JANA & COMPANY

Décisions


JANA & COMPANY
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-94-150

TABLE DES MATIERES

Ottawa, le mardi 3 septembre 1996

Appel n o AP-94-150

EU ÉGARD À un appel entendu le 7 février 1996 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes,L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national le 6 mai 1994 concernant des demandes de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

JANA & COMPANY Appelant

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis.

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre présidant

Raynald Guay ______ Raynald Guay Membre

Desmond Hallissey ______ Desmond Hallissey Membre

Susanne Grimes ______ Susanne Grimes Secrétaire intérimaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard de quatre décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi sur les douanes qui ont eu pour effet de rejeter les demandes de l'appelant concernant le réexamen de la valeur en douane de certains vêtements importés. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l'intimé a eu raison d'inclure les redevances payées par l'appelant dans la valeur en douane des vêtements importés conformément au sous-alinéa 48(5)a)(iv) de la Loi sur les douanes.

DÉCISION : L'appel est admis. Le Tribunal n'a pas été convaincu que les redevances en question ont été payées, directement ou indirectement, par l'appelant comme condition de la vente des vêtements pour exportation au Canada. En effet, aucun élément de preuve n'a établi l'existence d'un lien, contractuel ou autre, entre les fabricants des vêtements et les concédants, qui pourrait donner à penser qu'il existe une sorte de connexion ou rapport entre la vente de vêtements par ces fabricants pour exportation à l'appelant au Canada et le paiement de redevances par l'appelant aux concédants. En outre, le Tribunal conclut que les éléments de preuve fournis étaient insuffisants pour montrer que les concédants ont exercé un contrôle appréciable sur les fabricants au point de restreindre la capacité de l'appelant d'acheter des vêtements de ces fabricants si l'appelant ne payait pas les redevances aux concédants.

L'examen des accords de licence révèle que les concédants fournissent à l'appelant, et non pas aux fabricants, des échantillons, des dessins, etc., et permettent à l'appelant de faire confectionner les vêtements par l'entreprise de son choix. Selon le témoin de l'appelant, le choix des fabricants par l'appelant n'a jamais été remis en question et les concédants n'ont pas exercé leurs droits concernant l'inspection des installations et des échantillons. En ce qui concerne l'accord de licence exigeant de l'appelant qu'il utilise l'agent des achats du concédant, le Tribunal est d'avis que cet agent n'exerçait pas un contrôle appréciable sur les fabricants qui vendaient, en dernière analyse, à l'appelant les vêtements portant une marque de commerce puisque, en pratique, l'appelant ne recourait pas toujours à l'agent des achats et que, dans tous les cas, l'acheteur de l'appelant était chargé de négocier les contrats avec les fabricants, y compris les prix et la livraison.

À l'audience, l'avocate de l'intimé a soulevé, à titre de seconde argumentation, que les redevances versées aux termes de deux des accords de licence doivent être incluses dans la valeur en douane conformément aux dispositions du sous-alinéa 48(5)a)(v) de la Loi sur les douanes à titre de produit d'une revente ultérieure qui revient ou doit revenir, directement ou indirectement, au vendeur. Le Tribunal conclut que les éléments de preuve ne montrent pas que les redevances reviennent ou doivent revenir, directement ou indirectement, au vendeur, puisque l'appelant choisit souvent ses propres fabricants et recourt fréquemment à des fabricants différents de ceux des concédants, et qu'il n'existait aucun lien entre les agents des achats et les fabricants utilisés.

Lieu de l'audience : Vancouver (Colombie-Britannique) Date de l'audience : Le 7 février 1996 Date de la décision : Le 3 septembre 1996
Membres du Tribunal : Arthur B. Trudeau, membre présidant Raynald Guay, membre Desmond Hallissey, membre
Avocat pour le Tribunal : Shelley Rowe
Greffier : Anne Jamieson
Ont comparu : Kimberley L.D. Cook et Wyatt S. Holyck, pour l'appelant Josephine A.L. Palumbo, pour l'intimé Dalton J. Albrecht, pour Caulfeild Apparel Group Ltd., intervenant Brenda C. Swick-Martin, pour PMI Food Equipment Group (A Division of Premark Canada Inc.), intervenant W. Jack Millar, intervenant





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] (la Loi) à l'égard de quatre décisions [2] rendues par le sous-ministre du Revenu national aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi qui ont eu pour effet de rejeter les demandes de l'appelant concernant le réexamen de la valeur en douane de certains vêtements importés. L'intimé a fondé le refus de chacune des demandes sur les motifs suivants : [traduction] «Les redevances versées se rapportent aux marchandises et sont versées comme une condition de la vente pour exportation au Canada et doivent faire partie de la valeur en douane, conformément aux dispositions de la Loi sur les douanes qui traitent de l'évaluation».

La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l'intimé a eu raison d'inclure les redevances payées par l'appelant dans la valeur en douane des vêtements importés aux termes du sous-alinéa 48(5)a)(iv) de la Loi. Le sous-alinéa 48(5)a)(iv) prévoit ce qui suit :

(5) Dans le cas d'une vente de marchandises pour exportation au Canada, le prix payé ou à payer est ajusté :

a) par addition, dans la mesure où ils n'y ont pas déjà été inclus, des montants représentant :

[...]

(iv) les redevances et les droits de licence relatifs aux marchandises, y compris les paiements afférents aux brevets d'invention, marques de commerce et droits d'auteur, que l'acheteur est tenu d'acquitter directement ou indirectement en tant que condition de la vente des marchandises pour exportation au Canada, à l'exclusion des frais afférents au droit de reproduction de ces marchandises au Canada.

