L&F CANADA INC.

Décisions


L&F CANADA INC.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-95-076

TABLE DES MATIERES

Ottawa, le jeudi 8 août 1996

Appel no AP-95-076

EU ÉGARD À un appel entendu le 16 janvier 1996 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national concernant des demandes de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

L&F CANADA INC. Appelant

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis.


Lyle M. Russell ______ Lyle M. Russell Membre présidant

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre

Anita Szlazak ______ Anita Szlazak Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les contenants de vaporisateur désinfectant de marque Lysol, à senteur ordinaire, fraîche ou campagne, sont correctement classés dans le numéro tarifaire 3307.49.00 à titre d'autres préparations pour parfumer ou désodoriser les locaux, comme l'a établi l'intimé, ou s'ils doivent être classés dans le numéro tarifaire 3808.40.10 à titre de désinfectants en paquets d'un poids brut n'excédant pas 1,36 kg chacun, comme l'a soutenu l'appelant.

DÉCISION : L'appel est admis. Les Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (les Notes explicatives) de la position no 33.07 précisent que les préparations désodorisantes de locaux «consistent essentiellement en substances (méthacrylate de lauryle, par exemple) qui agissent par voie chimique sur les odeurs à éliminer ou autres substances destinées à absorber physiquement les odeurs par les forces de Van der Waal, par exemple». Les éléments de preuve soumis au Tribunal indiquent que les marchandises en cause masquent les odeurs et tuent les bactéries qui causent des odeurs. De l'avis du Tribunal, le fait de masquer une odeur et de tuer les bactéries qui causent des odeurs n'est pas la même chose que d'agir chimiquement sur une odeur ou d'absorber physiquement une odeur. À partir des indications précises données dans les Notes explicatives concernant les produits visés par le libellé «désodorisants de locaux, préparés», le Tribunal n'est pas persuadé que les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 33.07.

Les Notes explicatives de la position no 38.08 précisent que les désinfectants «sont des agents qui détruisent d'une manière irréversible les bactéries, virus ou autres micro-organismes indésirables se trouvant généralement sur les objets inanimés». Les éléments de preuve présentés au Tribunal indiquent que cette description s'applique bien aux marchandises en cause. En outre, celles-ci sont enregistrées comme désinfectants aux termes de la Loi sur les produits antiparasitaires et, comme l'information imprimée sur leurs étiquettes l'indique, sont commercialisées et utilisées comme désinfectants.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 16 janvier 1996 Date de la décision : Le 8 août 1996
Membres du Tribunal : Lyle M. Russell, membre présidant Arthur B. Trudeau, membre Anita Szlazak, membre
Avocat pour le Tribunal : Shelley Rowe
Greffier : Anne Jamieson
Ont comparu : Michael Sherbo, pour l'appelant Brian Tittemore, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] (la Loi) à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les contenants de vaporisateur désinfectant de marque Lysol, à senteur ordinaire, fraîche ou campagne, sont correctement classés dans le numéro tarifaire 3307.49.00 de l'annexe I du Tarif des douanes [2] à titre d'autres préparations pour parfumer ou pour désodoriser les locaux, comme l'a établi l'intimé, ou s'ils doivent être classés dans le numéro tarifaire 3808.40.10 à titre de désinfectants en paquets d'un poids brut n'excédant pas 1,36 kg chacun, comme l'a soutenu l'appelant.

Les dispositions pertinentes de l'annexe I du Tarif des douanes sont les suivantes :

33.07 Préparations pour le prérasage, le rasage ou l'après-rasage, désodorisants corporels, préparations pour bains, dépilatoires, autres produits de parfumerie ou de toilette préparés et autres préparations cosmétiques, non dénommés ni compris ailleurs; désodorisants de locaux, préparés, même non parfumés, ayant ou non des propriétés désinfectantes.

-Préparations pour parfumer ou pour désodoriser les locaux, y compris les préparations odoriférantes pour cérémonies religieuses :

3307.49.00 --Autres

38.08 Insecticides, antirongeurs, fongicides, herbicides, inhibiteurs de germination et régulateurs de croissance pour plantes, désinfectants et produits similaires, présentés dans des formes ou emballages de vente au détail ou à l'état de préparations ou sous forme d'articles tels que rubans, mèches et bougies soufrés et papier tue-mouches.

