BALLARAT CORPORATION LTD.

Décisions


BALLARAT CORPORATION LTD.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-93-359

TABLE DES MATIERES

Le mardi 19 décembre 1995

Appel no AP-93-359

EU ÉGARD À un appel entendu le 5 juillet 1995 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À huit décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national les 19 novembre et 3 et 7 décembre 1993 et le 20 janvier 1994 concernant des demandes de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

BALLARAT CORPORATION LTD. Appelant

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

ET

FISHER SCIENTIFIQUE LTÉE, SCHNEIDER CANADA INC.

ET CARBONE D'AMÉRIQUE (LCL) LTÉE Intervenants

L'appel est admis.


Robert C. Coates, c.r. ______ Robert C. Coates, c.r. Membre présidant

Anthony T. Eyton ______ Anthony T. Eyton Membre

Lyle M. Russell ______ Lyle M. Russell Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si certaines marchandises doivent être classées dans le numéro tarifaire 9107.00.20 à titre d'interrupteurs horaires «des types utilisés avec les marchandises classées dans les nos tarifaires énumérés à l'annexe VI [du Tarif des douanes]», comme l'a soutenu l'appelant. Dans huit décisions, le sous-ministre du Revenu national a classé les marchandises dans le numéro tarifaire 9107.00.90 à titre d'interrupteurs horaires «[a]utres» que ceux nommément désignés à la sous-position no 9107.00, qui comprend le numéro tarifaire demandé par l'appelant.

DÉCISION : L'appel est admis. Le Tribunal ne doute nullement que les interrupteurs horaires en cause possèdent les caractéristiques physiques qui les rendent reconnaissables comme étant destinés à certaines des marchandises classées dans les numéros tarifaires énumérés à l'annexe VI du Tarif des douanes. Ainsi, ils sont d'un type utilisé avec ces marchandises. Le Tribunal ne croit pas que, pour que les marchandises soient classées dans le numéro tarifaire 9107.00.20, il doit y avoir quelque chose d'inhérent à leur conception, à leur construction ou à leur composition qui les rende reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinées à une utilisation ou à une application particulière, ou qu'elles doivent être reconnaissables comme étant destinées principalement à une utilisation plutôt qu'à une autre ou être conçues principalement pour une utilisation particulière.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 5 juillet 1995 Date de la décision : Le 19 décembre 1995
Membres du Tribunal : Robert C. Coates, c.r., membre présidant Anthony T. Eyton, membre Lyle M. Russell, membre
Avocat pour le Tribunal : David M. Attwater
Greffier : Anne Jamieson
Parties : Doug Cowell, pour l'appelant Frederick B. Woyiwada, pour l'intimé John R. Peillard, pour l'intervenant, Fisher Scientifique Ltée Paul D. Burns, pour l'intervenant, Schneider Canada Inc. Douglas J. Bowering, pour l'intervenant, Carbone d'Amérique (LCL) Ltée





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] (la Loi) à l'égard de huit décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si certaines marchandises doivent être classées dans le numéro tarifaire 9107.00.20 de l'annexe I du Tarif des douanes [2] à titre d'interrupteurs horaires AB®des types utilisés avec les marchandises classées dans les nos tarifaires énumérés à l'annexe VI [du Tarif des douanes]», comme l'a soutenu l'appelant. Dans ses décisions, l'intimé a classé les marchandises dans le numéro tarifaire 9107.00.90 à titre d'interrupteurs horaires «[a]utres» que ceux nommément désignés à la sous-position no 9107.00, qui comprend le numéro tarifaire demandé par l'appelant. L'appel a été entendu sur la foi d'exposés écrits conformément à l'article 25 des Règles de procédure du Tribunal canadien du commerce extérieur [3] etsur la foi des documents à la disposition du Tribunal, complétés d'un exposé conjoint des faits et des mémoires présentés par les parties.

Dans l'exposé conjoint des faits, les marchandises en cause sont décrites comme des minuteries «Intermatic» des séries «SB», «TB» et «DT». Les interrupteurs horaires de la série SB en cause sont les modèles nos SB111, SB8C70, SB111C70, SB811C70 et SB911C70. Il s'agit d'interrupteurs horaires montés en boîtier hermétique, enfichables, à commande moteur. Ils sont destinés à commander la mise sous tension et hors tension d'appareils portatifs, dont les lampes.

