W.K. INVESTMENTS LTD.

Décisions


W.K. INVESTMENTS LTD.
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-95-132

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le vendredi 29 août 1997

Appel n o AP-95-132

EU ÉGARD À un appel entendu le 18 mars 1997 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le ministre du Revenu national le 8 juin 1995 concernant des avis d'opposition signifiés aux termes de l'article 81.17 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

W.K. INVESTMENTS LTD. Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté.


Lyle M. Russell ______ Lyle M. Russell Membre présidant

Patricia M. Close ______ Patricia M. Close Membre

Robert C. Coates, c.r. ______ Robert C. Coates, c.r. Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise à l'égard de trois déterminations du ministre du Revenu national qui ont eu pour effet de rejeter des demandes de remboursement de la taxe de vente fédérale pour habitations neuves. Deux des demandes de remboursement étaient datées du 18 janvier 1995 et sont arrivées au ministère du Revenu national le 19 janvier 1995. La troisième demande était datée du 20 février 1995 et est arrivée le 28 février 1995. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les demandes de remboursement de la taxe de vente fédérale pour habitations neuves de l'appelant ont été produites dans le délai prévu par le paragraphe 121(4) de la Loi sur la taxe d'accise.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Le Tribunal conclut à l'insuffisance d'éléments de preuve à l'effet que les demandes ont été mises à la poste avant 1995, c'est-à-dire le 8 ou le 9 septembre 1994. Étant donné que le directeur de W.K. Investments Ltd. a témoigné qu'il était au courant de la date limite du 31 décembre 1994, le Tribunal se serait attendu qu'il ait au moins envoyé des photocopies des originaux au ministère du Revenu national à la fin décembre lorsqu'il a appris qu'elles n'étaient pas arrivées, plutôt que d'attendre jusqu'au 18 janvier 1995 pour déposer les demandes originales. Le Tribunal conclut que les demandes de remboursement n'ont pas été produites dans le délai prévu par le paragraphe 121(4) de la Loi sur la taxe d'accise.

Lieu de l'audience : Vancouver (Colombie-Britannique) Date de l'audience : Le 18 mars 1997 Date de la décision : Le 29 août 1997
Membres du Tribunal : Lyle M. Russell, membre présidant Patricia M. Close, membre Robert C. Coates, c.r., membre
Avocat pour le Tribunal : Joël J. Robichaud
Greffier : Susanne Grimes
Ont comparu : David Paradis, pour l'appelant Janet Ozembloski, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi) à l'égard de trois déterminations du ministre du Revenu national qui ont eu pour effet de rejeter des demandes de remboursement de la taxe de vente fédérale (TVF) pour habitations neuves. Deux des demandes de remboursement étaient datées du 18 janvier 1995 et sont arrivées au ministère du Revenu national (Revenu Canada) le 19 janvier 1995. La troisième demande était datée du 20 février 1995 et est arrivée le 28 février 1995. L'intimé a rejeté les demandes de l'appelant, dont la somme était de 19 353,43 $, pour le motif qu'elles n'ont pas été produites avant 1995, comme le prévoit le paragraphe 121(4) de la Loi. L'appelant a signifié des avis d'opposition, que l'intimé a rejetés dans des décisions rendues le 8 juin 1995. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les demandes de remboursement de la TVF pour habitations neuves de l'appelant ont été produites dans le délai prévu par le paragraphe 121(4) de la Loi.

Aux fins du présent appel, la disposition législative pertinente est le paragraphe 121(4) de la Loi, qui se lit comme suit :

(4) Le montant est remboursé à l'égard d'un immeuble d'habitation si la personne en fait la demande au ministre avant 1995 en la forme et selon les modalités qu'il détermine. Toutefois, il n'est pas remboursé si un autre montant a déjà été remboursé à l'égard du même immeuble à une autre personne qui y avait droit en vertu du présent article.