3808.40 -Désinfectants

3808.40.10 ---En paquets d'un poids brut n'excédant pas 1,36 kg chacun

Le témoin de l'appelant, M. Robert T. Fellows, coordonnateur du Développement des produits chez Reckitt & Colman Canada Inc. [3] , a expliqué que les marchandises en cause renferment environ 80 p. 100 d'éthanol, 15 p. 100 d'eau, une petite quantité d'ortho-phénylphénol, un composé quaternaire biocide dont l'abréviation est N-alcoyle éthylsulfate de morpholinium N-éthylique, un inhibiteur de corrosion et un peu de parfum. Il a déclaré que l'éthyle phénylphénol, le biocide quaternaire et l'éthanol sont tous des ingrédients actifs qui confèrent des propriétés désinfectantes aux marchandises en cause. Il a reconnu avec l'avocat de l'intimé que, lorsque les marchandises en cause détruisent les bactéries ou les microbes, elles éliminent également l'odeur causée par ces bactéries ou microbes.

M. Fellows a présenté, à titre de pièce, un contenant des marchandises en cause. Sur l'étiquette du devant on peut lire notamment ce qui suit :

MARQUE DE[sic]

Lysol

VAPORISATEUR DÉSINFECTANT

Élimine les mauvaises odeurs

DÉTRUIT LES MICROBES MÉNAGERS ET LA MOISISSURE

No D'ENR. 11997, L.P.A.

GARANTIE : O - phénylphénol à 0.100 %, N - alcoyle

(C18 92 %, C16 8 %) éthylsulfates de morpholinium

N - éthylique 0.035 %

Au dos du récipient, on peut lire notamment :

Élimine les bactéries qui causent les mauvaises odeurs. Désodorise et désinfecte les poubelles, seaux à couches, endroits occupés para[sic] les animaux favoris, environs de la cuvette, dessous des éviers, chambres d'enfants, chambres de malades, sous-sois [sic], coins qui sentent le renfermé et autres endroits où les microbes causent de mauvaises odeurs. Détruit la moisissure.

Pour Désinfecter : Tenir le contenant à la verticale, de 15 à 20 cm de la surface et pulvériser de 2 à 3 secondes, jusqu'à ce qu'elle soit couverte de buée.

Pour Désodoriser : Pour éliminer les mauvaises odeurs de cuisson, de fumée, des salles de bains et d'autres odeurs ménagères désagréables, pulvériser au centre de la pièce pendant 1 ou 2 secondes.

M. Fellows a déclaré que les marchandises en cause ne sont pas conçues pour agir chimiquement sur une odeur. Leur but est plutôt de masquer une odeur désagréable par une autre plus agréable et de tuer les bactéries qui causent de mauvaises odeurs ce qui, à son avis, est une réaction biologique. Il a également affirmé que le pourcentage de matière odoriférante dans les marchandises en cause est de 0,1 p. 100 et qu'il ne connaissait pas de désinfectant qui ne renfermait pas un composé chimique odoriférant.

Par comparaison, M. Fellows a également présenté, à titre de pièce, un contenant de «Neutralisant d'odeurs d'Airwick». Au dos de ce récipient, on peut lire notamment ce qui suit :

Emplois suggérés : Pour désodoriser et rafraîchir l'air dans la salle de bains, la cuisine, l'auto, ou le coin des animaux. Le Neutralisant d'odeurs d'Airwick® élimine aussi l'odeur du tabac et les autres odeurs persistantes.

Mode d'emploi : BIEN AGITER AVANT CHAQUE UTILISATION. Diriger le jet loin du visage. Appuyer sur le bouton et vaporiser vers le haut.

