TEE-COMM ELECTRONICS INC.

Décisions


TEE-COMM ELECTRONICS INC.
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-94-075

TABLE DES MATIERES

Ottawa, le vendredi 21 avril 1995

Appel no AP-94-075

EU ÉGARD À un appel entendu le 3 novembre 1994 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 1er mars 1994 concernant un avis d'opposition signifié aux termes de l'article 81.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

TEE-COMM ELECTRONICS INC. Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis.


Lise Bergeron ______ Lise Bergeron Membre présidant

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre

Robert C. Coates, c.r. ______ Robert C. Coates, c.r. Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise à l'égard d'une cotisation concernant des ventes de récepteurs-désembrouilleurs intégrés, se composant de récepteurs de signaux de satellite (récepteurs) et de modules de désembrouillage (désembrouilleurs), effectuées entre le 1er avril 1986 et le 30 septembre 1989. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l'intimé a correctement établi que l'installation des désembrouilleurs à l'arrière des récepteurs, effectuée par l'appelant, constituait de la production ou de la fabrication et que l'appelant était donc redevable de la taxe de vente fédérale à l'égard des ventes de récepteurs et de désembrouilleurs aux termes du sous-alinéa 50(1)a)(i) de la Loi sur la taxe d'accise.

DÉCISION : L 2 'appel est admis. De l'avis du Tribunal, les désembrouilleurs ne sont pas des matériaux bruts ou préparés, au sens courant du terme «fabrication», pas plus que l'action d'installer un désembrouilleur à l'arrière d'un récepteur ne donne au désembrouilleur de nouvelles formes, qualités et propriétés ou combinaisons. En outre, le Tribunal n'est pas convaincu qu'en installant les désembrouilleurs à l'arrière des récepteurs, l'appelant a permis aux désembrouilleurs ou aux récepteurs d'exécuter une fonction qu'ils ne pouvaient remplir auparavant. Le Tribunal conclut que la fonction du désembrouilleur est distincte de celle du récepteur et que, même si le désembrouilleur peut améliorer la qualité de la réception du récepteur, il n'en fait pas partie intégrante ou n'en est pas inséparable, car le récepteur peut fonctionner sans désembrouilleur.

Le Tribunal conclut que l'installation du désembrouilleur à l'arrière du récepteur, comme l'installation de la radio dans l'automobile dans la cause Fiat Auto Canada Limited c. La Reine ne constitue pas de l'assemblage. De l'avis du Tribunal, l'installation du désembrouilleur à l'arrière du récepteur n'exige aucune modification du récepteur et est assimilable à la mise en place d'une vidéocassette dans un magnétoscope.

Enfin, le Tribunal n'est pas convaincu que les activités de l'appelant constituent de la préparation de marchandises pour la vente par emballage ou remballage. L'installation des désembrouilleurs à l'arrière des récepteurs visait plutôt à effectuer des essais, et les désembrouilleurs sont demeurés à l'arrière des récepteurs aux fins d'expédition aux marchands qui avaient acheté un désembrouilleur et un récepteur aux fins de revente.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 3 novembre 1994 Date de la décision : Le 21 avril 1995
Membres du Tribunal : Lise Bergeron, membre présidant Arthur B. Trudeau, membre Robert C. Coates, c.r., membre
Avocat pour le Tribunal : Shelley Rowe
Greffier : Anne Jamieson
Ont comparu : Thomas B. Akin et Neil E. Bass, pour l'appelant Geoffrey S. Lester, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi) à l'égard d'une cotisation de 269 630,62 $ concernant des ventes de récepteurs-désembrouilleurs intégrés, se composant de récepteurs de signaux de satellite (récepteurs) et de modules de désembrouillage (désembrouilleurs), effectuées entre le 1er avril 1986 et le 30 septembre 1989. Il a été précisé à l'audience que le montant de la cotisation qui est en cause est de 154 364,03 $ et correspond à [traduction] «des marchandises fabriquées considérées par erreur comme des marchandises destinées à la revente».

