LES TEXTILES BAKER INC.

Décisions


LES TEXTILES BAKER INC.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-95-284

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le lundi 17 février 1997

Appel n o AP-95-284

EU ÉGARD À un appel entendu le 29 novembre 1996 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national le 23 novembre 1995 concernant une demande de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

LES TEXTILES BAKER INC. Appelant

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis.


Charles A. Gracey ______ Charles A. Gracey Membre présidant

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre

Desmond Hallissey ______ Desmond Hallissey Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard de l'origine de 368 rouleaux de tissu décrit comme « modèle no 0315 - denim cambrai indigo 100 p. 100 coton - deuxième qualité » qui ont été importés au Canada en provenance des États-Unis lors de deux transactions. Au moment des deux importations, le tissu en cause a été classé dans le numéro tarifaire 5209.42.00 et a été déclaré être originaire des États-Unis et donc admissible à bénéficier du tarif des États-Unis, comme il est indiqué dans le certificat d'origine de l'exportateur. Cependant, après examen ultérieur, l'intimé a déterminé que les renseignements justificatifs n'étayaient pas suffisamment la déclaration de l'appelant à l'effet que le tissu en cause était originaire des États-Unis. Une nouvelle détermination a été effectuée, aux termes de l'article 61 de la Loi sur les douanes, prévoyant que le tissu en cause n'était pas admissible aux bénéfices du tarif des États-Unis. La nouvelle détermination a été confirmée dans la décision rendue par l'intimé, aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes, qui fait l'objet du présent appel auprès du Tribunal.

DÉCISION : L'appel est admis. De l'avis du Tribunal, l'appelant a fourni suffisamment de renseignements pour démontrer que le tissu en cause peut être qualifié de « marchandises entièrement obtenues ou produites » aux États-Unis et qu'il est donc originaire des États-Unis et admissible aux bénéfices du tarif des États-Unis. Le Tribunal est convaincu par la lettre de Greenwood Mills, Inc. à l'appelant, qui précise que le tissu décrit comme « modèle no 0315 - denim cambrai indigo 100 p. 100 coton - deuxième qualité » vendu par Greenwood Mills Marketing Company, Division of Greenwood Mills, Inc. (Greenwood) à la société The Carabela Trading Company Inc. (Carabela) a été fabriqué par Greenwood Mills, Inc. aux États-Unis à partir de matières premières, à savoir du coton provenant des États-Unis. De plus, le Tribunal est convaincu par les exemplaires représentatifs de factures de Carabela à l'appelant et de l'appelant à son client, où figurent les mêmes numéros de rouleaux que ceux qui figurent sur les factures de Greenwood à Carabela, que le tissu en cause a été fabriqué par Greenwood Mills, Inc., vendu à Carabela puis vendu à l'appelant. Rien n'indique que le tissu ait fait l'objet de traitements de fabrication après avoir été vendu par Greenwood à Carabela ni que Carabela ait vendu à l'appelant du denim cambrai indigo 100 p. 100 coton de deuxième qualité obtenu d'un autre fabricant.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 29 novembre 1996 Date de la décision : Le 17 février 1997
Membres du Tribunal : Charles A. Gracey, membre présidant Arthur B. Trudeau, membre Desmond Hallissey, membre
Avocat pour le Tribunal : Shelley Rowe
Greffier : Anne Jamieson
Ont comparu : Paul Baker, pour l'appelant Guy A. Blouin, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] (la Loi) à l'égard de l'origine de 368 rouleaux de tissu décrit comme « modèle no 0315 - denim cambrai indigo 100 p. 100 coton - deuxième qualité » [traduction] qui ont été importés au Canada en provenance des États-Unis lors de deux transactions. Au moment des deux importations, le tissu en cause a été classé dans le numéro tarifaire 5209.42.00 et a été déclaré être originaire des États-Unis et donc admissible à bénéficier du tarif des États-Unis (le TÉU), comme il est indiqué dans le certificat d'origine de l'exportateur (le COE). Cependant, après examen ultérieur, il a été déterminé que les renseignements justificatifs n'étayaient pas suffisamment la déclaration de l'appelant à l'effet que le tissu en cause était originaire des États-Unis. Une nouvelle détermination a été effectuée, aux termes de l'article 61 de la Loi, précisant que le tissu en cause n'était pas admissible aux bénéfices du TÉU. La nouvelle détermination a été confirmée dans la décision rendue par l'intimé, aux termes de l'article 63 de la Loi, qui fait l'objet du présent appel auprès du Tribunal.