À titre de seconde solution, si le Tribunal conclut que les redevances en question ne doivent pas être ajoutées au prix payé ou à payer pour les vêtements importés aux termes du sous-alinéa 48(5)a)(iv) de la Loi, l'avocate de l'intimé a avancé qu'aux termes du sous-alinéa 48(5)a)(v), certaines des redevances en question doivent être incluses dans le prix payé ou à payer pour les vêtements importés. Le sous-alinéa 48(5)a)(v) prévoit ce qui suit :

(v) la valeur de toute partie du produit de toute revente, cession ou utilisation ultérieure par l'acheteur des marchandises, qui revient ou doit revenir, directement ou indirectement, au vendeur.

Trois intervenants ont comparu à l'audience pour appuyer la demande de l'appelant, à savoir Caulfeild Apparel Group Ltd. (Caulfeild), PMI Food Equipment Group (A Division of Premark Canada Inc.) et monsieur W. Jack Millar [3] .

En réponse à une objection de l'avocate de l'intimé à l'effet qu'elle n'avait pas eu suffisamment de temps pour examiner les exposés des intervenants et y répondre, le Tribunal lui a accordé jusqu'au 26 février 1996 pour déposer des exposés écrits qui répondraient aux nouvelles questions soulevées dans les mémoires des intervenants. Les intervenants ont eu jusqu'au 4 mars 1996 pour déposer leurs réponses. Tous les exposés des parties ont été déposés auprès du Tribunal à temps et, en dépit de certaines objections soulevées par l'avocat de Caulfeild concernant certaines parties de la réponse de l'avocate de l'intimé aux exposés des intervenants, tous les exposés ont été considérés par le Tribunal.

L'appelant, qui exploite également son entreprise sous le nom de International Fashion Group, est un grossiste de vêtements au Canada. L'appelant est un titulaire de licence aux termes d'accords conclus avec quatre sociétés américaines, à savoir Joujou Designs, Inc. (Joujou), Banff, Ltd. (Banff), The BVY Group (BVY) et Norman Scott Ltd. (NSL) (collectivement les concédants), concernant l'utilisation de certaines marques de commerce déposées pour la production, la promotion, la distribution et la vente de certains vêtements. Chacun des accords stipule que l'appelant paiera aux concédants, à titre de propriétaires des marques de commerce, des redevances et droits de licence fondés sur un pourcentage des ventes de vêtements au Canada.

L'accord de licence conclu entre Joujou et l'appelant remonte au 17 août 1989 [4] , et stipule, en partie, que Joujou doit concevoir des vêtements et fournir à l'appelant des styles et que ce dernier a le droit et le permis exclusifs de fabriquer et de vendre au Canada des vêtements de sport pour femmes portant la marque de commerce déposée «Joujou». Les paragraphes 2.4A et 2.6 de l'accord stipulent ensemble que Joujou fournira à l'appelant des échantillons de vêtements et que l'appelant aura le droit d'en produire des copies. Le paragraphe 5 stipule que les vêtements fabriqués seront constitués de matériels spécifiés et approuvés par Joujou et que, si l'appelant conclut un contrat avec un autre fabricant, il doit en informer Joujou et lui donner libre accès aux locaux de fabrication et lui permettre de les inspecter moyennant avis raisonnable. Le paragraphe 5.1A stipule que, dans le cas où Joujou et l'appelant ont signé un contrat avec le même fabricant indépendant, [traduction] «[Joujou] n'aura absolument aucune obligation ni responsabilité à l'égard de [l'appelant] en ce qui concerne le fabricant, concernant, entre autres, la production, la qualité, le prix et la livraison des marchandises, mais ne s'y limitant pas». De plus, le paragraphe 5.2 stipule que [traduction] «[a]vant de distribuer ou de vendre tout vêtement [...] [l'appelant] mettra à la disposition de [Joujou] à des fins d'inspection et d'approbation écrite le modèle original de chacun des vêtements» et [traduction] «fournira de temps en temps des échantillons de production [...] à des fins d'inspection». Enfin, le paragraphe 5.2 précise que [traduction] «Joujou aura également le droit [...] d'inspecter le procédé de production de n'importe lequel des vêtements [...] dans tous les lieux de production».

L'accord de licence conclu entre Banff et l'appelant le 15 avril 1987 [5] , constitue une licence exclusive d'importer, d'utiliser et de vendre au Canada les marques suivantes : «Sweater Bee Knitwear», «Bee Wear Knitwear», «SB Sport» et «Bee Wear Sport». L'article 3 de l'accord stipule, en partie, que Banff partagera avec l'appelant ses méthodes de publicité et de promotion, ses patrons, spécifications de fabrication et méthodes d'importation, et l'article 4 stipule que Banff fournira à l'appelant une copie de chaque texte publicitaire, un ou plusieurs prototypes de chaque vêtement et tous les échantillons de vêtements et de tissus requis. L'article 8 stipule que les vêtements [traduction] «sont fabriqués et importés par [l'appelant] conformément aux spécifications et instructions qui lui seront données par [Banff] et doivent respecter à tous égards les normes élevées concernant le matériel et la finition associées aux vêtements vendus sous cette marque de commerce». L'article 9 stipule, en partie, que l'appelant achètera les vêtements par l'entremise du mandataire de Banff, à savoir Banff (Far East) International, Limited (Banff International) et délivrera une lettre de crédit payable à Banff International.

L'accord de licence conclu entre BVY et International Fashion Group Ltd. (International Fashion) [6] constitue une licence d'utilisation de la marque de commerce déposée Zylospour des vêtements pour hommes. L'article 2 de la section II stipule qu'International Fashion convient [traduction] «de préserver et de maintenir les normes de qualité actuelles des vêtements vendus sous la marque [Zylos]. L'article 8 de la section II stipule qu'International Fashion a [traduction] «plein pouvoir pour acheter les produits portant cette marque déposée [Zylos] chez les fournisseurs qui offriront les meilleurs prix et qualité possibles». Les articles 10 et 11 de la section II stipulent que BVY doit fournir à International Fashion ses collections et ses dessins, ainsi que des échantillons de vêtements et de tissus, et lui accorder [traduction] «des délais réalistes pour qu'elle puisse voir à la production, au contingent et au placement des tissus».

