RYERSON POLYTECHNICAL INSTITUTE

Décisions


RYERSON POLYTECHNICAL INSTITUTE
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-93-303

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le jeudi 24 novembre 1994

Appel no AP-93-303

EU ÉGARD À un appel entendu le 17 mai 1994 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 29 septembre 1993 concernant un avis d'opposition signifié aux termes de l'article 81.17 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

RYERSON POLYTECHNICAL INSTITUTE Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis. Le Tribunal renvoie l'affaire au ministre du Revenu national pour qu'il prenne les mesures qui s'imposent pour finir de traiter la demande de remboursement de l'appelant.



Lise Bergeron ______ Lise Bergeron Membre présidant

Charles A. Gracey ______ Charles A. Gracey Membre

Robert C. Coates, c.r. ______ Robert C. Coates, c.r. Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





L'appelant est un établissement d'enseignement postsecondaire situé à Toronto (Ontario). Le 16 septembre 1992, le ministre du Revenu national a reçu de l'appelant une demande de remboursement de la taxe de vente fédérale pour habitations neuves produite aux termes de l'article 121 de la Loi sur la taxe d'accise. Le remboursement demandé, qui vise des résidences d'étudiants construites par l'appelant, s'élevait à 1 048 081,82 $. Sur l'enveloppe dans laquelle la demande a été envoyée, on peut voir le timbre de la machine à affranchir de l'appelant en date du 14 septembre 1992 ainsi que le cachet d'oblitération de la Société canadienne des postes qui n'est pas entièrement lisible. Aux termes du paragraphe 121(3) de la Loi sur la taxe d'accise, les demandes de remboursement devaient, entre autres exigences, être produites «avant le 15 septembre 1992». La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si la demande de remboursement de l'appelant a été produite dans le délai prescrit à l'article 121 de la Loi sur la taxe d'accise.

DÉCISION : Le Tribunal convient avec l'avocat de l'intimé que les déclarations antérieures du Tribunal relativement à la date de production d'une demande, y compris les décisions citées, peuvent être résumées comme signifiant qu'en l'absence d'éléments de preuve concluants qui permettent de déterminer qu'une demande a été postée à une date antérieure, la date de mise à la poste doit être considérée comme la date de production de la demande, le cachet d'oblitération en faisant foi. Dans la présente cause, le Tribunal est d'avis que des éléments de preuve concluants montrent que la demande de remboursement de l'appelant a été postée le 14 septembre 1992. L'appel est donc admis et le Tribunal renvoie l'affaire au ministre du Revenu national pour qu'il prenne les mesures qui s'imposent pour finir de traiter la demande de remboursement de l'appelant.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 17 mai 1994 Date de la décision : Le 24 novembre 1994
Membres du Tribunal : Lise Bergeron, membre présidant Charles A. Gracey, membre Robert C. Coates, c.r., membre
Avocat pour le Tribunal : Hugh J. Cheetham
Greffier : Anne Jamieson
Ont comparu : Morris Cooper, pour l'appelant Brian Tittemore, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi) à l'égard d'une décision du ministre du Revenu national (le Ministre) datée du 29 septembre 1993.

L'appelant est un établissement d'enseignement postsecondaire situé à Toronto (Ontario). Le 16 septembre 1992, le Ministre a reçu de l'appelant une demande de remboursement de la taxe de vente fédérale (TVF) pour habitations neuves produite aux termes de l'article 121 de la Loi. Le remboursement demandé, qui vise des résidences d'étudiants construites par l'appelant, s'élevait à 1 048 081,82 $. Sur l'enveloppe dans laquelle la demande a été envoyée, on peut voir le timbre de la machine à affranchir de l'appelant en date du 14 septembre 1992 ainsi que le cachet d'oblitération de la Société canadienne des postes (Postes Canada) qui n'est pas entièrement lisible. Aux termes du paragraphe 121(3) [2] de la Loi, les demandes de remboursement devaient, entre autres exigences, être produites «avant le 15 septembre 1992».

Dans un avis de détermination daté du 30 novembre 1992, le Ministre a rejeté la demande de remboursement de l'appelant. Ce dernier a signifié un avis d'opposition le 14 décembre 1992. Dans une décision datée du 29 septembre 1993, le Ministre a ratifié la détermination pour le motif que la demande de l'appelant avait été produite après le délai prescrit par la Loi.

La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si la demande de remboursement de l'appelant a été produite dans le délai prescrit à l'article 121 de la Loi.