M. Fellows a déclaré que ce produit renferme environ 0,85 p. 100 de parfum et qu'il a une action chimique sur les mauvaises odeurs. Il a indiqué que les marchandises en cause diffèrent du désodorisant d'Airwick du point de vue de la quantité de parfum qu'elles renferment, de la forme du jet et de la réglementation gouvernementale applicable. Selon lui, les contenants des marchandises en cause ont un jet de vaporisation horizontal, renferment une très petite quantité de gaz propulseur et ont un grand orifice, de sorte que le jet qui sort de l'aérosol est composé de grosses gouttelettes qui tombent rapidement. Par contraste, le jet du contenant de désodorisant d'Airwick est vaporisé verticalement dans l'air sous l'effet d'une assez grande quantité de gaz propulseur (environ quatre fois plus de gaz que les marchandises en cause) et le récipient a un petit orifice de telle sorte que le jet sort en petites gouttelettes qui sont mieux diffusées et demeurent plus longtemps dans l'air. Pour ce qui est de la réglementation gouvernementale, le ministère de l'Agriculture réglemente les marchandises en cause tandis que le désodorisant d'Airwick n'est pas un produit réglementé.

M. Fellows a été d'accord pour dire avec l'avocat de l'intimé que, lorsqu'ils sont vaporisés, les deux produits comparés masquent ou éliminent les odeurs. Cependant, à son avis, le désodorisant d'Airwick agit chimiquement sur une odeur, puisqu'il convertit la molécule en molécule qui n'a plus l'odeur caractéristique ou le profil d'odeur du composé malodorant original [4] . Il a reconnu que les marchandises en cause sont souvent mises en vente dans les supermarchés à côté de produits semblables au désodorisant d'Airwick. Il a précisé que ni les marchandises en cause ni le désodorisant d'Airwick ne renferment de méthacrylate de lauryle. Cependant, il n'était pas certain si le désodorisant d'Airwick renfermait un composé semblable au méthacrylate de lauryle.

En réponse à la question qui consistait à savoir si l'appelant vendait des désinfectants, M. Fellows a présenté, à titre de pièces, une bouteille de désinfectant concentré de marque Lysol et une bouteille d'antiseptique désinfectant de marque Dettol. Les indications suivantes figurent, parmi d'autres, sur l'étiquette avant du flacon du désinfectant concentré de marque Lysol :

NETTOIE DÉSINFECTE ASSAINIT

No D'ENR. 12000, L.P.A.

GARANTIE : O-Phenylphenol 2.8 %, Xylenols 1.5 %, O-Benzyl-P-Chlorophenol 2.7 %

Au dos de ce même flacon, on peut lire, notamment, ce qui suit concernant le mode d'emploi :

CHAMBRE DE BÉBÉ - S eau à couches, table à changer bébé[sic], lit d'enfant, jouets.

SALLE DE BAINS - cuvette de toilette, douche, lavabo

TRAVAUX MéNAGERS - ASSAINISSEUR DE LESSIVE

MODE D'EMPLOI : CONCENTRé - FAIT ENVIRON 31 LITRES DE SOLUTION DE NETTOYAGE. A jouter 45 mL (3 cuillerées à soupe) à quatre litres d'eau. ASSAINISSEUR DE LESSIVE. Après avoir rempli d'eau la machine à laver, ajouter 250 mL (1 tasse) pour désinfecter la lessive.

L'étiquette au dos de la bouteille d'antiseptique désinfectant de marque Dettol porte, entre autres, les indications suivantes :

ENR. No 14590 LOI DES P.A.

GARANTIE : 4-chloro-3, 5-xylenol-4.8 %

MODE D'EMPLOI

Premiers soins.

Affections de peau.

Désinfection générale. Pour désinfecter sièges et cuvettes de toilette, seaux à couches, planchers, murs, éviers, boîtes à litière etc.

En réponse à la question qui consistait à savoir si ces produits pouvaient renfermer un parfum, M. Fellows a indiqué que tous les produits de consommation renferment un parfum pour masquer l'odeur de la formule de base, et aussi pour que le consommateur sache qu'une surface a été traitée.

Comme dernier élément de preuve, l'appelant a fait projeter deux vidéocassettes d'annonces télévisées sur les marchandises en cause qui faisaient ressortir leur utilisation comme «désinfectants».