À l'audience, l'avocat de l'intimé a confirmé qu'un COE avait été déposé à l'égard de tout le tissu en cause, mais que les documents justificatifs avaient été jugés insuffisants. L'appelant a donc déposé auprès de l'intimé des documents supplémentaires, qui ont été acceptés comme preuve de l'admissibilité de 63 rouleaux à bénéficier du TÉU. L'avocat a indiqué que l'intimé n'était cependant pas disposé à accorder cette admissibilité aux 305 autres rouleaux.

M. Paul Baker, directeur général de la société Les Textiles Baker Inc., a comparu à la fois comme témoin en faveur et représentant de l'appelant. Il a déclaré que l'appelant a acheté le tissu en cause de la société The Carabela Trading Company Inc. (Carabela), un grossiste en textiles de New York, qui s'était procuré le tissu de la société Greenwood Mills Marketing Company, Division of Greenwood Mills, Inc. (Greenwood). M. Baker a expliqué que le ministère du Revenu national avait déterminé, à l'insu de l'appelant, après une visite de vérification aux installations de Carabela en octobre 1992, que cette dernière n'appliquait aucune méthode de gestion des stocks pour distinguer les produits admissibles ou originaires des produits non admissibles ou non originaires; par conséquent, l'appelant n'avait pas droit aux bénéfices du TÉU. Il a renvoyé à une note de service datée du 1er novembre 1995 [2] provenant de Mme Ginette Yassa, applicateur du tarif, qui résume ces faits.

En décrivant le tissu en cause, M. Baker a expliqué qu'il s'agit de tissu de fils teints. M. Baker a renvoyé plus précisément aux factures de Greenwood et souligné qu'elles indiquent que le tissu est « filé, teint, tissé et apprêté » [traduction]. Greenwood apprête le tissu en cause pour en augmenter la résistance au retrait.

M. Baker a présenté et décrit plusieurs documents déposés en annexe au mémoire de l'appelant. Un des documents est une lettre envoyée à M. Baker par M. Earl Jennings, directeur de la planification et des services aux clients pour Greenwood Mills, Inc., mentionnant le 2 juillet 1996 comme date de réception et qui indique, en partie, ce qui suit :

Les marchandises en question [...] ont été vendues et fabriquées par Greenwood Mills Inc. à partir de matières premières provenant des États-Unis puis, entièrement produites aux États-Unis d'Amérique par Greenwood Mills Inc. L'étoffe a été tissée aux États-Unis d'Amérique par Greenwood Mills Inc. à partir de fil produit aux États-Unis d'Amérique à l'usine Greenwood Mills Lindale, en Géorgie, et est conforme aux exigences d'origine (article 301.2) précisées dans l'Accord de libre-échange [entre le Canada et les] États-Unis (l'ALÉ).

[Traduction]

Les documents déposés comprenaient aussi une lettre du 15 avril 1996 de M. Barry Ervin, vendeur et secrétaire pour Carabela, à M. Baker, et qui mentionne, en partie, ce qui suit :

La présente atteste que la Carabela Trading Company a acheté de Greenwood Mills Inc. du tissu cambrai indigo 100 p. 100 coton, modèle no 315 de Greenwood Mills.

