CABLECOR DATA LINES LIMITED

Décisions


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v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-93-304

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mercredi 2 novembre 1994

Appel no AP-93-304

EU ÉGARD À un appel entendu le 18 mai 1994 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 3 septembre 1993 concernant un avis d'opposition signifié aux termes de l'article 81.17 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

CABLECOR DATA LINES LIMITED Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis en partie. Le Tribunal renvoie l'affaire à l'intimé pour qu'il calcule et rembourse, le cas échéant, les pénalités et les intérêts versés par erreur par l'appelant et ce, conformément à la présente décision.



Robert C. Coates, c.r. ______ Robert C. Coates, c.r. Membre présidant

Anthony T. Eyton ______ Anthony T. Eyton Membre

Raynald Guay ______ Raynald Guay Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le 5 octobre 1992, l'appelant a demandé un remboursement de 39 031,41 $ au titre de paiements de la taxe de vente fédérale prétendument versés par erreur. La demande de remboursement portait sur la période comprise entre le 1 er novembre 1989 et le 31 décembre 1990. Dans un avis de détermination, le ministre du Revenu national a accordé un remboursement de 6 270,88 $. En réponse à l'avis d'opposition signifié par l'appelant, le montant du remboursement a été rajusté à 14 759,16 $. Le reste du montant a été refusé parce que les paiements au titre de la taxe de vente fédérale pour la période allant du 1 er novembre 1989 au 31 décembre 1990 avaient été faits avant le 5 octobre 1990 et que, par conséquent, la demande de remboursement de l'appelant avait été faite après le délai de deux ans prévu à l'article 68 de la Loi sur la taxe d'accise. La demande de remboursement de l'appelant comprenait des paiements en trop de la taxe de vente fédérale sur lesquels l'appelant avait dû payer des pénalités et des intérêts pour paiements tardifs. Dans un avis de décision, le ministre du Revenu national a remboursé les paiements en trop, mais il n'est pas établi clairement si les pénalités et les intérêts sur ces montants ont aussi été remboursés.

Les deux questions en litige dans le présent appel consistent à déterminer si : 1) l'appelant a droit à un remboursement de la taxe de vente fédérale versée par erreur avant le 5 octobre 1990; et 2) l'appelant a droit à un remboursement des pénalités et des intérêts versés sur les paiements en trop de la taxe de vente fédérale, paiements en trop qui ont par la suite été remboursés par le ministre du Revenu national.

DÉCISION : L'appel est admis en partie. Le Tribunal conclut, pour la première question, que l'appelant n'a pas droit à un remboursement de la taxe de vente fédérale pour les paiements versés avant le 5 octobre 1990. Aux termes de l'article 68 de la Loi sur la taxe d'accise, une personne peut demander le remboursement de la taxe de vente fédérale versée par erreur dans les deux ans suivant le paiement des sommes en cause. Pour ce qui est de la deuxième question, le Tribunal conclut que l'appelant a droit au remboursement des pénalités et des intérêts versés après le 5 octobre 1990 sur les paiements en trop de la taxe de vente fédérale qui ont fait l'objet d'un remboursement aux termes de l'avis de décision.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 18 mai 1994 Date de la décision : Le 2 novembre 1994
Membres du Tribunal : Robert C. Coates, c.r., membre présidant Anthony T. Eyton, membre Raynald Guay, membre
Avocat pour le Tribunal : Heather A. Grant
Greffier : Anne Jamieson
Parties : Douglas E. Evans, pour l'appelant Joanne W. Newton, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi) à l'égard d'une détermination du ministre du Revenu national (le Ministre) qui a eu pour effet de rejeter en partie une demande de remboursement de la taxe de vente fédérale (TVF) prétendument versée par erreur. Le présent appel porte sur deux questions. Dans un premier temps, l'appel a pour objet de déterminer si l'appelant a droit à un remboursement de la TVF versée par erreur entre le 1er novembre 1989 et le 4 mai 1990, remboursement qui a été refusé par le Ministre parce que la demande de remboursement avait été faite après le délai de deux ans prévu à l'article 68 de la Loi. Dans un deuxième temps, l'appel a pour objet de déterminer si l'appelant a droit à un remboursement des pénalités et des intérêts versés sur les paiements en trop de la TVF entre le 5 mai et le 31 décembre 1990, ces paiements en trop ayant par la suite été remboursés à l'appelant aux termes d'un avis de décision du Ministre daté du 3 septembre 1993.

