l'égard d'une cotisation établie par le ministre du Revenu national (le Ministre), le 19 février 1992, pour la période allant du 1er janvier 1988 au 31 décembre 1990. Une cotisation d'un montant de 19 960,24 $ pour les taxes impayées, de 4 001,86 $ pour la pénalité et de 7 446,75 $ pour les intérêts a été établie à l'égard de l'appelant parce que ses ventes ont dépassé 50 000 $ pour chacune des années en cause, l'assujettissant ainsi au paiement de la taxe de vente fédérale (TVF). La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l'appelant, un petit pub-brasserie qui brasse de la bière pression vendue et consommée sur place, est exempté du paiement de la TVF en application de l'article 50 de la Loi, en qualité de «petit fabricant», conformément à l'article 2 du Règlement exemptant certains petits fabricants ou producteurs de la taxe de consommation ou de vente [2] (le Règlement).

M. Paul L. Debenham a comparu au nom de l'appelant. Il a soulevé, à titre de question préliminaire, le fait que la cotisation qui fait l'objet du présent appel porte sur une période qui dépasse la limite de quatre ans concernant l'établissement des cotisations et prévue au paragraphe 81.11(2) de la Loi. Aux termes de ce paragraphe, «l'établissement des cotisations à l'égard d'une taxe, d'une pénalité, d'intérêts ou d'une autre somme se prescrit par quatre ans après que la taxe, la pénalité, les intérêts ou la somme sont devenus exigibles en application de la présente loi». L'avocat de l'intimé a reconnu que la cotisation pouvait uniquement porter sur une période de quatre années antérieure à la date de la cotisation. En résumé, la période de cotisation ne pouvait pas viser une période antérieure au 19 février 1988. Par conséquent, les montants de la TVF, de la pénalité et des intérêts exigés pour la période allant du 1er janvier au 18 février 1988 doivent être déduits du montant total de la cotisation.

En réponse aux questions posées par l'avocat de l'intimé, M. Debenham, en sa qualité de témoin de l'appelant, a déclaré que ce dernier brasse la bière dans des cuves pour ensuite la filtrer et l'entreposer dans des réservoirs de distribution. Les ales sont distribuées directement à partir des récipients dans lesquels elles sont fermentées. M. Debenham a convenu que les ventes de bière pression de l'appelant à ses clients dans ses locaux dépassaient 50 000 $ pour chacune des années 1988, 1989 et 1990.

Afin de déterminer si la taxe était exigible, M. Debenham a témoigné qu'il a interprété les ventes comme signifiant les coûts de fabrication. Il a estimé les coûts de la bière de l'appelant en se fondant sur les coûts de production de la bière, sur son estimation du coût de la bière vendue par les grandes brasseries, sur des renseignements obtenus d'autres pubs-brasseries et sur une publication du ministère du Revenu national (Revenu Canada) qui explique comment les pubs-brasseries doivent établir la valeur de leur bière pour le calcul de la TVF à payer. En se fondant sur ces estimations, il a déterminé que les ventes de l'appelant E9‚taient inférieures à la limite de 50 000 $ établie pour les petits fabricants et que, par conséquent, l'appelant n'était pas tenu de payer de TVF. Il a confirmé le fait que des fonctionnaires de Revenu Canada ne lui avaient pas fait savoir que la méthode de la valeur déterminée pouvait être utilisée pour établir si l'appelant devait obtenir une licence de TVF de fabricant et payer la TVF.

L'avocat de l'intimé a renvoyé M. Debenham à un avis de détermination en date du 2 mars 1989 concernant une demande de remboursement datée du 20 janvier 1989 et signée par le trésorier de l'appelant. L'avocat a souligné tout particulièrement l'énoncé suivant qui figure dans la détermination en question : [traduction] «Nous vous rappelons que si les ventes annuelles de marchandises taxables que vous produisez dépassent 50 000 $, vous devez présenter une demande en vue d'obtenir une licence de taxe de vente fédérale». M. Debenham n'a pas été en mesure de confirmer si cet avis avait été porté à son attention.