Les interrupteurs horaires de la série TB en cause sont les modèles nos TB811C70 et TB111C70. Ces modèles sont des interrupteurs horaires montés en boîtier de table hermétique à commande par horlogerie. Ils sont destinés à commander la mise sous tension et hors tension d'appareils portatifs, dont les lampes.

Les interrupteurs horaires de la série DT en cause sont les modèles nos DT1C70 et DT1B70. Les deux modèles sont des interrupteurs à semi-conducteurs montés en boîtier hermétique, à commande par horlogerie, destinés à commander la mise sous tension et hors tension d'appareils portatifs. Le DT1C est qualifié de «minuterie numérique programmable à grande capacité, avec mise à la terre», qui commande tous les genres de charges, comme les lampes (y compris les lampes fluorescentes), les téléviseurs, les chaînes stéréophoniques et les appareils.

L'alimentation des interrupteurs horaires des séries SB et TB se fait par une fiche à deux lames seulement, sans broche de mise à la terre. Ils sont munis d'un mécanisme de minuterie à moteur synchrone plutôt que de l'interrupteur à semi-conducteurs utilisé dans la série DT. Les interrupteurs horaires de la série DT ont une fiche et une prise de courant triphasées. Les interrupteurs horaires des trois séries sont conçus pour utiliser un raccordement standard par fiche de 15 A sur 120 V à brancher sur la source d'alimentation. Une différence d'utilisation est attribuable aux spécifications électriques. Les séries SB et TB sont limitées aux appareils à plus faible charge avec fiche à deux lames, alors que la série DT peut être utilisée avec des appareils à faible charge ou avec des appareils munis de fiches triphasées, dont la charge est généralement plus élevée. Chacun des modèles en cause est d'un genre habituellement acheté par des consommateurs ordinaires, dans des quincailleries ou d'autres magasins de détail, pour utilisation normale à la maison. Aucun de ces interrupteurs horaires n'est destiné exclusivement ou principalement à une utilisation ou à une application particulière. Ils se prêtent à de nombreuses applications différentes, pour contrôler la mise sous tension et hors tension d'une vaste gamme d'articles électriques d'une intensité de 15 A.

Relativement au présent appel, la nomenclature tarifaire pertinente de l'annexe I du Tarif des douanes se lit comme suit :

9107.00 Interrupteurs horaires et autres appareils permettant de déclencher un mécanisme à temps donné, munis d'un mouvement d'horlogerie ou d'un moteur synchrone.

9107.00.10.00 ---Pour appareils de chauffage ou de cuisson

9107.00.20.00 ---Autres, des types utilisés avec les marchandises classées dans les nos tarifaires énumérés à l'annexe VI de la présente loi

9107.00.90.00 ---Autres

Le représentant de l'appelant a fait valoir que les interrupteurs horaires en cause peuvent commander la mise sous tension et hors tension de tout appareil d'une intensité de 15 A, y compris les ventilateurs de table, de plancher et de fenêtre, les humidificateurs et déshumidificateurs domestiques, les pompes d'aquarium et les climatiseurs d'appartement. Il a soutenu que chacune de ces marchandises est classée dans un des numéros tarifaires énumérés à l'annexe VI du Tarif des douanes. À l'appui des diverses applications des marchandises en cause, il a cité la documentation sur le produit et une lettre de M. E.F. Condon, fils, vice-président – Ingénierie auprès d'Intermatic Incorporated, qui semble être le fabricant des marchandises en cause.

L'avocat de l'intimé a soutenu que l'expression «des types utilisés avec les marchandises classées dans les nos tarifaires énumérés à l'annexe VI de la présente loi» est de nature adjectivale ou descriptive. Cette expression descriptive implique des qualités inhérentes de composition, de nature ou de caractère dans un interrupteur qui le rendent reconnaissable comme étant destiné à une utilisation dans l'application particulière décrite. Ainsi, les interrupteurs horaires auxquels s'applique l'expression doivent être physiquement différents des autres interrupteurs horaires en général.

