INLAND RE-REFINING COMPANY LIMITED

Décisions


INLAND RE-REFINING COMPANY LIMITED
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-94-119

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mardi 3 décembre 1996

Appel n o AP-94-119

EU ÉGARD À un appel entendu le 11 septembre 1996 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E.-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 31 mars 1994 concernant un avis d'opposition signifié aux termes de l'article 81.17 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

INLAND RE-REFINING COMPANY LIMITED Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté.


Lyle M. Russell ______ Lyle M. Russell Membre présidant

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre

Charles A. Gracey ______ Charles A. Gracey Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise à l'égard d'une détermination et d'une cotisation du ministre du Revenu national rejetant, en partie, une demande de remboursement de la taxe de vente fédérale (TVF) présentée par l'appelant concernant des matériaux et de l'équipement achetés pour construire une installation de collecte et de recyclage d'huiles, d'eau, de filtres, de glycol et d'autres produits dérivés du pétrole, usés et contaminés. L'appelant a acheté ces articles de ses fournisseurs, TVF comprise. La plupart de ces articles ont été achetés après que l'appelant est devenu un fabricant titulaire de licence.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Aux termes de la Loi sur la taxe d'accise, sous réserve de certaines exceptions, ce n'est que lorsqu'une personne a versé des sommes d'argent par erreur et qu'il a été tenu compte des sommes d'argent à titre de taxes, que cette personne est admissible à réclamer un remboursement de la TVF. L'appelant n'est pas admissible à un remboursement concernant les articles achetés après qu'il est devenu un fabricant titulaire de licence, puisqu'il n'a pas été tenu compte de la composante TVF du prix payé à ses fournisseurs à titre de taxe. Les fournisseurs de l'appelant, et non l'appelant, devaient remettre ces sommes au ministère du Revenu national, et il aurait été tenu compte de ces sommes d'argent à titre de taxes, lorsqu'elles auraient été remises. Le Tribunal est d'avis que les articles achetés avant que l'appelant ne devienne un fabricant titulaire de licence n'ont pas été consommés ni dépensés directement dans la fabrication ou la production de marchandises et ne sont pas, par conséquent, exempts de la TVF.

Lieux de l'audience : Hull (Québec) et Dartmouth (Nouvelle-Écosse) Date de l'audience : Le 11 septembre 1996 Date de la décision : Le 3 décembre 1996
Membres du Tribunal : Lyle M. Russell, membre présidant Arthur B. Trudeau, membre Charles A. Gracey, membre
Avocat pour le Tribunal : John L. Syme
Greffiers : Anne Jamieson et Margaret Fisher
Ont comparu : Leonard A. Reilly, pour l'appelant Lyndsay K. Jeanes, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi) à l'égard d'une détermination et d'une cotisation toutes deux ayant trait à la demande de remboursement de la taxe de vente fédérale (TVF) de l'appelant présentée le 19 décembre 1991.

L'appelant est une entreprise qui collecte et recycle les huiles, l'eau, les filtres, le glycol et autres dérivés du pétrole, usés et contaminés. L'appelant a commencé la construction d'une installation de traitement de ces matières avant le 1er septembre 1990. La construction a été terminée à une date ultérieure. L'appelant est devenu un fabricant titulaire de licence, aux termes de la Loi, le 1er septembre 1990. Afin de construire l'installation, l'appelant a acheté auprès de fournisseurs de l'équipement et des matériaux divers. Le prix payé par l'appelant à ces fournisseurs comprenait un montant pour le prix d'achat des marchandises et un montant pour la TVF.

L'appelant a présenté une demande de remboursement de la TVF versée sur les matériaux et l'équipement qui ont servi à construire son installation. L'intimé a accordé un remboursement partiel à l'appelant. L'intimé a refusé de rembourser la partie des sommes visant les articles achetés après que l'appelant est devenu un fabricant titulaire de licence ainsi que ceux qui ont été déterminés être des «biens immeubles». L'appelant a signifié un avis d'opposition à la détermination; toutefois, cette dernière a été confirmée. L'appelant a par la suite reçu un avis de cotisation de trop-payé au montant de 5 199,26 $ sur son remboursement initial de la TVF.

