FLORA DISTRIBUTORS LTD.

Décisions


FLORA DISTRIBUTORS LTD.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-94-199

TABLE DES MATIERES

Ottawa, le mardi 8 octobre 1996

Appel n o AP-94-199

EU ÉGARD À un appel entendu le 5 février 1996 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national le 24 juin 1994 concernant une demande de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

FLORA DISTRIBUTORS LTD. Appelant

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté.


Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre présidant


Raynald Guay ______ Raynald Guay Membre


Desmond Hallissey ______ Desmond Hallissey Membre


Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard d'une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi sur les douanes. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les capsules d'«[a]il inodore» produites par le Dr Dünner AG, importées par l'appelant, sont correctement classées dans le numéro tarifaire 2106.90.90 à titre d'autres préparations alimentaires non dénommées ni comprises ailleurs, comme l'a déterminé l'intimé, ou encore dans la position no 15.17, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 3301.29.90 à titre d'autres solutions concentrées d'huiles essentielles dans des huiles fixes, obtenues par macération, comme l'a soutenu l'appelant.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne correspondent pas à la description générale des «huiles essentielles» énoncée dans les Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises de la position no 33.01. D'abord, le Tribunal n'est pas convaincu que les marchandises en cause servent de matières premières en parfumerie, dans certaines industries alimentaires et dans d'autres industries, puisqu'il s'agit de produits finis qui renferment plusieurs matières premières, dont seulement une est de l'huile d'ail. Deuxièmement, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne sont pas, en elles-mêmes, des extraits de solutions concentrées qui sont obtenues par macération. Plutôt, les marchandises en cause contiennent de l'huile d'ail qui a été extraite de gousses d'ail par macération, dans de l'huile de canola. Le Tribunal conclut en outre que les marchandises en cause ne correspondent pas à la description des solutions concentrées d'huiles essentielles dans les graisses, les huiles fixes, les cires ou matières analogues, puisqu'elles ne satisfont pas à la définition couramment acceptée du terme «pommade». S'appuyant sur ces constatations, le Tribunal conclut qu'il n'a pas été envisagé que des marchandises, comme celles en cause, soient classées dans la position no 33.01.

Le Tribunal conclut que les marchandises en cause correspondent effectivement à la description générale énoncée dans la position no 21.06, ainsi qu'à celle donnée dans les notes explicatives qui s'y rapportent, puisqu'il s'agit de suppléments alimentaires, provenant d'extraits de plantes, en l'occurrence des gousses d'ail, présentés dans des emballages. Le Tribunal reconnaît que l'étiquette apposée sur les marchandises en cause n'indique pas que leur but est de maintenir l'organisme en bonne santé. Cependant, les éléments de preuve montrent que les marchandises en cause sont utilisées à cette fin.

Lieu de l'audience : Vancouver (Colombie-Britannique) Date de l'audience : Le 5 février 1996 Date de la décision : Le 8 octobre 1996
Membres du Tribunal : Arthur B. Trudeau, membre présidant Raynald Guay, membre Desmond Hallissey, membre
Avocat pour le Tribunal : Shelley Rowe
Greffier : Anne Jamieson
Ont comparu : Jens Tonnesen et Bruce Dales, pour l'appelant Josephine A.L. Palumbo, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] (la Loi) à l'égard d'une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les capsules d'«[a]il inodore» produites par le Dr Dünner AG, importées par l'appelant, sont correctement classées dans le numéro tarifaire 2106.90.90 de l'annexe I du Tarif des douanes [2] à titre d'autres préparations alimentaires non dénommées ni comprises ailleurs, comme l'a déterminé l'intimé, ou encore dans la position no15.17, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 3301.29.90 à titre d'autres solutions concentrées d'huiles essentielles dans les huiles fixes, obtenues par macération, comme l'a soutenu l'appelant. La nomenclature tarifaire pertinente est la suivante :

21.06 Préparations alimentaires non dénommées ni comprises ailleurs.

2106.90 -Autres

2106.90.90 ---Autres

33.01 Huiles essentielles (déterpénées ou non), y compris celles dites «concrètes» ou «absolues»; résinoïdes; solutions concentrées d'huiles essentielles dans les graisses, les huiles fixes, les cires ou matières analogues, obtenues par enfleurage ou macération; sous-produits terpéniques résiduaires de la déterpénation des huiles essentielles; eaux distillées aromatiques et solutions aqueuses d'huiles essentielles.