L'avocat de l'intimé a fait valoir que le fait qu'un interrupteur horaire soit utilisé avec une lampe ou avec un climatiseur est sans conséquence sur son classement tarifaire, vu que les marchandises sont classées en fonction de leurs caractéristiques physiques. Il n'en est pas de même, toutefois, s'il y a quelque chose d'inhérent à la conception ou à la nature de l'interrupteur horaire qui le rend reconnaissable comme étant destiné principalement à une utilisation plutôt qu'à une autre. Par conséquent, les marchandises ne peuvent être classées dans le numéro tarifaire 9107.00.20 que si elles sont spécifiquement conçues pour être utilisées ou destinées à être utilisées avec des marchandises classées dans un des numéros tarifaires énumérés à l'annexe VI. Les marchandises qui peuvent être utilisées avec ces marchandises ou qui pourraient l'EAˆtre, mais qui n'ont pas été conçues principalement à cette fin, sont exclues du numéro tarifaire 9107.00.20.

L'avocat de l'intimé a soutenu qu'il n'y a rien d'inhérent à la conception, à la construction ou à la composition des marchandises en cause qui les rende reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinées à une utilisation ou à une application spécifique et, en particulier, avec les marchandises classées dans un numéro tarifaire énuméré à l'annexe VI.

L'avocat de Schneider Canada Inc. et le représentant de Fisher Scientifique Ltée ont fait valoir l'inutilité pour les marchandises devant être classées dans le numéro tarifaire 9107.00.20 d'être spécifiquement conçues pour être utilisées avec l'une ou l'autre des marchandises classées dans un des numéros tarifaires énumérés à l'annexe VI, ou d'être reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinées à une utilisation avec ces marchandises. Là où le Parlement a voulu que les marchandises soient «conçues pour» servir à une application particulière, il a prévu une formulation explicite en ce sens [4] à la nomenclature tarifaire. De même, là où l'intention du Parlement était que les marchandises devaient être «reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinées» à d'autres marchandises, il a utilisé une formulation explicite en ce sens [5] . Comme le Parlement n'a pas utilisé la même formulation dans le numéro tarifaire 9107.00.20, il faut supposer qu'il a voulu lui donner un sens différent.

Quant au sens de l'expression «des types utilisés», l'avocat de Schneider Canada Inc. a fait valoir qu'il faut interpréter cette disposition comme signifiant que les marchandises peuvent y être classées lorsqu'elles sont d'un type ou d'un genre utilisé avec les marchandises énumérées à l'annexe VI, mais qu'il n'est pas nécessaire qu'elles soient effectivement utilisées à cette fin. Cet argument a été repris par le représentant de Carbone d'Amérique (LCL) Ltée, qui a soutenu que le numéro tarifaire 9107.00.20 n'est pas assorti d'une exigence d'utilisation finale. Par conséquent, l'appelant n'a pas besoin de démontrer que les interrupteurs horaires en cause sont effectivement utilisés avec les marchandises classées dans les numéros tarifaires énumérés à l'annexe VI. Il suffit plutôt qu'ils soient d'un type, c'est-à-dire d'un genre ou d'une catégorie, utilisé ou susceptible d'être utilisé avec ces marchandises. L'avocat a soutenu que l'appelant a démontré qu'ils sont de ce genre ou de cette catégorie.

Le représentant de Fisher Scientifique Ltée a signalé que la description figurant sur l'emballage des marchandises en cause indique qu'elles sont destinées à servir avec de petits appareils. Il a fait valoir que la définition que donne le dictionnaire du mot «appliance» (appareil) est suffisamment vaste pour englober les marchandises classées dans un des numéros tarifaires énumérés à l'annexe VI. En outre, le point de vente de ces marchandises est déterminé par une décision de marketing, qui n'a rien à voir avec leur classement tarifaire.

En réponse, l'avocat de l'intimé a souligné que les marchandises en cause sont soit des interrupteurs horaires ordinaires ou des interrupteurs «des types utilisés» à une fin particulière. Les marchandises sont classées en fonction de leurs caractéristiques physiques et non pas de leur utilisation finale. Par conséquent, si les marchandises doivent être classées comme des marchandises «des types utilisés» à une fin particulière, leur composition, leur nature, leur conception ou leur caractère doivent les rendre essentiellement reconnaissables comme étant destinées à être utilisées à cette fin particulière.

