TILECHEM LIMITED

Décisions


TILECHEM LIMITED
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-93-364

TABLE DES MATIERES

Ottawa, le mardi 17 janvier 1995

Appel n o AP - 93 - 364

EU ÉGARD À un appel entendu le 22 juillet 1994 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national le 24 novembre 1993 concernant une demande de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

TILECHEM LIMITED Appelant

ET

LE SOUS - MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

DÉCISION DU TRIBUNAL

L'appel est admis.


Charles A. Gracey ______ Charles A. Gracey Membre présidant

Raynald Guay ______ Raynald Guay Membre

Lise Bergeron ______ Lise Bergeron Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





L'appelant importe des marchandises qu'il désigne «blocs d'argile creux pour la construction». Les marchandises en cause sont importées sous forme de blocs d'argile creux doubles munis d'entailles pour faciliter la refente en deux segments avant emploi. Les parois extérieures des blocs sont vernissées tandis que les parois intérieures sont façonnées en queue d'aronde. La paroi extérieure de chaque segment mesure environ 12,0 po sur 9,0 po et la queue d'aronde se prolonge d'environ 1,5 po au-delà de la paroi extérieure.

La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 6908.90.10 à titre de carreaux ayant une surface de 103 cm 2 ou plus grande, comme l'a établi l'intimé, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 6904.10.00 à titre de briques de construction, comme l'a soutenu l'appelant.

DÉCISION : L'appel est admis. Dès le départ, le Tribunal conclut que les marchandises en cause peuvent, de prime abord, être classées dans les deux positions susmentionnées, comme des carreaux ou des briques. Il doit donc tenir compte de la position qui décrit avec le plus de précision possible les marchandises en cause et conclut qu'elles sont décrites de façon plus précise dans la position n o 69.04, c'est - à - dire à titre de briques. Le Tribunal admet que l'appelant utilise les marchandises en cause pour construire des murs, puis des structures plus imposantes. Le devis descriptif de structure des marchandises en cause reconnaît à ces dernières les qualités requises pour des travaux de construction exigeant une grande résistance mécanique de même qu'une résistance aux acides. Leurs formes et tailles, même si elles ressemblent généralement à celles des carreaux, ne revêtent pas autant d'importance que leurs autres propriétés physiques. Si elles ne possédaient pas ces qualités structurales particulières, les marchandises en cause ne pourraient assurer un bon rendement dans le milieu où elles sont utilisées. La position n o 69.04 tient compte de ces types de qualités structurales, tandis que la position n o 69.08 semble leur accorder peu d'importance. Les carreaux classés dans la position n o 69.08 sont habituellement fixés à la surface de parois déjà constituées et servent principalement à les revêtir. À ces égards, les carreaux constituent un composant très superficiel d'un mur. Ils ne possèdent pas les qualités structurales des briques et ne jouent pas le même rôle dans les travaux de construction.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 22 juillet 1994 Date de la décision : Le 17 janvier 1995
Membres du Tribunal : Charles A. Gracey, membre présidant Raynald Guay, membre Lise Bergeron, membre
Avocat pour le Tribunal : Heather A. Grant
Greffier : Janet Rumball
Ont comparu : Edward M. Marilley, pour l'appelant Stéphane Lilkoff, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] (la Loi) à l'égard d'une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national le 24 novembre 1993 conformément à l'article 63 de la Loi.

L'appelant importe des marchandises qu'il désigne AB®blocs d'argile creux pour la construction». Les marchandises en cause sont importées sous forme de blocs d'argile creux doubles munis d'entailles pour faciliter la refente en deux segments avant emploi. Les parois extérieures des blocs sont vernissées tandis que les parois intérieures sont façonnées en queue d'aronde. La paroi extérieure de chaque segment mesure environ 12,0 po sur 9,0 po et la queue d'aronde se prolonge d'environ 1,5 po au-delà de la paroi extérieure.

La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 6908.90.10 de l'annexe I du Tarif des douanes [2] à titre de carreaux ayant une surface de 103 cm2 ou plus grande, comme l'a établi l'intimé, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 6904.10.00 à titre de briques de construction, comme l'a soutenu l'appelant.