-Huiles essentielles autres que d'agrumes :

3301.29 --Autres

3301.29.90 ---Autres

15.17 Margarine; mélanges ou préparations alimentaires de graisses ou d'huiles animales ou végétales ou de fractions de différentes graisses ou huiles du présent Chapitre, autres que les graisses et huiles alimentaires et leurs fractions du no 15.16.

1517.90 -Autres

Les représentants de l'appelant, M. Jens Tonnesen, chef des Opérations chez Flora Distributors Ltd., et M. Bruce Dales, chimiste à l'unité de recherche et de développement de Flora Distributors Ltd., ont également comparu comme témoins pour l'appelant. Ils ont affirmé que les marchandises en cause étaient une macération d'huile d'ail inodore préparée pour la vente au détail en doses précises comme produit à base d'herbes médicinales. Les marchandises en cause sont formées de capsules de gélatine molles, contenant chacune 270 mg d'huile d'ail. Les représentants ont soutenu que la position no33.01 englobe les marchandises en cause, puisque l'huile essentielle d'ail a été obtenue par extraction d'huiles fixes (canola) par un procédé de macération à proportions égales, effectué à la température ambiante. L'étiquette apposée sur les marchandises en cause indique qu'il s'agit d'«[a]il inodore» et précise que «[g]râce à leur enrobage entérique, [les] capsules se dissolvent dans le petit intestin plutôt que dans l'estomac, ce qui prévient les odeurs de l'haleine».

Comme l'ont indiqué les représentants de l'appelant, l'huile d'ail est extraite de l'ail par macération. La macération est un procédé de dissolution de particules fixes dans un liquide à l'aide d'un dissolvant, dans le cas des marchandises en cause, l'huile de canola. Selon les représentants de l'appelant, l'huile de canola est utilisée parce qu'elle est bonne pour la santé et renferme certains polyinsaturés. L'huile de canola est mélangée à des gousses d'ail broyées et la solution macère un certain temps à température ambiante pour que l'huile de canola en extraie les ingrédients liposolubles, qui sont les composés actifs ou essentiels. La solution est ensuite filtrée pour en éliminer les particules solides, et l'huile ainsi purifiée est mise en capsules de gélatine. D'autre huile de canola est ajoutée, environ 66 p. 100, après la macération afin que le produit ait un effet médicinal standard et soit sécuritaire et non toxique. Renvoi a été fait à la description du procédé de production [3] fournie par le fabricant, Finzelberg, ce qui a confirmé que c'était bien là le procédé utilisé pour fabriquer les marchandises en cause.

M. Dales, qui a indiqué avoir une formation en chimie, a présenté les définitions suivantes du verbe anglais «macerate» (macérer) :

To soften by steeping in a liquid preparation at room temperature or slightly higher; to soften and wear away by steeping. [4]

([Traduction] Amollir en trempant dans une préparation liquide à température ambiante ou légèrement supérieure à la température ambiante; amollir et réduire par trempage.)

To reduce (a solid substance) to a soft mass by soaking in liquid.... to make soft. [5]

([Traduction] Réduire [une substance solide] en masse molle par trempage dans un liquide. [...] amollir.)

Il a également présenté les définitions suivantes du terme anglais «maceration» (macération) :

Process of softening a solid by steeping in a fluid. [6]

([Traduction] Procédé d'amollissement d'un solide par trempage dans un fluide.)

[T]he softening of a solid by soaking. [7]

([Traduction] [L]'amollissement d'un solide par trempage.)

M. Dales a déclaré que les marchandises en cause sont des solutions concentrées à 100 p. 100 d'huile d'ail macéré. Il a ajouté que les capsules d'ail sont produites conformément au British Herbal Compendium [8] , qu'il a qualifié d'ouvrage de référence classique et de meilleure source à utiliser pour avoir la certitude qu'un produit a la puissance et la sécurité voulues. Cet ouvrage renvoie à des comprimés de poudre d'ail, à des produits d'ail macéré dans l'huile et à de l'huile d'ail distillé à la vapeur. De l'avis de M. Dales, si les capsules contenaient de l'huile d'ail pur, le produit ne serait pas aussi bon ni aussi sécuritaire. Il a renvoyé au test de la chromatographie en phase gazeuse, technique utilisée pour analyser un produit en vue de s'assurer qu'il renferme une quantité adéquate d'un ingrédient actif, en l'occurrence l'huile d'ail.