M. Wendell Ward, chef de la Section analytique, Laboratoire des produits organiques / Denrées alimentaires, Direction des travaux scientifiques et de laboratoire du ministère du Revenu national (Revenu Canada), a été accepté par le Tribunal comme témoin expert dans le domaine de l'analyse chimique des produits organiques et, en particulier, des produits des industries chimiques ou industries connexes. M. Ward a renvoyé au «Rapport de la Direction des travaux scientifiques et de laboratoire» de Revenu Canada, en date du 20 septembre 1995, qu'il avait rédigé. Il a confirmé avoir trouvé dans chacune des marchandises en cause trois types de produits chimiques, soit des désinfectants (éthanol, ortho-phénylphénol et composé d'ammonium quaternaire), des matières odoriférantes et des fixateurs. Il a indiqué que les désinfectants étaient présents pour tuer les microbes, les matières odoriférantes pour masquer les odeurs et les fixateurs pour prolonger la durée de l'action des matières odoriférantes. Il a déclaré qu'à son avis, pour ce qui est de tuer les microbes, l'effet des marchandises en cause pourrait être décrit comme une combinaison d'action chimique et biologique.

Même sans avoir analysé l'échantillon d'antiseptique désinfectant de marque Dettol et de désinfectant concentré de marque Lysol, M. Ward s'est fié à son expérience et à son odorat pour dire qu'à son avis, ni l'un ni l'autre de ces produits ne renfermait un parfum pour masquer les odeurs et que l'antiseptique désinfectant de marque Dettol avait une senteur d'huile de pin, tandis que le désinfectant concentré de marque Lysol une senteur de phénol.

En réponse à des questions du représentant de l'appelant, M. Ward a déclaré qu'un désinfectant qui tue les bactéries causant des odeurs empêcherait la formation d'une odeur et qu'éventuellement le gaz odorant se dissiperait. Il a convenu que certains produits peuvent avoir une action chimique ou physique sur une odeur sans agir sur la cause de l'odeur. Il a confirmé que le charbon actif serait un produit capable d'agir physiquement sur une odeur, mais qui n'aurait aucun effet sur les bactéries, et que la chlorophylle aurait une action chimique sur une odeur, mais qu'elle n'affecterait aucunement les bactéries.

M. Ward a indiqué qu'il ne pouvait confirmer si le désodorisant d'Airwick qu'il avait examiné renfermait un ingrédient présentant les mêmes propriétés d'absorption que le méthacrylate de lauryle. Cependant, il a indiqué que cela se pourrait.

Le représentant de l'appelant a déclaré qu'aux termes de l'article 10 du Tarif des douanes, le classement des marchandises doit se faire conformément aux Règles générales d'interprétation du Système harmonisé [5] (les Règles générales) et aux Règles canadiennes [6] . Selon la Règle 1 des Règles générales, le classement est déterminé d'après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres. Le représentant a donc soutenu que, pour déterminer le classement correct des marchandises en cause, le Tribunal doit se concentrer sur le libellé «désodorisants de locaux, préparés, même non parfumés, ayant ou non des propriétés désinfectantes» de la position no 33.07, ainsi que sur le libellé «désinfectants et produits similaires, présentés dans des formes ou emballages de vente au détail ou à l'état de préparations ou sous forme d'articles» de la position no 38.08. Le représentant a également soutenu, en renvoyant à l'article 11 du Tarif des douanes, que le Tribunal doit tenir compte des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [7] (les Notes explicatives) pour interpréter ces libellés.

Les Notes explicatives du Chapitre 33 prévoient que les «désodorisants de locaux préparés demeurent classés au no 33.07 même s'ils ont des propriétés désinfectantes autres qu'accessoires». Les Notes explicatives de la position no 33.07 précisent, en partie, ce qui suit :

(IV) Préparations pour parfumer ou pour désodoriser les locaux, y compris les préparations odoriférantes pour cérémonies religieuses.

1) Les préparations utilisées pour parfumer les locaux et les préparations odoriférantes pour cérémonies religieuses. Elles agissent généralement par évaporation ou combustion, tel l'Agarbatti, et peuvent être présentées sous forme de liquides, de poudres, de cônes, de papiers imprégnés, etc. Certaines de ces préparations sont utilisées pour masquer les odeurs.

2) Les désodorisants de locaux, préparés, même non parfumés, ayant ou non des propriétés désinfectantes.