Au début de l'audience, le Tribunal a demandé à l'avocat de l'intimé de préciser si le Ministre convenait que, mis à part le délai prescrit, la demande de remboursement de l'appelant répondait à toutes les autres exigences de la Loi. L'avocat a alors indiqué que le Ministre ne pouvait abonder dans ce sens puisque la demande de l'appelant n'avait pas été entièrement traitée lorsque la décision a été rendue.

Selon l'avocat de l'appelant, la décision démontre clairement que le seul point en suspens, sous réserve des calculs du Ministre pour la ratification du montant du remboursement, consiste à déterminer si la demande de remboursement a été produite dans le délai prescrit.

Mme Nancy Ozaruk, vice-présidente de Bergen Associates Inc. (Bergen), a témoigné pour le compte de l'appelant. Bergen, une société d'experts-conseils en taxes de vente, travaille auprès d'organismes de charité et d'établissements d'enseignement. L'appelant est un client de la société Bergen depuis environ 18 ans et cette dernière est son mandataire autorisé dans la présente cause. Mme Ozaruk a expliqué que la société Bergen a deux bureaux : l'un situé à Yorkville, au centre-ville de Toronto (Ontario), et l'autre à Concord, au nord de Toronto. Mme Ozaruk est responsable du bureau de Concord.

Mme Ozaruk a déclaré avoir reçu la demande de remboursement de son frère, M. Douglas Bergen, peu après que la demande eut été signée le 4 septembre 1992. La demande de l'appelant faisait partie d'un groupe de cinq demandes signées que Mme Ozaruk retenait, en attendant la réponse à une autre demande produite en octobre 1991 concernant une université.

Mme Ozaruk a affirmé avoir mis à la poste les demandes le 14 septembre 1992, entre 16 h et 16 h 30, dans la boîte aux lettres qu'elle a l'habitude d'utiliser, laquelle est située dans un centre commercial près de son bureau. Elle a précisé l'avoir fait à la demande de son frère inquiet qui, en début d'après-midi, lui avait téléphoné pour lui demander de poster les demandes la journée même parce que, selon certaines rumeurs, la Loi allait être modifiée. Mme Ozaruk a indiqué qu'elle avait affranchi les enveloppes avec la machine à affranchir du bureau avant de les mettre à la poste. Mme Ozaruk a aussi mentionné qu'elle se souvenait de l'heure approximative à laquelle elle avait posté les enveloppes contenant les demandes parce qu'elle voulait s'assurer de les mettre à la poste avant la dernière levée, à 17 h. En outre, elle se rappelait qu'il s'agissait d'un lundi parce qu'elle avait eu une séance de physiothérapie au cours de l'avant-midi et qu'elle a l'habitude de prendre ces rendez-vous le lundi.

Mme Ozaruk a affirmé que son frère lui a téléphoné le jour suivant pour confirmer que les demandes avaient été postées le 14 septembre 1992. Il lui a dit à ce moment que les modifications à propos desquelles il s'inquiétait avaient bel et bien été apportées et aux termes de celles-ci, les demandes de remboursement devaient être produites avant le 15 septembre 1992.

Au cours du contre-interrogatoire, Mme Ozaruk a déclaré qu'à son avis, si les demandes avaient été postées avant 17 h le 14 septembre 1992, le cachet d'oblitération de la poste devait indiquer cette date. En réponse à des questions formulées par le Tribunal, elle a précisé les raisons pour lesquelles les demandes n'avaient pas été produites plus tôt. Elle a indiqué qu'elle croyait avoir jusqu'en 1995 pour les produire afin que l'appelant ait droit au remboursement. Mme Ozaruk a confirmé qu'elle était la seule utilisatrice de la machine à affranchir à son bureau.

M. Bergen, vice-président de Bergen, a aussi témoigné pour le compte de l'appelant. Il a déclar 9‚ qu'il travaille pour la société Bergen depuis 19 ans et qu'il est la personne la plus au courant du dossier concernant la demande de remboursement de l'appelant. Il a aussi déclaré avoir obtenu la demande signée de l'appelant le 4 septembre 1992.

M. Bergen a indiqué que Mme Ozaruk avait conservé la demande de remboursement de l'appelant avec les autres demandes qui, pour la plupart, concernaient des clients de sa sœur. Il a ajouté que ces demandes avaient été retenues en attendant la réponse à une autre demande qu'il avait produite antérieurement pour le compte d'une université.