Mme Catherine Copeland, chimiste principale au Laboratoire des produits organiques/Denrées alimentaires de la Direction des travaux scientifiques et de laboratoire du ministère du Revenu national, a été appelée au nom de l'intimé à titre de témoin expert dans le domaine de l'analyse des denrées alimentaires et produits connexes, des produits chimiques organiques et des produits chimiques utilisant diverses techniques instrumentales. Après avoir analysé les marchandises en cause, MmeCopeland a rédigé un rapport pour le compte de la Direction des travaux scientifiques et de laboratoire [9] . Elle a indiqué que les marchandises en cause sont constituées de capsules de gélatine renfermant un liquide huileux jaune pâle constitué à 90 p. 100 environ d'huile de canola et à 10 p. 100 d'huile essentielle d'ail. Elle a déclaré que, à son avis, après avoir examiné l'étiquette, les marchandises en cause ont été préparées dans un but précis, à titre de supplément alimentaire, puisqu'elles sont présentées comme un substitut à l'ail lui-même, réputé pour être bénéfique à la santé.

MmeCopeland a déclaré que l'huile essentielle d'ail est normalement obtenue par distillation à la vapeur de gousses d'ail broyées. À son avis, dans les circonstances normales, elle n'aurait pas dit que l'huile de canola était produite par le procédé de fabrication en vue d'obtenir l'huile essentielle d'ail. Cependant, elle a reconnu, en s'appuyant sur les éléments de preuve de l'appelant, que, dans le cas des marchandises en cause, une certaine portion de l'huile de canola provient du procédé de fabrication.

En réponse aux questions qui lui étaient posées concernant le sens des termes «macération» et «enfleurage», MmeCopeland a présenté, comme pièces, des extraits de deux publications : Perfumes Cosmetics & Soaps [10] et The New Encyclopædia Britannica [11] . S'appuyant sur ces extraits, elle a déclaré que les termes «enfleurage» et «macération» ont des sens très précis. L'enfleurage consiste à extraire une huile essentielle sur des graisses solides à basse température. Les graisses solides utilisées de façon traditionnelle sont du lard purifié et du suif, ainsi que d'autres substances cireuses ou graisses semblables. Le procédé consiste, par exemple, à étendre des pétales de fleurs sur le gras refroidi et à les y laisser de un à trois jours. Les pétales sont alors retirés et l'opération est répétée plusieurs fois, jusqu'à l'obtention d'un concentré de l'huile essentielle dans les graisses solides. La macération désigne l'extraction d'une huile essentielle dans un corps gras fondu ou chaud. Les pétales de fleurs sont immergés dans ce corps gras pendant plusieurs heures puis en sont retirés, et ce procédé est répété plusieurs fois jusqu'à l'obtention d'un concentré de l'huile essentielle dans le corps gras. Le produit obtenu est connu et vendu dans le commerce à titre de pommade.

MmeCopeland a également présenté la définition suivante du terme anglais «maceration» (macération) tirée du Webster's Third New International Dictionary [12] :

an act or the process of macerating something ... a process of extracting fragrant oils that is similar to enfleurage but differs in the use of hot fat in which the flower petals are immersed. [13]

([Traduction] action ou procédé consistant à macérer quelque chose [...] un procédé d'extraction d'huiles parfumées semblable à l'enfleurage mais qui en diffère par l'utilisation de graisse chaude dans laquelle les pétales de fleurs sont immergés.)

Mme Copeland a soutenu que le terme «macération» au sens où il est utilisé en parfumerie ou au sens d'extraction d'huiles essentielles, conformément à l'objet de la position no 33.01, a un sens différent de celui de la macération dont les représentants de l'appelant ont parlé. Elle a reconnu que l'huile d'ail dans les marchandises en cause est produite par un procédé d'extraction. Cependant, ce procédé d'extraction n'est pas, selon elle, une macération.