L'accord de licence conclu entre NSL et l'appelant le 1er février 1985 [7] , concerne l'utilisation de la marque de commerce «Sahara Club» relativement à la fabrication, à l'importation et à la vente au Canada de vêtements de sport pour hommes ainsi que, peut-être, de vêtements de sport pour garçons, pour filles et pour femmes. Le paragraphe 4 de l'accord, stipule, en partie, que NSL consultera l'appelant concernant les tissus, les motifs de couleur et l'emballage. Le paragraphe 4 mentionne également les usines ou installations de fabrication de l'appelant. Le paragraphe 5 exige, entre autres, de l'appelant qu'il présente des échantillons de production à NSL pour approbation préalable afin d'assurer le respect des normes de qualité. En outre, le paragraphe 5 stipule que NSL a le droit d'inspecter le procédé de fabrication et les articles produits.

Le témoin de l'appelant, M. Jack Wolfe, associé directeur général de Jana & Company, a indiqué que nombre des dispositions des accords de licence ne sont pas respectées, notamment celles qui portent sur les dépenses minimales de publicité et de promotion, les ventes minimales, le contrôle de la qualité et les modifications des dessins et des styles de vêtements. Il a déclaré qu'aucun des concédants n'avait beaucoup de pouvoir sur le marché et que les seules conditions auxquelles l'appelant s'était strictement conformé en toute circonstance étaient celles concernant le paiement de redevances.

M. Wolfe a dit ignorer qu'il existe un lien entre les fabricants utilisés par l'appelant et les concédants, qu'à sa connaissance les concédants n'ont aucun investissement financier dans les fabricants, et qu'il n'existe aucun accord entre les concédants et les fabricants. Il a reconnu que les concédants sont capables d'influencer certains fabricants en raison de l'intensité de leurs relations d'affaires avec ces fabricants. Cependant, ces fabricants n'étaient pas utilisés uniquement par l'appelant et les concédants, mais également par d'autres sociétés non apparentées. L'appelant n'est pas tenu d'utiliser tel ou tel fabricant et son choix de fabricants n'est pas remis en question. À son avis, même si les accords de licence ne sont pas explicitement discutés avec les fabricants, compte tenu de la nature du secteur de la production des vêtements, tous les fabricants connaissent l'existence des accords de licence, mais n'en ont pas besoin pour fabriquer les marchandises. M. Wolfe s'est déclaré d'accord avec l'avocate de l'intimé pour dire que, normalement, un accord de licence est requis pour exercer des activités commerciales comme celles de l'appelant. Cependant, il a expliqué que les mêmes vêtements pourraient être achetés dans un magasin et copiés sans avoir à conclure un accord de licence et à obtenir les styles et les dessins.

M. Wolfe a confirmé qu'il n'existe aucun accord écrit officiel entre l'appelant et les fabricants et que les seuls éléments prouvant l'existence de relations d'affaires sont les bons d'achat et les lettres de crédit. Les bons d'achat indiquent la composition du tissu, les dimensions, la couleur, la date de livraison et l'étiquette à utiliser. L'appelant envoie une demande par télécopieur afin de déterminer si un fabricant donné peut fournir des vêtements selon certaines conditions. Une fois que le fabricant confirme qu'il peut satisfaire cette demande, aux conditions énoncées, l'appelant délivre un bon de commande suivi d'une lettre de crédit. Les concédants ne participent pas à ces démarches, quel que soit le fabricant auquel l'appelant a recours.

M. Wolfe a également fait des observations concernant les détails de certains accords. À propos de l'accord conclu avec Joujou, il a souligné que, même si l'appelant n'a pas à utiliser les fabricants de Joujou, il cherche à faire exécuter ses activités de fabrication dans les mêmes pays, à savoir l'Inde, le Canada et le Brésil, en ayant recours aux mêmes fabricants. Il a indiqué que le pourcentage d'activités de fabrication exécutées par des fabricants non utilisés par Joujou peut varier mais que, généralement, il représente de 20 à 30 p. 100 du total des activités de fabrication. M. Wolfe a aussi indiqué que, outre les vêtements portant la marque de commerce Joujou, l'appelant a également fabriqué et vendu des vêtements portant des marques privées, notamment celles de Sears, Eaton, Caruba et Thrifty.

Lors de son analyse de l'accord conclu avec Banff, M. Wolfe a déclaré que, même si cet accord stipule que l'appelant doit faire ses achats par l'entremise de l'acheteur de Banff, en pratique l'appelant ne le fait pas toujours. Il a souligné, en particulier, que Banff fait exécuter la plupart de ses activités de fabrication à Macao et que, puisque le contingent alloué au Canada en provenance de Macao est très petit et coûteux, l'appelant fait faire les vêtements à Hong Kong ou au Portugal, où les contingents sont moins coûteux. Dans tous les cas, l'acheteur de l'appelant est responsable de la négociation des contrats avec les fabricants, notamment le prix et les modalités de livraison, et délivre des lettres de crédit établies aux noms des fabricants.

Pour ce qui est du contrat conclu avec BVY, l'appelant recourt normalement aux fabricants de BVY, puisque les quantités achetées sont très petites. Cependant, l'appelant a, dans certaines circonstances, utilisé ses propres fabricants. M. Wolfe a indiqué que BVY n'a pas activement cherché à faire respecter les normes de qualité et que des échantillons de production ne lui ont jamais été fournis. De plus, l'acheteur de l'appelant a négocié tous les contrats avec les fabricants, obtenant fréquemment un prix plus favorable que celui consenti à BVY, et a modifié les styles et dessins de BVY sans son approbation.