Les éléments pertinents des positions en cause sont les suivants :

69.04 Briques de construction, hourdis, cache - poutrelles et articles similaires, en céramique.

69.08 Carreaux et dalles de pavement ou de revêtement vernissés ou émaillés, en céramique.

Le président de Tilechem Limited, M. Edward M. Marilley, a comparu au nom de l'appelant. Il a expliqué que l'appelant est un entrepreneur spécialisé dans la conception et l'installation de revêtements structuraux non métalliques anticorrosion pour réservoirs, cuviers, cuves et cuvettes, utilisés principalement pour le traitement de la pâte à papier et des produits en papier. Pour protéger les structures de la corrosion provoquée par les acides, l'appelant a conçu les marchandises en cause, c'est-à-dire des éléments de maçonnerie anticorrosion constitués d'argile cuite. Selon le représentant de l'appelant, les marchandises sont importées sous forme de blocs doubles séparés en deux segments avant l'installation. En outre, elles sont installées à l'aide de mortier résistant aux produits chimiques.

Le représentant de l'appelant a discuté des caractéristiques des marchandises en cause sous l'angle des documents de l'American Society for Testing and Materials (l'ASTM). Il a expliqué que les marchandises sont classées sous «Committee C15 on Manufactured Masonry Units [3] » (Comité C15 - Éléments de maçonnerie fabriqués), plus précisément sous «C15.09 Chemical - Resistant Units [4] » (C15.09 Éléments résistant aux produits chimiques). D'après la terminologie uniformisée utilisée par l'ASTM concernant les matériaux non métalliques résistant aux produits chimiques, un [traduction] «matériau de construction résistant aux produits chimiques» est un [traduction] «matériau modulaire non métallique, vitreux ou non, utilisé dans des procédés industriels principalement pour des applications exigeant une résistance chimique, thermique et mécanique [5] ». Se reportant à la «Standard Specification for Chemical - Resistant Masonry Units» (Norme visant les éléments de maçonnerie résistant aux produits chimiques) de l'ASTM, le représentant a déclaré que les marchandises sont également classées sous «1.2.2 Type II», qui porte sur des matériaux [traduction] «destinés à être utilisés dans des applications exigeant un taux d'absorption moindre et une résistance aux acides supérieure [6] ».

Le représentant de l'appelant a témoigné que les marchandises en cause ont un faible taux d'absorption, tout au plus de 4 à 5 p. 100. Elles ne sont donc pas entièrement vitrifiées. Le représentant a ajouté que les marchandises sont conçues pour que chaque carreau utilisé pour ériger diverses structures soit aligné rang par rang et pour que le béton soit coulé dans les joints du mur, les carreaux servant de coffrages. Pour certaines structures, les marchandises ne sont utilisées que d'un côté, tandis que pour d'autres, elles sont utilisées des deux côtés. Selon le représentant, au terme de cette méthode de construction, les marchandises font partie intégrante du mur. Le représentant a expliqué que la forme en queue d'aronde au dos de chaque carreau est nécessaire pour assurer le liaisonnement et que la queue d'aronde est protégée contre les dommages du fait que les marchandises sont expédiées en unités doubles.

Le représentant de l'appelant a ensuite présenté certaines photographies pour démontrer le processus d'érection des structures, de même que l'installation des marchandises en cause. Il a expliqué qu'avec les carreaux et le revêtement en queue d'aronde, le mur sert de mur porteur offrant une grande résistance à la compression.

Au cours du contre-interrogatoire, le représentant de l'appelant a témoigné que même si le vernis apposé sur la surface lisse des marchandises en cause ajoute à leur résistance aux acides, c'est principalement la composition des éléments principaux des marchandises qui leur confère leur résistance aux acides. Selon le représentant, le vernis a pour principale fonction d'assurer la résistance à l'érosion et de maintenir une surface propre. Le représentant a convenu avec l'avocat de l'intimé que la méthode de construction particulière qu'utilise l'appelant a pour but d'établir une liaison solide entre les carreaux et le béton. Le représentant a admis que les marchandises sont considérées comme des carreaux, mais que ces derniers et les briques sont classés par l'ASTM comme des éléments de maçonnerie résistant aux produits chimiques qui répondent aux mêmes spécifications de conception. Il a ensuite ajouté que les marchandises ne sont pas encastrées dans le béton, mais qu'elles y sont plutôt intégrées à l'étape de la construction du mur; elles font donc partie intégrante du mur.