L'avocate de l'intimé a renvoyé MmeCopeland à l'avis donné dans le Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [14] (les Avis de classement) sur l'huile «Dr. Dünner Evening Primrose Oil» additionnée de vitamine E et de graisse butyrique, présentée en gélules de gélatine/glycérol sous un emballage transparent («blistère») pour la vente au détail, utilisée comme complément alimentaire en raison des acides gras essentiels présents dans l'huile (notamment l'acide gamma-linolénique). Selon cet avis, ce produit doit être classé dans la sous-position no 1517.90, qui englobe les «mélanges ou préparations alimentaires de graisses ou d'huiles animales ou végétales ou [...] leurs fractions du no 15.16» autres que la margarine. En réponse à la question qui consiste à savoir si cet avis pourrait éventuellement s'appliquer aux marchandises en cause, Mme Copeland a indiqué que l'huile de graine d'onagre et les gélules de gélatine sont parfois additionnées de graisse butyrique et sont, par conséquent, considérées comme des préparations alimentaires d'huile végétale.

Dans leur plaidoirie, les représentants de l'appelant ont remis en question plusieurs des affirmations formulées dans le mémoire de l'intimé. En particulier, ils ont affirmé, en s'appuyant sur la description du procédé de production fournie par le fabricant, que l'huile de canola sert à extraire l'huile d'ail et que l'addition d'huile de canola après l'extraction a pour objet de diluer l'huile d'ail afin qu'elle satisfasse aux normes imposées aux préparations médicinales. Les représentants de l'appelant ont également rejeté la conclusion de l'intimé selon laquelle les marchandises en cause sont semblables à l'huile de graine d'onagre mentionnée dans les Avis de classement. Ils ont soutenu que, bien qu'il s'agisse dans les deux cas d'huiles qui sont bénéfiques pour la santé, leur procédé d'extraction est différent.

Les représentants de l'appelant ont renvoyé au British Herbal Compendium et indiqué que l'extraction à basse température est une méthode de macération assez courante dans le domaine des produits à base d'herbes médicinales traditionnelles ou dans le domaine de la chimie classique appliquée aux herbes médicinales traditionnelles. Ils ont en outre soutenu que le libellé de la position no 33.01 ne vise pas uniquement l'industrie des parfums, et ils ne voyaient pas pourquoi les herbes médicinales traditionnelles ne feraient pas partie de cette autre catégorie de l'industrie où la macération peut être effectuée à des températures basses ou élevées, selon le produit.

L'avocate de l'intimé a soutenu que les marchandises en cause sont essentiellement de petites capsules constituées de gélatine et d'un produit alimentaire à haute teneur en protéines et faible teneur en calories renfermant un mélange de 10 p. 100 d'huile essentielle d'ail et de 90 p. 100 d'huile de canola, une huile végétale alimentaire. En outre, comme l'ont confirmé les représentants de l'appelant, 66 p. 100 de l'huile de canola est ajoutée après la macération pour servir de diluant ou de support. Les marchandises en cause sont destinées à l'alimentation humaine, en l'état où elles sont importées, et sont présentées comme un produit à base d'herbes médicinales dont la posologie recommandée est de 1 ou 2 capsules par jour. Les marchandises en cause doivent être avalées et, puisqu'il s'agit de gélules de gélatine, leur digestion ne commence pas dans l'estomac, ce qui supprime l'odeur associée normalement à la consommation d'ail.

L'avocate de l'intimé a allégué que, pour que des marchandises soient classées dans la position no 33.01, elles doivent être des «[h]uiles essentielles» ou des «solutions concentrées d'huiles essentielles dans les graisses, les huiles fixes, les cires ou matières analogues obtenues par enfleurage ou macération». Elle a renvoyé aux Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [15] (les Notes explicatives) de la position no 33.01 qui prévoient, en partie, ce qui suit :

A. Huiles essentielles, y compris celles dites «concrètes» ou «absolues»; résinoïdes.

Les huiles essentielles (désignées aussi sous le nom d'essences) sont des matières premières d'origine végétale utilisées en parfumerie, dans certaines industries alimentaires ou dans d'autres industries.

Les huiles essentielles sont obtenues selon le cas, par un des procédés suivants :

1) Par expression (procédé utilisé notamment pour extraire l'huile essentielle des écorces de citron).

2) Par distillation et entraînement au moyen de vapeur d'eau.