Trente-sept rouleaux des marchandises en question, modèle no 315 - denim cambrai indigo 100 p. 100 coton de deuxième qualité, ont par la suite été vendus à la société Les Textiles Baker Inc., tel qu'indiqué sur notre facture (no 504108) du 15 avril 1993.

Nous sommes présentement à la recherche d'autres factures de Greenwood Mills concernant le reste des marchandises vendues à la société Les Textiles Baker Inc.

[Traduction]

Les autres documents déposés étaient des copies de factures de Greenwood à Carabela et de Carabela à l'appelant. M. Baker a renvoyé à ces documents pour montrer que 63 numéros de rouleaux qui figurent sur les factures de Greenwood à Carabela figurent également sur les factures de Carabela à l'appelant. Il a dit croire que le numéro de modèle 0315, indiqué sur les documents, est un numéro dont Greenwood se sert à des fins internes.

Selon M. Baker, il lui a été dit que s'il pouvait obtenir des éléments de preuve similaires pour 56 rouleaux de plus, l'intimé envisagerait de recommander que tous les autres rouleaux soient reconnus comme étant admissibles aux bénéfices du TÉU. M. Baker a fait savoir que ces pièces justificatives n'étaient pas disponibles.

M. Baker a également présenté des copies de factures commerciales accompagnées des bordereaux d'expédition, de l'appelant à la société Confections Rayjo Inc., pour démontrer que tous les 368 rouleaux ont été vendus à un seul client et que les numéros de rouleaux qui figurent sur ces factures correspondent aux numéros de rouleaux qui figurent sur les factures de Carabela, dont certains, à leur tour, correspondent aux numéros de rouleaux qui paraissent sur les factures de Greenwood.

Le premier témoin de l'intimé, Mme Yassa, applicatrice du tarif initialement responsable de la détermination de l'origine des importations en question, a décrit le processus de traitement des demandes de nouvelles déterminations et de prise de décisions au nom de l'intimé. Dans la description du processus, elle a renvoyé à une unité de surveillance dont le mandat est de contrôler les secteurs de haut risque, comme les textiles, où certaines marchandises susceptibles de ne pas être des marchandises originaires d'un territoire particulier selon les règles d'origine sont parfois déclarées comme telles. L'unité de surveillance rassemble des renseignements et fait rapport des résultats de ses examens, enquêtes et décisions, en versant l'information dans une base de données appelée le Système de référence technique (le SRT). Les données de ce système sont l'une des sources d'information servant à déterminer l'origine.

Mme Yassa a mentionné deux décisions de l'Unité SRT, les nos 82371 [3] et 94050 [4] , auxquelles elle s'est reportée au cours de son examen. La décision SRT no 82371 mentionne que, à la suite d'une visite de vérification faite par les spécialistes de l'unité de surveillance, Carabela ne peut obtenir la certification aux termes de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis [5] (l'ALÉ) relativement à certains tissus « parce que les imprimeurs et les transformateurs ne la fourniront pas » [traduction]. La décision SRT no 94050 indique que « le 27 juillet 1993 [Carabela] a démontré qu'elle dispose d'un système de gestion des stocks qui permettra de déterminer lesquelles de ces exportations seront admissibles au TÉU. [Carabela] établira un COE pour chaque expédition au Canada et fournira pour les tissus admissibles les codes des tissus à l'état grège » [traduction]. Mme Yassa a déclaré que cette dernière décision la portait à croire que, après le 27 juillet 1993, Carabela a fourni certains renseignements à l'appui de sa compétence à signer des COE et à retracer l'origine des marchandises.