En réponse aux questions du Tribunal, le représentant de l'appelant a expliqué que le béton et les barres d'armature en acier assurent le soutien du mur. Il a ajouté que l'épaisseur du carreau entre dans le calcul de la portance requise du mur. En outre, la résistance à la compression verticale des marchandises en cause est en réalité supérieure à celle du béton, qui est également prise en compte par les ingénieurs au moment de la conception du mur.

Dans sa plaidoirie à l'appui de la position de l'appelant, le représentant de l'appelant a soutenu que les marchandises en cause doivent être classées dans la position no 69.04, car cette position englobe les briques résistant aux acides, qui sont plus ou moins vitrifiées et qui sont destinées à être utilisées dans des usines de produits chimiques. Dans son mémoire, l'appelant a soutenu que les marchandises sont importées en éléments doubles et qu'à leur refente, elles conservent les qualités pour lesquelles elles ont été conçues, c'est-à-dire celles de blocs de construction. En outre, l'appelant a mentionné que les articles précisés à la position no 69.08 sont des carreaux minces utilisés pour revêtir du béton et d'autres surfaces en place, mais non conçus pour un milieu résistant aux acides.

L'avocat de l'intimé a fait valoir que les marchandises en cause ont été classées dans la position no 69.08 parce qu'il s'agit de carreaux conçus pour être fixés à un mur de béton et pour le revêtir de manière à le protéger des substances corrosives. En outre, la taille et la forme des marchandises ressemblent à celles des carreaux et non à celles des briques ou d'autres articles énoncés à la position no 69.04. De l'avis de l'avocat, le mode d'installation des marchandises vise à faire en sorte que ces dernières soient solidement encastrées dans le mur, ce qui ne modifie toutefois pas le caractère fondamental des marchandises en leur qualité de carreaux. L'avocat a ajouté que les marchandises ne constituent pas véritablement l'ossature du mur en béton armé, comme l'exige la position no 69.04.

L'avocat de l'intimé a fait valoir que les Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [7] (les Notes explicatives) portant sur le no 69.08 (auquel les Notes explicatives de la position no 69.07 s'appliquent lorsque les marchandises sont vernissées) renferment des critères permettant d'établir une distinction entre les carreaux et les briques. L'avocat a mentionné trois caractéristiques des carreaux : 1) les carreaux servent principalement à revêtir les murs; 2) ils sont destinés à être fixés à la surface des parois déjà constituées; et 3) le rapport entre leur épaisseur et leurs autres dimensions est plus faible que dans le cas des briques de construction. Pour ce qui est du premier critère, l'avocat a fait valoir que les marchandises en cause sont en fait utilisées pour revêtir les murs. En ce qui a trait au deuxième critère, l'avocat a prétendu que même si les marchandises ne semblent pas satisfaire à ce critère, à son avis, cela n'empêche pas de classer dans cette position les carreaux qui ne sont pas fixés à la surface des parois déjà constituées. L'avocat a soutenu qu'il importe peu que le mur ait été construit avant ou après que les carreaux aient été fixés. Selon lui, c'est le produit fini, c'est-à-dire le mur, qui importe; en outre, les marchandises doivent servir de carreaux sur le mur. Pour ce qui est du troisième critère, l'avocat a fait valoir que d'après leurs dimensions, les marchandises ressemblent davantage à des carreaux qu'à des briques et que l'on peut s'en convaincre en regardant simplement les carreaux, ces derniers étant plus minces que d'autres types de briques vendues couramment sur le marché. L'avocat a également soutenu que les marchandises sont désignées dans les Notes explicatives de la position no 69.08 comme des carreaux doubles destinés à être refendus avant leur emploi.