3) Par extraction de produits végétaux à l'état frais au moyen de dissolvants, tels que l'éther de pétrole, le benzène, l'acétone ou le toluène.

4) Par extraction des solutions concentrées reprises à la partie B ci-dessous et obtenues par enfleurage ou macération.

B. Solutions concentrées d'huiles essentielles dans les graisses, les huiles fixes, les cires ou matières analogues.

Ces produits proviennent de l'extraction, au moyen de graisses, d'huiles fixes, de cires, de vaseline, etc., des essences contenues dans les plantes et fleurs, que cette opération ait eu lieu à froid ou à chaud (procédé de l'enfleurage ou bien de la macération ou digestion). Ces produits se présentent donc sous la forme de solutions concentrées, d'huiles essentielles dans les graisses, les huiles fixes, etc. Les concentrés dans les graisses sont désignés, commercialement, sous les termes de pommades aux fleurs.

L'avocate de l'intimé a soutenu que les marchandises en cause ne sont pas «utilisées en parfumerie, dans certaines industries alimentaires ou dans d'autres industries». Elle a en outre affirmé que, puisque les marchandises en cause sont constituées de trois composantes, à savoir des gélules en gélatine, de l'huile de canola et de l'huile d'ail, elles ne peuvent pas être désignées à titre d'huiles essentielles. En outre, étant donné que l'huile de canola a été mélangée à l'huile d'ail après que l'huile d'ail a été extraite, l'avocate a affirmé que le contenu des gélules en gélatine ne peut pas être considéré comme étant une «solution concentrée d'huiles essentielles dans [...] les huiles fixes».

Le renvoi a également été fait à la Note explicative D intitulée «Eaux distillées aromatiques et solutions aqueuses d'huiles essentielles» qui prévoit que la position no 33.01 exclut «b) [l]es mélanges d'huiles essentielles entre elles, les mélanges de résinoïdes entre eux, les mélanges d'huiles essentielles et de résinoïdes et les mélanges à base d'huiles essentielles». L'avocate de l'intimé a soutenu que l'exclusion explicite de ces produits interdit de classer les marchandises en cause dans la position no 33.01.

Enfin, l'avocate de l'intimé a affirmé, en s'appuyant sur son renvoi aux Notes explicatives de la position no 21.06, que les préparations destinées à l'alimentation humaine, à base d'extraits de plantes et présentées dans des emballages comportant des indications selon lesquelles elles maintiennent l'organisme en bonne santé, doivent être classées dans la position no 21.06. En particulier, elle a renvoyé aux Notes explicatives de la position no 21.06 dont le libellé est, en partie, le suivant :

Sont notamment classés ici :

16) Les préparations désignées souvent sous le nom de compléments alimentaires, à base d'extraits de plantes, de concentrats de fruits, de miel, de fructose, etc., additionnées de vitamines et parfois de quantités très faibles de composés de fer. Ces préparations sont souvent présentées dans des emballages indiquant qu'elles sont destinées à maintenir l'organisme en bonne santé. Les préparations analogues qui sont destinées à prévenir ou à traiter des maladies ou affections sont exclues (n os 30.03 ou 30.04).

Elle a affirmé que les marchandises en cause sont emballées en doses précises, présentées comme supplément alimentaire destiné à la consommation humaine, et sont, par conséquent, correctement classées dans la position no 21.06.

Comme seconde solution, l'avocate de l'intimé a soutenu que les marchandises en cause pourraient être classées dans la sous-position no 1517.90, à l'instar du produit «Dr. Dünner Evening Primrose Oil». Elle a renvoyé à l'avis concernant l'«[h]uile de graine d'onagre additionnée de vitamine E et de graisse butyrique, présentée en gélules de gélatine/glycérol sous un emballage transparent (“blistère”) pour la vente au détail, servant à compléter l'alimentation par les acides gras essentiels présents dans l'huile (notamment, l'acide gamma-linolénique)» figurant parmi les Avis de classement. Cet avis prévoit que ce produit est classé dans la sous-position no 1517.90 qui englobe les «mélanges ou préparations alimentaires de graisses ou d'huiles animales ou végétales ou de fractions de différentes graisses ou [...] leurs fractions du no 15.16» autres que la margarine.