Pendant toute la période pertinente, l'appelant était un fabricant titulaire de licence qui importait des récepteurs de la République de Corée et des désembrouilleurs des États-Unis. L'appelant a payé la taxe de vente fédérale (TVF) sur la valeur à l'acquitté des récepteurs et des désembrouilleurs à la date d'importation.

M. Robert A. Kavelman, comptable agréé, a comparu au nom de l'appelant. M. Kavelman était vice-président, Finances, auprès de l'appelant jusqu'en juin 1994. Il en était le secrétaire et un des administrateurs pendant la période entre juin 1986 et juin 1994. Pendant sa période d'emploi auprès de l'appelant, M. Kavelman a traité avec le ministère du Revenu national (Revenu Canada) au sujet de la question en litige dans le présent appel.

Comme l'a déclaré M. Kavelman, l'appelant vend à des marchands au Canada et aux États-Unis du matériel résidentiel de télévision par satellite. M. Kavelman a expliqué qu'un système à satellite se compose d'une antenne parabolique, munie au centre d'un cornet d'alimentation qui recueille les signaux à micro-ondes transmis par un satellite, et d'un câble coaxial au moyen duquel les signaux sont transmis à un récepteur et traités pour être lus par un téléviseur. Un système peut également comprendre un désembrouilleur qui débrouille les signaux et, à la limite, permet de capter d'autres canaux.

M. Kavelman a présenté le [traduction] «catalogue de matériel satellite Tee-Comm», qui renferme une liste de prix de chaque composant d'un système à satellite, de même que les prix des ensembles pouvant comprendre au moins deux composants d'un système. Selon M. Kavelman, cette liste a été utilisée comme outil de commercialisation pour inciter les marchands à acheter des systèmes complets plutôt que des composants.

M. Kavelman a décrit un récepteur comme un dispositif pouvant capter une centaine de signaux de radiodiffusion par l'entremise d'une antenne parabolique. Un désembrouilleur peut être installé dans le port encastré situé à l'arrière d'un récepteur au moyen d'un adapteur branché à l'arrière du désembrouilleur pour assurer la connexion avec le récepteur. Si un désembrouilleur est installé à l'arrière d'un récepteur, ce dernier peut alors recevoir une quarantaine de canaux supplémentaires de télévision payante, à condition que l'utilisateur s'abonne à ce service. Si l'utilisateur n'est pas abonné, les signaux reçus sont brouillés et ne peuvent être perçus clairement ou peuvent ne pas transmettre de son.

M. Kavelman a expliqué qu'aux fins du contrôle de la qualité, l'appelant a installé des désembrouilleurs dans les récepteurs. Après essai, et à condition que le marchand ait commandé un désembrouilleur, l'appelant expédiait le récepteur muni d'un désembrouilleur branché à l'arrière. Étant donné que la plupart des marchands achetaient un récepteur et un désembrouilleur, la plupart des désembrouilleurs n'étaient pas débranchés avant l'expédition.

La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l'intimé a correctement établi que l'installation de désembrouilleurs à l'arrière de récepteurs, effectuée par l'appelant, constituait une activité de production ou de fabrication et que l'appelant était donc redevable de la TVF à l'égard des ventes de récepteurs et de désembrouilleurs aux termes du sous-alinéa 50(1)a)(i) de la Loi.

Les avocats de l'appelant ont fait valoir que l'installation du désembrouilleur dans le récepteur ne constitue pas de la fabrication ni de la production, car cette activité ne débouche pas sur la production d'un article à partir de matériaux bruts ou préparés, pas plus qu'elle ne confère au récepteur de nouvelles formes, qualités et propriétés. De l'avis des avocats, le récepteur et le désembrouilleur, séparément, constituent du matériel entièrement fabriqué et tout à fait autonome; ils ne pouvaient donc pas, à la date d'importation, être considérés comme des matériaux bruts ou préparés à partir desquels un article est produit.