Le représentant de l'appelant a fait valoir que l'interprétation doit être uniforme de façon que la valeur des ventes utilisée pour déterminer l'admissibilité d'un fabricant à l'exemption pour petits fabricants soit la même que celle utilisée pour déterminer le montant de la TVF exigible aux termes de la Loi. Il s'est reporté à la fiche de décision 3700/122-1 [3] (la fiche de décision) de Revenu Canada et au Mémorandum de l'Accise ET-104 [4] qui, a-t-il fait valoir, prévoient que la valeur taxable de la bière pression produite par un pub-brasserie doit être fondée sur la valeur des marchandises vendues et non sur le prix de vente au détail. À son avis, les valeurs établies dans la fiche de décision représentent une estimation équitable du coût de fabrication ou de production de la bière pression du petit fabricant, avec provision pour un bénéfice raisonnable. Si la valeur établie selon la fiche de décision avait été utilisée, les ventes de l'appelant n'auraient pas dépassé 50 000 $ au cours des années visées par la vérification à l'origine de la cotisation.

Le représentant de l'appelant a déclaré que ce dernier est essentiellement un fabricant et un détaillant, bien que la propriété et le contrôle soient communs. L'appelant utilise la bière qu'il fabrique dans son commerce de détail. À son avis, la valeur servant à déterminer si les ventes de l'appelant ont dépassé 50 000 $ doit être fondée sur les ventes de bière du secteur de la fabrication au secteur de la vente au détail de l'appelant, un peu comme c'est le cas pour les grandes brasseries qui vendent leurs produits à la société Brewers Warehousing Company Limited, le monopole provincial, en dépit du fait que la loi provinciale autorise l'appelant à vendre uniquement aux clients de son établissement. À son avis, le fait de déterminer la valeur des ventes de l'appelant de cette façon éliminerait l'illogisme qui se manifeste lorsqu'une valeur est utilisée pour déterminer s'il y a exemption du paiement de la TVF et qu'une autre valeur est utilisée pour établir le montant de la TVF exigible.

Bien que le représentant de l'appelant ait affirmé, dans ses déclarations officielles, que les rapports de ce dernier avec le bureau local de Revenu Canada avaient été exemplaires, il était d'avis que si Revenu Canada avait fait preuve d'un peu plus de diligence, la cotisation établie à l'égard de l'appelant relativement à la taxe, à la pénalité et aux intérêts exigibles n'aurait pas été aussi élevée. Il a fait valoir que Revenu Canada avait fait preuve de négligence puisque l'appelant avait fait l'objet de quelque cinq vérifications entre 1986 et 1991. Jamais Revenu Canada n'avait indiqué que l'appelant devait verser la TVF. Ce n'est qu'en février 1991, lorsque l'appelant a présenté une demande afin de percevoir et de verser la taxe d'accise exigible sur le vin qu'il prévoyait fabriquer que Revenu Canada s'est rendu compte du problème et a procédé à la vérification de l'appelant, établissant alors la cotisation qui fait l'objet du présent appel.

En dernier lieu, le représentant de l'appelant a demandé au Tribunal d'annuler la pénalité et les intérêts, si le Tribunal est habilité à le faire.

L'avocat de l'intimé a fait valoir que le Règlement doit être interprété en tenant compte de l'obligation de verser la taxe conformément au paragraphe 50(1) de la Loi. L'expression «valeur de ces marchandises» à l'alinéa 2(1)a) du Règlement signifie le «prix de vente» des marchandises tel qu'énoncé au paragraphe 50(1) de la Loi.

L'avocat de l'intimé s'est reporté à la décision du Tribunal dans la cause Rieger Enterprises Inc., Division Stellaris Craft & Florist Supplies et Division Vista Scenic Hobby Products c. Le ministre du Revenu national [5] qui, a-t-il fait valoir, appuie la thèse selon laquelle pour être exempté de l'obligation d'obtenir une licence de TVF, il faut que la valeur des ventes de marchandises taxables fabriquées ou produites ne dépasse pas 50 000 $.

Selon l'avocat de l'intimé, le prix de vente, aux fins du présent appel, doit être établi en fonction de la façon dont l'appelant dirige son entreprise. L'appelant vend à des consommateurs à un prix de vente. C'est ce prix de vente qui doit être utilisé pour déterminer si les ventes de l'appelant ont dépassé 50 000 $, et non le prix de vente qui serait payé si l'appelant vendait ses produits à un monopole provincial.

Le Tribunal est d'avis que l'appelant n'était pas exempté du paiement de la TVF conformément à la Loi en qualité de petit fabricant aux termes de l'article 2 du Règlement et que, par conséquent, la cotisation établie pour les taxes impayées, la pénalité et les intérêts pour la période allant du 19 février 1988 au 31 décembre 1990 est juste.

