FLEXTUBE INC.

Décisions


FLEXTUBE INC.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-95-097

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le vendredi 19 février 1999

Appel n o AP-95-097

EU ÉGARD À un appel entendu le 21 septembre 1998 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national le 31 mai 1995 concernant une demande de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

FLEXTUBE INC. Appelante

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis en partie.


Richard Lafontaine ______ Richard Lafontaine Membre présidant

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard d'une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les marchandises en cause, décrites comme étant des serpentins en acier, sont correctement classées dans le numéro tarifaire 7306.50.00, comme l'a déterminé l'intimé, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 7306.20.00, comme l'a soutenu l'appelante. Une deuxième question en litige consiste à savoir si les marchandises en cause sont admissibles aux avantages des codes 1570, 1551 ou 1552 de l'annexe II du Tarif des douanes.

DÉCISION : L'appel est admis en partie. Essentiellement, le Tribunal doit statuer sur trois questions. La première consiste à déterminer si la doctrine de la chose jugée s'applique pour empêcher le Tribunal d'entendre le présent appel. La deuxième question porte sur le classement tarifaire correct des marchandises en cause et la troisième, sur l'applicabilité des codes 1570, 1551 et 1552. Le Tribunal conclut que la doctrine de la chose jugée ne s'applique pas pour l'empêcher d'entendre le présent appel parce que la question soulevée dans celui-ci est différente de la question qui a été soulevée dans l'affaire Canadian Fracmaster Ltd.c. L e sous-ministre du Revenu national. Dans l'appel susmentionné, la question en litige consistait à déterminer si les « serpentins en acier » étaient correctement classés dans le numéro tarifaire 7306.50.00 ou s'ils devaient être classés dans le numéro tarifaire 8307.10.00. Dans le présent appel, la question en litige consiste à déterminer si les « serpentins en acier » sont correctement classés dans le numéro tarifaire 7306.50.00 ou s'ils doivent être classés dans le numéro tarifaire 7306.20.00. De plus, les parties au présent appel ne sont pas les mêmes parties qui ont comparu devant le Tribunal dans l'affaire Canadian Fracmaster. En outre, le présent appel traite d'importations différentes. En ce qui a trait à la deuxième question en litige, le Tribunal accueille, dans l'ensemble, les éléments de preuve soumis par l'appelante et conclut que les marchandises en cause sont du type utilisé pour l'extraction du pétrole ou du gaz. À ce titre, elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 7306.20.00 à titre de tubes et tuyaux de cuvelage ou de production des types utilisés pour l'extraction du pétrole ou du gaz. Pour ce qui est de la troisième question en litige, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne sont pas admissibles aux avantages des codes 1570, 1551 et 1552. Pour ce qui est du code 1570, le Tribunal est d'avis que les marchandises en cause ne sont manifestement pas du matériel devant servir à la fabrication des marchandises du Chapitre 73, et n'a pu non plus conclure, à la lumière des éléments de preuve, que les marchandises en cause devaient servir à la fabrication des marchandises de la position 87.05. De plus, le procédé qui sert à fixer les raccords et à couper les tuyaux n'équivaut pas, selon le Tribunal, à de la fabrication. En ce qui concerne les codes 1551 et 1552, le Tribunal est d'avis que les marchandises en cause ne sont pas admissibles à titre de machines ou d'appareils. En outre, l'appelante n'a pas, selon le Tribunal, démontré de façon probante que les marchandises en cause sont montées sur des machines et appareils d'étude des puits ou de perforation des puits, et qu'elles en sont des parties nécessaires et intégrantes, ni que leur degré de fabrication est tel qu'elles sont exclusivement destinées à une application particulière.

Lieux de l'audience par voie de vidéo conférence : Hull (Québec) et Vancouver (Colombie-Britannique) Date de l'audience : Le 21 septembre 1998 Date de la décision : Le 19 février 1999
Membre du Tribunal : Richard Lafontaine, membre présidant
Avocat pour le Tribunal : Joël J. Robichaud
Greffiers : Anne Turcotte et Margaret Fisher
Ont comparu : Kimberley L.D. Cook, pour l'appelante Jan Brongers, pour l'intimé





Le présent appel, entendu par voie de vidéoconférence, est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] (la Loi), à l'égard d'une décision rendue le 31 mai 1995 par le sous-ministre du Revenu national aux termes de l'article 63 de la Loi.

La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les marchandises en cause, décrites comme étant des serpentins en acier, sont correctement classées dans le numéro tarifaire 7306.50.00 de l'annexe I du Tarif des douanes [2] , comme l'a déterminé l'intimé, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 7306.20.00, comme l'a soutenu l'appelante. Une deuxième question en litige consiste à savoir si les marchandises en cause sont admissibles aux avantages des codes 1570, 1551 ou 1552 de l'annexe II du Tarif des douanes. Aux fins du présent appel, la nomenclature tarifaire pertinente prévoit ce qui suit :

73.06 Autres tubes, tuyaux et profilés creux (soudés, rivés, agrafés ou à bords simplement rapprochés, par exemple), en fer ou en acier.

7306.20 -Tubes et tuyaux de cuvelage ou de production des types utilisés pour l'extraction du pétrole ou du gaz

7306.50.00 -Autres, soudés, de section circulaire, en autres aciers alliés

D'abord, l'avocate de l'appelante a avisé le Tribunal qu'elle avait l'intention de soutenir que les marchandises en cause sont admissibles aux avantages des codes 1551 et 1552. Elle a fait valoir qu'elle devrait être autorisée à soulever la question pour garantir que l'argumentation complète de l'appelante soit soumise au Tribunal. En outre, elle a soutenu que ses arguments sur l'applicabilité des codes susmentionnés seraient semblables à ceux qu'elle présenterait sur l'applicabilité du code 1570. De plus, il ne serait pas nécessaire de présenter de faits supplémentaires. Dans un souci de justice à l'endroit de l'avocat de l'intimé, elle a proposé qu'il soit accordé à ce dernier l'occasion de déposer des exposés écrits supplémentaires traitant de la question. L'avocat de l'intimé a fait opposition et a soutenu que l'avocate de l'appelante ne devrait pas être autorisée à soulever cette nouvelle question aussi tardivement. Il a soutenu que lui permettre de ce faire porterait préjudice à l'intimé, qui n'a pas eu l'occasion de se préparer à traiter de ladite question. Il a soutenu que, parce que l'avocate n'a pas soulevé la question dans son mémoire, elle ne devrait pas être autorisée à en traiter à l'audience.