Se reportant à la décision rendue par la Cour fédérale du Canada dans la cause Fiat Auto Canada Limited c. La Reine [2] et à celle du Tribunal dans l'affaire F.D. Jul Inc. c. Le ministre du Revenu national [3] , les avocats de l'appelant ont fait valoir qu'il n'y a fabrication ou production que si les opérations effectuées débouchent sur un produit nouveau capable d'exercer une nouvelle fonction qu'il ne pouvait remplir auparavant. Les avocats ont invoqué le fait que le récepteur est capable de capter des signaux brouillés et non brouillés sans l'aide d'un désembrouilleur et ont ajouté qu'avec un désembrouilleur, le récepteur fonctionne exactement de la même façon, sauf qu'à leur réception, les signaux brouillés sont transmis au désembrouilleur.

Les avocats de l'appelant ont fait valoir que, compte tenu de la décision rendue par la Cour fédérale du Canada dans la cause La Reine c. Stuart House Canada Limited [4] , pour que le Tribunal déclare que les activités de l'appelant représentent de la fabrication, il doit conclure que le récepteur ne peut être utilisé par un utilisateur ordinaire avant que le désembrouilleur n'y soit installé. Les avocats ont soutenu que cette exigence n'est pas satisfaite, car les marchands auxquels l'appelant a vendu les récepteurs et les désembrouilleurs ont retiré les désembrouilleurs des récepteurs avant de les revendre et ont fourni à leurs clients des désembrouilleurs modifiés.

De l'avis des avocats de l'appelant, les activités de l'appelant ne sont pas visées par le sens élargi aux termes de l'alinéa f) de la définition de l'expression «fabricant ou producteur» donnée au paragraphe 2(1) de la Loi. Les avocats ont fait valoir que l'installation du désembrouilleur est analogue à l'installation des radios dans les automobiles, dans l'affaire Fiat, installation qui a été considérée comme l'ajout d'une commodité plutôt que l'assemblage d'une automobile.

Les avocats de l'appelant ont fait valoir que l'expression «pr 9‚pare des marchandises pour la vente», au sens élargi de l'alinéa f) de la définition de l'expression «fabricant ou producteur» donnée au paragraphe 2(1) de la Loi, signifie changer, modifier ou améliorer la présentation commerciale des marchandises en vue de leur vente [5] . Les avocats ont soutenu que l'appelant n'a pas préparé les marchandises pour la vente pour les raisons suivantes : 1) les récepteurs étaient déjà vendus car, avant de passer leurs commandes auprès de l'appelant, les marchands avaient vendu les récepteurs à des utilisateurs finals; et 2) les désembrouilleurs sont demeurés branchés aux récepteurs aux fins d'expédition, comme cela a été le cas dans la cause SMED Manufacturing Inc. c. Le ministre du Revenu national [6] ,et non dans le but de préparer des marchandises pour la vente.

Enfin, se reportant à la décision rendue dans l'affaire Gene A. Nowegijick c. Sa Majesté la Reine [7] , aux termes de laquelle la Cour suprême du Canada a déclaré que «[l]es politiques et l'interprétation administratives ne sont pas déterminantes, mais elles ont une certaine valeur et [...] elles peuvent être un “facteur important” [8] », les avocats de l'appelant ont soutenu qu'il serait utile au Tribunal de réexaminer la fiche de décision 1105/115 de Revenu Canada [9] . Les avocats ont fait valoir que l'installation du désembrouilleur correspond au branchement de plaquettes de circuits imprimés dans des unités centrales, ce qui n'a pas été considéré comme de la fabrication ni de la production dans la fiche de décision 1105/115.

L'avocat de l'intimé a fait valoir que le récepteur acquiert de nouvelles formes, qualités et propriétés ou combinaisons en raison de l'ajout du désembrouilleur. L'avocat a fait remarquer que la combinaison du récepteur et du désembrouilleur crée un produit nouveau, car il s'agit d'une nouvelle forme ou d'une nouvelle combinaison pouvant recevoir une quarantaine de canaux de plus que le récepteur seul. En outre, l'avocat a soutenu que le désembrouilleur transforme le récepteur en un produit offrant des canaux plus précis que le récepteur utilisé seul, ce qui constitue une amélioration de la fonction principale du récepteur. Pour étayer son argument, l'avocat a invoqué le fait que l'appelant donne des descriptions et des codes différents au récepteur et au récepteur muni d'un désembrouilleur.

