BAZAAR & NOVELTY CO., A DIVISION OF BINGO PRESS & SPECIALTY LIMITED

Décisions


BAZAAR & NOVELTY CO., A DIVISION OF BINGO PRESS & SPECIALTY LIMITED
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-95-120

TABLE DES MATIERES

Ottawa, le mercredi 10 avril 1996

Appel no AP-95-120

EU ÉGARD À un appel entendu le 24 novembre 1995 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national le 31 juillet 1995 concernant une demande de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

BAZAAR & NOVELTY CO., A DIVISION
OF BINGO PRESS & SPECIALTY LIMITED Appelant

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis.


Lise Bergeron ______ Lise Bergeron Membre présidant

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre

Desmond Hallissey ______ Desmond Hallissey Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard d'une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national le 31 juillet 1995. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les boules miroirs en verre sont correctement classées dans le numéro tarifaire 7009.91.00 à titre de miroirs en verre non encadrés, comme l'a établi l'intimé, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 8479.89.90 à titre d'autres machines ayant une fonction propre, non dénommées ni comprises ailleurs dans le Chapitre 84, comme l'a soutenu l'appelant.

DÉCISION : L'appel est admis. Le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont des appareils mécaniques ayant une fonction propre et qu'elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 8479.89.90.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 24 novembre 1995 Date de la décision : Le 10 avril 1996
Membres du Tribunal : Lise Bergeron, membre présidant Arthur B. Trudeau, membre Desmond Hallissey, membre
Avocat pour le Tribunal : John L. Syme
Greffier : Anne Jamieson
A comparu : Josephine A.L. Palumbo, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] (la Loi) à l'égard d'une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national le 31 juillet 1995. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les boules miroirs en verre sont correctement classées dans le numéro tarifaire 7009.91.00 de l'annexe I du Tarif des douanes [2] à titre de miroirs en verre non encadrés, comme l'a établi l'intimé, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 8479.89.90 à titre d'autres machines ayant une fonction propre, non dénommées ni comprises ailleurs dans le Chapitre 84, comme l'a soutenu l'appelant.

Les boules miroirs en cause sont des sphères, recouvertes de petits miroirs en verre, qui pivotent sur l'axe d'un moteur électrique. Elles sont couramment utilisées dans les discothèques et les salles de danse, où elles peuvent être accrochées au plafond ou aux murs, ou fixées au plancher.

Aux fins du présent appel, les dispositions tarifaires pertinentes sont les suivantes :

70.09 Miroirs en verre, même encadrés, y compris les miroirs rétroviseurs.

7009.10.00 -Miroirs rétroviseurs pour véhicules

-Autres :

7009.91.00 --Non encadrés

84.79 Machines et appareils mécaniques ayant une fonction propre, non dénommés ni compris dans le présent Chapitre.

-Autres machines et appareils :

8479.89 --Autres

8479.89.90 ---Autres :

Le représentant de l'appelant ne s'est pas présenté à l'audience, se contentant de soumettre un premier mémoire et un mémoire supplémentaire dans le cadre des présentes délibérations. Dans ces exposés, le représentant soutient que les boules miroirs sont un «matériau composite» comprenant deux principaux éléments, à savoir la boule à surface réfléchissante ainsi que le groupe moteur et arbre de transmission. Selon l'exposé du représentant, si l'appelant ne faisait qu'importer la boule à surface réfléchissante sans moteur ni arbre de transmission, le classement des marchandises en cause établi par l'intimé serait correct. Cependant, la présence du moteur et de l'arbre de transmission dans les marchandises en cause en modifient la nature. Ce deuxième élément transforme les boules miroirs en machines. C'est pourquoi le représentant a proposé qu'elles soient classées dans le Chapitre 84 et, plus précisément, dans le numéro tarifaire 8479.89.90.

Selon le mémoire de l'intimé, les boules miroirs sont correctement classées dans le numéro tarifaire 7009.91.00 à titre de miroirs en verre non encadrés. Le principal argument avancé par l'avocate de l'intimé s'appuyait sur l'affirmation que le caractère essentiel des boules miroirs était conféré par les miroirs apposés sur les boules pour réfléchir la lumière et non pas par le moteur électrique qui en assure leur rotation. L'avocate s'en est prise au fait que l'appelant ait décrit les boules miroirs comme des machines. De l'avis de l'avocate, le Tribunal a déjà défini les machines comme étant un assemblage plus ou moins complexe de pièces mobiles et stationnaires dont le travail consiste à produire, à modifier ou à transmettre de la force ou du mouvement. Puisque les boules miroirs ne peuvent que tourner en rond sur l'axe de leur moteur électrique, elles ne produisent, ne modifient ni ne transmettent aucune force ou aucun mouvement et ne sont pas, par conséquent, des machines.