Les désodorisants de locaux préparés consistent essentiellement en substances (méthacrylate de lauryle, par exemple) qui agissent par voie chimique sur les odeurs à éliminer ou autres substances destinées à absorber physiquement les odeurs par les forces de Van der Waal, par exemple. Sous leur conditionnement de vente au détail, ces préparations sont généralement présentées en récipients aérosols.

Le représentant de l'appelant a soutenu que les marchandises en cause ne sont pas visées par cette description des «désodorisants de locaux, préparés» et ne sont pas correctement classées dans la position no 33.07, puisqu'elles ne renferment aucune des substances, tel le méthacrylate de lauryle, qui agissent par voie chimique sur l'odeur à éliminer, et qu'elles n'absorbent pas physiquement l'odeur.

Le représentant de l'appelant a renvoyé aux Notes de la Section VI de l'annexe I du Tarif des douanes portant sur les «produits des industries chimiques ou des industries connexes». Il a notamment cité la Note 2 de la Section VI dont le libellé est le suivant :

Sous réserve des dispositions de la Note 1 ci - dessus, tout produit qui, en raison, soit de sa présentation sous forme de doses, soit de son conditionnement pour la vente au détail, relève de l'un des nos 30.04, 30.05, 30.06, 32.12, 33.03, 33.04, 33.05, 33.06, 33.07, 35.06, 37.07 ou 38.08, devra être classé sous cette position et non dans une autre position de la Nomenclature.

S'appuyant sur cette note, il a soutenu que les marchandises qui sont vendues au détail comme désinfectants, qui eux sont visés par la position no 38.08, doivent donc être classées dans la position no 38.08.

Pour donner encore plus de poids à cet argument, le représentant de l'appelant a renvoyé aux Notes explicatives de la position no 38.08 qui précisent, en partie, ce qui suit :

La présente position couvre également les produits ci - après, pour autant qu'ils soient conditionnés pour la vente au détail en tant que fongicides, désinfectants, etc. :

a) Produits et compositions organiques tensioactifs, à cation actif (tels que sels d'ammonium quaternaire), doués de propriétés antiseptiques, désinfectantes, bactéricides ou germicides.

Les préparations insecticides, désinfectantes, etc., peuvent être à base de composés cupriques (acétate, sulfate ou acéto-arsénite de cuivre, par exemple), de soufre, de produits sulfurés (sulfure de calcium, bisulfure de carbone, etc.), d'huile de créosote minérale ou d'huiles anthracéniques, de DDT, de lindane, de paranitrophénylthiophosphate de diéthyle, de dérivés des phénols ou des crésols, de produits arsénicaux (arséniate de calcium, arséniate diplombique, etc.) [...]

(IV) Les désinfectants

Les désinfectants sont des agents qui détruisent d'une manière irréversible les bactéries, virus ou autres micro-organismes indésirables se trouvant généralement sur les objets inanimés.

Les désinfectants sont utilisés, par exemple, dans les hôpitaux pour le nettoyage des murs, etc., ou pour la stérilisation des instruments. Ils sont également utilisés en agriculture pour la désinfection des semences.

Le représentant de l'appelant a soutenu que les marchandises en cause satisfont à la description des désinfectants visés par ces notes puisqu'elles renferment de l'o-phénylphénol, qui est un dérivé du phénol, ainsi que du morpholinium N-éthylique, qui est un composé d'ammonium quaternaire, et qu'elles tuent les microbes ainsi que les bactéries qui causent de mauvaises odeurs. En outre, les marchandises en cause sont enregistrées comme désinfectants aux termes de la Loi sur les produits antiparasitaires [8] et sont étiquetées comme désinfectants. Enfin, le représentant a établi une distinction entre les marchandises en cause et les désodorisants de locaux du fait que les marchandises en cause produisent, comme désinfectants, un jet plus concentré. Compte tenu de ces explications, le représentant a affirmé que les marchandises en cause doivent être classées à titre de désinfectants dans la position no 38.08.