L'avocat de l'intimé a ajouté que pour classer un produit dans la position no 69.04, il convient de déterminer si ce dernier fait partie de l'ossature du bâtiment. L'avocat s'est reporté à la définition du terme «frame [8] » (ossature) que l'on trouve dans le dictionnaire The Concise Oxford Dictionary of Current English pour faire valoir que ce sont le béton et les barres d'armature en acier, et non les carreaux, qui forment l'ossature ou la structure du mur. L'avocat a prétendu que le mur porte tout le poids qui lui est appliqué et que les carreaux ne sont installés que pour protéger le mur de béton et en préserver l'intégrité.

L'avocat de l'intimé a ajouté que l'industrie et le représentant de l'appelant considèrent les marchandises en cause comme des carreaux. En outre, ces derniers servent principalement à protéger le béton et l'acier et à faciliter le nettoyage; à cet égard, ils sont semblables à des carreaux pour salle de bains, qui peuvent être classés dans la position no 69.08.

Pour ce qui est de savoir si les marchandises en cause conservent leur qualité de briques de construction après la refente, l'avocat de l'intimé a soutenu qu'au moment de leur importation, les marchandises constituent vraiment deux carreaux adossés et qu'une fois fendues, elles ressemblent davantage à deux carreaux. En outre, les carreaux sont placés de cette façon uniquement pour protéger la forme en queue d'aronde contre les dommages au cours de l'expédition; de plus, les marchandises ne sont pas installées sous cette forme, mais elles sont refendues avant leur emploi. L'avocat a également prétendu qu'aux fins de classement dans la position no 69.08, il importe peu que les carreaux soient épais ou minces. En fait, les marchandises en cause doivent être de plus grandes dimensions et plus résistantes que les carreaux ordinaires pour salle de bains afin de donner les résultats escomptés dans le milieu où elles sont utilisées.

Dans sa réponse, le représentant de l'appelant a fait valoir que la définition de l'expression «framework» (ossature), plus précisément «frame, structure, upon or into which casing or contents can be put [9] » (ossature, structure, sur laquelle ou à l'intérieur de laquelle un montage ou son contenu peut être placé) dans le dictionnaire The Concise Oxford Dictionary of Current English décrit mieux la méthode de construction utilisée par l'appelant et qu'elle doit être prise en compte par le Tribunal. Le représentant a soutenu que si les marchandises en cause ne constituaient pas une ossature dans laquelle le béton est coulé, pour ainsi faire partie intégrante du mur, l'appelant n'érigerait pas ce type de structures. Le représentant a déclaré que si le béton était coulé dans une ossature de bois et que les marchandises étaient par la suite appliquées au béton, une telle opération ne conviendrait pas à la construction de ces structures. En outre, la position no 69.08 ne porte pas sur les matériaux résistant aux produits chimiques; à son avis, il n'existe aucun rapport entre l'épaisseur réelle des marchandises et leur classement à titre de briques ou de carreaux.

Aux fins du classement des marchandises dans l'annexe I du Tarif des douanes, le Tribunal reconnaît que la Règle 1 des Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé [10] (les Règles générales) revêt la plus grande importance. La Règle 1 des Règles générales prévoit que les marchandises sont d'abord classées d'après le libellé des positions tarifaires et de toutes Notes de Chapitres pertinentes. Par conséquent, le Tribunal doit d'abord déterminer si les marchandises en cause sont désignées ou décrites de façon générique dans une position tarifaire particulière. Si les marchandises sont nommées dans une position, elles sont classées dans cette position, sous réserve des Notes de Chapitres pertinentes. Aux fins de l'examen des termes des positions, le Tribunal doit tenir compte des Notes explicatives, conformément à l'article 11 du Tarif des douanes.