Le Tribunal a décidé de permettre à l'avocate de l'appelante de soulever la question de l'applicabilité des codes 1551 et 1552. Le Tribunal a convenu qu'il devrait être accordé à l'appelante, dans toute la mesure du possible, l'occasion de présenter complètement sa cause. Cependant, le Tribunal a rappelé à l'avocate qu'il existe des règles à suivre et que, à l'avenir, elle devrait veiller à ce que de telles questions soient signalées au Tribunal et à l'intimé le plus tôt possible. Pour être juste à l'endroit de l'avocat de l'intimé, le Tribunal a brièvement suspendu l'audience afin que ce dernier puisse consulter son client. L'avocat a aussi été informé que l'occasion lui serait donnée de déposer des exposés consécutifs à l'audience sur cette question, s'il le souhaitait. Le cas échéant, il serait accordé à l'avocate de l'appelante l'occasion de présenter ses observations en réponse.

A témoigné au nom de l'appelante M. George Mayette, directeur du Service de prospection de la clientèle pour les services de serpentins à la société Canadian Fracmaster Ltd. (Fracmaster) et, auparavant, président et directeur général de la société Flextube Inc. (Flextube). Il a expliqué que l'appelante a été achetée par Fracmaster, il y a 1½ an. Il a dit travailler dans le domaine de l'industrie du pétrole et du gaz depuis environ 20 ans. Il a expliqué que 90 p. 100 du chiffre d'affaires de l'appelante se rapportait à l'exploitation de serpentins, ce qui comprend l'entretien et la réparation de serpentins utilisés dans l'industrie du pétrole et du gaz. M. Mayette a témoigné que les serpentins sont faits de tubes en acier continus fabriqués en diverses longueurs et dimensions. Il a expliqué que les marchandises en cause ont un diamètre de 2 pouces ou moins et qu'elles ont été achetées de la société Precision Tubing et Quality Tubing, de Houston (Texas). Il a ajouté que 98 p. 100 de l'activité commerciale de sa société se rapporte, au pétrole et au gaz.

M. Mayette a expliqué que les serpentins d'un diamètre inférieur à deux pouces servent dans les opérations de forage et de perforation, qui consistent à descendre des charges explosives sur un outil dans un trou de forage pour perforer le tube de cuvelage en place dans le puits de forage. Il a dit que, d'une façon générale, les serpentins de 1,5 pouce sont utilisés pour de telles opérations. Cependant, on peut aussi se servir de tubes de 2 pouces et de 1,25 pouce de diamètre. M. Mayette a aussi témoigné que les serpentins servent dans l'étude des puits, qui consiste à enregistrer les pressions, la perméabilité et la porosité du système en place et à déterminer l'emplacement des poches de gaz, de pétrole ou d'eau dans le réservoir.

À l'aide d'un dessin illustrant une installation sous-équilibrée de forage horizontal profond, M. Mayette a expliqué la fonction d'une bobine de travail. Il a dit que, pour l'essentiel, la bobine de travail tient le serpentin. Elle est dotée d'une série de commandes qui peuvent être réglées à distance. Son objet principal est le bobinage du tube et son alimentation à travers l'injecteur dans le trou de forage. Il est ainsi possible d'alimenter en puissance les outils de forage au fond du trou. Il a témoigné que les serpentins sont essentiels au fonctionnement de la bobine de travail. M. Mayette a aussi expliqué de quelle manière des raccords à compression servent à fixer le serpentin à la bobine de travail et aux différents outils situés à l'extrémité du serpentin. Il a précisé qu'il est très important de bien préparer les extrémités du tube. Ce tube doit être soigneusement coupé et nettoyé, et il faut enlever tous les débris. Ensuite, on monte une soudure, ou le procédé de soudage commence. Dans certains cas, il est important de vérifier la soudure aux rayons X. M. Mayette a témoigné que les marchandises sont normalement expédiées sur une bobine de travail en bois, habituellement en longueur d'environ 5 000 mètres. Selon la taille de l'unité de serpentin avec laquelle il servira, il arrive qu'on enroule aussi peu que 1 000 mètres de tube sur une autre bobine. Il a témoigné qu'il faut jusqu'à cinq personnes pour exécuter les opérations de bobinage et de soudure. D'une façon générale, une opération normale de bobinage dure de trois à quatre heures. Les types de machines nécessaires pour ces opérations comprennent des soudeuses et des bobines auxiliaires. Il a ajouté que les travailleurs ont accès à des installations d'usinage, comme un tour, et que, dans de nombreux cas, le travail peut être confié en sous-traitance. M. Mayette a, en outre, témoigné que les installations extérieures de bobinage de Fracmaster et de l'appelante représentent un investissement en capital de l'ordre de 300 000 $. Au cours du contre-interrogatoire, M. Mayette a expliqué que, pour des raisons d'économie d'échelle, les marchandises sont expédiées sur de grosses bobines en bois et que les quantités nécessaires pour la colonne de forage sur une unité de serpentin sont alors déroulées et coupées à la longueur voulue. Il a ajouté que la coupe est une opération toute simple. Le raccordement est ce qui exige une certaine quantité de contrôle de la qualité.

Au cours du contre-interrogatoire, M. Mayette a aussi témoigné que la date de prise d'effet de la vente de l'appelante à Fracmaster était le 1er janvier 1997. La date de fermeture était le 15 avril 1997. Il a expliqué que l'appelante a été acquise au moyen d'achat d'actions et non d'achat des actifs. De ce fait, M. Mayette a témoigné que l'appelante existe encore en tant qu'entité sociale. Cependant, il a témoigné que l'appelante et Fracmaster sont, essentiellement, une seule et même entité. En outre, M. Mayette a confirmé que les seules marchandises en cause dans le présent appel sont les tubes de 1,25 pouce et de 1,5 po. Il a témoigné que ces tubes conviennent au nettoyage des puits, aux traitements acides, aux traitements de nitrification, à l'extraction de la matière à haute teneur et aux purges, qui sont toutes des fonctions d'entretien. Il a convenu avec l'avocat de l'intimé que les marchandises en cause peuvent servir dans l'entretien des puits. Il a cependant dit ne pas être d'accord sur le fait que les marchandises en cause ne soient pas reconnaissables comme étant susceptibles d'être utilisées dans de véritables travaux de forage pour puits de pétrole ou de gaz. M. Mayette a réitéré que l'appelante se sert de « serpentins » de 1,25 pouce et de 1,5 pouce à cette fin depuis de nombreuses années. Il a expliqué que, grâce à la nouvelle technologie appliquée par l'appelante, le couple est moindre, ce qui rend les petits tubes susceptibles d'être utilisés dans le forage de puits de pétrole ou de gaz. M. Mayette a dit ne pas connaître les dates exactes auxquelles l'appelante a de fait utilisé les serpentins de 1,25 pouce et de 1,5 pouce pour faire du forage de puits de pétrole et de gaz, mais a dit que c'était probablement en 1991 ou en 1992 dans le cas des tubes de 1,25 pouce et souvent au cours des six à sept dernières années dans le cas des serpentins de 1,5 po. Il a dit être certain que les tubes de 1,25 pouce et de 1,5 pouce ont de fait servi à des opérations de forage de puits de pétrole et de gaz, étant donné qu'il était président et directeur général de Flextube à cette époque.