Le Tribunal a statué sur l'affaire sur la foi d'exposés écrits, conformément à l'article 25 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur [2] , en se fondant sur les documents versés au dossier du Tribunal qui comprenaient un exposé conjoint des faits et des mémoires déposés par les parties.

Dans l'exposé conjoint des faits, il est indiqué que pendant la période en cause l'appelant fabriquait des él 9‚ments de câbles pour ordinateurs et matériel de télécommunications ainsi que de l'équipement terminal. Le 5 octobre 1992, l'appelant a demandé un remboursement de 39 031,41 $ pour la période allant du 1er novembre 1989 au 31 décembre 1990 au titre de la TVF prétendument versée par erreur. Dans un avis de détermination, le Ministre a admis la demande en partie, soit pour un montant de 6 270,88 $, mais a refusé le reste du montant parce qu'il portait sur des marchandises vendues avant le 5 octobre 1990 et que, par conséquent, la demande avait été faite après le délai prescrit pour ces marchandises. Le 18 février 1993, l'appelant a signifié un avis d'opposition en réponse à l'avis de détermination du Ministre. Le Ministre a admis l'opposition en partie et a rajusté le montant du remboursement à 14 759,16 $. Le Ministre a procédé à ce rajustement parce que le délai prescrit de deux ans est calculé à compter de la date du paiement des taxes plutôt que de la date de la vente des marchandises. Le remboursement prévu dans l'avis de décision du Ministre portait sur la période comprise entre le 5 mai et le 31 décembre 1990. Le reste du montant a été refusé parce que les paiements de la TVF pour la période allant du 1er novembre 1989 au 4 mai 1990 ont été versés avant le 5 octobre 1990 et que, par conséquent, la demande pour ces sommes n'avait pas été faite dans le délai prescrit.

Dans son avis d'opposition, l'appelant a soutenu avoir payé la TVF sur le prix de vente des marchandises à revendre même si, aux termes de la Loi, la TVF ne doit être payée que sur le prix coûtant de telles marchandises. L'appelant a payé le montant plus élevé parce que ses systèmes informatiques ne pouvaient distinguer les marchandises à revendre des marchandises fabriquées qu'il vendait. Bien que conscient du fait que des paiements en trop avaient été versés, l'appelant n'a pas été en mesure, compte tenu de l'activité commerciale intense en 1990 et 1991, de procéder à un examen manuel des transactions avant le début de 1992 et de déterminer le montant des paiements en trop versés pour les transactions effectuées entre le 1er novembre 1989 et le 31 décembre 1990.

Bien que l'appelant ait continué à verser régulièrement la TVF jusqu'en août 1990, y compris des paiements en trop, il a retenu tout autre paiement en attendant la détermination concernant les paiements en trop de la TVF. L'appelant a cependant versé les montants impayés entre le 4 janvier et le 8 février 1991. L'appelant a soutenu avoir versé les montants de TVF dus parce qu'il croyait pouvoir réclamer tous les paiements en trop de la TVF versés entre le 1er novembre 1989 et le 31 décembre 1990, à condition de présenter sa demande dans les deux ans suivant le premier paiement des sommes dues. Ces paiements ayant été faits en retard, des pénalités et des intérêts ont été exigés pour le montant total des paiements, y compris les paiements en trop de la TVF. Au début de 1992, l'entreprise de l'appelant s'était suffisamment stabilisée pour lui permettre de procéder à un examen manuel de ses transactions et de déterminer sur quels articles la TVF avait été payée en trop pour la période comprise entre le 1er novembre 1989 et le 31 décembre 1990. Cet examen a pris environ neuf mois et la demande de remboursement de l'appelant a été faite au ministère du Revenu national (Revenu Canada) le 5 octobre 1992.

Aux fins du présent appel, la disposition applicable de la Loi stipule ce qui suit :

68. Lorsqu'une personne, sauf à la suite d'une cotisation, a versé des sommes d'argent par erreur de fait ou de droit ou autrement, et qu'il a été tenu compte des sommes d'argent à titre de taxes, de pénalités, d'intérêts ou d'autres sommes en vertu de la présente loi, un montant égal à celui de ces sommes doit, sous réserve des autres dispositions de la présente partie, être payé à cette personne, si elle en fait la demande dans les deux ans suivant le paiement de ces sommes.