À l'audience, M. Eddie Chiu, directeur de la société W.K. Investments Ltd., a témoigné au nom de l'appelant. M. Chiu a expliqué que l'appelant a aménagé et vendu des condominiums à Vancouver (Colombie-Britannique) pendant la période de transition de la TVF à la taxe sur les produits et services (TPS). M. Chiu a expliqué qu'il a personnellement préparé toutes les demandes de remboursement qui ont été produites auprès de Revenu Canada pour le compte de l'appelant. M. Chiu a témoigné qu'il mettait normalement les formules de demande dans des enveloppes, les scellait et les envoyait par la poste à Revenu Canada. Il a expliqué que, sur les 30 logements pour lesquels des demandes ont été produites, les trois logements en cause sont les seuls pour lesquels l'appelant n'a pas reçu de remboursement. M. Chiu a fait état de trois formules de demande datées du 8 septembre 1994. Il a témoigné qu'il a mis ces trois formules, avec une autre formule, dans une enveloppe qu'il a remise à la seule autre employée de l'appelant, Mme Ann Chen. Selon M. Chiu, Mme Chen a porté l'enveloppe au bureau de poste et l'a mise à la poste. Il fallait porter l'enveloppe au bureau de poste pour connaître le montant de l'affranchissement nécessaire. Au moment de l'audience, Mme Chen n'était plus employée par l'appelant. M. Chiu a témoigné, toutefois, qu'elle avait été une employée très fiable. M. Chiu a produit un reçu du bureau de poste daté du 9 septembre 1994, qui a été déposé en preuve. Il a témoigné qu'il a remis 1,40 $, soit le montant indiqué sur le reçu, à Mme Chen. Il se rappelait ne pas avoir donné d'argent à Mme Chen lorsqu'il l'a envoyée au bureau de poste.

M. Chiu a expliqué qu'il s'est écoulé un certain temps avant qu'il n'ait de nouvelles de Revenu Canada. Il a dit qu'il n'y a rien vu d'inusité. Il a supposé que le retard était imputable à une lourde charge de travail à Revenu Canada ou à la décision de Revenu Canada d'utiliser l'argent du remboursement en compensation d'autres sommes que l'appelant devait à Revenu Canada. M. Chiu a témoigné qu'il n'a pas oublié les remboursements, parce que l'appelant avait besoin de l'argent pour payer certaines de ses factures. Il a dit que, quelque temps après Noël 1994, toujours sans nouvelles de Revenu Canada, il s'est enquis auprès d'un fonctionnaire de Revenu Canada, qui l'a informé que les demandes de l'appelant n'avaient pas été reçues. M. Chiu a donc refait les demandes au début de janvier 1995 et les a livrées en personne au bureau de Revenu Canada afin d'éviter des problèmes postaux.

Au cours du contre-interrogatoire, M. Chiu a expliqué qu'il n'y a que trois demandes de remboursement en litige, parce que la quatrième demande, dont il a parlé pendant son interrogatoire principal, avait déjà été envoyée par la poste à Revenu Canada. Il a témoigné qu'il savait, depuis le remplacement de la TVF par la TPS, que les demandes de remboursement de la TVF pour habitations neuves devaient être produites avant 1995. Il a dit qu'une lettre datée du 8 février 1995, adressée à Revenu Canada sous sa signature et indiquant que la première fois qu'il a entendu parler de cela était le jour où il a reçu l'avis de détermination daté du 3 février 1995, était erronée. M. Chiu a expliqué qu'il avait demandé à un ami de rédiger la lettre, parce que son anglais n'est pas assez bon. Il a témoigné que, s'il n'a pas immédiatement produit de nouveau les demandes de remboursement après avoir découvert qu'elles n'étaient pas arrivées à Revenu Canada, c'est qu'il croyait qu'elles finiraient par arriver et qu'il s'était peut-être adressé à la mauvaise personne à Revenu Canada. M. Chiu a expliqué que, s'il n'a pas refait et présenté de nouveau les demandes de remboursement avant le 18 janvier 1995, c'est que, après Noël, il est parti en voyage d'affaires pour environ trois semaines. Une des demandes a dû être présentée de nouveau parce qu'il y manquait certains documents. C'est pourquoi elle était datée du 20 février 1995. M. Chiu a dit qu'il a refait les demandes parce qu'il avait l'impression que Revenu Canada n'acceptait pas de photocopies.

S'appuyant sur le témoignage de M. Chiu, le représentant de l'appelant a fait valoir que les demandes de remboursement de la TVF pour habitations neuves ont été mises à la poste le 8 ou le 9 septembre 1994, et que la raison pour laquelle Revenu Canada ne les a pas reçues avant 1995 pourrait être qu'elles se sont perdues dans le courrier. Le représentant a invoqué le paragraphe 79.2(3) de la Loi pour faire valoir qu'une demande de remboursement est considérée comme produite le jour où elle est postée. Il a aussi renvoyé à une disposition semblable de la Loi de l'impôt sur le revenu [2] .

