MME MARIA BLASS, PH. D.

Décisions


MME MARIA BLASS, PH. D.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-94-362

TABLE DES MATIERES

Ottawa, le jeudi 25 janvier 1996

Appel no AP-94-362

EU ÉGARD À un appel entendu le 18 octobre 1995 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national le 22 décembre 1994 concernant une demande de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

Mme MARIA BLASS, Ph. D. Appelante

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté.


Robert C. Coates, c.r. ______ Robert C. Coates, c.r. Membre présidant

Lise Bergeron ______ Lise Bergeron Membre

Anita Szlazak ______ Anita Szlazak Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si une Buick 1991, importée des États-Unis, est correctement classée dans le numéro tarifaire 8703.21.90 à titre de voiture de tourisme d'une cylindrée n'excédant pas 1 000 cm3, principalement conçue pour le transport de personnes, comme l'a établi l'intimé, ou si elle doit être classée dans le numéro tarifaire 9806.00.00 à titre d'effet personnel ou domestique acquis par un résident du Canada à la suite de la mort ou en prévision de la mort d'une personne résidant à l'extérieur du Canada, comme l'a soutenu l'appelante.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Pour déterminer le classement tarifaire approprié de la voiture importée, le Tribunal doit établir si Mme Helga Schwallbach l'a cédée à l'appelante à titre de fiduciaire de la succession de M. Blass ou à titre de propriétaire de la voiture. Pour résoudre cette question, le Tribunal doit déterminer la véritable intention de M. Blass pour ce qui est de la façon de disposer de la voiture. Ayant pris connaissance du testament, le Tribunal est convaincu que la voiture a été léguée à Mme Schwallbach, libre de toute obligation fiduciaire. En outre, une demande orale faite par M. Blass pour que la voiture soit donnée à l'appelante, contrairement aux dispositions de son testament, ne pouvait avoir pour effet de modifier ledit testament. Les gestes posés par Mme Schwallbach, soit de faire établir le titre de la voiture à son nom et de la céder ensuite par voie de déclaration à l'appelante, confirment cette interprétation.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 18 octobre 1995 Date de la décision : Le 25 janvier 1996
Membres du Tribunal : Robert C. Coates, c.r., membre présidant Lise Bergeron, membre Anita Szlazak, membre
Avocat pour le Tribunal : David M. Attwater
Greffier : Anne Jamieson
A comparu : Josephine A.L. Palumbo, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] (la Loi) à l'égard d'une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si une Buick 1991, importée des États-Unis, est correctement classée dans le numéro tarifaire 8703.21.90 de l'annexe I du Tarif des douanes [2] à titre de voiture de tourisme d'une cylindrée n'excédant pas 1 000 cm3, principalement conçue pour le transport de personnes, comme l'a établi l'intimé, ou si elle doit être classée dans le numéro tarifaire 9806.00.00 à titre d'effet personnel ou domestique acquis par un résident du Canada à la suite de la mort ou en prévision de la mort d'une personne résidant à l'extérieur du Canada, comme l'a soutenu l'appelante. Des mémoires ont été déposés par les parties; cependant, l'appelante ne s'est pas présentée à l'audience publique.

Aux fins du présent appel, la nomenclature tarifaire pertinente de l'annexe I du Tarif des douanes est rédigée comme suit :

87.03 Voitures de tourisme et autres véhicules automobiles principalement conçus pour le transport de personnes (autres que ceux du no 87.02), y compris les voitures du type «break» et les voitures de course.

8703.21--D'une cylindrée n'excédant pas 1.000 cm3

8703.21.90---Autres

9806.00.00 Effets personnels ou domestiques d'un résident du Canada décédé à l'étranger; effets personnels ou domestiques acquis par un résident du Canada à la suite de la mort ou en prévision de la mort d'une personne résidant à l'extérieur du Canada, tout ce qui précède lorsque donné en cadeau à un résident du Canada.

La voiture, qui appartenait à feu Karl Blass, a été ramenée au Canada par Mme Helga Schwallbach huit mois après le décès de M. Blass. Mme Schwallbach était la fiduciaire ayant droit à la succession de M. Blass. Il est allégué (déclaration sous serment à l'appui) qu'avant son décès, M. Blass a demandé que la voiture soit donnée à l'appelante. Pour exécuter cette intention, Mme Schwallbach a fait une déclaration qui cédait la propriété de la voiture sans contrepartie à sa belle-soeur, l'appelante, le 4 avril 1994.

Dans son mémoire, l'appelante a soutenu que Mme Schwallbach détenait la voiture à titre de fiduciaire jusqu'à ce qu'elle puisse exécuter les intentions de feu son père. Ainsi, l'appelante a acquis la voiture à la suite du décès de M. Blass et non pas à titre de cadeau de Mme Schwallbach.

L'avocate de l'intimé a allégué que, pour pouvoir être classée dans le numéro tarifaire 9806.00.00, la voiture importée devait : 1) être un effet personnel ou domestique et 2) avoir été acquise à la suite de la mort ou en prévision de la mort d'une personne résidant à l'extérieur du Canada.