La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l'appelant a droit à un remboursement de la TVF concernant la taxe versée sur les articles qui ont servi à la construction de son installation.

L'avocate de l'intimé a soulevé une question préliminaire concernant la compétence du Tribunal à entendre l'appel dans la mesure où il était relié à l'avis de cotisation de l'intimé. À l'audience, le Tribunal a d'abord invité les parties à présenter leurs arguments sur cette question. L'avocate a soutenu que, étant donné que l'appelant n'a jamais signifié d'avis d'opposition à la cotisation, ce dernier ne pouvait appeler de la cotisation aux termes de l'article 81.19 de la Loi [2] . En ce qui a trait à la question de compétence, le représentant de l'appelant a soumis que l'appelant a toujours maintenu avoir droit au montant complet réclamé dans sa demande de remboursement de la TVF. Il a soutenu que, étant donné que l'appelant avait signifié un avis d'opposition à la détermination et que la cotisation n'était qu'une simple modification de cette détermination, l'appelant pouvait appeler à la fois de la détermination et de la cotisation.

Le Tribunal a réservé sa décision concernant la question de compétence et a entendu le bien-fondé de l'appel. Ayant maintenant eu l'occasion d'examiner la question, le Tribunal est d'avis que l'appelant n'avait pas le droit d'interjeter appel de la cotisation. L'article 81.19 de la Loi donne le droit d'appel aux personnes pour lesquelles une cotisation a été établie; cependant, la signification d'un avis d'opposition en vertu de l'article 81.15 de la Loi est une condition préalable nécessaire à l'exercice de ce droit. Le fait qu'une cotisation soit liée au même objet qu'une détermination précédente ne modifie pas cette exigence. Le Tribunal fait cependant remarquer que les questions en litige dans la partie de l'appel liée à la cotisation sont les mêmes que celles qui ont été soulevées dans l'avis d'opposition de l'appelant.

Le représentant de l'appelant a témoigné que l'installation de l'appelant, n'étant pas protégée à l'intérieur d'un édifice ou d'une autre structure, est exposée aux éléments. L'installation a, par conséquent, été construite de façon à minimiser les risques de déversement ou de débordement des matières traitées qui seraient causés par la pluie. L'installation comprend des bassins de rétention et un système de drainage qui sont fixés à une fondation ou assise en béton. Les côtés de l'assise sont légèrement relevés afin d'empêcher, en cas de déversement, la fuite de toute matière en voie de traitement.

Dans sa plaidoirie, le représentant de l'appelant a exprimé sa frustration devant la difficulté à obtenir les renseignements nécessaires pour déterminer si la réclamation de l'appelant était valide ou non. Il a soutenu que l'appelant a droit à un remboursement aux termes de l'article 1 de la partie XIII de l'annexe III de la Loi, puisqu'il produit des carburants, lubrifiants, huiles et matières dérivées. Il a aussi soutenu que l'exploitation de l'appelant est similaire à certaines exploitations de l'industrie minière, où les résidus issus de la production sont récupérés. Il a déclaré que les matériaux utilisés dans la construction des installations nécessaires à de telles exploitations minières sont exempts de la TVF aux termes de l'article 1 et que, pour que la loi soit appliquée de façon uniforme, l'appelant doit aussi avoir droit à l'exemption. Enfin, le représentant a soutenu que, aux termes de l'article 68 de la Loi, l'appelant a droit de recevoir les sommes d'argent qu'il a payées en taxes, puisque ces sommes d'argent ont été versées par erreur.