En réponse à des questions du Tribunal, M. Mayette a témoigné que les serpentins de 1,25 pouce et de 1,5 pouce ont probablement été régulièrement utilisés par l'appelante à des fins de forage à chaque année depuis 1988. Il a témoigné qu'il était sur place à au moins trois occasions où il a alors vu les serpentins de 1,25 pouce être utilisés spécifiquement. Une de ces occasions était en juin 1993. Une autre serait en septembre 1991. Il a dit se souvenir de cette occasion en particulier parce que le travail avait été effectué par très mauvais temps. Une autre occasion encore serait en mars 1989. Il a aussi témoigné que, parce que les serpentins de 1,5 pouce font partie des applications habituelles de l'appelante, il ne pouvait se souvenir des dates précises auxquelles ils avaient de fait été utilisés.

Un témoin, M. David R. Budney, Ph. D., professeur de génie mécanique à la University of Alberta, a comparu au nom de l'intimé. L'avocat de l'intimé a demandé que le Tribunal reconnaisse à M. Budney la qualité d'expert dans la domaine de la résistance améliorée du matériel de tuyauterie, y compris les tubes. L'avocate de l'appelante s'est opposée à ce que M. Budney soit reconnu à titre d'expert dans le domaine des applications des serpentins dans l'industrie pétrolière et gazière. Après avoir reçu des éléments de preuve sur la compétence et les connaissances de M. Budney sur les tubes et tuyaux, ainsi que sur son manque d'expérience sur le terrain dans l'industrie pétrolière et gazière, le Tribunal a été d'accord avec l'avocate et a reconnu à M. Budney la qualité de témoin expert dans le domaine des « serpentins », mais non relativement à l'application de telles marchandises dans l'industrie pétrolière et gazière. À cet égard, le Tribunal a dit qu'il examinerait les éléments de preuve soumis par ce dernier au même titre que s'ils étaient soumis par un témoin ordinaire.

M. Budney a témoigné que les marchandises en cause servent principalement à l'entretien du puits pour accroître la production ou le débit. M. Budney a expliqué que, d'après les dimensions et la résistance des marchandises en cause, elles ne s'approchent même pas du plus petit diamètre ni de la plus petite valeur de solidité des tiges de forage traditionnelles nécessaires à l'extraction du pétrole et du gaz. À sa connaissance, l'échelle des limites d'élasticité des serpentins allait de 40 000 à 80 000 livres par pouce carré jusqu'à ce qu'il consulte un document fourni par l'appelante et qui indiquait une limite d'élasticité de 100 000 livres par pouce carré [3] . Il a témoigné que les diamètres extérieurs des tiges de forage se situent entre 2 3/8 pouces et 6 5/8 po. Il a expliqué que les contraintes métallurgiques varient aussi selon les différentes conditions mécaniques associées à l'utilisation des tiges : la tige de forage doit avoir une limite d'élasticité élevée; elle doit résister à la fatigue et aux chocs; elle ne peut se plier. Il a expliqué que le tube en continu est conçu pour résister à la fatigue oligocyclique, ce qui entraîne des différences de capacité de couple, ce qui convient davantage aux opérations telles que les services d'entretien au fond du trou, le nettoyage des puits, les traitements acides, la stimulation des puits et ainsi de suite.

L'avocate de l'appelante a soutenu que les marchandises en cause servent surtout pour les opérations de forage ou d'extraction, d'étude de puits, de perforation et d'entretien. Elle a soutenu que les éléments de preuve montrent que, après leur importation, les marchandises en cause sont transformées, depuis des pièces de tube qui sont utilisées dans l'industrie gazière et pétrolière, en composants ou parties intégrales de l'unité de serpentin, dans un procédé qui nécessite plus de quatre heures de travail de la part de trois ouvriers spécialisés. En outre, elle a soutenu que les types de travaux pour lesquels l'unité de serpentin est utilisée changent d'un jour à l'autre. C'est pourquoi l'unité elle-même est constamment l'objet d'une nouvelle fabrication pour l'adapter au travail auquel elle doit servir, que ce soit l'étude des puits, la perforation ou le forage. À la lumière des éléments de preuve qui ont été présentés, l'avocate a soutenu que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 7306.20.00, puisqu'elles sont du type utilisé pour l'extraction du pétrole ou du gaz. L'avocate a soutenu que, dans l'affaire Canadian Fracmaster Ltd.c. L e sous-ministre du Revenu nationa l [4] , le Tribunal a examiné une question différente, c.-à-d., le bien-fondé du classement tarifaire des serpentins dans le numéro tarifaire 8307.10.00 ou dans le numéro tarifaire 7306.50.00.

À l'appui de son argument selon lequel les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 7306.20.00, l'avocate de l'appelante a renvoyé à la décision qu'a rendue le Tribunal dans l'affaire Ballarat Corporation Ltd.c. L e sous-ministre du Revenu national [5] , où il a été statué que les expressions « du type utilisé » et « des types utilisés » signifient que les marchandises doivent posséder les caractéristiques physiques qui font qu'elles sont reconnaissables comme étant susceptibles d'être utilisées avec certaines des marchandises qui entrent dans le champ d'application de la définition des catégories de marchandises « du type utilisé » ou « des types utilisés ». Elle a soutenu que le Tribunal a rejeté l'argument selon lequel il doit exister quelque chose d'inhérent dans la conception, la construction ou la composition des marchandises qui fasse qu'elles soient reconnaissables comme étant destinées à une application particulière ou qu'elles doivent être reconnaissables comme étant principalement destinées à une application particulière plutôt qu'à une autre. L'avocate a soutenu que les éléments de preuve montrent clairement que les marchandises en cause possèdent les caractéristiques physiques qui font qu'elles sont reconnaissables comme étant susceptibles d'être utilisées pour l'extraction du pétrole ou du gaz. De toute façon, l'avocate a soutenu que les marchandises en cause répondraient au critère plus rigoureux, c.-à-d. le critère de la qualité inhérente préconisé par l'intimé. L'avocate a renvoyé à la Règle 3a) des Règles générales pour l 2 'interprétation du Système harmonisé [6] (les Règles générales) et à la Règle 1 des Règles canadiennes [7] , qui prévoient que, lorsque des marchandises paraissent devoir être classées dans deux ou plusieurs numéros tarifaires, le numéro tarifaire le plus spécifique doit avoir la priorité sur les numéros tarifaires d'une portée plus générale. Elle a soutenu que les marchandises en cause doivent donc être classées dans le numéro tarifaire 7306.20.00, le numéro tarifaire le plus spécifique des deux numéros tarifaires en cause.