L'avocat de l'intimé a soutenu que les faits dans la cause Fiat sont différents de ceux du présent appel parce que l'ajout du désembrouilleur, contrairement à la radio et aux haut-parleurs mis en place dans l'automobile, améliore la fonction principale du récepteur.

Invoquant la décision rendue par la Cour fédérale du Canada dans la cause ECG Canada Inc. c. La Reine [10] , l'avocat de l'intimé a fait valoir que les activités de l'appelant constituaient de l'emballage ou du remballage au sens de l'alinéa f) de la définition de l'expression «fabricant ou producteur» donnée au paragraphe 2(1) de la Loi et que les récepteurs et les désembrouilleurs n'étaient pas emballés ou remballés obligatoirement aux fins de sécurité en vue de leur expédition, mais qu'ils étaient combinés et remballés pour assurer leur qualité marchande et pour respecter les numéros d'articles stockés et les prix de l'appelant.

L'avocat de l'intimé a fait valoir que l'appelant a mal interprété la fiche de décision 1105/115. Selon l'interprétation de la fiche de décision par l'avocat, le détaillant qui branche des plaquettes de circuit dans la carte-mère d'une unité centrale, dans un magasin de détail, aux fins de vente directe à un client, exécute une activité de fabrication classique et non une activité d'assemblage. De l'avis de l'avocat, les faits présentés dans le cadre du présent appel correspondent davantage à ceux énoncés dans la fiche de décision 1140/122 de Revenu Canada [11] , qui précise que le branchement d'une plaquette facultative dans une unité centrale et la vente de l'unité «améliorée» à un prix global constituent de la fabrication.

Pour que le Tribunal déclare que la cotisation de TVF établie à l'égard de l'appelant relativement à des ventes de désembrouilleurs était exacte, il doit conclure que l'installation de désembrouilleurs à l'arrière de récepteurs constitue de la fabrication ou de la production au sens de l'alinéa 50(1)a) de la Loi, qui prévoit que la TVF est imposée sur les marchandises produites ou fabriquées au Canada.

L'expression «produites ou fabriquées au Canada» a été interprétée dans le cadre de plusieurs appels entendus par le Tribunal et ses prédécesseurs; en outre, le Tribunal s'est constamment reporté à la définition suivante de l'expression «fabrication» tirée de la cause Le Ministre du Revenu national c. Dominion Shuttle Company Limited [12] et adoptée par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Her Majesty the Queen v. York Marble, Tile and Terrazzo Limited [13] :

manufacture is the production of articles for use from raw or prepared material by giving to these materials new forms, qualities and properties or combinations whether by hand or machinery [14] .

([Traduction] la fabrication représente la production à partir de matériaux bruts ou préparés des articles destinés à être utilisés, en donnant aux matériaux de nouvelles formes, qualités et propriétés ou combinaisons soit à la main, soit à la machine.)

De l'avis du Tribunal, les désembrouilleurs ne sont pas des matériaux bruts ou préparés, comme l'indique l'interprétation courante de l'expression «fabrication», pas plus que l'installation d'un désembrouilleur à l'arrière d'un récepteur ne donne au désembrouilleur de nouvelles formes, qualités et propriétés ou combinaisons.