Selon M. Wolfe, certaines des usines employées pour fabriquer les vêtements conformément à l'accord conclu avec NSL appartenaient à NSL. Cependant, l'appelant n'a pas eu recours uniquement aux fabricants de NSL, mais également à d'autres de son choix, et NSL n'a jamais remis en question son choix de fabricants. De plus, NSL n'a pas exercé ses droits concernant le contrôle de la qualité et n'a jamais demandé à l'appelant de fournir un échantillon de production.

Dans leur plaidoirie, les avocats de l'appelant ont soutenu que les termes du sous-alinéa 48(5)a)(iv) de la Loi ne visent que les redevances directement ou indirectement liées à une vente entre un vendeur et un acheteur ou importateur. De l'avis des avocats, aucune redevance fondée sur les ventes intérieures nettes n'est payable lorsque l'acheteur ou l'importateur achète des marchandises d'un vendeur. De telles redevances sont plutôt payables lorsqu'un importateur vend les marchandises sur le territoire. La redevance est, par conséquent, une condition des ventes intérieures de l'importateur et non une condition des ventes des marchandises pour exportation.

Les avocats de l'appelant ont renvoyé à deux décisions, l'une rendue par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Signature Plaza Sport Inc. c. Sa Majesté la Reine [8] , et l'autre rendue par le Tribunal dans l'affaire Reebok Canada Inc., A Division of Avrecan International Inc. c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [9] , dans lesquelles il a été établi que les redevances versées par un titulaire de licence avaient correctement été incluses dans la valeur en douane. L'avocat a soutenu que, dans l'affaire Signature Plaza, la Cour d'appel fédérale avait décidé que les redevances étaient passibles de droits parce que les relations existant entre l'acheteur ou l'importateur et le fabricant n'étaient pas des relations d'acheteur - vendeur et que, par conséquent, les redevances étaient une condition de vente indirecte. De la même façon, dans l'affaire Reebok, les redevances ont été jugées passibles de droits comme condition de vente indirecte parce que, conformément à l'un des accords en cause, le concédant exerçait un contrôle appréciable sur la production des importations.

Dans leur plaidoirie concernant les faits particuliers au présent appel, les avocats de l'appelant ont insisté sur l'exigence énoncée au sous-alinéa 48(5)a)(iv) de la Loi, à savoir que le paiement des redevances doit être une condition directe ou indirecte de la vente pour exportation au Canada. De l'avis des avocats, les redevances versées par l'appelant aux concédants n'étaient pas une condition, directe ou indirecte, puisque l'appelant était libre de négocier avec les fabricants et que ceux-ci ne se préoccupaient ni des accords de licence ni du paiement des redevances.

Les avocats de l'appelant ont soutenu qu'il y avait lieu d'établir une distinction entre les faits du présent appel et ceux des affaires Signature Plaza et Reebok. Ils ont affirmé que, contrairement à ces appels, les concédants dans la présente instance n'exercent aucun contrôle sur la fabrication des vêtements importés et n'y participent d'aucune façon. Les avocats ont en outre fait valoir que le Tribunal doit examiner les dispositions des accords conclus entre les concédants et l'appelant compte tenu des éléments de preuve présentés par M. Wolfe concernant la façon d'agir de l'appelant et des concédants et le fait que de nombreuses dispositions des accords ne sont pas respectées. Par exemple, l'appelant prend lui-même ses décisions d'achat, recourt souvent à des fabricants que les concédants n'utilisent pas et modifie souvent des dessins et les styles sans l'approbation de ces derniers, et enfin les concédants n'effectuent aucun contrôle de qualité, ni vérification. Les avocats ont contesté l'affirmation faite par l'avocate de l'intimé selon laquelle Banff et BVY doivent être considérés comme des vendeurs ou des vendeurs réputés, compte tenu des éléments de preuve présentés par M. Wolfe selon lesquels l'appelant achète des marchandises directement de fabricants en sous-traitance, qui n'ont aucun lien avec Banff et BVY, et compte tenu des dispositions de l'article 8 de la section II de l'accord de BVY qui donnent à l'appelant le pouvoir d'acheter des produits des fournisseurs qui offriront les meilleurs prix et qualité possibles.

L'avocat de Caulfeild a soutenu que huit faits essentiels non contestés dans le présent appel appuient une conclusion établissant que les redevances en question ne doivent pas être incluses dans la valeur en douane des vêtements importés : 1) il n'existe aucun lien entre l'appelant et les fabricants; 2) il n'existe aucun lien entre les concédants et les fabricants; 3) l'appelant n'est pas tenu de recourir à des fabricants désignés; 4) dans certains cas, l'appelant et les concédants recourent aux mêmes fabricants; 5) à la connaissance de l'appelant, il n'existe aucun accord entre les concédants et les fabricants; 6) les concédants ne participent pas au processus contractuel relatif aux marchandises importées par l'appelant; 7) les accords conclus entre les concédants et l'appelant ne constituent pas des conditions préalables à la fabrication des marchandises par des fabricants indépendants; 8) les concédants n'ont pas fait strictement observer les dispositions sur le contrôle de la qualité énoncées dans les accords de licence.

L'avocat de Caulfeild a rejeté la position de l'intimé selon laquelle le droit du concédant, prévu à l'accord de licence, de demander l'approbation des échantillons ou l'inspection des marchandises produites par un fabricant indépendant fait du paiement des redevances une condition de la vente des marchandises de ce fabricant au titulaire de licence. Il a souligné que ce droit est une condition établie depuis longtemps dans la Loi sur les marques de commerce [10] et qu'il vise à protéger les droits d'un propriétaire de marque de commerce.