Le représentant de l'appelant s'en est aussi remis à la décision de la Cour canadienne de l'impôt dans l'affaire Erroca Enterprises Limited c. The Minister of National Revenue [3] . Dans cette affaire, l'intimé avait imposé des pénalités à la société contribuable pour ne pas avoir produit une déclaration de revenus dans le délai prescrit. Le contribuable en a appelé à la Cour canadienne de l'impôt, soutenant qu'il avait posté sa déclaration dans le délai prescrit. L'intimé a affirmé ne pas avoir reçu de déclaration du contribuable avant d'en avoir exigé une. L'appel du contribuable a été admis. La Cour canadienne de l'impôt était convaincue de la crédibilité des témoins déclarant au nom du contribuable selon lesquels les déclarations de revenus avaient été postées dans le délai prévu par la Loi de l'impôt sur le revenu. Par ailleurs, le contribuable n'avait jamais eu de problèmes avec Revenu Canada auparavant, et il n'avait rien à gagner en retardant la production de sa déclaration. Le représentant a soutenu que la situation de M. Chiu est semblable et que le Tribunal devrait accepter ses éléments de preuve selon lesquels les demandes de remboursement ont été mises à la poste avant 1995.

L'avocate de l'intimé a plaidé que l'appelant ne s'était pas acquitté de son fardeau dans la présente affaire. À son avis, il n'y avait pas d'éléments de preuve directs permettant de conclure que les demandes de remboursement avaient effectivement été postées le 8 ou le 9 septembre 1994. Malheureusement, Mme Chen, l'adjointe de M. Chiu, n'a pas témoigné. En outre, rien n'indiquait que le reçu du bureau de poste daté du 9 septembre 1994 était bel et bien un reçu pour l'affranchissement des demandes en cause. L'avocate trouvait bizarre que M. Chiu ait attendu jusqu'au 18 janvier 1995 pour refaire et produire de nouveau les demandes de remboursement. Si M. Chiu était au courant de la date limite, il aurait dû vérifier que les demandes avaient été, effectivement, produites avant son départ en voyage d'affaires. L'avocate a aussi noté qu'il s'est écoulé un mois avant que M. Chiu ne présente de nouveau à Revenu Canada la troisième demande, datée du 20 février 1995.

L'avocate de l'intimé a soutenu que le paragraphe 121(4) de la Loi précise clairement que le montant n'est remboursé que si la personne en fait la demande à l'intimé avant 1995. Puisque les demandes étaient datées du 18 janvier et du 20 février 1995 et qu'elles sont arrivées à Revenu Canada le 19 janvier et le 28 février 1995, l'appel ne peut pas tenir. Elle a fait valoir que le Tribunal est lié par la loi — qu'il est tenu d'appliquer — et qu'il n'a pas le pouvoir d'accorder de dispense du délai prévu par la Loi, ou de le prolonger, ni le pouvoir d'accorder un redressement fondé sur l'équité dans la détermination des appels. Par ailleurs, a fait valoir l'avocate, si le Tribunal conclut que les demandes ont été produites avant 1995, l'affaire devrait être renvoyée à l'intimé pour qu'il détermine si l'appelant a droit aux remboursements.

S'appuyant sur la politique ministérielle de Revenu Canada et sur l'article 79.2 de la Loi, le Tribunal a statué qu'une demande de remboursement de la TVF à l'inventaire aux termes du paragraphe 120(8) de la Loi est considérée comme ayant été produite par le contribuable le jour où elle est postée et que la date du cachet postal fait foi de la date de mise à la poste [4] . Cela vaudrait également dans le cas d'une demande de remboursement de la TVF pour habitations neuves aux termes du paragraphe 121(4) de la Loi. Dans la présente affaire, le Tribunal n'avait pas d'enveloppe portant le cachet postal. Le Tribunal est incapable de conclure que le reçu du bureau de poste daté du 9 septembre 1994 constitue la preuve de la date de la mise à la poste des demandes. Le Tribunal conclut à l'insuffisance d'éléments de preuve à l'effet que les demandes ont été mises à la poste avant 1995, c'est-à-dire le 8 ou le 9 septembre 1994. Étant donné que M. Chiu a témoigné qu'il était au courant de la date limite du 31 décembre 1994, le Tribunal se serait attendu qu'il ait au moins envoyé des photocopies des originaux à Revenu Canada à la fin décembre lorsqu'il a appris qu'elles n'étaient pas arrivées, plutôt que d'attendre jusqu'au 18 janvier 1995 pour déposer les demandes originales. Le Tribunal conclut que les demandes de remboursement n'ont pas été produites dans le délai prévu par le paragraphe 121(4) de la Loi.

Par conséquent, l'appel est rejeté.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E-15.

2. L.R.C. (1985), (5e suppl.).

3. [1986] 2 C.T.C. 2425.

4. Voir, par exemple, l'affaire Lakhani Gift Store c. Le ministre du Revenu national, appel no AP-92-167, le 15 novembre 1993.


Publication initiale : le 23 septembre 1997