Dans le cas présent, les marchandises en cause ne sont pas spécifiquement nommées dans une position, mais puisqu'elles possèdent les caractéristiques des briques et des carreaux, elles sont communément décrites de façon générique dans les positions nos 69.04 et 69.08. La position no 69.04 porte sur les «[b]riques de construction, hourdis, cache-poutrelles et articles similaires, en céramique», tandis que la position no 69.08 vise les «[c]arreaux et dalles de pavement ou de revêtement, vernissés ou émaillés, en céramique; cubes, dés et articles similaires pour mosaïques, vernissés ou émaillés, en céramique, même sur support».

Les Notes explicatives de la position no 69.07 (qui s'appliquent à la position no 69.08 lorsque le produit est vernissé) prévoient que «les carreaux [...] de revêtement se caractérisent essentiellement par le fait que le rapport de leur épaisseur aux autres dimensions est plus faible que dans les briques de construction proprement dites». En outre, «[a]lors que ces dernières [les briques] participent étroitement à la construction même dont elles forment l'ossature, les carreaux et dalles sont plus particulièrement destinés à être fixés (plaqués) au moyen de ciment, colle et autres procédés sur des parois déjà constituées». En outre, les Notes explicatives stipulent que les carreaux «servent principalement au revêtement des murs, des cheminées, des foyers, des parquets, des allées de jardin [...]. [Les carreaux et dalles] peuvent être faits en terre commune ou en faïence, mais, du fait que certains doivent être assez résistants, ils sont fréquemment en matières plus ou moins vitrifiées par la cuisson; c'est ainsi qu'il y a des carreaux et des dalles en grès cérames, voire en porcelaine ou en stéatite (par exemple des carreaux assez épais pour le revêtement intérieur de broyeurs à émaux et appareils analogues)». De plus, le classement des marchandises dans la position no 69.08 est établi «moins [d'après] leur composition [...] que leur forme et leurs dimensions, de telle sorte que des briques pouvant indifféremment servir à la construction et au pavage - il s'agirait notamment de briques dont la cuisson serait assez poussée - relèveraient du no 69.04».

Les Notes explicatives de la position no 69.04 débutent par la mention suivante : «La présente position est réservée aux briques non réfractaires en céramique [...] des types communément utilisés dans la construction des édifices, murs de clF4“ture, cheminées industrielles et installations analogues, même si elles sont accessoirement employées pour d'autres usages». En outre, «[l]es briques de l'espèce sont le plus souvent en terre commune, mais, pour certaines constructions spéciales (installations chimiques, par exemple) où la résistance à la compression et aux acides est recherchée, elles sont formées de grès cérames». De plus, «[p]our autant qu'elles conservent encore, après séparation, le caractère de briques de construction, on admettrait encore ici les briques dites doubles avec perforation spéciale dans le sens de la longueur et qui sont refendues avant usage». Les Notes explicatives de la position no 69.04 indiquent également que «[l]es carreaux, pavés et dalles de pavement et de revêtement» sont spécifiquement exclus de cette position.

Après examen des Notes explicatives, le Tribunal est d'avis que la caractéristique principale des carreaux pouvant être classés dans la position no 69.08 réside dans leur taille et leur forme, de même que dans la méthode de fixation à une paroi déjà constituée et que ces marchandises servent principalement à revêtir des murs. Les briques pouvant être classées dans la position no 69.04 sont principalement caractérisées par l'important rôle structural qu'elles jouent dans la construction d'un édifice ou d'une autre structure. En d'autres termes, les qualités qui leur confèrent leur utilité au plan de la structure (c.-à-d. des travaux de construction) semblent avoir reçu plus d'attention que certaines caractéristiques comme la forme et la taille.

Pour ce qui est des marchandises en cause, le Tribunal fait remarquer qu'au plan de l'apparence, elles ressemblent à des carreaux. Plus précisément, elles ont une grande surface par rapport à leur épaisseur. Le Tribunal admet que les marchandises sont même considérées comme des carreaux, d'après le témoignage du représentant de l'appelant. Ayant reconnu que les marchandises possèdent certains éléments des carreaux, le Tribunal conclut qu'elles peuvent, de prime abord, être classées dans la position no 69.08.