Enfin, l'avocat de Caulfeild a soutenu que les faits dans le présent appel ne doivent pas être assimilés à ceux des affaires Signature Plaza, Reebok ou encore Polygram Inc. c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [11] . L'affaire Signature Plaza portait sur le produit d'une revente ultérieure. Dans l'affaire Polygram, les redevances variaient selon le prix des marchandises et les achats étaient effectués directement d'un concédant ou d'une filiale à part entière du concédant. Ainsi, il existait une connexion directe entre le concédant et le fabricant, et une connexion claire et évidente entre le paiement de la redevance et la capacité d'acheter les marchandises. Dans l'affaire Reebok, des accords de fabrication existaient entre le concédant et les fabricants des marchandises, aux termes desquels les fabricants des marchandises brevetées étaient autorisés à les vendre uniquement à des filiales du concédant ou à d'autres acheteurs approuvés par celui-ci. En outre, le titulaire de licence était autorisé à acheter les marchandises vendues sous cette marque de commerce seulement de ces fabricants.

M. Millar a soutenu que, en général, la valeur des marchandises est le prix payé ou à payer et que la valeur de biens incorporels, tels que les marques de commerce, ne doit être incluse dans la valeur en douane que lorsqu'elle est incluse par les parties dans le prix. Il a soutenu que, pour l'essentiel, la valeur transactionnelle est le prix des marchandises convenu entre l'acheteur et le vendeur dans le cadre de l'acte de vente pour exportation et que l'intention générale de l'Accord relatif à la mise en œuvre de l'article VII de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce [12] , couramment connu à titre de Code, était de ne pas inclure la valeur de biens personnels incorporels pour déterminer la valeur transactionnelle [13] . Il a en outre soutenu que, puisque le Code et la Loi exigent que des droits soient payés uniquement sur la valeur des marchandises, la redevance ne doit généralement pas être ajoutée à la valeur transactionnelle. De plus, il a déclaré que ceci signifie qu'un montant est payé pour les marchandises et un montant distinct est payé pour les droits incorporels.

M. Millar a examiné plusieurs avis consultatifs récents du Comité technique de l'évaluation en douane [14] pour avoir des indications sur la façon de déterminer quand des redevances sont passibles de droits. Dans l'Avis consultatif 4.8 (juillet 1994), il n'existait aucun lien entre l'importateur, le titulaire de licence et le fabricant, et le contrat de vente entre le fabricant et l'importateur ne prévoit le paiement d'aucune redevance. Le Comité technique de l'évaluation en douane a conclu que la redevance n'était pas passible de droits puisque l'obligation de verser la redevance était prévue dans un accord distinct sans rapport à la vente pour exportation et n'était, par conséquent, pas une condition de la vente pour exportation. De même, dans l'Avis consultatif 4.13 (juillet 1994), un importateur a payé à un titulaire de licence auquel il est lié une redevance pour obtenir le droit d'utiliser une marque de commerce, mais a acheté des sacs de sport de divers fournisseurs avec lesquels il n'avait aucun lien. Le Comité technique de l'évaluation en douane a conclu que la redevance n'était pas passible de droits et a affirmé que [traduction] «les marchandises importées sont achetées à différents fournisseurs en vertu de différents contrats et le paiement de la redevance ne constitue pas une condition de la vente de ces marchandises. L'acheteur n'est pas tenu de verser une redevance pour acheter les marchandises. Le montant de la redevance ne doit donc pas être ajouté au prix effectivement payé ou à payer».

L'avocate de l'intimé a soutenu qu'aux termes des articles 47 et 48 de la Loi, la méthode utilisée actuellement pour déterminer la valeur en douane de marchandises importées est la valeur transactionnelle de l'importation et que cette valeur est déterminée en se basant sur le prix payé ou à payer pour les marchandises lorsque celles-ci sont vendues pour exportation au Canada et en ajustant le prix au besoin conformément au paragraphe 48(5). Le sous-alinéa 48(5)a)(iv) exige qu'une redevance soit incluse dans la valeur en douane dans certaines situations.

L'avocate de l'intimé a eu recours au Code pour interpréter les dispositions de la Loi relatives à la valeur transactionnelle. La Partie I du Code, intitulée «Règles d'évaluation en douane», traite de l'évaluation en douane fondée sur la valeur transactionnelle et l'article 8 de la Partie I prévoit, en partie, ce qui suit :

1. Pour déterminer la valeur en douane par application des dispositions de l'article premier, on ajoutera au prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises importées

c) les redevances et les droits de licence relatifs aux marchandises à évaluer, que l'acheteur est tenu d'acquitter, soit directement soit indirectement, en tant que condition de la vente des marchandises à évaluer, dans la mesure où ces redevances et droits de licence n'ont pas été inclus dans le prix effectivement payé ou à payer.

L'avocate de l'intimé a soutenu que le Code reconnaît que certaines marchandises ont une valeur supérieure au coût de leur fabrication matérielle en raison de la propriété intellectuelle intrinsèque aux marchandises et que la composante de propriété intellectuelle reflète une partie de la valeur réelle des marchandises au moment de l'importation.

L'avocate de l'intimé a également renvoyé à un extrait de l'ouvrage Customs Valuation in Canada [15] qui, à son avis, prévoit que le critère permettant de déterminer si le paiement d'une redevance doit être inclus dans la valeur en douane est le suivant : [traduction] «[l]e paiement d'une redevance était requis pour qu'il y ait une vente—en d'autres termes déterminer si le paiement était une condition antérieure à l'accord [...] [S]i l'acheteur avait la possibilité de prendre les marchandises sans la redevance ou le droit de licence, alors le paiement n'était pas une condition de la vente et ne doit pas être passible de droits [16] ».

Selon l'avocate de l'intimé, une redevance doit être incluse dans la valeur en douane de marchandises importées si les conditions suivantes sont remplies : 1) la redevance se rapporte aux marchandises; 2) la redevance est payée directement ou indirectement; 3) la redevance est une condition de la vente des marchandises pour exportation au Canada [17] .