L'avocate de l'appelante a soutenu que, pour être admissibles aux avantages du code 1570, les marchandises en cause doivent répondre aux quatre critères suivants : 1) les marchandises doivent être du matériel; 2) elles doivent servir à la fabrication de marchandises; 3) la fabrication doit se rapporter aux marchandises de la position no 87.05 ou du Chapitre 73; 4) les marchandises doivent être utilisées dans les travaux d'exploration, de découverte, d'entretien, d'épuisement ou de mise en exploitation de puits de pétrole ou de gaz naturel. L'avocate a soutenu que les marchandises en cause sont du matériel et que ce fait n'a pas été contesté par l'intimé. En outre, si les marchandises sont fabriquées, alors, manifestement, la fabrication se rapporte à des marchandises de la position no 87.05 ou du Chapitre 73. Plus précisément, elle se rapporte à des marchandises du numéro tarifaire 8705.90.10, c.-à-d. des systèmes de serpentin pour l'entretien des puits de pétrole, ou à des ouvrages en fer ou acier du Chapitre 73. Le troisième critère serait donc satisfait. L'avocate a soutenu que les marchandises en cause sont importées et classées à titre de marchandises du Chapitre 73 et qu'elles subissent un procédé de fabrication pour la production d'autres marchandises du Chapitre 73. En ce qui a trait au quatrième critère, l'avocate a soutenu que le fait que les marchandises en cause sont utilisées en relation avec des travaux d'exploration, de découverte, d'entretien et de mise en exploitation de puits de pétrole ou de gaz naturel n'est pas contestée. La seule question en litige devient donc celle de déterminer si les marchandises en cause sont utilisées dans la fabrication de marchandises.

À l'appui de son argument selon lequel les marchandises en cause servent effectivement dans la fabrication d'autres marchandises, l'avocate de l'appelante a renvoyé à la décision que la Cour suprême du Canada a rendue dans l'affaire The Deputy Minister of National Revenue for Customs and Excise v. Research-Cottrell (Canada) Limited and Joy Manufacturing Company (Canada) Limite d [8] , dans laquelle elle a statué que le montage de parties peut, dans certaines circonstances, être une fabrication. Elle a soutenu que, si tel est le cas, alors les procédés de fabrication axés sur la précision et d'une nature plus complexe, qui sont exécutés par l'appelante, doivent certainement satisfaire au critère de fabrication exigé dans le code 1570. L'avocate a aussi renvoyé à la décision que la Cour suprême du Canada a rendue dans l'affaire Her Majesty the Queenv. York Marble, Tile and Terrazzo Limite d [9] , où il a été statué que la fabrication est la production d'articles à partir de matières premières ou préparées, en donnant à ces matières de nouvelles formes, qualités et propriétés ou combinaisons, soit manuellement, soit mécaniquement. Elle a soutenu que, en l'espèce, les éléments de preuve montrent que les marchandises en cause, après l'importation, subissent un procédé qui leur donne de nouvelles formes et propriétés. Elle a soutenu que le procédé de coupe et de polissage répond au critère énoncé dans l'affaire York Marble. Plus précisément, les marchandises en cause sont coupées à longueur, et l'extrémité du tube fait l'objet de soudage de précision, de chanfreinage et de polissage pour garantir le maintien de la pression dans le puits. Elle a soutenu que les marchandises sont transformées d'une pièce de tube ou de tuyau en une partie intégrante de l'unité de serpentin. En outre, il est donné de nouvelles qualités et propriétés aux marchandises en cause, du fait qu'elles ont fait l'objet de soudage de précision à diverses longueurs et sont capables de recevoir en accessoires divers outils pour faciliter une vaste gamme d'activités du domaine des puits de gaz et de pétrole. Elle a soutenu que la décision du Tribunal dans l'affaire Ardel Steel Ltd.c. Le ministre du Revenu nationa l [10] est différente du présent appel puisqu'elle portait sur des barres d'armature qui étaient simplement coupées et cintrées. Elle a soutenu que le degré de complexité du procédé susmentionné n'avoisinait certes pas celui qu'a exécuté l'appelante. Elle a présenté un argument similaire relativement à la décision que le Tribunal a rendue dans l'affaire Computalog Ltd.c. L e sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [11] .

À titre d'argument de rechange, l'avocate de l'appelante a soutenu que les marchandises en cause sont admissibles aux avantages des codes 1551 et 1552. Elle a soutenu que les marchandises répondent aux deux critères établis pour les codes susmentionnés, puisqu'elles sont utilisées dans les travaux d'exploration, de mise en valeur et d'entretien des puits de pétrole et de gaz naturel, et qu'elles sont englobées soit dans les machines et appareils d'étude des puits soit dans les machines et appareils de perforation des puits, et leurs parties. Elle a soutenu que les marchandises en cause sont des parties de l'unité de serpentin, et donc, des parties des machines d'étude et/ou de perforation des puits. L'avocate a renvoyé à la décision que le Tribunal a rendue dans l'affaire SnyderGeneral Inc.c. L e sous-ministre du Revenu national [12] , dans laquelle le Tribunal a fait observer qu'il n'existe pas de critère universel qui permette de déterminer si un produit est une partie et que chaque cause est jugée selon ses particularités propres. Elle a soutenu que, par le passé, le Tribunal a considéré les facteurs suivants : la question de savoir si le produit est essentiel au fonctionnement d'un autre produit; celle de savoir si le produit est une partie nécessaire et intégrante d'un autre produit; celle de savoir si le produit est monté sur l'autre produit; la nature des pratiques et usages commerciaux courants. L'avocate a soutenu que les marchandises en cause sont des parties de l'unité de serpentin et, donc, qu'elles sont des parties des machines d'étude ou de perforation des puits, puisqu'elles répondent aux quatre critères. Elle a soutenu que les machines ne peuvent fonctionner sans serpentin, que le serpentin est une partie nécessaire et intégrante de l'unité de serpentin, que les marchandises sont montées sur l'unité de serpentin et, finalement, que, dans le secteur du pétrole et du gaz, l'« unité enroulée sur bobine » est couramment désignée, utilisée et considérée en tant que partie de l'unité de serpentin.

Si le Tribunal devait conclure que les marchandises en cause ne sont pas des parties de l'unité de serpentin, l'avocate de l'appelante a soutenu qu'elles sont des parties des appareils de bobines de travail de serpentin. En premier lieu, elle a soutenu que l'unité de serpentin répond à la définition du mot « appareil », c.-à-d. une combinaison de machines. Elle a renvoyé au témoignage de M. Mayette selon lequel l'unité de serpentin comprend le serpentin, la bobine elle-même et du matériel hydro-mécanique, le tout étant assemblé dans le but de fournir et d'alimenter l'injecteur de serpentin jusqu'à l'unité de chauffage du serpentin. En outre, elle a soutenu que les marchandises en cause sont des parties des appareils de bobines de travail de serpentin pour les mêmes raisons que celles qui ont déjà été énoncées.