Pour déterminer le sens à accorder à l'expression «matériaux bruts ou préparés» dans la définition du terme «fabrication» fournie par la Cour suprême du Canada, le Tribunal a jugé utile d'examiner les faits particuliers de la cause York Marble. Dans cette affaire, la Cour a décidé que les dalles de marbre importées, découpées à partir de gros blocs en pièces de tailles et d'épaisseurs variables, à surfaces et extrémités brutes et non finies, qui étaient coupées, taillées, meulées, polies et finies, constituaient des matériaux bruts ou préparés auxquels on avait conféré de nouvelles formes, qualités et propriétés ou combinaisons. Le Tribunal a également conclu que la décision rendue par la Commission du tarif dans la cause Skega Canada Limited c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [15] , sur laquelle l'appelant s'est appuyé, est utile. Dans l'affaire Skega, tout en appliquant le critère de la fabrication utilisé dans la cause York Marble, la Commission du tarif a conclu que l'expression «articles en caoutchouc» désignait les produits d'un procédé de fabrication achevé qui sont prêts à remplir la fonction pour laquelle ils ont été conçus. De l'avis du Tribunal, contrairement aux dalles de marbre dans la cause York Marble, les désembrouilleurs en question sont des marchandises entièrement fabriquées qui n'ont été soumises à aucun procédé qui pourrait en modifier la forme, la qualité et les propriétés ou combinaisons, et qui sont prêtes à être utilisées.

Le Tribunal a également étudié la question de savoir si l'installation du désembrouilleur constituait une activité de production. Voici l'interprétation généralement reconnue du terme «production» invoquée par la Cour fédérale du Canada dans la cause Le ministre du Revenu national c. Enseignes Imperial Signs Ltée [16] lorsqu'elle s'est reportée à l'affaire Gruen Watch Company of Canada Ltd. v. Attorney General of Canada [17] :

Il y a production si ce que fait une personne a pour résultat de produire une chose nouvelle. Et une chose est nouvelle lorsqu'elle peut remplir une fonction que ne pouvaient remplir les choses qui existaient auparavant [18] .

Encore une fois, le Tribunal a jugé utile, aux fins de l'interprétation du terme «production», d'envisager ce terme en tenant compte des faits particuliers des causes Gruen Watch et Enseignes Imperial. Dans l'affaire Gruen Watch, il a été conclu que l'action de placer des mouvements de montres importés dans des boîtiers de fer-blanc ou d'aluminium et, dans certains cas, d'y fixer des bracelets pour adapter les montres aux fins d'utilisation courante ou personnelle constituait de la production. Dans la cause Enseignes Imperial, la Cour fédérale du Canada a conclu que la remise à neuf d'enseignes usagées, composées d'un boîtier de métal avec des tubes fluorescents, le tout paré d'un couvercle de plastique transparent sur lequel est peint le nom d'une société, en les nettoyant, en les réparant et en les repeignant, constituait de la production. La Cour a déclaré que les enseignes usagées remises à neuf transmettaient un nouveau message publicitaire et qu'en conséquence, elles remplissaient une nouvelle fonction.

De l'avis du Tribunal, en installant le désembrouilleur à l'arrière du récepteur, l'appelant n'a pas permis au désembrouilleur ou au récepteur d'exécuter une fonction qu'il ne pouvait remplir auparavant. Contrairement aux mouvements de montre dans la cause Gruen Watch et aux enseignes usagées dans l'affaire Enseignes Imperial, qui n'auraient pu être utilisés pour remplir leurs fonctions respectives sans avoir subi certaines modifications, les fonctions du désembrouilleur et du récepteur sont demeurées les mêmes, que l'appelant ait ou non installé le désembrouilleur à l'arrière du récepteur. Le Tribunal conclut que la fonction du désembrouilleur est distincte de celle du récepteur et, même si le désembrouilleur peut améliorer la qualité de la réception du récepteur, il n'en fait pas partie intégrante ou n'en est pas inséparable, car le récepteur peut fonctionner sans désembrouilleur.

L'expression «producteur ou fabricant» au sous-alinéa 50(1)a)(i) est modifiée par l'alinéa f) de la définition de l'expression «fabricant ou producteur» donnée au paragraphe 2(1) de la Loi qui prévoit qu'un fabricant ou un producteur comprend :

toute personne qui, y compris par l'intermédiaire d'une autre personne agissant pour le compte de celle-ci, prépare des marchandises pour la vente en les assemblant, fusionnant, mélangeant, coupant sur mesure, diluant, embouteillant, emballant ou remballant, ou en les enduisant ou les finissant, à l'exclusion d'une personne qui prépare ainsi des marchandises dans un magasin de détail afin de les y vendre exclusivement et directement aux consommateurs.