M. Bergen a témoigné avoir été mis au courant de rumeurs par diverses relations au sein de services juridiques et d'entreprises de publication de lois en matière de fiscalité et que ces rumeurs l'avaient amené à conclure que la Loi serait peut-être modifiée. Plus particulièrement, en ce qui a trait à la journée du 14 septembre 1992, il a déclaré que ces relations, de même que des sources au ministère du Revenu national (Revenu Canada), lui avaient indiqué que des modifications seraient peut-être apportées la journée même. Au début de l'après-midi du 14 septembre 1992, M. Bergen était à ce point préoccupé qu'il a parlé à sa sœur et lui a dit de poster les demandes. Dans son témoignage, M. Bergen a aussi déclaré qu'il avait parlé à M. Stanley Farber de Revenu Canada le 15 septembre 1992 et que, bien qu'il était alors en possession d'une copie des modifications proposées, il n'avait rien dit à ce dernier. Il a soutenu avoir agi de cette façon parce qu'il craignait de discuter ouvertement de la demande de remboursement de l'appelant et de celles d'autres clients avec M. Farber. M. Bergen a confirmé avoir parlé à sa sœur le 15 septembre 1992 et a déclaré que cette dernière l'avait informé du fait qu'elle avait posté les demandes la journée précédente.

Au cours du contre-interrogatoire, M. Bergen a soutenu ne pas avoir discuté de la demande de l'appelant et de celles d'autres clients avec M. Farber le 15 septembre 1992. M. Bergen a confirmé avoir parlé à Mme Astrid Smith-Remy, agente des appels dans la présente cause, le 25 juin 1993 et a déclaré que, dans le cadre de cette conversation, il a mentionné avoir été mis au courant le 14 septembre 1992 des modifications de la Loi. En outre, M. Bergen a confirmé avoir dit à Mme Smith-Remy que sa sœur avait posté les demandes [traduction] «du bureau nord» le 14 septembre 1992.

Pendant l'interrogatoire, à la demande du Tribunal, l'avocat de l'intimé a produit l'enveloppe dans laquelle la demande a été postée et celle-ci a été admise à titre de pièce. En ce qui a trait au timbre et au cachet d'oblitération sur l'enveloppe, l'avocat de l'appelant a indiqué que les parties s'entendaient pour dire que le timbre de la machine à affranchir indiquait le 14 septembre 1992, mais qu'elles n'étaient pas d'accord sur le fait que le cachet d'oblitération était en date du 15 septembre 1992.

M. Farber, qui est gestionnaire de la Section des biens immobiliers, Politique et législation, pour le compte de Revenu Canada depuis avril 1992, a témoigné en faveur de l'intimé. M. Farber a expliqué que sa section doit fournir des conseils aux différents bureaux régionaux et aux bureaux de district concernant la taxe sur les produits et services (TPS) en ce qui a trait à l'interprétation des lois en matière de TPS et aux remboursements de la TVF qui s'y rattachent. M. Farber a déclaré qu'il a commencé à traiter le dossier de l'appelant à la suite d'une demande de renseignements d'un bureau de district au sujet de la demande produite en octobre 1991. Le bureau de district avait alors exprimé ses préoccupations à l'égard de la demande parce que cette dernière donnerait droit à un remboursement exigible selon un montant pour lequel un remboursement avait déjà été accordé et qu'en conséquence, il n'y aurait aucune TPS à verser. Le bureau de district a demandé à M. Farber de s'entretenir avec M. Bergen au sujet de cette demande et M. Farber a par la suite communiqué périodiquement avec M. Bergen au sujet de l'état de la demande.

Quant à la conversation téléphonique entre MM. Farber et Bergen le 15 septembre 1992, M. Farber a témoigné avoir dit à M. Bergen que la demande produite en octobre 1991 serait acceptée, sous réserve de la vérification de certains calculs, et que les demandes produites après le 14 septembre 1992 seraient rejetées. De plus, M. Farber a affirmé qu'au cours de la conversation, M. Bergen a déclaré ne pas avoir les modifications de la Loi. Une fois la conversation terminée, M. Farber a envoyé à M. Bergen par télécopieur une copie des parties pertinentes de la motion de voies et moyens [3] .

Au cours du contre-interrogatoire, M. Farber a confirmé que, lors de ses entretiens avec M. Bergen avant le 14 septembre 1992, il avait demandé à ce dernier s'il savait si d'autres demandes en ce sens allaient être produites.