Le Tribunal convient avec l'avocat de l'intimé que les interrupteurs horaires en cause doivent être classés en fonction de leurs caractéristiques physiques plutôt que de leur utilisation finale. Dans la mesure où le numéro tarifaire 9107.00.20 exige que les interrupteurs horaires soient «utilisés» avec certaines autres marchandises, le Tribunal interprète cette condition d'utilisation comme signifiant que les marchandises doivent être susceptibles d'être utilisées avec ces marchandises ou être reconnaissables comme étant destinées à l'être. Il n'est pas nécessaire qu'elles soient effectivement utilisées avec ces marchandises.

Les parties conviennent que les interrupteurs horaires en cause sont reconnaissables comme étant destinés à des appareils électriques utilisant une source d'alimentation à tension nominale de 120 V et à intensité nominale de 15 A avec une fiche standard à deux lames ou triphasée. Parmi les marchandises énumérées à l'annexe VI, il y a les humidificateurs ou déshumidificateurs domestiques, les machines et appareils d'appartement pour le conditionnement de l'air du type mural ou pour fenêtres et les ventilateurs de table. Le Tribunal ne doute nullement que les interrupteurs horaires en cause possèdent les caractéristiques physiques qui les rendent reconnaissables comme étant destinés à une utilisation avec ces marchandises. Par conséquent, ils sont d'un type utilisé avec certaines des marchandises classées dans les numéros tarifaires énumérés à l'annexe VI.

L'avocat de l'intimé a soutenu que, pour que les marchandises soient classées dans le numéro tarifaire 9107.00.20, il doit y avoir quelque chose d'inhérent à leur conception, à leur construction ou à leur composition qui les rende reconnaissables comme étant destinées exclusivement ou principalement à une utilisation ou à une application particulière. Elles doivent être reconnaissables comme étant destinées principalement à une utilisation plutôt qu'à une autre ou être conçues principalement pour une utilisation particulière. Cependant, le Tribunal ne peut donner raison à l'avocat sur ce point. L'appelant et les intervenants ont cité des exemples caractéristiques fournis par la nomenclature tarifaire de l'annexe I du Tarif des douanes à la suite de l'imposition par le Parlement de telles conditions par une formulation explicite. En outre, là où il a voulu que les marchandises des types utilisés principalement avec d'autres marchandises, par leur conception ou autrement, soient classées dans un numéro tarifaire donné, le Parlement a explicitement imposé cette condition [6] . Comme le Parlement n'a pas précisé de telles conditions dans le libellé du numéro tarifaire 9107.00.20, le Tribunal ne peut interpréter qu'il y a une condition au classement dans ce numéro tarifaire.

Aux termes de la Règle 3 a) des Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé [7] et de la Règle 1 des Règles canadiennes [8] , lorsque des marchandises paraissent devoir être classées dans deux ou plusieurs numéros tarifaires, le numéro tarifaire le plus spécifique doit avoir la priorité sur les numéros tarifaires d'une portée plus générale. Le Tribunal croit que les interrupteurs horaires en cause paraissent devoir être classés dans les deux numéros tarifaires 9107.00.20 et 9107.00.90. Le premier numéro tarifaire a la priorité, vu qu'il a une portée plus spécifique.

Par conséquent, l'appel est admis.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

2. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

3. DORS/91-499, le 14 août 1991, Gazette du Canada Partie II, vol. 125, no 18 à la p. 2912.

4. Voir, p. ex., les numéros tarifaires 3005.90.10, 7017.10.10, 7017.20.10, 8532.10.00, 9001.40.10, 9001.50.10, 9003.11.10, 9003.19.10 et les sous - positions nos 4203.21 et 9006.30.

5. Voir, p. ex., les positions nos 84.09, 84.31, 84.48, 84.66, 84.73, 85.29, 85.38, les sous-positions nos 8409.91, 8503.00 et les numéros de classement 8483.10.90.11 et 8483.10.90.12.

6. Voir, p. ex., les positions nos 12.11, 14.01, 14.02 et 14.04 et le numéro tarifaire 1211.90.00.

7. Supra, note 2, annexe I.

8. Ibid.


Publication initiale : le 28 août 1996