En renvoyant au sens courant et ordinaire du terme «désodoriser», aux Notes explicatives sur la position no 33.07, à l'analyse de laboratoire et aux étiquettes apposées sur les contenants des marchandises en cause présentées à titre de pièces, l'avocat de l'intimé a fait valoir que les marchandises en cause sont correctement classées à titre de désodorisants de locaux préparés à la position no 33.07 et, plus précisément, dans le no tarifaire 3307.49.00 à titre d'autres préparations pour parfumer ou désodoriser les locaux. L'avocat a renvoyé le Tribunal aux définitions suivantes du terme «deodorize» (désodoriser) : «destroy odor of [9] » ([traduction] enlever les mauvaises odeurs de) et «To deprive of odor, esp. of offensive or noisome odour, to take away the (bad) smell of [10] » ([traduction] dépouiller de son odeur, en particulier d'une odeur désagréable ou fétide; éliminer la [mauvaise] odeur de). L'avocat a également attiré l'attention du Tribunal sur le fait que les Notes explicatives exigent que les préparations désodorisantes de locaux «consistent essentiellement en substances (méthacrylate de lauryle, par exemple) qui agissent par voie chimique sur les odeurs à éliminer ou autres substances destinées à absorber physiquement les odeurs». Selon l'interprétation qu'en a donné l'avocat, cette disposition des Notes explicatives signifie que le méthacrylate de lauryle est un exemple d'une substance qui détruit ou élimine les odeurs, mais que d'autres substances pourraient servir à éliminer les odeurs. L'avocat a fait valoir que les marchandises en cause satisfont à ce critère et s'est appuyé sur le rapport d'analyse de laboratoire ainsi que sur les étiquettes apposées sur les marchandises en cause. Dans le rapport d'analyse de laboratoire, il est indiqué que les marchandises en cause [traduction] «désodorisent en masquant l'odeur nauséabonde par d'autres odeurs, plus agréables. Leur effet est prolongé par la présence de fixateurs de parfum et par les désinfectants qui tuent les bactéries causant de mauvaises odeurs». Selon les indications inscrites sur les étiquettes apposées sur les marchandises en cause, celles-ci sont destinées à être utilisées comme désodorisants de locaux.

Enfin, l'avocat de l'intimé a douté qu'il soit approprié de classer les marchandises en cause dans la position no 38.08 en raison de leurs propriétés désinfectantes. L'avocat a souligné que le libellé «désodorisants de locaux, préparés, même non parfumés, ayant ou non des propriétés désinfectantes» de la position no 33.07 ainsi que les Notes explicatives du Chapitre 33, qui précisent que les «désodorisants de locaux préparés demeurent classés au no 33.07 même s'ils ont des propriétés désinfectantes autres qu'accessoires», prévoient que des marchandises comme celles qui sont en cause, qui ont des propriétés parfumantes, désodorisantes et désinfectantes, doivent être classées dans la position no 33.07. L'avocat a en outre affirmé que les marchandises en cause ne sont ni vendues ni utilisées exclusivement comme désinfectants, mais sont également vendues et utilisées comme désodorisants de locaux.

Aux termes de l'article 10 du Tarif des douanes, le Tribunal doit classer les marchandises conformément aux Règles générales et aux Règles canadiennes. La Règle 1 des Règles générales prévoit que le classement est déterminé d'après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et que, lorsqu'elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d'après les principes énoncés aux Règles 2 à 6, ainsi que d'après les Règles canadiennes qui suivent. Par ailleurs, l'article 11 du Tarif des douanes oblige le Tribunal à s'inspirer des Notes explicatives pour interpréter les positions et sous-positions de l'annexe I du Tarif des douanes. Ainsi, pour établir le classement des marchandises en cause, il s'agit d'abord d'examiner les termes des positions nos 33.07 et 33.08 ainsi que les Notes de Sections et de Chapitres et les Notes explicatives pertinentes, susceptibles de fournir des éléments d'interprétation des termes de ces positions. La position no 33.07 englobe les «désodorisants de locaux, préparés, même non parfumés, ayant ou non des propriétés désinfectantes». Même si cette désignation semble, à première vue, englober les marchandises en cause, le Tribunal est d'avis que les Notes explicatives de la position no 33.07 indiquent que l'intention était que la position no 33.07 n'engloberait que les types de «désodorisants de locaux, préparés» qui y étaient spécifiés.