Mme Smith-Remy, agente principale des appels, bureau régional de Toronto, Revenu Canada, a aussi témoigné pour le compte de l'intimé. Mme Smith-Remy occupe son poste depuis le mois de novembre 1991 et elle a été chargée du dossier de l'appelant. Elle a confirmé avoir rencontré M. Bergen ainsi que le signataire de la demande de l'appelant le 22 juin 1993. Elle a déclaré que la rencontre a principalement porté sur les façons de déterminer la date indiquée par le cachet d'oblitération sur l'enveloppe contenant la demande. À la suite de cette rencontre, Mme Smith-Remy a parlé à M. Bergen au téléphone le 25 juin 1993. C'est au cours de cette conversation que M. Bergen l'a informée que la demande avait été postée par sa sœur [traduction] «quelque part au nord» le 14 septembre 1992.

Au cours du contre-interrogatoire, Mme Smith-Remy a soutenu qu'à son avis, les réponses fournies par M. Bergen aux questions concernant la date et l'endroit où avait été postée la demande étaient vagues. Plus précisément, elle aurait aimé savoir à quelle boîte aux lettres la demande avait été postée aux fins de vérification car, selon elle, le cachet d'oblitération de Postes Canada sur l'enveloppe indiquait le 15 septembre 1992. Mme Smith-Remy a déclaré ne pas être prête à admettre la date indiquée par la machine à affranchir comme cachet d'oblitération parce que la machine à affranchir pouvait être trafiquée. Mme Smith-Remy a convenu que, le 16 septembre 1992, la demande de l'appelant avait été estampillée «Reçu» par le [traduction] «bureau central de l'accise de Toronto», Revenu Canada, situé dans le même édifice que son bureau et que, bien qu'il n'y ait aucun moyen de savoir l'heure exacte de réception de la demande ce jour-là, il est possible qu'il s'agisse du matin du 16 septembre 1992. En réponse à des questions posées par le Tribunal, Mme Smith-Remy a affirmé que, selon elle, le deuxième chiffre du cachet d'oblitération de Postes Canada ne pouvait être un 3, un 4 ou un 6 et qu'il devait donc s'agir d'un 5.

Dans sa plaidoirie, l'avocat de l'appelant a fait valoir que le Tribunal a déjà déterminé qu'aux fins de l'application de la Loi, la date de mise à la poste d'une demande est considérée comme la date de production de la demande. Les éléments de preuve, a-t-il déclaré, indiquent que le «bureau central de l'accise de Toronto», Revenu Canada, a reçu la demande le 16 septembre 1992, ce qui, selon lui, vient appuyer le témoignage de l'appelant selon lequel la demande a été postée le 14 septembre 1992. Il a fait remarquer que M. Bergen a expliqué pourquoi la demande de l'appelant n'avait pas été produite plus tôt et a déclaré que les réserves de M. Bergen face à l'intimé s'étaient avérées fondées, comme le confirme le fait que M. Farber a admis avoir essayé de découvrir par l'entremise de M. Bergen si d'autres demandes avaient été produites. L'avocat a soutenu que la décision d'attendre la réponse à la demande produite en octobre 1991 était logique, car elle permettrait de déterminer quelle méthode était utilisée pour calculer le remboursement, étant donné que l'une comme l'autre des méthodes utilisées était complexe.

L'avocat de l'appelant a fait valoir que le témoignage clair et sans équivoque de Mme Ozaruk en ce qui a trait à la date de mise à la poste de la demande, soit le 14 septembre 1992, n'avait pas été contesté par l'intimé. Il a souligné que, malgré le fait que le Ministre avait été mis au courant de ces éléments de preuve en juin 1993, ce dernier n'y avait pas donné suite puisque personne à Revenu Canada n'avait communiqué avec Mme Ozaruk. De plus, il a fait valoir que les éléments de preuve montraient que le Ministre n'avait pas cherché à savoir s'il était possible de recevoir au centre-ville de Toronto, le 16 septembre 1992, du courrier mis à la poste le 15 septembre 1992 dans la région métropolitaine de Toronto.

L'avocat de l'intimé a soutenu que le Tribunal a déjà déterminé que l'expression «produite» doit être interprétée de manière uniforme et qu'à cet égard, un cachet d'oblitération constitue la preuve de la date à laquelle une demande est postée et, par le fait même, produite [4] . Il a fait valoir que dans la présente cause, puisque le cachet d'oblitération de Postes Canada figurant sur l'enveloppe était daté du 15 septembre 1992, cette date doit être considérée comme étant la date de production de la demande, faute d'éléments de preuve concluants permettant de déterminer que la demande avait en fait été postée à une date antérieure.