Cependant, le Tribunal admet également que les qualités structurales des marchandises en cause ressemblent à celles des briques. Plus particulièrement, elles possèdent une «grande résistance mécanique» et une «résistance aux acides», comme il est énoncé dans les Notes explicatives de la position no 69.04. En outre, compte tenu de la méthode de construction, le Tribunal est d'avis que les marchandises font partie intégrante du mur. Il estime que les marchandises représentent un élément fondamental de la construction du mur, qu'elles en constituent une partie de l'ossature, élément qui, de l'avis de l'avocat de l'intimé, représente un critère obligatoire de classement des marchandises parmi les briques. Le Tribunal n'est pas convaincu par l'argument de l'avocat selon lequel la méthode d'installation ne vise qu'à garantir que les marchandises soient correctement encastrées dans le mur pour protéger ce dernier, et que les marchandises ne constituent pas une partie de l'ossature du mur. Ainsi, le Tribunal conclut également que les marchandises peuvent, de prime abord, être classées dans la position no 69.04 à titre de briques.

Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause peuvent, de prime abord, être classées dans l'une ou l'autre position. Il doit donc déterminer quelle position est plus spécifique aux fins du classement des marchandises dans l'une des positions, conformément à la Règle 3 a) des Règles générales, qui prévoit que la position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d'une portée plus générale.

Après examen des éléments de preuve et des Notes explicatives des deux positions, le Tribunal est d'avis que la position no 69.04 présente une description plus spécifique des marchandises en cause. Les Notes explicatives de la position no 69.04 précisent que «[l]a présente position est réservée aux briques [...] des types communément utilisés dans la construction des édifices, murs de clôture, cheminées industrielles et installations analogues, même si elles sont accessoirement employées pour d'autres usages».

Le Tribunal admet que les marchandises en cause sont utilisées par l'appelant pour construire des murs, puis des structures plus imposantes. Le devis descriptif de structure des marchandises en cause reconnaît à ces dernières les qualités requises pour des travaux de construction exigeant une grande résistance mécanique de même qu'une résistance aux acides. Leurs formes et tailles, même si elles ressemblent généralement à celles des carreaux, ne revêtent pas autant d'importance que leurs autres propriétés physiques. Si elles ne possédaient pas ces qualités structurales particulières, les marchandises en cause ne pourraient assurer un bon rendement dans le milieu où elles sont utilisées. La position no 69.04 tient compte de ces types de qualités structurales, tandis que la position no 69.08 semble leur accorder peu d'importance. Les carreaux classés dans la position no 69.08 sont habituellement fixés à la surface de parois déjà constituées et servent principalement à les revêtir. À ces égards, les carreaux constituent un composant très superficiel d'un mur. Ils ne possèdent pas les qualités structurales des briques et ne jouent pas le même rôle dans les travaux de construction.

Par conséquent, le Tribunal estime que les marchandises en cause doivent être classées dans la position no 69.04, à titre de briques, plutôt que dans la position no 69.08, à titre de carreaux.

En outre, le Tribunal conclut que les marchandises en cause représentent un type de brique de construction et qu'elles doivent donc être classées dans le numéro tarifaire 6904.10.00, car elles jouent un rôle structural dans la construction de structures, comme des cuves et des réservoirs. Le Tribunal est d'avis qu'au moment de leur importation, les marchandises sont correctement décrites comme des briques doubles, dont les segments conservent les propriétés des briques de construction à l'étape de la refente.

Par conséquent, l'appel est admis.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2 e suppl.).

2. L.R.C. (1985), ch. 41 (3 e suppl.).

3. ASTM Directory , Philadelphia, ASTM, 1993 à la p. 55.

4. Ibid .

5. Annual Book of ASTM Standards , vol. O4.05, Philadelphia, ASTM, 1994 à la p. 555.

6. Ibid . à la p. 137.

7. Conseil de coopération douanière, 1 re éd., Bruxelles, 1986.

8. Septième éd., Oxford, Clarendon Press, 1988 à la p. 390.

9. Ibid.

10. Supra , note 2, annexe I.


Publication initiale : le 10 octobre 1996