Il a été fait mention de la lettre de l'avocat de Carabela [6] indiquant que Carabela n'allait pas fournir de pièces justificatives pour ses COE. Mme Yassa a déclaré que le COE est une condition d'admissibilité aux bénéfices du TÉU. Cependant, le COE n'est pas suffisant à titre d'élément de preuve que les marchandises sont originaires d'un territoire particulier. Elle a renvoyé au libellé de la case 11 du COE qui prévoit que l'exportateur accepte de « conserver et de produire sur demande les documents à l'appui ». Selon Mme Yassa, les pièces justificatives devraient retracer l'origine des marchandises depuis le fabricant, l'usine, en incluant le traitement de production appliqué jusqu'au moment où les marchandises sont vendues à l'exportateur et expédiées au Canada. L'information comprendrait les factures, les preuves de traitement ultérieur et les documents d'inventaire. Mme Yassa a indiqué que ces renseignements sont nécessaires parce que, même si un fournisseur peut fournir des tissus originaires en provenance d'un fabricant, ce fournisseur peut aussi s'approvisionner auprès d'autres fabricants. Si tel est le cas, il peut y avoir mélange des stocks et il est difficile, en l'absence d'un système convenable de gestion des stocks, de savoir si le tissu qui a été importé au Canada est le même que celui qui a été produit à l'usine située aux États-Unis.

Le deuxième témoin de l'intimé, Mme Marie Dewar, applicatrice du tarif présentement responsable de l'affaire faisant l'objet d'un appel auprès du Tribunal, a vérifié l'information incluse dans le mémoire de l'appelant et déterminé qu'il y avait suffisamment d'éléments de preuve pour montrer que 63 des 368 rouleaux du tissu en cause étaient originaires des États-Unis et admissibles aux bénéfices du TÉU. Mme Dewar a en particulier mis les numéros de rouleaux figurant sur les factures de Greenwood à Carabela en concordance avec ceux figurant sur les factures de Carabela à l'appelant. Mme Dewar a déclaré que tous les 63 rouleaux au sujet desquels des renseignements ont été fournis ont été portés sur l'une des deux factures concernant des rouleaux de tissu vendus à Carabela par Greenwood. Pour vérifier l'origine des 305 autres rouleaux de tissu, elle a demandé des renseignements similaires supplémentaires pour un rouleau sur cinq. Mme Dewar a été avisée en octobre 1996 que l'appelant était incapable de fournir les renseignements demandés.

Le représentant de l'appelant a soutenu que l'information supplémentaire fournie dans le mémoire de l'appelant, à savoir la lettre de Greenwood et les factures de Greenwood à Carabela et de Carabela à l'appelant, ainsi que l'information fournie à l'audience, à savoir la facture de l'appelant à l'acheteur ultime du tissu en cause, Confections Rayjo Inc., a démontré que le tissu en cause, comme il a été produit par Greenwood, vendu à Carabela puis exporté à l'appelant, est originaire des États-Unis et admissible aux bénéfices du TÉU.

L'avocat de l'intimé a soutenu que, aux termes de l'article 3 du Règlement sur les règles d'origine des marchandises bénéficiant du tarif des États-Unis [7] (le Règlement), les marchandises importées des États-Unis sont admissibles aux bénéfices du TÉU si elles sont entièrement obtenues ou produites dans le territoire. L'avocat a renvoyé à la procédure suivante, tirée des articles 79 et 85 du Mémorandum D11-4-12 [8] , pour déterminer si les marchandises sont admissibles ou non à bénéficier du TÉU.

79. Comme on l'indique dans le mémorandum D11-4-2 portant sur le Règlement sur la justification de l'origine, pour pouvoir réclamer l'application du TÉU au moment de la déclaration en détail, l'importateur doit avoir en mains un certificat d'origine délivré par l'exportateur américain et attestant que les marchandises en question sont conformes aux règles d'origine concernant les marchandises assujetties au TÉU. Par conséquent, c'est en dernière analyse à l'exportateur qu'il incombe de déterminer si les marchandises répondent aux critères d'origine territoriale.

85. Marchandises entièrement obtenues ou produites dans le territoire :

[...]

c) le cas échéant, obtenir une liste des matières servant à produire des marchandises dans le territoire, avec une indication de l'endroit de leur provenance ou de la personne qui a fourni chacune d'elle, en y ajoutant tout renseignement disponible sur leur origine.