Pour interpréter et appliquer cette définition dans le cadre du présent appel, le Tribunal se fonde en grande partie sur la décision rendue par la Cour fédérale du Canada dans la cause Fiat qui, à son avis, renfermait des faits très semblables à ceux du présent appel. Dans l'affaire Fiat, la Cour devait déterminer si une société qui importait des automobiles d'Italie et qui faisait installer les radios et les haut-parleurs dans les automobiles par une autre société en son nom était un fabricant ou un producteur et était, par le fait même, redevable de la TVF appliquée aux ventes d'automobiles. La Cour a conclu que l'installation des radios et des haut-parleurs ne constituait ni de la fabrication ni de la production, car les véhicules pouvaient être utilisés sans les radios; en outre, la forme, les qualités ou les combinaisons des véhicules n'étaient pas modifiées. La Cour a également conclu que l'installation de la radio dans l'automobile constituait l'addition d'une commodité, mais qu'il ne s'agissait pas d'un assemblage. En rendant cette conclusion, la Cour a défini ainsi le terme «assembler» : «mettre ensemble diverses pièces pour qu'elles forment un tout».

De l'avis du Tribunal, l'installation du désembrouilleur à l'arrière du récepteur est semblable à l'installation d'une radio dans une automobile; elle ne constitue pas de l'assemblage. En fait, le Tribunal conclut qu'il est encore plus évident dans la présente cause que dans l'affaire Fiat que les activités visées ne constituent pas de l'assemblage. L'installation de la radio dans l'automobile, dans la cause Fiat, exigeait des changements beaucoup plus importants que l'installation du désembrouilleur à l'arrière du récepteur, opération qui ne nécessite aucune modification du récepteur et qui est assimilable à la mise en place d'une vidéocassette dans un magnétoscope. En outre, l'installation du désembrouilleur à l'arrière du récepteur ne vise pas à permettre au récepteur de former un tout en état de fonctionnement, car ce dernier peut recevoir des signaux sans le désembrouilleur.

Enfin, le Tribunal n'est pas convaincu que les activités de l'appelant constituent de la préparation de marchandises pour la vente par emballage ou remballage. L'explication du témoin de l'appelant a persuadé le Tribunal que l'appelant a installé les désembrouilleurs à l'arrière des récepteurs aux fins du contrôle de la qualité et que, dans la plupart des cas, les désembrouilleurs n'ont pas été débranchés aux fins d'expédition avant leur livraison aux marchands, car la plupart des marchands ont acheté un désembrouilleur et un

récepteur. De l'avis du Tribunal, cette situation est semblable à celle de la cause SMED, dans le cadre de laquelle le Tribunal a conclu que les marchandises déjà vendues et emballées aux fins d'expédition ne sont pas des marchandises préparées pour la vente par emballage ou remballage.

Par conséquent, l'appel est admis.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E - 15.

2. [1984] 1 C.F. 203.

3. Appel no AP - 90 - 183, le 18 janvier 1993.

4. [1976] 2 C.F. 421.

5. Note de service du ministère du Revenu national adressée aux directeurs régionaux, en date du 6 juillet 1981, et intitulée Principes et philosophie de la fabrication marginale.

6. Tribunal canadien du commerce extérieur, appel no AP - 93 - 081, le 17 mai 1994.

7. [1983] 1 R.C.S. 29.

8. Ibid. à la p. 37.

9. Fabrication sous forme d'assemblage dans un magasin de détail, le 31 mars 1988.

10. [1987] 2 C.F. 415.

11. Insertion de plaquettes facultatives dans le matériel électronique - fabrication ou non, le 15 août 1984.

12. (1933), 72 C.S. du Québec 15.

13. [1968] R.C.S. 140.

14. Ibid. à la p. 145.

15. (1983), 9 R.C.T. 50.

16. (1990), 116 N.R. 235, Cour d'appel fédérale, no du greffe A - 264 - 89, le 28 février 1990.

17. [1950] O.R. 429, [1950] C.T.C. 440.

18. Supra, note 16 à la p. 239.


Publication initiale : le 28 août 1996