Dans le mémoire supplémentaire de l'intimé, il est souligné que le libellé de la position no 84.79 précise que les machines et les appareils mécaniques ont une fonction propre. Le principal argument avancé par l'avocate de l'intimé dans le mémoire supplémentaire est que, puisque les boules miroirs sont incapables, par elles-mêmes, de réfléchir la lumière sans l'aide d'un autre appareil (c.-à-d. une source lumineuse), elles sont incapables de remplir une «fonction propre» et ne peuvent pas, par conséquent, être classées dans la position no 84.79.

Selon le paragraphe 7 du mémoire supplémentaire, les boules miroirs ne satisfont pas à la définition du terme «machine» indiquée ci-dessus (c.-à-d. un assemblage de pièces dont le travail consiste à produire, à modifier ou à transmettre de la force ou du mouvement). Cependant, au paragraphe 12, il est concédé que les boules miroirs sont des machines.

À l'audience, l'avocate de l'intimé a avancé trois arguments en faveur du classement tarifaire établi par l'intimé :

Caractère essentiel : Aux termes de la Règle 3 b) des Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé [3] (les Règles générales), les ouvrages composés de matières différentes ou constitués par l'assemblage d'articles différents sont classés d'après la matière ou l'article qui leur confère leur caractère essentiel. L'avocate a fait valoir que, même s'il est vrai que les boules miroirs sont composées de deux éléments, c'est-à-dire la boule à surface réfléchissante ainsi que le groupe moteur et arbre de transmission, leur «caractère essentiel» provient des miroirs montés sur les boules. L'argument de l'avocate s'appuie sur le fait que la principale fonction des boules est de réfléchir la lumière. L'effet créé par la rotation de la boule miroir est, de l'avis de l'avocate, secondaire par rapport à sa fonction principale.

Fonction propre : L'avocate a soutenu que les boules miroirs ne pouvaient être classées dans la position no 84.79, puisque celle-ci vise explicitement les «[m]achines et appareils mécaniques ayant une fonction propre». L'avocate a fait valoir que, puisque les boules miroirs ne remplissent aucune fonction en l'absence d'une source lumineuse, elles n'ont pas de fonction propre et ne peuvent, par conséquent, être classées dans la position no 84.79.

Exclusion : À titre de seconde solution, l'avocate a allégué que les boules miroirs étaient exclues du Chapitre 84 aux termes de la Note 1 c) des Notes de Chapitre. Cette note exclut les articles suivants du Chapitre 84 :

la verrerie de laboratoire (n o 70.17); les ouvrages en verre pour usages techniques (n os 70.19 ou 70.20).

En réponse à une question du Tribunal, l'avocate de l'intimé a précisé que les boules miroirs sont des appareils ou des articles destinés à un usage technique et qu'elles sont, par conséquent, exclues par la Note 1 c). L'avocate a fait valoir que, si le Tribunal était disposé à accepter son argument subsidiaire, les boules miroirs devaient être classées dans la position no70.20 à titre d'«[a]utres ouvrages en verre».

Le classement tarifaire est établi conformément aux Règles générales. La Règle 1 des Règles générales prévoit que «le classement [est] déterminé [...] d'après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et, lorsqu'elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d'après les Règles suivantes». Contrairement à ce que soutient l'intimé, le Tribunal est d'avis que la Règle 1 suffit pour trancher le présent appel. Conformément à la Règle 1, le Tribunal doit d'abord déterminer si les marchandises en cause sont nommées ou décrites de façon générique dans une position donnée. Aux termes de l'article 11 du Tarif des douanes, le Tribunal doit, dans son interprétation des positions et sous-positions de l'annexe I, tenir compte des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [4] (les Notes explicatives).

Le représentant de l'appelant a déclaré que les boules miroirs doivent être classées dans la position no 84.79 à titre de «[m]achines et appareils mécaniques ayant une fonction propre». Pour que les marchandises en cause soient classées dans la position no 84.79, le Tribunal doit être convaincu qu'elles ne sont ni dénommées ni comprises ailleurs dans le Chapitre 84, qu'elles sont soit des machines, soit des appareils mécaniques et qu'elles ont une fonction propre.