L'appelant a soutenu s'être fié aux assurances fournies par l'intimé selon lesquelles il pourrait demander le remboursement de tous les paiements en trop de la TVF versés entre le 1er novembre 1989 et le 31 décembre 1990, à condition de demander un remboursement dans les deux ans suivant le 4 janvier 1991. Par conséquent, en faisant sa demande le 5 octobre 1992, l'appelant considérait l'avoir produite dans le délai prescrit. Par ailleurs, l'appelant a soutenu que même s'il n'a pas fait sa demande de remboursement dans le délai prescrit, il faut tenir compte de circonstances atténuantes, notamment de la restructuration importante subie par son entreprise à la suite de la récession et du processus fastidieux que représente l'examen manuel de chaque transaction afin de calculer les paiements en trop de la TVF, à l'origine de la production tardive de la demande. Par conséquent, pour des raisons d'équité, il devrait pouvoir recouvrer la TVF versée par erreur.

Dans son mémoire, l'intimé a soutenu que le Tribunal n'est pas habilité à annuler ou à proroger le délai prescrit à l'article 68 de la Loi. Le Tribunal est lié par la loi et ne peut accorder de redressement équitable même si l'application de la loi cause des difficultés financières à l'appelant. De plus, la Couronne n'est pas liée par les observations faites par des fonctionnaires de Revenu Canada aux contribuables, si ces observations vont à l'encontre des dispositions expresses de la loi. L'intimé n'a pas abordé la deuxième question qui porte sur l'admissibilité de l'appelant à un remboursement des pénalités et des intérêts.

Le Tribunal estime que la demande de remboursement de l'appelant relativement aux paiements en trop de la TVF faits avant le 5 octobre 1990 est frappée de prescription. L'article 68 de la Loi stipule qu'une demande de remboursement des sommes payées par erreur doit être faite dans les deux ans suivant le paiement des sommes en question. Puisque la demande de remboursement de l'appelant a été faite le 5 octobre 1992, l'appelant ne peut recouvrer les montants de la TVF payés en trop pour la période allant du 1er novembre 1989 au 4 mai 1990, ces paiements ayant été faits avant le 5 octobre 1990. Par ailleurs, le Tribunal ayant été établi par une loi, ses pouvoirs ou sa compétence sont limités par la loi. Bien que le Tribunal compatisse à la situation de l'appelant, il n'a pas la compétence voulue pour déroger à la loi et tenir compte des principes d'équité dans les décisions qu'il rend [3] .

En ce qui a trait à la deuxième question, le Tribunal estime que l'appelant a droit à un remboursement des pénalités et des intérêts versés après le 5 octobre 1990 et qui ont été calculés sur les paiements en trop de la TVF versés entre le 5 mai et le 31 décembre 1990. Aux termes de l'article 68 de la Loi, une personne peut obtenir le remboursement des pénalités et des intérêts versés par erreur, à condition d'en faire la demande dans les deux ans suivant le paiement de ces sommes. Le Tribunal est d'avis que les pénalités et les intérêts qui ont fait l'objet d'une cotisation au titre des paiements en trop de la TVF faits entre le 5 mai et le 31 décembre 1990 ont été versés par erreur, les paiements en trop étant eux-mêmes considérés comme ayant été faits par erreur et remboursés à l'appelant conformément à l'avis de décision du Ministre daté du 3 septembre 1993. Étant donné que l'appelant a fait sa demande de remboursement le 5 octobre 1992, les pénalités ou les intérêts versés par erreur après le 5 octobre 1990 devraient être remboursés. Le Tribunal n'a pu déterminer, sur la foi des documents dont il disposait, si l'intimé avait en fait remboursé ces pénalités et intérêts à l'appelant.

Par conséquent, le Tribunal admet l'appel en partie et renvoie l'affaire à l'intimé pour qu'il examine la demande de l'appelant et lui rembourse les pénalités et les intérêts versés après le 5 octobre 1990 sur les paiements en trop de la TVF remboursés par le Ministre conformément à l'avis de décision daté du 3 septembre 1993, si ces pénalités et intérêts n'ont pas déjà été remboursés à l'appelant.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E-15.

2. DORS/91-499, le 14 août 1991, Gazette du Canada Partie II, vol. 125, n o 18 à la p. 2912.

3. Joseph Granger c. Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada , [1986] 3 C.F. 70, confirmée par [1989] 1 R.C.S. 141.


Publication initiale : le 26 mai 1997