L'avocate de l'intimé a divisé sa plaidoirie en deux parties. Elle a d'abord traité de l'admissibilité de l'appelant à un remboursement de la TVF payée sur les articles que l'appelant a achetés après être devenu un fabricant titulaire de licence. À cet égard, elle a soutenu que, manifestement, selon l'esprit de la Loi, seule la personne qui verse effectivement la TVF au ministère du Revenu national (Revenu Canada), sauf dans le cas de «petits fabricants ou producteurs» aux termes de l'article 68.28 de la Loi, a droit à demander un remboursement. Quant aux matériaux que l'appelant a achetés alors qu'il était réputé être un de ces «petits fabricants», c.-à-d. avant de devenir un fabricant titulaire de licence, l'avocate a porté à l'attention du Tribunal les alinéas 1a), 1b), et 1b.1) de la partie XIII de l'annexe III de la Loi invoqués par l'appelant. Elle a soutenu qu'aucun d'entre eux ne s'appliquait aux circonstances de l'appelant. Plus précisément, l'avocate a fait valoir que chacun des trois alinéas s'applique à certains types de «machines et appareils». L'avocate a fait valoir que, de ce fait, les structures en béton qui forment une partie des installations de l'appelant, qu'elle a soutenu être des «biens immeubles», n'entrent dans le champ d'application d'aucun des alinéas susmentionnés.

L'article 68 de la Loi prévoit ce qui suit :

Lorsqu'une personne, sauf à la suite d'une cotisation, a versé des sommes d'argent par erreur de fait ou de droit ou autrement, et qu'il a été tenu compte des sommes d'argent à titre de taxes, de pénalités, d'intérêts ou d'autres sommes en vertu de la présente loi, un montant égal à celui de ces sommes doit, sous réserve des autres dispositions de la présente partie, être payé à cette personne, si elle en fait la demande dans les deux ans suivant le paiement de ces sommes.

Pour obtenir le remboursement aux termes de l'article 68 de la Loi, une personne doit avoir «versé des sommes d'argent par erreur» et il doit avoir «été tenu compte des sommes d'argent à titre de taxes». L'appelant a acheté certains matériaux de ses fournisseurs. Une partie du prix d'achat payé par l'appelant représentait un montant pour la TVF. Cependant, aux termes de la Loi, les fournisseurs de l'appelant, et non l'appelant, devaient remettre cette somme d'argent à Revenu Canada. C'est de cette somme d'argent, une fois remise, dont il aurait été tenu compte à titre de taxes. Si les fournisseurs avaient omis de remettre le montant versé concernant la TVF, le seul recours qu'aurait pu exercer Revenu Canada aurait été de poursuivre les fournisseurs. Revenu Canada n'aurait eu aucune raison pour poursuivre l'appelant [3] .

Dans des causes antérieures, lorsque le Tribunal a dû examiner le droit d'une personne à obtenir un remboursement aux termes de l'article 68 de la Loi, il a constamment soutenu que les personnes, telles que l'appelant, qui achètent des marchandises d'un fournisseur et paient à ce dernier la TVF sur ces marchandises, n'ont pas droit à un remboursement aux termes de l'article 68. Ces décisions suivent les principes énoncés par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Her Majesty the Queen v. M. Geller Incorporated [4] et par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Price (Nfld.) Pulp and Paper Limited c. La Reine [5] . Par conséquent, le Tribunal est d'avis que l'appelant n'a pas droit au remboursement de la TVF sur les matériaux qu'il a achetés après être devenu un fabricant titulaire de licence.

Comme il a déjà été indiqué, l'appelant a aussi demandé un remboursement concernant une quantité relativement faible d'articles qu'il a achetés avant de devenir un fabricant titulaire de licence. Les deux tiers de cette somme d'argent est liée à l'achat de ciment et d'armatures de la structure de la chaudière. L'intimé a rejeté la demande de l'appelant concernant ces articles du fait que ce sont des «biens immeubles». Les autres articles comprennent une série de pièces et d'équipements divers. Le remboursement concernant ces articles a été refusé du fait qu'ils n'étaient pas destinés à «être utilisés [...] directement».