L'avocat de l'intimé a soutenu que la principale question en litige consiste à déterminer si les marchandises en cause sont du type ou des types utilisé(s) pour l'extraction du pétrole ou du gaz. Il a reconnu qu'elles sont utilisées dans l'industrie pétrolière et gazière, mais uniquement à des fins d'entretien et de service des puits et non pour l'extraction. L'avocat a soutenu que le Tribunal ne peut s'appuyer sur le témoignage de M. Mayette selon lequel les tubes de 1,25 pouce et de 1,5 pouce ont de fait été utilisés pour l'extraction du pétrole ou du gaz. Il a souligné que M. Mayette n'a pas pu désigner d'élément de preuve documentaire spécifique pour montrer que les tubes de 1,25 pouce et de 1,5 pouce ont effectivement été utilisés pour l'extraction du pétrole ou du gaz. Il a souligné que M. Mayette n'a pas expliqué les caractéristiques nécessaires pour qu'un tube puisse être reconnaissable comme étant susceptible d'être utilisé dans l'extraction. Il a soutenu que le témoignage de M. Mayette sur les dates auxquelles les marchandises en cause ont effectivement été utilisées n'était pas fiable. L'avocat a comparé le témoignage susmentionné au témoignage de M. Budney, un expert reconnu dans le domaine. Plus précisément, l'avocat a renvoyé au témoignage de M. Budney selon lequel les marchandises en cause ne servent pas au forage ou à l'extraction, mais plutôt à l'entretien et au service. De plus, il a établi la différence entre les caractéristiques physiques des serpentins et celles d'une tige de forage. L'avocat a soutenu que le témoignage de M. Budney devrait prévaloir sur celui de M. Mayette et sur les éléments de preuve documentaires, présentés à l'appui de l'argumentation de l'appelante.

L'avocat de l'intimé a soutenu que les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 7306.50.00. Il a renvoyé à la décision rendue par le Tribunal en 1996 dans l'affaire Canadian Fracmaster, où le Tribunal a conclu que l'intimé avait correctement classé les serpentins dans la sous-position no 7306.50. L'avocat a soutenu que la décision susmentionnée est déterminante aux fins du présent appel, puisque les deux appels portent sur les mêmes marchandises. Il a soutenu que, pour tirer la conclusion que les serpentins étaient correctement classés dans la sous-position no 7306.50, le Tribunal a alors nécessairement rejeté tous les autres classements possibles. La décision rendue par le Tribunal en 1996 dans l'affaire Canadian Fracmaster n'a pas fait l'objet d'appel et vaut donc en tant que décision définitive du Tribunal. L'avocat a soutenu que, bien que le Tribunal ne soit pas lié par ses décisions antérieures, il est bien établi en droit que tous les organismes judiciaires visent la cohérence dans leur prise de décision. Par conséquent, à des fins de cohérence, l'avocat a exhorté le Tribunal à confirmer sa décision antérieure et à décider, une fois encore, que les marchandises en cause sont correctement classées dans la sous-position no 7306.50. L'avocat a soutenu que l'argument de l'appelante dans le présent appel a été implicitement rejeté par le Tribunal lorsque ce dernier a statué dans l'affaire Canadian Fracmaster en 1996.

L'avocat de l'intimé a soutenu que la doctrine de la chose jugée(res judicata) empêche l'appelante de plaider de nouveau la question du classement tarifaire correct des marchandises en cause. Il a invoqué une décision rendue par le Tribunal en 1998 dans l'affaire Canadian Fracmaster Ltd.c. L e sous - ministre du Revenu national [13] , dans laquelle le Tribunal a admis une requête présentée par l'intimé et portant sur le rejet d'un appel au motif de l'irrecevabilité résultant de la doctrine de la chose jugée. L'avocat a soutenu que le présent appel devrait être rejeté pour le même motif que l'a été l'appel Canadian Fracmaster de 1998, à savoir, que les marchandises en cause sont les mêmes, que la décision de 1996 du Tribunal dans l'affaire Canadian Fracmaster était définitive, et que les parties engagées sont les mêmes. Pour ce qui est de cette dernière condition, l'avocat a souligné que les éléments de preuve montrent que, puisque Flextube a été achetée par Fracmaster, ces deux sociétés sont fondamentalement une seule et même entité.

En ce qui a trait à l'applicabilité du code 1570, l'avocat de l'intimé a soutenu que les marchandises en cause ne servent pas dans la fabrication de l'une ou de l'autre des marchandises énumérées au Chapitre 73. Il a soutenu que, en fendant un tuyau en deux ou en fixant une soupape à l'extrémité d'un tuyau, l'appelante ne fabrique pas un nouveau produit. À l'appui de son argument, l'avocat a renvoyé le Tribunal à la décision que ce dernier a rendue dans l'affaire Computalog. Il a soutenu que la préparation des tubes pour qu'ils servent dans les puits ne constitue pas une activité de « fabrication » aux fins du code 1570. L'avocat a soutenu que les marchandises en cause ne peuvent donc pas être admissibles à l'entrée en franchise de droits de douane aux termes du code 1570.

L'avocat de l'intimé a déposé un mémoire supplémentaire dans lequel il a soutenu que les marchandises en cause ne sont pas admissibles aux avantages des codes 1551 et 1552. En ce qui concerne le code 1551, l'avocat a soutenu que les marchandises en cause ne sont pas des machines d'étude des puits. Il a renvoyé à la décision rendue par le Tribunal dans l'affaire Schlumberger of Canada, A Division of Schlumberger Canada Ltd.c. L e sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [14] , dans laquelle le Tribunal avait exprimé l'avis que l'expression « [t]o take and record borehole geophysical measurements [15] » (« prendre et enregistrer des mesures géophysiques à partir du trou de forage ») représentait une signification acceptable de l'expression « well logging» (« études des puits »). Il a souligné que, dans l'affaire susmentionnée, les éléments de preuve présentés ne suffisaient pas pour montrer que les composants d'un réseau de communication fonctionnant en tant que service de transmission de données d'étude des puits étaient soit du matériel d'étude des puits soit des pièces de ce qui précède. L'avocat a soutenu que la situation est la même en l'espèce, c'est-à-dire que les éléments de preuve présentés ne suffisent pas pour montrer que les marchandises en cause ont effectivement été utilisées « [t]o take and record borehole geophysical measurements» (« prendre et enregistrer des mesures géophysiques à partir du trou de forage »). L'avocat a aussi renvoyé à la décision que le Tribunal a rendue dans l'affaire Computalog, où une décision similaire a été rendue. Invoquant des raisons similaires, l'avocat a soutenu que les marchandises en cause ne sont pas des appareils d'étude des puits. L'avocat a ajouté qu'elles ne sont pas des appareils, puisque ce terme, lorsqu'il est utilisé dans le Tarif des douanes, renvoie à un dispositif complexe conçu en vue d'une utilisation particulière. Il a soutenu que les marchandises en cause sont simplement des tubes. L'appelante n'a produit aucun élément de preuve qu'elles étaient, d'une façon quelconque, des dispositifs complexes conçus pour une utilisation particulière, pas plus que ce n'avait été le cas pour le câble électrique dans l'affaire Computalog.

