BENNETT FLEET INC.

Décisions


BENNETT FLEET INC.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-95-109


TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le lundi 7 octobre 1996

Appel no AP-95-109

EU ÉGARD À un appel entendu le 31 janvier 1996 aux termes de l’article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national le 11 mai 1995 concernant une demande de réexamen aux termes de l’article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

BENNETT FLEET INC. Appelant

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

DÉCISION DU TRIBUNAL

L’appel est admis.

Arthur B. Trudeau
Arthur B. Trudeau
Membre présidant

Lyle M. Russell
Lyle M. Russell
Membre

Anita Szlazak
Anita Szlazak
Membre

Michel P. Granger
Michel P. Granger
Secrétaire

RÉSUMÉ OFFICIEUX

La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les marchandises en cause, dénommées «Supertex 300, 400 ou 500», sont correctement classées dans la sous-position no 4811.90, comme l’a établi l’intimé, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 4805.80.10, comme l’a soutenu l’appelant.

DÉCISION : L’appel est admis. Le Tribunal conclut que les marchandises en cause doivent être classées dans la position no 48.05, et plus précisément dans le numéro tarifaire 4805.80.10, qui prévoit le classement des cartons à chaussures. Selon le Tribunal, ce numéro tarifaire décrit spécifiquement les marchandises en cause.

Lieu de l’audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l’audience :

Le 31 janvier 1996

Date de la décision :

Le 7 octobre 1996

   

Membres du Tribunal :

Arthur B. Trudeau, membre présidant

 

Lyle M. Russell, membre

 

Anita Szlazak, membre

   

Avocat pour le Tribunal :

Joël J. Robichaud

   

Greffier :

Anne Jamieson

   

Ont comparu :

Jocelyn Olivier, pour l’appelant

 

Stéphane Lilkoff, pour l’intimé

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le présent appel est interjeté aux termes de l’article 67 de la Loi sur les douanes 1 (la Loi) à l’égard d’une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national le 11 mai 1995 aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi.

Les marchandises en cause, dénommées «Supertex 300, 400 ou 500», sont décrites dans le mémoire de l’appelant comme étant des cartons à chaussures utilisés dans la fabrication de «fausses semelles», également appelées «semelles premières» ou «interior soles» en anglais. Elles sont composées de fibres alpha-cellulose, de latex butadiène-styrène, de stabilisants, d’antioxydants et de colorants. Ces produits sont mélangés avec de l’eau pour former la pâte. Le «Supertex» est importé en feuilles et est ensuite coupé pour en faire des semelles premières.

La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les marchandises en cause sont correctement classées dans la sous-position no 4811.90 de l’annexe I du Tarif des douanes 2 , comme l’a établi l’intimé, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 4805.80.10, comme l’a soutenu l’appelant. Aux fins du présent appel, la nomenclature tarifaire pertinente à l’annexe I du Tarif des douanes est la suivante :

48.05 Autres papiers et cartons, non couchés ni enduits, en rouleaux ou en feuilles.

4805.80 -Autres papiers et cartons d’un poids au m2 égal ou supérieur à 225 g

4805.80.10 ---Cartons à chaussures

48.11 Papiers, cartons, ouate de cellulose et nappes de fibres de cellulose, couchés, enduits, imprégnés, recouverts, coloriés en surface, décorés en surface ou imprimés, en rouleaux ou en feuilles, autres que les produits des nos 48.03, 48.09, 48.10 ou 48.18.

4811.90 -Autres papiers, cartons, ouate de cellulose et nappes de fibres de cellulose

Le représentant de l’appelant a convoqué un témoin, M. Clifford G. Wintemute, directeur de la cartonnerie à la société Bennett Fleet Inc. M. Wintemute a été reconnu comme témoin expert dans le domaine des pâtes et papiers. Il a décrit la nature des marchandises en cause et leur processus de fabrication. Il a expliqué que le latex est ajouté à la fibre de cellulose, c’est-à-dire au stade de la boue, avant que la feuille de carton soit formée. M. Wintemute a témoigné que le couchage, l’enduction et l’imprégnation comprennent habituellement le traitement d’un produit fini. Au cours du contre-interrogatoire, il a admis que l’imprégnation peut cependant consister en l’ajout de solutions lorsque le mélange est au stade de la boue dans le processus de fabrication. Il a témoigné que les marchandises en cause ne sont ni couchées ni enduites. Selon lui, les marchandises en cause sont des cartons à chaussures. Elles sont connues dans l’industrie et vendues par l’appelant comme tels.