L'avocate de l'intimé a soutenu que les redevances en question se rapportent aux vêtements importés puisqu'elles sont calculées en fonction des ventes de ces vêtements. Pour ce qui est de l'exigence selon laquelle le paiement des redevances doit être une condition de la vente, l'avocate a soutenu que le moment où les redevances sont calculées est sans importance et que le fait que l'appelant soit tenu, aux termes d'accords de licence, de verser des redevances fait de celles-ci des éléments inséparables de l'achat des marchandises. L'avocate a affirmé que, puisque l'appelant a l'obligation contractuelle de payer des redevances en échange du droit de faire fabriquer les vêtements importés portant une marque de commerce, le paiement de redevances est une condition de la vente des vêtements. À l'appui de son argument, elle a renvoyé à la décision du Tribunal dans l'affaire Reebok dans laquelle il a été déclaré que le paiement des redevances peut être une condition de la vente pourvu qu'il existe un certain rapport entre ce paiement et les marchandises importées.

Selon la position adoptée par l'avocate de l'intimé, les concédants contrôlaient indirectement les fabricants puisqu'ils avaient le pouvoir d'approuver les installations de fabrication et la qualité des marchandises produites par l'appelant. De l'avis de l'avocate, il n'est pas nécessaire que les concédants aient des ententes ou des rapports distincts avec les fabricants puisque les accords de licence définissent leurs relations.

De l'avis du Tribunal, seules les redevances qui répondent à la description énoncée au sous-alinéa 48(5)a)(iv) de la Loi doivent être incluses dans la valeur en douane des marchandises importées. Ainsi, pour qu'une redevance soit incluse dans la valeur en douane, il doit s'agir d'une redevance, incluant les paiements pour les brevets d'invention, les marques de commerce et les droits d'auteur, en rapport avec les marchandises que l'acheteur ou l'importateur est tenu de payer, directement ou indirectement, comme condition de la vente des marchandises pour exportation au Canada.

En ce qui concerne l'exigence selon laquelle une redevance, incluant les paiements pour les brevets d'invention, les marques de commerce et les droits d'auteur, se rapporte aux marchandises, le Tribunal constate que, dans l'affaire Polygram, il a conclu qu'un paiement est relatif à des marchandises lorsqu'il ne s'agit pas d'un paiement général indépendant des marchandises particulières importées [18] . Dans l'affaire Reebok, le Tribunal a en outre conclu que les ordonnances qui sont versées pour le droit unique et exclusif et le permis d'utiliser des marques de commerce données en rapport avec la fabrication, la publicité, le marchandisage, la promotion, l'utilisation, la distribution et la vente des marchandises sont versées à l'égard de «marques de commerce» et constituent, par conséquent, des redevances et des droits de licence au sens du sous-alinéa 48(5)a)(iv) de la Loi.

Quant à la disposition exigeant que les redevances soient payées directement ou indirectement comme condition de la vente pour exportation au Canada, le Tribunal a conclu, dans l'affaire Reebok, que le fait que les termes «en tant que condition de la vente» mentionnés au sous-alinéa 48(5)a)(iv) de la Loi sont précédés des mots «directement ou indirectement» donne à penser que, même si une redevance peut ne pas être exigée conformément aux modalités de l'achat lui-même, il peut être considéré comme une condition de la vente tant qu'il existe un lien entre cette redevance et les marchandises achetées [19] . En outre, dans les affaires Reebok et Polygram, le Tribunal a déclaré qu'une redevance serait une condition de la vente de marchandises pour exportation au Canada si l'acheteur ne pouvait acheter ou importer des marchandises sans avoir à payer la redevance. Le Tribunal, dans le présent appel, accepte et retient les interprétations du sous-alinéa 48(5)a)(iv) de la Loi qu'il a déjà exprimées dans les affaires Reebok et Polygram.

En examinant dans quelle mesure les dispositions du sous-alinéa 48(5)a)(iv) de la Loi s'appliqueraient au présent appel, le Tribunal a tenu compte des dispositions particulières des accords de licence ainsi que du témoignage de M. Wolfe concernant la façon dont ces accords fonctionnent concrètement. De l'avis du Tribunal, les redevances en question ont été payées pour le droit de produire, de promouvoir, de vendre et de distribuer au Canada des vêtements portant certaines marques de commerce, et non pas comme condition directe ou indirecte de la vente des vêtements par les fabricants pour exportation à l'appelant au Canada. Le Tribunal n'est pas convaincu par les éléments de preuve qu'il existait un rapport, contractuel ou autre, entre les fabricants de vêtements et les concédants donnant à penser qu'il existait une certaine connexion ou un certain lien entre la vente des vêtements pour exportation par ces fabricants à l'appelant au Canada et le paiement de redevances par l'appelant aux concédants. Le Tribunal estime en outre que les éléments de preuve fournis ne permettent pas de démontrer que les concédants ont exercé un contrôle appréciable sur les fabricants au point de restreindre la capacité de l'appelant d'acheter des vêtements de ces fabricants si l'appelant ne versait pas les redevances aux concédants.

Un examen des accords de licence régissant les redevances en question indique que les concédants exercent certains droits sur le contrôle de la qualité, notamment le droit d'inspecter les échantillons ainsi que les installations et procédés de production. Le Tribunal reconnaît que les concédants auraient pu exercer une influence sur certains des fabricants en raison de l'intensité de leurs relations d'affaires, comme l'a déclaré M. Wolfe. Cependant, dans tous les accords, sauf celui qui a été conclu avec la société Banff, les concédants fournissent à l'appelant, et non pas aux fabricants, des échantillons, des dessins, etc., et permettent à l'appelant de faire fabriquer des vêtements par l'entreprise de son choix. De plus, selon M. Wolfe, en pratique, les fabricants choisis par l'appelant n'ont jamais été remis en question et les concédants n'ont pas exercé leur droit d'inspecter les installations et les échantillons.