L'avocat de l'intimé a aussi soutenu que les marchandises en cause ne sont pas des parties de machines ou appareils d'étude des puits, pas plus qu'elles ne sont des machines ou appareils d'étude des puits, pour les raisons qui ont déjà été indiquées. L'avocat a soutenu qu'il est bien établi que pour qu'un article soit jugé comme étant une partie d'un autre article aux fins du Tarif des douanes, le premier article doit être fabriqué à un degré tel qu'il soit reconnaissable comme étant exclusivement destiné à une application particulière [16] , ce qui signifie une pièce particulière d'une machine. Les parties doivent aussi être elles-mêmes des articles reconnaissables et être destinées, par leur conception ou leur fabrication, à d'autres articles pour être considérées comme des parties de ces articles. Il a soutenu que le fait que certains composants servent ensemble ne signifie pas que les uns font partie des autres. Il a soutenu qu'aucun élément de preuve n'a été présenté pour montrer que les marchandises en cause étaient, d'une façon quelconque, fabriquées pour ne servir qu'à une application particulière. En outre, aucun élément de preuve n'a été présenté pour montrer qu'elles étaient de véritables parties d'une machine déterminée plutôt que de simples composants d'un système. Finalement, l'avocat a souligné que le Tribunal a conclu, dans l'affaire Computalog, que, pour qu'une « marchandise » soit classée dans un code de l'annexe II à titre de partie, ladite « marchandise » doit aussi être initialement classée dans un numéro tarifaire de l'annexe I à titre de partie. L'avocat a soutenu que tel n'est pas le cas en l'espèce. L'avocat a présenté des arguments similaires pour appuyer sa position selon laquelle les marchandises en cause ne sont pas admissibles au bénéfice du code 1552.

Dans ses exposés en réponse, l'avocate de l'appelante a soutenu que le témoignage de M. Mayette et la pièce A-2 démontrent clairement que la machine appelée unité de serpentin et l'appareil de bobines de travail de l'unité de serpentin servent dans des travaux d'étude et de perforation des puits. Elle a souligné que le témoin susmentionné a spécifiquement déclaré que les unités de travail de serpentin servent d'une manière constante et persistante à des applications d'étude et de perforation des puits. Par conséquent, l'avocate a soutenu que l'unité de travail de serpentin et l'appareil de bobines de travail de serpentin sont des machines et des appareils utilisés dans des travaux d'étude des puits et de perforation des puits, comme le prévoient les codes 1551 et 1552. Elle a soutenu que l'appareil de bobines de travail de serpentin répond à la définition donnée par l'intimé du mot « appareil », c'est-à-dire un dispositif complexe conçu en vue d'une utilisation particulière. Plus précisément, il se compose de plusieurs parties, y compris un dispositif hydraulique, des dispositifs de mesure, une bobine de travail, un serpentin, etc. Elle a soutenu que le serpentin est destiné, de par sa conception et sa fabrication, à servir avec la machine de serpentin et la bobine de travail. Elle a renvoyé aux éléments de preuve qui montrent que les marchandises en cause sont fabriquées par les fournisseurs pour servir dans une unité de serpentin et un appareil de bobines de travail.

L'avocate de l'appelante a soutenu qu'il n'est pas nécessaire qu'une « marchandise » soit classée à titre de partie dans l'annexe I du Tarif des douanes pour être considérée comme étant une partie au sens de l'annexe II. Elle a souligné qu'il existe de nombreuses marchandises dans le tarif qui sont clairement des parties de machine ou d'appareil, et qui sont néanmoins correctement classées dans une position déterminée du tarif. Par exemple, une soupape de compresseur est clairement une partie dudit compresseur, mais est néanmoins correctement classée dans une position englobant les « soupapes » et non en tant que partie dudit compresseur. D'une façon similaire, l'avocate a soutenu que les marchandises en cause sont clairement une partie soit de l'unité de serpentin, soit de l'appareil de bobines de travail de serpentin, tout en étant néanmoins correctement classées dans la position qui prévoit spécifiquement les tubes et tuyaux. L'avocate a soutenu qu'il s'ensuivrait des résultats absurdes si le mot « partie » au sens de l'annexe II du Tarif des douanes était compris comme ne devant s'appliquer qu'aux articles qui ont été classés à titre de partie dans l'annexe I du Tarif des douanes. Elle a réitéré que le critère convenable pour déterminer si un article est une partie ou non a été fixé dans l'affaire SnyderGeneral.

Pour l'essentiel, le Tribunal doit statuer sur trois questions en litige. La première question en litige consiste à déterminer si la doctrine de la chose jugée s'applique pour empêcher le Tribunal d'entendre le présent appel. La deuxième question en litige porte sur le classement tarifaire correct des marchandises en cause et la troisième question en litige porte sur l'applicabilité des codes 1570, 1551 et 1552.

En ce qui concerne la première question en litige, le Tribunal fait observer que, dans l'affaire I.D. Foods Superior Corp.c. L e sous-ministre du Revenu national [17] , il a procédé à l'examen du droit concernant l'applicabilité de la doctrine de la chose jugée aux tribunaux administratifs. Le Tribunal a conclu que, même s'il s'agit d'un point de droit bien établi que les tribunaux administratifs ne sont pas liés par leurs décisions antérieures, la doctrine de la chose jugée (ou de l'autorité de la chose jugée) peut s'appliquer aux procédures engagées devant les tribunaux administratifs afin d'empêcher que soit entendue une question qui a déjà été tranchée. Le Tribunal a alors invoqué la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire O'Brienc. Canada (Procureur général) [18] et la décision rendue par la Section de première instance de la Cour fédérale du Canada dans l'affaire Canada (Procureur général)c. Canada (Commission canadienne des droits de la personne) [19] en rendant sa décision. Dans l'affaire I.D. Foods, le Tribunal a fait observer qu'il semblait exister deux doctrines distinctes : la doctrine de la chose jugée/ l'irrecevabilité résultant de l'identité des causes d'action et la doctrine de la chose jugée/ l'irrecevabilité résultant de l'identité des questions en litige.