Les Notes explicatives sur la position no 33.07 indiquent que les préparations désodorisantes de locaux «consistent essentiellement en substances (méthacrylate de lauryle, par exemple) qui agissent par voie chimique sur les odeurs à éliminer ou autres substances destinées à absorber physiquement les odeurs par les forces de Van der Waal, par exemple». Le témoin expert de l'intimé, M. Ward, a déclaré que les marchandises en cause masquent les odeurs et tuent les bactéries causant de mauvaises odeurs. M. Ward a déclaré qu'à son avis, les bactéries qui causent de mauvaises odeurs étaient tuées sous l'effet d'une action à la fois chimique et biologique. Cependant, il n'a rien dit au sujet des effets chimiques des marchandises en cause sur l'odeur elle-même. De l'avis du Tribunal, le fait de masquer une odeur et de tuer les bactéries qui causent une odeur n'est pas la même chose que d'agir par voie chimique sur une odeur ou d'absorber physiquement une odeur. S'appuyant sur la description précise, dans les Notes explicatives, de ce qui est visé par le libellé «désodorisants de locaux, préparés» de la position no 33.07, le Tribunal n'est pas persuadé que les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 33.07.

Pour déterminer si les marchandises en cause doivent être classées dans la position no 33.08 à titre de désinfectants, le Tribunal a aussi commencé par examiner les termes de cette position ainsi que les Notes de Sections ou de Chapitres et les Notes explicatives pertinentes. Les Notes explicatives de la position no 38.08 précisent que cette position couvre les «[p]roduits et compositions organiques tensioactifs, à cation actif (tels que sels d'ammonium quaternaire), doués de propriétés antiseptiques, désinfectantes, bactéricides ou germicides», que les préparations désinfectantes «peuvent être à base [...] de dérivés des phénols ou des crésols», et que les désinfectants «sont des agents qui détruisent d'une manière irréversible les bactéries, virus ou autres micro-organismes indésirables se trouvant généralement sur les objets inanimés». Or, les éléments de preuve soumis au Tribunal indiquent que les marchandises en cause renferment de l'o-phénylphénol (0,1 p. 100), qui est un dérivé de phénol, ainsi que de l'éthylsulfate de morpholinium N-éthylique, qui est un composé d'ammonium quaternaire, et qu'elles tuent les microbes et les bactéries causant des odeurs. En outre, les marchandises en cause sont enregistrées comme désinfectants aux termes de la Loi sur les produits parasitaires et, comme cela est précisé dans les renseignements inscrits sur leurs étiquettes et dans les annonces de télévision projetées à l'audience, elles sont commercialisées, conditionnées pour la vente au détail et utilisées comme désinfectants.

Enfin, le Tribunal fait remarquer que les étiquettes apposées sur les autres produits, en l'occurrence le désinfectant concentré de marque Lysol et l'antiseptique désinfectant Dettol, présentés à titre de pièces et décrits comme désinfectants, donnent à penser que ces produits peuvent servir à certaines des mêmes fins que les marchandises en cause.

Par conséquent, l'appel est admis. Les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 3808.40.10 à titre de désinfectants en paquets d'un poids brut n'excédant pas 1,36 kg chacun.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

2. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

3. Il a été confirmé à l'audience que Reckitt & Colman Canada Inc. a acquis L&F Canada Inc. aux environs de janvier 1995. Voir Transcription de la session publique, le 16 janvier 1996 à la p. 10.

4. Il a proposé la définition suivante du terme « neutralization » (neutralisation) : « A chemical reaction in which water is formed by mutual interaction of the ions that characterize acids and bases when both are present in an aqueous solution ... the remaining product being a salt » ([traduction] Réaction chimique dans laquelle de l'eau est formée par interaction mutuelle des ions caractéristiques des acides et des bases lorsque les deux sont présents dans une solution aqueuse [...] le reste du produit étant constitué d'un sel), The Merck Index , 7 éd., Rahway, Merck, 1960 à la p. 816.

5. Supra note 2, annexe I.

6. Ibid.

7. Conseil de coopération douanière, 1re éd., Bruxelles, 1986.

8. L.R.C. (1985), ch. P-9.

9. The Concise Oxford Dictionary of Current English , 7e éd., Oxford, Clarendon Press, 1982 à la p. 256.

10. The Oxford English Dictionary , 2e éd., Oxford, Clarendon Press, 1989 à la p. 468.


Publication initiale : le 16 décembre 1996