Aux termes de l'article 10 du Tarif des douanes, le Tribunal doit classer les marchandises conformément aux Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé [16] (les Règles générales) et aux Règles canadiennes [17] . La Règle 1 des Règles générales prévoit que le classement est déterminé d'après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et, lorsqu'elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d'après les principes énoncés aux Règles 2 à 6, ainsi que d'après les Règles canadiennes qui suivent. En outre, aux termes de l'article 11 du Tarif des douanes, le Tribunal doit s'inspirer des Notes explicatives pour interpréter les positions et sous-positions de l'annexe I du Tarif des douanes. Ainsi, pour classer les marchandises en cause, il doit d'abord examiner le libellé des positions nos33.01, 21.06 et 15.17, ainsi que les Notes de Sections et de Chapitres et les Notes explicatives susceptibles de l'orienter dans l'interprétation appropriée des termes de ces positions.

La position no33.01 vise les «[h]uiles essentielles [...] y compris celles dites “concrètes” ou “absolues”; résinoïdes; solutions concentrées d'huiles essentielles dans les graisses, les huiles fixes, les cires ou matières analogues, obtenues par enfleurage ou macération; sous-produits terpéniques résiduaires de la déterpénation des huiles essentielles; eaux distillées aromatiques et solutions aqueuses d'huiles essentielles».

Dans les Notes explicatives, les «[h]uiles essentielles» sont décrites à titre de «matières premières [...] utilisées en parfumerie, dans certaines industries alimentaires ou dans d'autres industries» et peuvent être obtenues par divers procédés, notamment par expression, par distillation au moyen de vapeur d'eau, par extraction au moyen de dissolvants et par extraction de solutions concentrées obtenues par enfleurage ou macération. En outre, la liste des principales huiles essentielles et des principaux résinoïdes fournie en annexe aux Notes explicatives du Chapitre 33 comprend l'ail.

De l'avis du Tribunal, les marchandises en cause ne satisfont pas à cette description générale. D'abord, le Tribunal n'est pas convaincu que les marchandises en cause sont utilisées comme matières premières en parfumerie, dans certaines industries alimentaires ou dans d'autres industries. Le Tribunal accepte que la production des marchandises en cause peut être visée par l'expression «autres industries», comme l'ont soutenu les représentants de l'appelant. Cependant, de l'avis du Tribunal, les marchandises en cause ne peuvent pas être considérées comme des matières premières. Les marchandises en cause sont plutôt des produits finis qui sont fabriqués ou produits à partir de diverses matières premières [18] , dont une seulement est l'huile d'ail. Deuxièmement, le Tribunal estime que les marchandises en cause ne sont pas, en elles-mêmes, des extraits de concentrés par macération. Plutôt, les marchandises en cause contiennent de l'huile d'ail, dans de l'huile de canola, qui a été extraite de gousses d'ail par voie de macération.

Le Tribunal est également d'avis que les marchandises en cause ne satisfont pas à la désignation de solutions concentrées d'huiles essentielles dans les graisses, les huiles fixes, les cires ou matières analogues. Dans les Notes explicatives, ces solutions concentrées sont dites provenir «de l'extraction, au moyen de graisses, d'huiles fixes, de cires, de vaseline, etc., des essences contenues dans les plantes et fleurs, que cette opération ait eu lieu à froid ou à chaud (procédé de l'enfleurage ou bien de la macération ou digestion)» et désignées commercialement sous les termes de «pommades aux fleurs». Le Tribunal reconnaît que l'huile d'ail contenue dans les marchandises en cause a été obtenue par un procédé couramment défini comme étant une macération. Cependant, le Tribunal fait remarquer que les pommades, selon la définition courante qui en est donnée, sont des onguents parfumés destinés à être appliqués sur la peau et, plus particulièrement, sur le cuir chevelu et les cheveux [19] . Le Tribunal n'est pas convaincu que les marchandises en cause satisfont à la définition généralement acceptée du terme «pommade», et n'est pas d'avis non plus qu'elles ont les mêmes caractéristiques que les pommades et estime, par conséquent, qu'il n'avait pas été envisagé que des marchandises, comme celles en cause, soient classées dans la position no 33.01.