Selon l'intimé, l'appelante a acquis la voiture parce que Mme Schwallbach a décidé de la lui donner en cadeau. À l'appui de l'affirmation selon laquelle la voiture était réellement la propriété de Mme Schwallbach, l'intimé a fait remarquer ce qui suit : 1) M. Blass a explicitement légué «any automobile that he may own» ([traduction] toute automobile qui serait sienne) à Mme Schwallbach «free of trust» ([traduction] libre de fiducie); 2) bien que, selon le testament, Mme Schwallbach soit autorisée à «distribute undivided interests» ([traduction] distribuer les intérêts indivis) en qualité de fiduciaire ayant droit à la succession, la voiture ne peut être dite constituer un intérêt indivis puisqu'elle est explicitement léguée à Mme Schwallbach dans le testament; 3) la déclaration de cession du titre de propriété de la voiture par Mme Schwallbach confirme que cette dernière était la bénéficiaire de la voiture dans le testament de M. Blass; 4) la déclaration établit également que la voiture a été donnée par Mme Schwallbach à l'appelante; et 5) le certificat de titre de propriété relatif à la voiture délivré par l'État de la Floride le 7 juin 1994 indique explicitement que Mme Schwallbach était la propriétaire inscrite de la voiture et n'agissait pas à titre de fiduciaire.

Pour ce qui est de changer les dispositions expresses du testament, l'avocate de l'intimé a fait remarquer que, aux termes d'une disposition explicite du testament, M. Blass «reserves the right to alter or amend this Agreement at any time» ([traduction] se réserve le droit de modifier ou d'amender cet accord à n'importe quel moment). Cependant, «[a]ny amendment to [the] Trust Agreement must be in writing and executed by [Mr. Blass] in the presence of two (2) witnesses and a Notary, and written notice of said amendment shall be sent to the Successor Trustee» ([traduction] tout amendement à [l]'accord de fiduciaire doit être fait par écrit et exécuté par [M. Blass] en présence de deux (2) témoins et d'un notaire, et un avis écrit dudit amendement doit être envoyé au fiduciaire ayant droit). À ce titre, si M. Blass a dit qu'il avait l'intention de donner la voiture à l'appelante, contrairement aux dispositions expresses de son testament, cette déclaration d'intention est sans effet, puisqu'elle constituerait une modification ou un amendement dudit testament qui ne serait pas fait conformément aux modalités prévues dans le testament. En outre, Mme Schwallbach n'a pas le pouvoir de modifier unilatéralement le testament, puisque celui-ci comprend une disposition indiquant explicitement que «[t]he rights herein reserved to [Mr. Blass] to revoke and amend this Agreement are hereby declared to be personal rights exercisable by [Mr. Blass] alone and not by any other person» ([traduction] les droits réservés dans le présent document à [M. Blass] de révoquer et de modifier cet Accord sont par la présente déclarés être des droits personnels que seul [M. Blass] peut exercer à l'exclusion de toute autre personne).

En s'appuyant sur ces faits, l'avocate de l'intimé a soutenu que la voiture est devenue la propriété de Mme Schwallbach, qui l'a par la suite donnée à l'appelante. Au moment de son importation, donc, la voiture n'était pas un «effet personnel» de M. Blass; et l'appelante n'a pas acquis la voiture «à la suite de» ou «en prévision de» la mort de M. Blass. Par conséquent, les dispositions du numéro tarifaire 9806.00.00 n'ont pas été respectées.

Pour établir le classement tarifaire approprié de la voiture importée, le Tribunal doit établir si Mme Schwallbach l'a cédée à l'appelante à titre de fiduciaire de la succession de M. Blass ou à titre de propriétaire de la voiture. Pour résoudre cette question, le Tribunal convient, en accord avec les arguments avancés par l'avocate de l'intimé, qu'il doit déterminer la véritable intention de M. Blass pour ce qui est de la façon de disposer de la voiture. En outre, pour savoir quelle était cette intention, le Tribunal doit examiner le libellé du testament et la conduite des parties par rapport au testament [3] .

Ayant pris connaissance du testament, notamment des dispositions citées par l'avocate de l'intimé, le Tribunal est convaincu que la voiture a été léguée à Mme Schwallbach, libre de toute obligation fiduciaire. En outre, une demande orale faite par M. Blass pour que la voiture soit donnée à l'appelante, contrairement aux dispositions de son testament, ne pouvait avoir pour effet de modifier ledit testament.

Les gestes posés par Mme Schwallbach, soit de faire établir le titre de la voiture à son nom et de la céder ensuite par voie de déclaration à l'appelante, confirment cette interprétation. En reconnaissant dans sa déclaration que le testament fait d'elle la bénéficiaire de la voiture, Mme Schwallbach a posé un geste révélateur.

Par conséquent, l'appel est rejeté.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

2. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

3. À l’appui de cette proposition, l’avocate de l’intimé a renvoyé à l’affaire Clarkson Co. Ltd. c. La Reine, non publié, Cour d’appel fédérale, no du greffe A - 623 - 88, le 6 décembre 1988.


Publication initiale : le 28 août 1996