Le paragraphe 50(1) de la Loi prévoit que la TVF sera imposée sur le prix de vente des marchandises produites ou fabriquées au Canada. Aux fins du paiement de la TVF, le paragraphe 54(1) de la Loi prévoit que tout fabricant ou producteur doit demander une licence. Toutefois, le paragraphe 54(2) de la Loi stipule que le Ministre peut prendre des règlements exemptant toute classe de petits fabricants ou producteurs du paiement de la TVF et de l'obligation d'obtenir une licence de TVF.

Aux termes du Règlement, certains petits fabricants ou producteurs, mentionnés au paragraphe 2(1), sont exemptés du paiement de la TVF. Aux fins du présent appel, la disposition pertinente se trouve à l'alinéa 2(1)a) du Règlement et prévoit ce qui suit :

a) les fabricants, autres que ceux qui choisissent d'exploiter leur entreprise aux termes d'une licence, qui vendent des marchandises de leur propre fabrication normalement assujetties à la taxe de consommation ou de vente, ou qui fabriquent pour leur propre usage des marchandises normalement assujetties à la taxe de consommation ou de vente, si la valeur de ces marchandises ne dépasse pas $ 50,000 par année civile.

Aux termes du paragraphe 2(2) du Règlement, l'exemption prévue au paragraphe 2(1) ne s'applique plus si le «total des ventes» du fabricant ou du producteur «pour une année civile dépasse 50 000 $». Par conséquent, l'exemption du paiement de la TVF par l'appelant est fonction du fait que le total de ses ventes de bière pression a dépassé ou non 50 000 $ pendant une année donnée.

De l'avis du Tribunal, parce que l'appelant vend sa bière pression uniquement aux clients qui se présentent dans ses locaux, le total des ventes de bière pression de l'appelant est le montant demandé à ses clients pour la bière pression achetée dans ses locaux. Le représentant de l'appelant a admis que les ventes de bière pression de l'appelant aux clients dans ses locaux ont dépassé 50 000 $ pour chacune des années 1988, 1989 et 1990. L'appelant n'était donc pas exempté du paiement de la TVF conformément au paragraphe 2(1) du Règlement et la cotisation établie pour les taxes impayées, la pénalité et les intérêts, pour la période allant du 19 février 1988 au 31 décembre 1990, est juste.

Quant à la demande formulée par l'appelant au Tribunal pour faire annuler la pénalité et les intérêts, le Tribunal conclut, comme cela a été le cas lors de décisions antérieures [6] , qu'il n'a pas compétence pour annuler ou réduire une pénalité. L'article 79 de la Loi stipule qu'en cas de défaut de paiement de la TVF par une personne, cette dernière doit verser des pénalités et des intérêts et aucune disposition de la Loi n'accorde au Tribunal le pouvoir de soustraire l'appelant au paiement des pénalités ou des intérêts, ou d'annuler les pénalités ou les intérêts.

Par conséquent, l'appel est admis en partie. Le Tribunal renvoit la cotisation au Ministre afin qu'il ajuste les montants de la TVF, de la pénalité et des intérêts exigibles conformément au paragraphe 81.11(2) de la Loi, qui prévoit que «l'établissement des cotisations à l'égard d'une taxe, d'une pénalité, d'intérêts ou d'une autre somme se prescrit par quatre ans après que la taxe, la pénalité, les intérêts ou la somme sont devenus exigibles en application de la présente loi». Étant donné que la cotisation est datée du 19 février 1992, aucun cotisation ne peut être établie à l'égard de l'appelant pour la taxe, la pénalité ou les intérêts devenus exigibles avant le 19 février 1988.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E-15.

2. DORS/82-498, le 13 mai 1982, Gazette du Canada Partie II, vol. 116, n o 10 à la p. 1869.

3. Valeur taxable de la bière en fût produite par des pubs-brasseries , le 1 er novembre 1987.

4. Petits fabricants , ministère du Revenu national, Douanes et Accise, le 20 mars 1989.

5. Appel n o AP-90-078, le 3 novembre 1992.

6. Les Presses Lithographiques Inc. c. Le ministre du Revenu national , appel n o 2997, le 26 juin 1989; et Oerus Corporation Ltd. c. Le ministre du Revenu national , appel n o AP - 91 - 056, le 3 septembre 1992.


Publication initiale : le 29 mai 1997