De l'avis du Tribunal, les marchandises en cause correspondent effectivement à la description générale des préparations alimentaires non dénommées ni incluses ailleurs dans la position no 21.06, ainsi qu'à celle donnée dans les notes explicatives qui s'y rapportent. Les Notes explicatives de la position no 21.06 indiquent qu'elle englobe «[l]es préparations désignées souvent sous le nom de compléments alimentaires, à base d'extraits de plantes, de concentrats de fruits, de miel, de fructose, etc., additionnées de vitamines et parfois de quantités très faibles de composés de fer». Les Notes explicatives ajoutent en outre que ces «préparations sont souvent présentées dans des emballages indiquant qu'elles sont destinées à maintenir l'organisme en bonne santé». Les éléments de preuve présentés au Tribunal indiquent que les marchandises en cause sont des suppléments alimentaires provenant d'extraits de plantes, en l'occurrence des gousses d'ail, présentés dans des emballages. Le Tribunal reconnaît que l'étiquette apposée sur les marchandises en cause n'indique pas que leur but est de maintenir l'organisme en bonne santé. Cependant, les éléments de preuve montrent que les marchandises en cause sont utilisées à cette fin.

Par conséquent, l'appel est rejeté. Le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 2106.90.90 à titre d'autres préparations alimentaires non dénommées ni comprises ailleurs.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

2. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

3. Pièce A-1.

4. Source Book for Food Scientists , Herbert W. Ockerman, Ph.D., Westport, The AVI Publishing Company, 1978 à la p. 162.

5. Funk & Wagnalls Canadian College Dictionary , Markham, Fitzhenry & Whiteside, 1986 à la p. 810.

6. Taber's Cyclopedic Medical Dictionary , 17e éd., Philadelphie, F.A. Davis Company, 1993 à la p. 1151.

7. Dorland's Illustrated Medical Dictionary , 28e éd., Philadelphie, W.B. Saunders Company, 1994 à la p. 975.

8. Vol. 1, « A handbook of scientific information on widely used plant drugs, Companion to Volume 1 of the British Herbal Pharmacopoeia » ( [traduction] Un manuel d'information scientifique sur les médicaments à base de plantes d'utilisation courante, Complément du volume 1 de la British Herbal Pharmacopoeia ), révisé par Peter R. Bradley.

9. Mémoire de l'intimé, onglet 1.

10. Vol. II, 3e éd., William A. Poucher, p h. c ., New York, D. Van Nostrand Company, 1929 aux pp. 38 à 44.

11. Vol. 4, 15e éd. Toronto, Encyclopædia Britannica, 1987 aux pp. 563 à 565.

12. Merriam-Webster, 1986.

13. Ibid. à la p. 1353.

14. Conseil de coopération douanière, 1re éd., Bruxelles, 1987.

15. Ibid. 1986.

16. Supra note 2, annexe I.

17. Ibid.

18. Voir l'affaire Her Majesty the Queen v . York Marble, Tile and Terrazzo Limited , [1968] R.C.S. 140, où la fabrication est décrite comme le fait de donner à des matières premières de nouvelles formes, qualités et propriétés ou combinaisons. Voir également l'affaire Le ministre du Revenu national c. Enseignes Imperial Signs Ltée (1990), 116 N.R. 235, non publiée, Cour d'appel fédérale, no du greffe A-264-89, le 28 février 1990, où la Cour fédérale du Canada déclare qu'il y a production d'une chose lorsque celle-ci peut remplir une fonction que ne pouvaient pas remplir les matières premières.

19. The Oxford English Dictionary , 2e éd., vol. XII, Oxford, Clarendon Press, 1989 à la p. 81 : « A scented ointment (in which apples are said to have been originally an ingredient) for application to the skin; now used esp. for the skin of the head and for dressing the hair » ([traduction] Un onguent parfumé (dans lequel les pommes sont dites avoir été un ingrédient original) pour application sur la peau; utilisé aujourd'hui spécialement pour le cuir chevelu et pour le soin de la chevelure); Gage Canadian Dictionary , Toronto, Gage Publishing, 1983 à la p. 874 : « a perfumed ointment for the scalp and hair » ([traduction] un onguent parfumé pour le cuir chevelu et les cheveux); Webster's New World Dictionary , 3e éd. collège, New York, Simon & Schuster, 1988 à la p. 1048 : « a perfumed ointment, esp. for grooming the hair » ([traduction] un onguent parfumé, spécialement pour le soin des cheveux).


Publication initiale : le 10 janvier 1997