La première doctrine, celle de la chose jugée/l'irrecevabilité résultant de l'identité des causes d'action, s'applique pour empêcher que les mêmes parties remettent en question, dans un nouveau litige, ces questions qui ont définitivement été tranchées dans une décision antérieure, et la deuxième, celle de la chose jugée/ l'irrecevabilité résultant de l'identité des questions en litige, a pour effet d'interdire à une partie le droit de plaider de nouveau le bien-fondé, dans un nouveau litige, lorsqu'il arrive que la cause d'action est différente mais que les points ou questions de fait ont déjà été décidés [20] . Étant donné que l'affaire I.D. Foods traitait d'une importation différente de l'importation visée dans l'appel précédent, le Tribunal a conclu que la doctrine de la chose jugée/l'irrecevabilité résultant de l'identité des causes d'action ne s'appliquait pas pour empêcher le Tribunal d'entendre l'appel. Le Tribunal a cependant été d'avis que la doctrine de la chose jugée/l'irrecevabilité résultant de l'identité des questions en litige donnait au Tribunal le pouvoir de refuser d'examiner le bien-fondé de l'appel, puisque ce dernier satisfaisait aux trois conditions suivantes : 1) la même question, avait été décidée dans un appel antérieur; 2) la décision judiciaire invoquée comme créant l'irrecevabilité était définitive; 3) les parties visées par la décision judiciaire invoquée étaient les mêmes que les parties engagées dans l'instance où l'irrecevabilité avait été soulevée.

Comme dans l'affaire I.D. Foods, le présent appel traite d'importations différentes de celles qui étaient visées dans la décision que le Tribunal a rendue en 1996 dans l'affaire Canadian Fracmaster. De ce fait, le Tribunal est d'avis que la doctrine de la chose jugée/ l'irrecevabilité résultant de l'identité des causes d'action ne s'applique pas pour empêcher le Tribunal d'entendre l'appel. Le Tribunal est aussi d'avis que la doctrine de la chose jugée/ l'irrecevabilité résultant de l'identité des questions en litige ne s'applique pas pour l92'empêcher d'entendre le présent appel puisque la question soulevée dans le présent appel est différente de celle qui a été décidée dans sa décision de 1996 dans l'affaire Canadian Fracmaster. Dans cette décision, la question en litige consistait à déterminer si les « serpentins » devaient être classés dans le numéro tarifaire 7306.50.00 ou dans le numéro tarifaire 8307.10.00. Dans le présent appel, la question en litige consiste à déterminer si les « serpentins » sont correctement classés dans le numéro tarifaire 7306.50.00 ou s'ils doivent être classées dans le numéro tarifaire 7306.20.00. En outre, les parties au présent appel ne sont pas les mêmes que les parties visées par la décision que le Tribunal a rendue en 1996 dans l'affaire Canadian Fracmaster.

Pour ce qui est de la deuxième question en litige, le Tribunal fait observer que l'article 1 des Règles générales est d'une importance cruciale dans le classement des marchandises de l'annexe I du Tarif des douanes. La Règle 1 prévoit que le classement est d'abord déterminé d'après les termes des positions et des Notes de Chapitres. Par conséquent, le Tribunal doit déterminer si les marchandises en cause sont nommées ou décrites de façon générique dans une position particulière. Si elles le sont, elles doivent y être classées sous réserve de toute Note de Chapitre pertinente. L'article 11 du Tarif des douanes prévoit en outre que, pour l'interprétation des positions ou des sous-positions, le Tribunal doit tenir compte des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [21] .

Pour être classées dans le numéro tarifaire 7306.20.00, les marchandises en cause doivent être du type utilisé pour l'extraction du pétrole ou du gaz. Dans l'affaire Ballarat, le Tribunal a statué que l'expression « du type utilisé » signifie que les marchandises doivent être susceptibles d'être utilisées avec d'autres marchandises, ou reconnaissables comme étant destinées à l'être. Dans l'ensemble, le Tribunal accueille le témoignage de M. Mayette selon lequel les tubes de 1,25 pouce et de 1,5 pouce ont été utilisés dans des applications d'extraction dès 1988. M. Mayette a témoigné avoir été sur place à au moins trois occasions où les tubes de 1,25 pouce avaient été utilisés, à savoir, en mars 1989, en septembre 1991 et en juin 1993. Il a de plus ajouté que des opérations d'extraction ont été effectuées « à plusieurs reprises » en utilisant des tubes de 1,5 pouce et qu'il s'agissait là d'opérations courantes et non pas des cas isolés. Le Tribunal fait observer que M. Mayette était, à ce moment, président et directeur général de Flextube et était donc en position de savoir à quelles applications les serpentins en cause servaient. M. Budney, à qui le Tribunal n'a pas reconnu le titre d'expert dans le domaine des applications pétrolières et gazières, n'a pas pu convaincre le Tribunal que les serpentins de 1,25 pouce et de 1,5 pouce n'étaient pas des types utilisés pour l'extraction du pétrole et du gaz. Selon le Tribunal, M. Budney semble ne pas avoir été au fait des récents développements technologiques dans le domaine et ce dernier a admis ne pas avoir d'expérience sur le terrain pour ce qui est de l'exploitation pétrolifère et gazière. Si ce n'est en indiquant qu'il n'était pas au courant que les tubes de 1,25 pouce et de 1,5 pouce servaient à de telles utilisations, en résumant d'une façon très générale les différences entre les serpentins et les tiges de forage et en indiquant qu'il y avait des différences de capacité de couple, M. Budney n'a pas pu éclairer utilement le Tribunal.

Le Tribunal, par conséquent, conclut que les marchandises en cause sont des types utilisés pour l'extraction du pétrole ou du gaz. Comme telles, elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 7306.20.00 à titre de tubes et tuyaux de cuvelage ou de production des types utilisés pour l'extraction du pétrole ou du gaz. Le Tribunal s'appuie sur la Règle 3a) des Règles générales, qui prévoit que la position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d'une portée plus générale, et sur la Règle 1 des Règles canadiennes, qui précise que le même principe s'applique au classement des marchandises dans les numéros tarifaires ou dans les sous-positions. Par conséquent, le Tribunal admet cette partie de l'appel.

La dernière question en litige sur laquelle le Tribunal doit statuer porte sur l'applicabilité des codes 1570, 1551 et 1552 aux marchandises en cause. Le code 1570 prévoit l'entrée en franchise de droits de douane des marchandises qui répondent à la description suivante :

Matériel devant servir à la fabrication des marchandises de la Section XVI, des Chapitres 40, 73 ou 90, ou des positions nos 59.10 ou 87.05 (à l'exclusion des châssis des véhicules automobiles et leurs parties), ces marchandises devant être utilisées dans les opérations suivantes :

1570 Les travaux d'exploration, de découverte, de mise en valeur, d'entretien, d'essai, d'épuisement ou de mise en exploitation de puits de pétrole ou de gaz naturel, jusqu'à et y compris la vanne de distribution sur place.