Le représentant de l’appelant a soutenu que les marchandises en cause ne sont pas imprégnées au sens de la nomenclature pertinente, car l’ajout du latex fait partie du processus normal de fabrication des marchandises en cause. Il a renvoyé le Tribunal à la Note I) A) des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises 3 (les Notes explicatives) du Chapitre 48 qui prévoit, en partie, que «[l]es traitements autorisés au sens des nos 48.01 à 48.05 ont pour caractéristique d’être des opérations faisant partie de la série normale des opérations de fabrication du papier». Selon le représentant, les éléments de preuve montrent que les marchandises en cause ne sont ni du papier, ni du carton, ni de la ouate de cellulose, ni non plus une nappe de fibres de cellulose qui ont subi un autre traitement. Le latex est ajouté à la fibre de cellulose et non au produit fini. Il a donc prétendu que la Note 2 du Chapitre 48 de l’annexe I du Tarif des douanes ne s’applique pas. Par conséquent, les marchandises en cause ne peuvent être classées dans la position no 48.11. Selon le représentant, les marchandises en cause sont des cartons à chaussures et, par conséquent, doivent être classées dans le numéro tarifaire 4805.80.10.

L’avocat de l’intimé a soutenu que les marchandises en cause sont correctement classées dans la sous-position no 4811.90 puisqu’il s’agit d’un carton «imprégné» de latex. L’avocat a prétendu que le latex confère au carton une imperméabilité, une résistance et une flexibilité que n’ont pas les cartons ordinaires. Selon l’avocat, le fait que le latex est ajouté à la pâte de papier et non au produit fini n’empêche pas les marchandises en cause d’être classées dans la sous-position no 4811.90. Pour appuyer sa thèse, l’avocat s’est reporté à la décision du Tribunal dans l’affaire D. Dyck Industries Limited c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l’accise 4 . Dans cette affaire, le Tribunal a conclu que l’encollage interne, c’est-à-dire l’ajout de solutions au papier lorsqu’il est au stade de la boue, auquel était soumis le carton «Homasote», pouvait être qualifié de procédé d’imprégnation. Étant donné la Note 2 du Chapitre 48 de l’annexe I du Tarif des douanes, l’avocat a prétendu que les marchandises en cause ne peuvent être classées dans la position no 48.05.

Aux fins du classement des marchandises dans l’annexe I du Tarif des douanes, l’application de la Règle 1 des Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé 5 revêt une importance capitale. Cette règle prévoit que le classement est d’abord déterminé d’après les termes des positions et des Notes de Chapitres. Par conséquent, le Tribunal doit d’abord déterminer si les marchandises en cause sont nommées ou décrites de façon générale dans une position particulière de l’annexe I du Tarif des douanes. Si les marchandises en cause sont nommées dans une position, elles doivent y être classées sous réserve de toute Note de Chapitre pertinente. L’article 11 du Tarif des douanes précise que, pour l’interprétation des positions ou des sous-positions, le Tribunal doit tenir compte des Notes explicatives.

La position no 48.05 prévoit le classement de papiers et cartons, non couchés ni enduits, en rouleaux ou en feuilles. La Note 2 du Chapitre 48 de l’annexe I du Tarif des douanes prévoit que «les papiers, cartons, ouate de cellulose et nappes de fibres de cellulose qui ont subi un autre traitement tel que le couchage, l’enduction, l’imprégnation, ne relèvent pas» des positions nos 48.01 à 48.05. Les éléments de preuve montrent que les marchandises en cause ne sont ni couchées ni enduites et que le latex est ajouté à la fibre de cellulose. C’est donc la fibre de cellulose, et non le carton, qui est imprégnée. Selon le Tribunal, l’imprégnation dans ce cas ne constitue pas un autre traitement des marchandises en cause, mais plutôt un traitement qui fait partie de la série normale des opérations de leur fabrication. Le Tribunal est donc d’avis que les marchandises en cause ne sont pas imprégnées au sens de la Note 2 du Chapitre 48 de l’annexe I du Tarif des douanes. Le Tribunal se rapporte également à la Note I) A) des Notes explicatives du Chapitre 48 qui prévoit, en partie, que «[l]es traitements autorisés au sens des nos 48.01 à 48.05 ont pour caractéristique d’être des opérations faisant partie de la série normale des opérations de fabrication du papier». Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause doivent être classées dans la position no 48.05, et plus précisément dans le numéro tarifaire 4805.80.10, qui prévoit le classement des cartons à chaussures. Selon le Tribunal, ce numéro tarifaire décrit spécifiquement les marchandises en cause.

Pour les raisons qui précèdent, l’appel est admis.


1 . L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

2 . L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

3 . Conseil de coopération douanière, 1re éd., Bruxelles, 1986.

4 . Appel no AP-91-157, le 30 septembre 1992.

5 . Supra note 2, annexe I.