(1) Il s'avère parfois nécessaire de vérifier auprès de tiers les renseignements obtenus dont il est question ci-dessus à c), afin de relever l'origine des matières ou des sous-matières, compte tenu que chaque matière doit être entièrement originaire du territoire.

L'avocat a soumis que ni l'appelant ni Carabela n'ont fourni les documents ou renseignements nécessaires requis par l'intimé concernant l'état du tissu en cause au moment de sa réception par Carabela de Greenwood et au moment de son exportation par Carabela à l'appelant. En outre, l'avocat a soutenu que l'avocat de Carabela a confirmé, par écrit, que son client n'avait pas l'intention de fournir d'autres renseignements supplémentaires et que l'intimé devrait clore le dossier concernant l'exportation à l'étude.

En ce qui a trait aux documents justificatifs fournis par l'appelant dans son mémoire, l'avocat de l'intimé a soutenu qu'ils ne portent que sur 63 des 368 rouleaux de tissu en cause et ne suffisent donc pas pour justifier l'admissibilité des 305 autres rouleaux à bénéficier du TÉU. L'avocat a fait valoir que Carabela est un grossiste qui achète des marchandises en solde, des fins de pièces et du tissu de second choix, les revend à des importateurs canadiens et prend les dispositions nécessaires pour qu'elles soient imprimées et apprêtées. Il en résulte que l'intimé a besoin d'une piste documentaire justificative pour déterminer l'origine du tissu brut et le suivre tout au long des étapes de fabrication jusqu'à la vente ultime à l'appelant.

De l'avis du Tribunal, pour que les marchandises puissent être admissibles aux bénéfices du TÉU, les conditions suivantes, énoncées au paragraphe 25.2(6) du Tarif des douanes [9] , doivent être réunies :

a) l'origine des marchandises est justifiée conformément à la Loi sur les douanes;

b) elles bénéficient, aux termes des règlements d'application du paragraphe 13(2), du tarif des États-Unis;

c) elles sont transportées directement au Canada, avec ou sans transbordement, en provenance des États-Unis.

Le paragraphe 35.1(1) de la Loi prescrit, relativement à sa justification, que l'origine de toutes les marchandises doit être « justifiée en la forme et avec les renseignements déterminés par le ministre de même qu'avec les renseignements, déclarations et justificatifs prévus par les règlements d'application ».

Le paragraphe 3.1(2) [10] du Règlement sur la justification de l'origine [11] prévoit que l'importateur qui réclame les bénéfices du TÉU doit présenter à l'agent, à titre de pièce justificative de l'origine, « le certificat d'origine des marchandises de l'exportateur » ou une déclaration d'origine.

Carabela a déposé auprès de l'intimé un COE relativement au tissu en cause. Dans le COE, Carabela déclare que le tissu en cause a été « entièrement produit ou obtenu au Canada ou aux États-Unis » [traduction]. De l'avis du Tribunal, l'exigence de dépôt d'un COE a été satisfaite. L'information qui y est incluse n'établit cependant pas clairement que les marchandises ont été « entièrement produites ou obtenues au Canada ou aux États-Unis ». De plus, la personne qui signe un COE convient de fournir les justificatifs du COE sur demande.

Comme il a déjà été indiqué, l'alinéa 25.2(6)b) du Tarif des douanes prescrit que l'appelant doit démontrer que le tissu en cause bénéficie, aux termes de tout règlement d'application du paragraphe 13(2) du Tarif des douanes, du TÉU. Le paragraphe 13(1) du Tarif des douanes prévoit que « les marchandises sont originaires d'un pays si la totalité de leur valeur a été produite dans ce pays ». Le paragraphe 13(2) du Tarif des douanes prévoit que le « gouverneur en conseil peut, sur recommandation du ministre des Finances, prendre des règlements concernant l'origine des marchandises [...] notamment a)sur l'assimilation, pour l'application de la présente loi ou de toute autre loi, à des marchandises originaires d'un pays des marchandises produites en tout ou en partie à l'extérieur de ce pays [...]; b) sur la détermination du droit au bénéfice [...] [du TÉU] ».