Aux termes de l'accord conclu avec Banff, l'appelant était tenu de passer par l'agent des achats de Banff. Cependant, M. Wolfe a déclaré qu'en pratique, l'appelant n'avait pas toujours eu recours à cet agent et que, dans tous les cas, l'acheteur de l'appelant était chargé de négocier les contrats avec les fabricants, incluant le prix et les modalités de livraison. Ainsi, même s'il existe un certain rapport entre Banff et les fabricants par l'entremise de l'agent des achats de Banff, le Tribunal est d'avis qu'aucun élément de preuve n'établit que Banff, ou son agent des achats, a exercé un contrôle appréciable sur les fabricants qui, en dernière analyse, vendaient des vêtements portant la marque de commerce de Banff à l'appelant.

Dans leurs mémoires et à l'audience, les parties ont soutenu que le Tribunal devait tenir compte des dispositions du Code, des avis consultatifs, de la littérature ainsi que des décisions judiciaires et administratives rendues dans d'autres juridictions pour interpréter le sous-alinéa 48(5)a)(iv) de la Loi. Le Tribunal constate qu'au Canada, il est soutenu depuis longtemps que, dans l'interprétation des lois, le sens doit découler du libellé de la loi elle-même et, lorsque les mots d'une loi sont clairs et sans ambiguïté, l'intention du législateur doit être déduite des mots de la loi elle-même et non d'éléments de preuve extrinsèques, par exemple, de l'histoire parlementaire ou de conventions internationales [20] . De plus, le fait d'invoquer des conventions internationales à titre de documents d'interprétation extrinsèques n'est permis que lorsque la législation nationale est ambiguë [21] . Cependant, le juge Gonthier, exprimant l'opinion majoritaire dans l'affaire Corn Growers, a déclaré qu'«il est raisonnable de se référer à une convention internationale dès l'ouverture de l'enquête pour déterminer si la loi nationale renferme une ambiguïté, fut-elle latente [22] ».

Le Tribunal a déjà fait référence au Code et aux avis consultatifs pour interpréter les dispositions de l'article 48 de la Loi [23] . Bien que le Tribunal estime qu'aux fins du présent appel le libellé du sous-alinéa 48(5)a)(iv) ou (v) ou son application ne souffrent d'aucune ambiguïté requérant de se rapporter au Code, à des avis consultatifs ou à des décisions rendues dans d'autres juridictions, il constate que les avis consultatifs auxquels M. Millar a renvoyé sont conformes à l'interprétation donnée par le Tribunal du sens et de l'application des dispositions du sous-alinéa 48(5)a)(iv). En particulier, dans l'Avis consultatif 4.8, le Comité technique de l'évaluation en douane a déclaré qu'une redevance ne constituerait pas une redevance payée directement ou indirectement comme condition de la vente pour exportation si l'obligation de payer la redevance résulte d'un accord distinct qui ne se rapporte pas à la vente pour exportation des marchandises au pays d'importation. En outre, dans l'Avis consultatif 4.13, le Comité technique de l'évaluation en douane a affirmé que le paiement d'une redevance ne constituerait pas une condition de la vente des marchandises pour exportation si l'acheteur n'avait pas à payer une redevance pour acheter les marchandises.

Compte tenu des explications précédentes, le Tribunal conclut que les redevances en question ne sont pas des redevances que l'appelant était tenu de payer comme condition directe ou indirecte de la vente des vêtements pour exportation au Canada et ne doivent pas, par conséquent, être ajoutées au prix payé ou à payer pour les vêtements importés aux termes du sous-alinéa 48(5)a)(iv) de la Loi.

À l'audience, l'avocate de l'intimé a soutenu, à titre de seconde argumentation, que les redevances payées aux termes des accords conclus avec Banff et BVY doivent être ajoutées à la valeur en douane, aux termes du sous-alinéa 48(5)a)(v) de la Loi, à titre de produit d'une revente ultérieure qui revenait ou devait revenir, directement ou indirectement, au vendeur. Dans son mémoire en réponse aux exposés des intervenants, l'avocate a en outre soutenu que les accords de licence conclus entre l'appelant et Banff et BVY renferment des exigences particulières concernant le pays d'origine des marchandises, de telle sorte que Banff et BVY sont respectivement considérés comme les vendeurs ou les vendeurs réputés des marchandises portent une marque de commerce. En particulier, elle a renvoyé à l'exigence énoncée à l'article 9 de l'accord conclu avec Banff selon laquelle l'appelant devait faire ses achats par l'entremise de Banff International, l'agent de Banff, et à l'exigence énoncée à la section I de l'accord conclu avec BVY selon laquelle la marque Zylos est fabriquée exclusivement par ou au nom de BVY. Elle a soutenu que cette position est conforme aux décisions rendues dans les affaires Mexx Canada Inc. c. Le sous-ministre du Revenu national [24] et Signature Plaza.

Les avocats de l'appelant et l'avocat de Caulfeild ont soutenu que le sous-alinéa 48(5)a)(v) de la Loi n'est pas applicable, puisque les redevances en question ont été payées aux concédants qui n'avaient aucun lien avec les fabricants et qui n'ont pas participé à la négociation des contrats entre l'appelant et les fabricants.