Le Tribunal est convaincu que les boules miroirs ne sont dénommées nulle part ailleurs dans le Chapitre 84. Pour ce qui est de déterminer s'il s'agit de machines ou d'appareils mécaniques, le Tribunal fait remarquer que, dans deux décisions qu'il a rendues récemment, il a estimé que les expressions «machine» et «appareil mécanique» sont analogues [5] . Le Tribunal souligne que «l'une des définitions principales et courantes du terme anglais «mechanical» (mécanique), selon les dictionnaires, est la suivante : «having to do with machinery» ([traduction] qui a rapport aux machines) et a conclu que les «expressions “machines” et “appareils mécaniques” sont semblables compte tenu de la nature des marchandises visées par les définitions et doivent, par conséquent, être classées dans la position no 84.79 [6] ». Dans le présent appel, le Tribunal est du même avis.

Pour déterminer si les boules miroirs sont des machines ou des appareils mécaniques, le Tribunal a renvoyé à la Note supplémentaire 1 de la Section XVI de l'annexe I selon laquelle «[d]ans la présente Section, l'expression “à commande mécanique” se rapporte aux produits comprenant une combinaison plus ou moins complexe de parties mobiles et stationnaires et contribuant à la production, la modification ou la transmission de la force et du mouvement». Le Tribunal souligne que ce libellé est similaire à la définition du terme «machine» adoptée par la Cour d'appel fédérale [7] .

De l'avis du Tribunal, les boules miroirs sont à commande mécanique et sont des appareils mécaniques. La sphère sur la surface de laquelle une multitude de miroirs sont collés tourne autour d'un axe interne ou d'un arbre de transmission mu par un moteur électrique. Selon le Tribunal, le moteur et l'arbre de transmission confèrent aux boules miroirs leur caractère mécanique.

Pour ce qui est de la question de la fonction propre, les Notes explicatives de la position no 84.79 expliquent en détail, exemples à l'appui, le sens de l'expression «fonction propre», en fournissant, entre autres, les précisions suivantes :

B) Les dispositifs mécaniques qui ne peuvent fonctionner que montés sur une autre machine, un autre appareil ou engin ou incorporés dans un ensemble plus complexe, à la condition cependant que leur fonction :

1°) soit distincte de celle de la machine, de l'appareil ou de l'engin sur lesquels ils doivent être montés ou de celle de l'ensemble dans lequel ils doivent être incorporés, et

2°) qu'elle ne participe pas d'une manière intégrante et indissociable au fonctionnement de cette machine, de cet appareil, engin ou ensemble.

Exemple : [...] un carburateur pour moteur à allumage par étincelles n'a pas, bien que sa fonction soit distincte de celle du moteur, de fonction propre au sens de la définition ci - dessus puisque cette fonction s'intègre dans celle du moteur dont elle ne constitue en réalité qu'une phase.

Le Tribunal est convaincu que les boules miroirs ont une fonction propre. Même si ces boules miroirs ne peuvent pas remplir leur fonction si elles ne sont pas utilisées conjointement avec une source lumineuse, contrairement à un carburateur de moteur, leur fonction est distincte de celle de la source de lumière et ne participe pas d'une manière intégrante au fonctionnement de la source de lumière.

Le Tribunal s'est également penché sur la question de savoir si les marchandises en cause étaient correctement classées dans la position no 70.09, comme l'a établi l'intimé. En ce qui concerne le libellé de cette position et des Notes explicatives qui s'y rapportent, le Tribunal n'est simplement pas persuadé que les boules miroirs sont des miroirs en verre non encadrés au sens envisagé dans cette position. Quant à l'argument subsidiaire présenté par l'avocate de l'intimé et qui repose sur la Note 1 c) des Notes du Chapitre 84, le Tribunal est d'avis que les boules miroirs ne sont pas destinées à «un usage technique», comme l'exige la note et qu'elles ne sont pas, par conséquent, exclues du Chapitre 84.

Pour les motifs susmentionnés, les marchandises en cause doivent être classées dans la position no 84.79. Le Tribunal conclut que les boules miroirs, puisqu'elles ne sont dénommées dans aucune des sous-positions visant des marchandises particulières de la position no 84.79, doivent être classées dans la sous-position no 8479.89, «Autres». Dans cette sous-position, les boules miroirs doivent être classées dans le numéro tarifaire 8479.89.90.

Par conséquent, l'appel est admis.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

2. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

3. Supra, note 2, annexe I.

4. Conseil de coopération douanière, 1re éd., Bruxelles, 1986.

5. Voir, par exemple, Canper Industrial Products Ltd. c. Le sous-ministre du Revenu national , appel no AP-94-034, le 24 janvier 1995 et Société Canadian Tire Ltée c. Le sous-ministre du Revenu national , appel no AP-94-157, le 12 octobre 1995.

6. Canper Industrial Products Ltd ., ibid. à la p. 4.

7. Voir, par exemple, Ingersoll-Rand Door Hardware Canada Inc. c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise , non publié, no du greffe A-503-86, le 21 octobre 1987.


Publication initiale : le 28 octobre 1996