Conformément au paragraphe 3(1) du Règlement, sont des marchandises originaires des États-Unis et bénéficiant du TÉU : a) les marchandises entièrement obtenues ou produites dans le territoire; b) les marchandises traitées ou montées dans le territoire, si leur classement tarifaire constitue un changement par rapport au classement tarifaire qui se serait appliqué avant leur traitement ou leur montage et si les marchandises satisfont aux autres conditions prévues à l'annexe; c) les marchandises montées dans le territoire et qui font l'objet du même classement tarifaire avant et après leur montage. L'appelant a déclaré que le tissu en cause a été entièrement obtenu ou produit aux États-Unis. L'expression « marchandises entièrement obtenues ou produites dans le territoire » est définie au paragraphe 2(1) du Règlement et s'entend des produits qui sont fabriqués aux États-Unis exclusivement à partir, entre autres produits mentionnés, de produits récoltés aux États-Unis, à toute étape de la production.

De l'avis du Tribunal, l'appelant a fourni suffisamment de renseignements pour démontrer que le tissu en cause peut être qualifié de « marchandises entièrement obtenues ou produites » aux États-Unis et qu'il est donc originaire des États-Unis et admissible à bénéficier du TÉU. Le Tribunal est convaincu par la lettre de Greenwood Mills, Inc. à l'appelant qui précise que le tissu décrit comme « modèle no 0315 - denim cambrai indigo 100 p. 100 coton - deuxième qualité » vendu par Greenwood à Carabela a été fabriqué par Greenwood Mills, Inc. aux États-Unis à partir de matière brute, à savoir du coton provenant des États-Unis. De plus, le Tribunal est convaincu par les exemplaires représentatifs de factures de Carabela à l'appelant et de l'appelant à son client, où figurent les mêmes numéros de rouleaux que ceux qui figurent sur les factures de Greenwood à Carabela, que le tissu en cause a été fabriqué par Greenwood Mills, Inc., vendu à Carabela puis vendu à l'appelant. Rien n'indique que le tissu ait fait l'objet de traitements de fabrication après avoir été vendu par Greenwood à Carabela ni que Carabela ait vendu à l'appelant du denim cambrai indigo 100 p. 100 coton de deuxième qualité obtenu d'un autre fabricant.

Par conséquent, le Tribunal conclut que le tissu en cause a droit au TÉU et l'appel est admis.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.). Le paragraphe 57.2(4) de la Loi sur les douanes prévoit que les demandes de nouvelles déterminations et les appels de décisions portant sur des marchandises importées des États-Unis doivent être traités comme s’il s’agissait de demandes et d’appels à l’égard du classement tarifaire ou de la valeur en douane des marchandises aux termes des articles 58 à 72 de la Loi sur les douanes.

2. Mémoire de l’intimé, onglet B.

3. Mémoire de l'intimé, onglet E.

4. Mémoire de l'intimé, onglet F.

5. Recueil des traités du Canada, 1989, no 3 (R.T.C.).

6. Mémoire de l'intimé, onglet D.

7. DORS/89-49, le 30 décembre 1988, Gazette du Canada Partie II, vol. 123, no 2 à la p. 773.

8. Règlements sur les règles d'origine des marchandises bénéficiant du tarif des États-Unis, ministère du Revenu national, Accise, Douanes et Impôt, décembre 1988.

9. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

10. Ajouté par DORS/89-68, le 30 décembre 1988, Gazette du Canada Partie II, vol. 123, no 2 à la p. 855.

11. DORS/88-83, le 31 décembre 1987, Gazette du Canada Partie II, vol. 122, no 2 à la p. 850.


Publication initiale : le 2 juin 1997