TOOTSIE ROLL OF CANADA LTD.

Décisions


TOOTSIE ROLL OF CANADA LTD.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-96-114

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mardi 16 septembre 1997

Appel n o AP-96-114

EU ÉGARD À un appel entendu le 6 juin 1997 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national le 8 octobre 1996 concernant une demande de réexamen aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

TOOTSIE ROLL OF CANADA LTD. Appelant

ET

L E SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis. L'affaire est renvoyée au sous-ministre du Revenu national aux fins d'un nouveau calcul de la valeur en douane selon la méthode de la valeur de référence.


Robert C. Coates, c.r. ______ Robert C. Coates, c.r. Membre présidant

Raynald Guay ______ Raynald Guay Membre

Lyle M. Russell ______ Lyle M. Russell Membre

Susanne Grimes ______ Susanne Grimes Secrétaire intérimaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard d'une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national aux termes de l'article 63. L'appelant a interjeté appel de la décision de l'intimé qui indiquait que la valeur des marchandises importées à l'inventaire de l'entrepôt canadien de l'appelant, en consignation aux fins de vente, devrait être déterminée selon la méthode de la valeur reconstituée (article 52) plutôt que la méthode de la valeur de référence (article 51). L'appel vise des produits de confiserie importés au Canada.

DÉCISION : L'appel est admis. Le Tribunal renvoie l'affaire à l'intimé aux fins d'un nouveau calcul de la valeur en douane selon la méthode de la valeur de référence.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 6 juin 1997 Date de la décision : Le 16 septembre 1997
Membres du Tribunal : Robert C. Coates, c.r., membre présidant Raynald Guay, membre Lyle M. Russell, membre
Avocat pour le Tribunal : Gerry H. Stobo
Greffier : Margaret Fisher
Ont comparu : Brenda C. Swick-Martin et Kenneth H. Sorensen, pour l'appelant Janet Ozembloski, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] (la Loi) à l'égard d'une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national aux termes de l'article 63. L'appelant a interjeté appel de la décision de l'intimé qui indiquait que la valeur des marchandises importées à l'inventaire de l'entrepôt canadien de l'appelant, en consignation aux fins de vente, devrait être déterminée selon la méthode de la valeur reconstituée (article 52) plutôt que la méthode de la valeur de référence (article 51). L'appel vise des produits de confiserie importés au Canada dans le cadre de la transaction no 17566445101799.

L'appelant, une filiale à 100 p. 100 de Tootsie Roll Industries (TRIUS), importe et vend au Canada divers types de bonbons. Il exploite un entrepôt canadien où il entrepose ses stocks de bonbons destinés à la vente sur le marché canadien. Le personnel au Canada comprend un directeur général des ventes et un adjoint administratif.

L'appelant importe régulièrement des bonbons au Canada pour renouveler ses stocks à son entrepôt canadien. Les bonbons sont ensuite vendus à des clients canadiens à une date postérieure à l'importation, en général dans les 90 jours. Les clients passent leurs commandes de bonbons de l'appelant auprès de courtiers indépendants canadiens. Ces derniers transmettent les commandes à l'appelant. Une fois les commandes traitées, les bonbons sont expédiés de l'entrepôt canadien aux clients.

Par le passé, à de rares occasions, lorsqu'une commande équivalait à un chargement de camion complet, les marchandises étaient expédiées directement de TRIUS depuis les États-Unis jusqu'aux clients canadiens, évitant ainsi entièrement l'entrepôt. Cependant, de tels envois ont été complètement interrompus en 1996. Présentement, toutes les commandes canadiennes sont exécutées à même les stocks de l'entrepôt canadien, peu importe leur taille.

Les faits de la présente affaire ne sont pas contestés. Le 18 décembre 1995, les représentants du ministère du Revenu national (Revenu Canada) ont visité l'appelant pour déterminer quelle méthode d'appréciation devrait s'appliquer aux marchandises importées au Canada.

Le 22 janvier 1996, Revenu Canada a rendu une décision informant l'appelant que la valeur des marchandises expédiées directement des États-Unis à un client canadien devait être déterminée selon la méthode de la valeur transactionnelle indiquée à l'article 48. En ce qui a trait aux marchandises expédiées à l'entrepôt canadien en vue de leur vente subséquente, Revenu Canada a avisé que la valeur devait en être déterminée selon la méthode de la valeur transactionnelle de marchandises identiques (article 49).