Le Tribunal est d'avis que les marchandises en cause ne sont clairement pas du matériel devant servir à la fabrication des marchandises du Chapitre 73. Les marchandises en cause sont elles-mêmes des marchandises du Chapitre 73. Le Tribunal est donc d'avis qu'elles ne peuvent être du matériel utilisé dans la fabrication de telles marchandises, puisqu'il s'agit de la même chose.

Le Tribunal est aussi d'avis que les éléments de preuve déposés ne suffisent pas pour établir que les marchandises en cause devaient servir dans la fabrication des marchandises de la position no 87.05, à savoir, en l'espèce, des systèmes de serpentin pour l'entretien ou le service des puits de pétrole. Le Tribunal fait observer que l'article 4 du Tarif des douanes prévoit que l'expression « devant servir dans », mentionnée en regard d'un numéro tarifaire de l'annexe I ou d'un code de l'annexe II, signifient que, sauf indication contraire du contexte, les marchandises en cause doivent entrer dans la composition d'autres marchandises par voie d'ouvraison, de fixation ou d'incorporation, selon ce qui est indiqué en regard de ce numéro tarifaire ou code. L'appelante a témoigné que les serpentins pouvaient servir à de diverses applications, y compris le forage ou l'extraction, qui ne constituent pas des fonctions d'entretien. L'élément de preuve susmentionné ne permet pas au Tribunal de conclure que les marchandises en cause devaient servir dans la fabrication des marchandises de la position no 87.05. Cependant, le Tribunal n'est pas convaincu que le procédé qui se rattache au montage des raccords et à la coupe des tuyaux, avec ou sans soudage, équivaut à une activité de fabrication. Le Tribunal est d'avis que les serpentins ne subissent pas une transformation telle que ladite transformation modifie la nature des tubes ou tuyaux. Il n'est, par conséquent, pas satisfait aux critères énoncés dans l'affaire York Marble et appliqués dans l'affaire Ardel Steel. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne sont pas admissibles aux avantages du code 1570 et rejette donc cette partie de l'appel.

Les codes 1551 et 1552 prévoient l'entrée en franchise de droits de douane des marchandises qui répondent à la description suivante :

Ce qui suit devant être utilisé dans les travaux d'exploration, de découverte, de mise en valeur, d'entretien, d'essai, d'épuisement ou de mise en exploitation de puits de pétrole ou de gaz naturel ou devant servir dans des machines de forage devant être utilisées dans les travaux d'exploration, de découverte, de mise en valeur ou de mise en exploitation de gisements de potasse ou de sel gemme, à l'exclusion des châssis et leurs parties des véhicules automobiles à usages spéciaux de la position no 87.05 et à l'exclusion de tous les autres véhicules automobiles du Chapitre 87 et d'instruments de géophysique de la position no 90.15 :

1551 Machines et appareils d'étude des puits et leurs parties

1552 Machines et appareils de perforation des puits et leurs parties

Le Tribunal est d'avis que les marchandises en cause ne peuvent être qualifiées de machines ou d'appareils d'étude ou de perforation des puits. Il n'a pas été démontré que les marchandises sont dotées de parties mobiles, ce qui pourrait les rendre admissibles à titre de machines, ni n'a-t-il été démontré qu'il s'agit de dispositifs complexes, ce qui pourrait les rendre admissibles à titre d'appareils.

Le Tribunal n'est pas non plus en mesure de déterminer que les marchandises en cause sont admissibles à titre de parties de machines ou d'appareils d'étude ou de perforation des puits. Le Tribunal a examiné les éléments de preuve par rapport aux facteurs établis dans l'affaire SnyderGeneral et au principe énoncé dans l'affaire Access Corrosion voulant que, pour déterminer si un article est une partie d'un autre, l'article doit avoir subi une fabrication à un degré tel qu'il soit exclusivement destiné à une application particulière [22] . Le Tribunal fait observer que l'avocate de l'appelante a soutenu que les serpentins sont une partie nécessaire et intégrante de l'unité de serpentin et qu'ils ont été montés sur cette dernière, et que le témoin de l'appelante a déclaré que les unités de serpentin servaient dans les opérations de « perforation » et d'« étude des puits ». Cependant, l'appelante n'a pas établi à la satisfaction du Tribunal que les unités de serpentin ou les bobines de travail de serpentin, avec lesquelles les marchandises en cause sont utilisées, sont effectivement des machines ou des appareils d'étude ou de perforation des puits et ne sont pas des machines ou des appareils pour l'extraction ni d'autres marchandises. Le Tribunal fait également observer, à cet égard, qu'il a conclu que les marchandises en cause sont des types utilisés pour l'extraction du pétrole et du gaz. En vérité, l'avocate de l'appelante a soutenu que les types d'applications auxquels les unités de serpentin servent changent d'un jour à l'autre et que les unités font constamment l'objet de nouvelles opérations de fabrication. Par conséquent, le Tribunal est d'avis que l'appelante n'a pas réussi à démontrer que les marchandises en cause sont montées sur des machines ou des appareils d'étude ou de perforation des puits et qu'elles en sont des parties nécessaires et intégrantes, ni n'a-t-il réussi à démontrer que leur degré de fabrication est tel qu'elles sont exclusivement destinées à une application particulière. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne sont pas admissibles aux avantages du code 1551 ou 1552 et rejette donc aussi cette partie de l'appel.

Par conséquent, l'appel est admis en partie.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

2. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

3. Pièce A-2 à la p. 2.

4. Appel no AP-95-098, le 31 octobre 1996.

5. Appel no AP-93-359, le 19 décembre 1995.

6. Supra note 2, annexe I.

7. Ibid.

8. [ 1968 ] R.C.S 684.

9. [ 1968 ] R.C.S. 140.

10. Appel no AP-92-158, le 5 mai 1994.

11. Appel no AP-92-265, le 12 mai 1994.

12. Appel no AP-92-091, le 19 septembre 1994.

13. Appel no AP-97-059, le 29 mai 1998.

14. Appel no 2898, le 10 septembre 1990.

15. Ibid. à la p. 14.

16. Voir Access Corrosion Services Ltd. c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise, 9 R.C.T. 184 à la p. 188.

17. Tribunal canadien du commerce extérieur, appel no AP-95-252, le 12 décembre 1996.

18. Non publié, no du greffe A-291-91, le 16 avril 1993.

19. Non publié, Section de première instance de la Cour fédérale du Canada, no du greffe T-381-90, le 24 avril 1991.

20. Supra note 17 aux pp. 4-5, où le Tribunal a invoqué la décision rendue par la Section de première instance de la Cour fédérale du Canada dans l'arrêt Bande indienne Musqueam c. Canada (Ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien), [1990] 2 C.F. 351.

21. Conseil de coopération douanière, 1re éd., Bruxelles, 1986.

22. Supra note 16.


Publication initiale : le 7 avril 1999