Le représentant de l'appelant a soutenu que le ciment et l'armature de la structure de la chaudière achetés par ce dernier étaient admissibles à une exemption aux termes de l'article 2 de la partie XIII de l'annexe III de la Loi à titre de «[m]atières [...] consommées ou utilisées par les fabricants ou producteurs [...] directement dans [...] la fabrication ou la production de marchandises». À l'appui de son affirmation, il a renvoyé à la décision du Tribunal dans l'affaire BHP-Utah Mines Ltd. c. Le ministre du Revenu nationa l [6] . Dans cette cause, le Tribunal avait conclu que les matières utilisées dans la construction d'une barrière érigée autour d'une mine pour empêcher l'infiltration d'eau étaient admissibles à l'exemption. La question principale consistait à déterminer si les matières en question avaient été utilisées «directement» dans la fabrication ou la production de marchandises. En concluant qu'il y avait un rapport ou un lien étroit entre la barrière et la production, en plus de s'appuyer sur la proximité physique de la barrière par rapport au site minier, le Tribunal s'est appuyé sur le fait que la construction d'un mur constituait un ouvrage préparatoire nécessaire à l'extraction du minerai de cuivre et que cet ouvrage serait nécessaire jusqu'à la fin de l'extraction.

Dans la présente cause, le Tribunal n'est pas convaincu que le béton et l'armatures de la structure de la chaudière ont été consommés ou utilisés directement dans les divers articles produits par l'appelant. Les éléments en béton sont la fondation (ou assises) sur laquelle l'installation de l'appelant est érigée. Comme il a déjà été observé, les assises sont dotées de bords légèrement relevés qui visent à empêcher la fuite de toute matière faisant l'objet du traitement. Le Tribunal convient que ces assises ont une fonction de prévention et que toute matière qui pourrait se déverser sur ces structures serait dirigée vers un système de drainage et finalement réacheminée dans le cycle de production. Cependant, le Tribunal n'est pas convaincu qu'il s'agit là de leur fonction primordiale. De l'avis du Tribunal, la fonction primordiale des éléments de béton est de servir de fondation ou d'assise à l'installation et, de ce fait, elles ne peuvent être justement qualifiées de matières consommées ou utilisées directement dans la fabrication ou la production de marchandises. De même, le Tribunal n'est pas convaincu que les pièces utilisées dans la construction de la structure de l'installation ont été consommées ou utilisées directement dans la fabrication ou la production de marchandises.

Le représentant de l'appelant n'a pas soumis d'élément de preuve ni présenté de plaidoirie concernant les articles divers que l'appelant a achetés avant d'obtenir une licence. Comme il a déjà été observé, il s'agit d'une vaste gamme d'articles, que l'intimé a tous déterminés comme n'étant pas destinés à «être utilisés [...] directement». Il semblerait, sur la foi du dossier [7] , que la plupart de ces dépenses étaient soit pour des services, comme le forage de trous de contrôle et la réparation de matériel, ou pour l'achat d'articles, tels du méthane, de l'acétylène, des électrodes et du bois de sciage, qui auraient servi à la construction de l'installation. Dans ce cas encore, le Tribunal n'est pas convaincu qu'il existe un lien suffisamment étroit entre l'utilisation de ces articles et la production de marchandises pour que ces articles puissent être qualifiés de matières consommées directement dans la fabrication de marchandises.

Par conséquent, l'appel est rejeté.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E-15.

2. L’article 81.19 de la Loi prévoit que «[t]oute personne qui a signifié un avis d’opposition en vertu de l’article 81.15 ou 81.17, autre qu’un avis à l’égard de la partie I, peut, dans les quatre-vingt-dix jours suivant la date d’envoi de l’avis de décision concernant l’opposition, appeler de la cotisation ou de la détermination au Tribunal».

3. Alpha Fuels Limited c. Le ministre du Revenu national, Tribunal canadien du commerce extérieur, appel no AP-89-264, le 6 avril 1992.

4. [1963] R.C.S. 629.

5. [1974] 2 C.F. 436.

6. Appel no AP-91-047, le 19 mars 1993.

7. Exposé de l'appelant, pièce 8.


Publication initiale : le 27 février 1997