En ce qui a trait aux éléments de preuve fournis par Mme Ozaruk, l'avocat de l'intimé a avancé qu'il y avait des contradictions dans son témoignage du fait qu'elle convenait que, si la demande avait été postée avant 17 h, le cachet d'oblitération aurait été en date du 14 septembre 1992. L'avocat a aussi laissé entendre qu'il y avait des contradictions dans le témoignage de M. Bergen, notamment en ce qui a trait à la date à laquelle il a été informé des modifications de la Loi et à la date à laquelle la demande a réellement été postée. L'avocat a soutenu que, en raison des contradictions dans le témoignage de M. Bergen, aucun élément de preuve concluant autre que la date du cachet d'oblitération de Postes Canada, soit le 15 septembre 1992, n'a été présentée au Tribunal et qu'en conséquence, cette date devait être considérée comme la date à laquelle la demande a été postée et, par le fait même, produite. Finalement, l'avocat a déclaré que si le Tribunal rendait une décision en faveur de l'appelant, l'affaire devait être renvoyée au Ministre pour qu'il traite la demande de la façon courante.

En réponse, l'avocat de l'appelant a fait valoir que les éléments de preuve montraient que les fonctionnaires de Revenu Canada se fiaient uniquement au cachet d'oblitération de Postes Canada qui n'était pas bien lisible, et qu'ils n'ont pas tenu compte de la date indiquée lisiblement par le timbre de la machine à affranchir, c'est-à-dire le 14 septembre 1992. L'avocat a par ailleurs fait remarquer que l'expression «cachet d'oblitération» n'est définie dans aucune loi et a déclaré que cette affaire ne peut reposer uniquement sur les caprices de Postes Canada, à savoir si cette société appose le cachet d'oblitération de la journée suivante lorsque les levées sont faites après une certaine heure.

Pour le Tribunal, il est clair qu'aux termes de l'article 121 de la Loi, la demande faisant l'objet de la présente cause devait être produite avant le 15 septembre 1992 pour que l'appelant ait droit au remboursement. Les parties ont convenu que la question que doit trancher le Tribunal en l'espèce consiste à déterminer si la demande de remboursement a été postée le 14 septembre 1992.

Le Tribunal convient avec l'avocat de l'intimé que les déclarations antérieures du Tribunal relativement à la date à laquelle une demande est produite, y compris les décisions citées [5] , peuvent être résumées comme signifiant qu'en l'absence d'éléments de preuve concluants qui permettent de déterminer qu'une demande a été postée à une date antérieure, la date de mise à la poste doit être considérée comme la date de production de la demande, le cachet d'oblitération en faisant foi. Dans la présente cause, le Tribunal est d'avis que des éléments de preuve concluants montrent que la demande de l'appelant a été postée le 14 septembre 1992. Le Tribunal est persuadé, après avoir entendu le témoignage de Mme Ozaruk, que cette dernière a posté la demande le 14 septembre 1992. Le Tribunal fait remarquer que le témoignage de Mme Ozaruk n'a pas été contesté au cours de l'audience et, comme les éléments de preuve l'indiquent, les fonctionnaires de l'intimé n'ont jamais vérifié cet élément de preuve directement auprès d'elle pendant que le présent litige faisait l'objet d'une enquête, même s'ils avaient été mis au courant de cet élément de preuve en juin 1993. Cette conclusion est aussi compatible avec l'élément de preuve présenté concernant la machine à affranchir de la société Bergen. En outre, de l'avis du Tribunal, même si Mme Ozaruk a posté la demande après la dernière levée de Postes Canada pour cette journée, soit avant ou après 17 h, les éléments de preuve révèlent tout de même qu'elle a mis la demande à la poste le 14 septembre 1992.

Par conséquent, l'appel est admis. Le Tribunal est d'avis que, étant donné que l'avocat de l'intimé l'a informé que ce dernier n'avait pas encore fini de traiter la demande de l'appelant, la présente affaire doit être renvoyée au Ministre pour qu'il prenne les mesures qui s'imposent pour finir de traiter la demande de remboursement de l'appelant.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E-15.

2. L.C. 1993, ch. 27, art. 7.

3. Déposée le lundi 14 septembre 1992, Document parlementaire n o 343 - 1/310F.

4. Moto Optical Ltd. c. Le ministre du Revenu national , appel n o AP-92-283, le 23 février 1994; et Lakhani Gift Store c. Le ministre du Revenu national , appel n o AP-92-167, le 15 novembre 1993.

5. Ibid ., voir aussi Vern Glass Company (1976) Limited c. Le ministre du Revenu national , appel n o AP-92-221, le 13 décembre 1993.


Publication initiale : le 26 mai 1997