Le Tribunal n'est pas convaincu que les redevances payées par l'appelant en vertu de l'accord conclu soit avec Banff, soit avec BVY étaient le produit d'une revente ultérieure par l'acheteur qui revenait ou devait revenir, directement ou indirectement, au vendeur. Le Tribunal souligne que l'article 9 de l'accord conclu avec Banff stipule que l'appelant fera ses achats par l'entremise de Banff International, l'agent de Banff, qu'il établira une lettre de crédit payable à Banff International pour couvrir tous les achats pour importation au Canada et qu'il paiera à Banff ou à son mandataire désigné une commission représentant un certain pourcentage du coût des achats. Cependant, M. Wolfe a déclaré que, en pratique, l'appelant n'a jamais été obligé de passer par un fabricant précis et qu'il recourait à l'agent qui lui convenait le mieux. En outre, l'appelant utilisait souvent des fabricants autres que ceux de Banff. De l'avis du Tribunal, les redevances payées à Banff relativement à des achats effectués par l'entremise de Banff International étaient des commissions versées au mandataire qui, au nom de l'appelant, prenait des arrangements pour faire fabriquer des vêtements. Les éléments de preuve présentés par le témoin de l'appelant indiquent que l'appelant n'a pas toujours fait ses achats par l'entremise de Banff International, que l'appelant a souvent choisi ses propres fabricants, que ni Banff International ni Banff n'avaient de lien avec les fabricants et qu'ils ne pouvaient donc être considérés comme les vendeurs des marchandises. En outre, les redevances payées à Banff International étaient fondées sur le coût des achats et non sur la valeur de la revente ultérieure effectuée par l'appelant.

En ce qui concerne l'accord conclu avec BVY, le Tribunal fait remarquer que l'article 8 de la section II stipule que l'appelant peut acheter des produits [traduction] «des pays qui fourniront les meilleurs prix et qualité possibles». M. Wolfe a déclaré que, même si l'appelant recourt souvent à des fabricants utilisés par BVY, les acheteurs de l'appelant négocient les contrats avec les fabricants, notamment le prix et les modalités de livraison, et obtiennent souvent de meilleurs prix que BVY. L'accord indique également que les commissions d'agent sont versées en pourcentage du prix de revient de base américain. Cependant, aucune disposition particulière de l'accord et aucune indication ne donne à penser qu'il existait entre l'agent et les fabricants un lien en vertu duquel l'agent pourrait être considéré comme le vendeur des marchandises.

Par conséquent, le Tribunal n'est pas convaincu que les redevances en question font partie du produit de la revente, de la cession ou de l'utilisation ultérieure des vêtements importés qui revient ou doit revenir, directement ou indirectement, au vendeur, en l'occurrence les fabricants des vêtements, et n'est donc pas convaincu qu'elles doivent être ajoutées au prix payé ou à payer pour les vêtements importés en question aux termes du sous-alinéa 48(5)a)(v) de la Loi.

Par conséquent, l'appel est admis.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

2. L’avocate de l’intimé a fait remarquer que, dans les décisions de l’intimé, les redevances payées à sept concédants ont été ajoutées au prix payé ou à payer pour les marchandises importées. Cependant, l’appelant conteste uniquement les décisions portant sur les redevances payées à quatre des concédants.

3. Dans une lettre en date du 2 février 1996, le Tribunal a informé M. Millar qu'il avait décidé de lui accorder [traduction] «un statut restreint d'intervenant aux seules fins de présenter des exposés (arguments)» sans droit d'interroger, de contre-interroger ou d'appeler des témoins. Le Tribunal a déclaré que, même si M. Millar n'avait pas lui-même d'intérêt dans l'appel, les questions en litige dans l'appel étaient importantes et sa présence pourrait être d'une certaine utilité au Tribunal.

4. Pièces du Tribunal AP-94-150-6.1 (protégée) et AP-94-150-18, onglet 1.

5. Ibid. onglet 2.

6. Ibid. onglet 3. La copie de l'accord fourni est désigné ébauche et comprend trois documents.

7. Ibid. onglet 4.

8. Non publiée, no du greffe A-453-90, le 28 février 1994.

9. Appel no AP-92-224, le 1er septembre 1993.

10. L.R.C. (1985), ch. T-13.

11. Tribunal canadien du commerce extérieur, appels nos AP-89-151 et AP-89-165, le 7 mai 1992.

12. Genève, mars 1980, GATT IBDD, 26e suppl. à la p. 116.

13. Customs Valuation: Commentary on the GATT Customs Valuation Code , New York, ICC Publishing S.A., 1988, paragraphe 54 à la p. 62.

14. Accord du GATT et Textes du Comité technique de l'évaluation en douane , Conseil de coopération douanière, Bruxelles.

15. M. Irish, Don Mills, CCH Canadian, 1985.

16. Ibid. aux pp. 185-186.

17. Supra note 11; l'autorisation d'en appeler devant la Cour d'appel fédérale a été refusée le 18 décembre 1992.

18. Supra note 11 à la p. 4.

19. Supra note 9 à la p. 6.

20. Voir R. c. Multiform Manufacturing Co. , [1990] 2 R.C.S. 624 à la p. 630; Morguard Properties Ltd. c. Ville de Winnipeg, [1983] 2 R.C.S. 493 aux pp. 498-99; Schavernoch c. La Commission des réclamations étrangères, [1982] 1 R.C.S. 1092 à la p. 1098; et National Corn Growers Assn. c. Canada (Tribunal des importations) , [1990] 2 R.C.S. 1324 à la p. 1371.

21. Schavernoch, ibid. à la p. 1098; et Corn Growers, ibid. à la p. 1371.

22. Corn Growers, supra note 20 à la p. 1371; les raisons du juge Gonthier sont citées et entérinées par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise c. Générale Électrique du Canada Inc., non publiée, no du greffe A-388-93, le 1er juin 1994.

23. Voir les affaires Radio Shack, A Division of InterTAN Canada Ltd. c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise , appels nos AP-92-193 et AP-92-215, le 16 septembre 1993 et Harbour Sales (Windsor) Limited c. Le sous-ministre du Revenu national, appel no AP-93-322, le 4 novembre 1994; l'autorisation d'interjeter appel devant la Cour d'appel fédérale a été refusée le 31 janvier 1995.

24. Tribunal canadien du commerce extérieur, appels nos AP-94-035, AP-94-042 et AP-94-165, le 16 février 1995.


Publication initiale : le 17 décembre 1996