Le 8 février 1996, l'intimé a délivré un Relevé détaillé de réajustement (RDR), conformément à l'article 61, concernant les marchandises expédiées à l'entrepôt de l'appelant. Le RDR indique ce qui suit :

La valeur en douane a été rajustée pour refléter la valeur transactionnelle de marchandises identiques, aux termes de la décision sur l'appréciation de la valeur, no L7160-1 (KAB) LO/WO152587.

[Traduction]

Le 4 avril 1996, l'appelant a interjeté appel aux termes de l'article 63, demandant que la valeur en douane des marchandises expédiées à l'entrepôt canadien fasse l'objet d'une nouvelle appréciation selon la méthode de la valeur de référence (article 51).

Le 8 octobre 1996, l'intimé a délivré un RDR, conformément au paragraphe 63(3). Le RDR mentionne ce qui suit :

La valeur en douane demeure celle qui a été déterminée par le Bureau régional du Sud de l'Ontario aux termes de la lettre de décision V-6277-1, 7160-4 (DA).

[Traduction]

Le 10 octobre 1996, l'intimé a délivré la lettre de décision 7160-4(DA) V-6277-1, où il est mentionné que la valeur en douane des marchandises vendues avant leur importation à des acheteurs au Canada devrait être déterminée selon la méthode de la valeur transactionnelle établie à l'article 48. Quant aux marchandises expédiées à l'entrepôt canadien, l'intimé a cependant décidé que la méthode de la valeur reconstituée énoncée à l'article 52 devrait être appliquée.

L'appelant est d'accord que l'article 48 devrait s'appliquer aux marchandises expédiées directement de TRIUS à un acheteur canadien. Cependant, l'appelant n'est pas d'accord avec l'utilisation de la méthode de la valeur reconstituée pour déterminer la valeur des marchandises expédiées à l'inventaire général de l'entrepôt canadien de l'appelant. Dans le présent appel, le Tribunal ne traitera que de cette dernière question.

Les dispositions pertinentes de la Loi sont les suivantes :

47.(1) La valeur en douane des marchandises est déterminée d'après leur valeur transactionnelle dans les conditions prévues à l'article 48.

(2) Lorsque la valeur en douane des marchandises n'est pas déterminée par application du paragraphe (1), elle l'est d'après les valeurs suivantes qui peuvent constituer la base de l'appréciation par l'application des articles 49 à 52, prises dans l'ordre où elles s'appliquent :

a) la valeur transactionnelle de marchandises identiques répondant aux exigences visées à l'article 49;

b) la valeur transactionnelle de marchandises semblables répondant aux exigences visées à l'article 50;

c) la valeur de référence des marchandises;

d) la valeur reconstituée des marchandises.

(3) Par dérogation au paragraphe (2), à la demande écrite de l'importateur des marchandises à apprécier présentée avant le début de l'appréciation, l'ordre d'applicabilité des valeurs visées aux alinéas (2) c ) et d ) est inversé.

51.(1) Sous réserve des paragraphes (5) et 47(3), la valeur en douane des marchandises est, dans les cas où elle n'est pas déterminée par application des articles 48 à 50, leur valeur de référence, si elle est déterminable.

(2) La valeur de référence des marchandises à apprécier est un prix unitaire, déterminé conformément au paragraphe (3), ajusté conformément au paragraphe (4), choisi selon les modalités suivantes :

a) lorsque, au moment de l'importation des marchandises à apprécier ou à peu près à ce moment, ces marchandises, des marchandises identiques ou semblables sont vendues au Canada dans l'état où elles ont été importées, c'est le prix unitaire de vente du plus grand nombre de marchandises des trois catégories au moment sus-indiqué qui est retenu;

b) lorsque les marchandises à apprécier, des marchandises identiques ou semblables sont vendues au Canada, non dans les situations visées à l'alinéa a), mais dans l'état où elles ont été importées dans les quatre-vingt-dix jours suivant l'importation des marchandises à apprécier, c'est le prix unitaire de vente du plus grand nombre de marchandises des trois catégories à la date la plus proche de l'importation des marchandises à apprécier qui est retenu;

c) lorsque les marchandises à apprécier, des marchandises identiques ou semblables ne sont pas vendues au Canada dans les situations visées aux alinéas a)ou b), que les marchandises à apprécier, après assemblage, emballage ou transformation complémentaire, y sont vendues dans les cent quatre-vingts jours suivant leur importation et que l'importateur des marchandises à apprécier demande l'application du présent alinéa à la détermination de leur valeur en douane, c'est le prix unitaire de vente du plus grand nombre des marchandises à apprécier qui est retenu.

(3) Pour l'application du paragraphe (2), le prix unitaire des marchandises à apprécier, de marchandises identiques ou de marchandises semblables désigne le prix unitaire auquel ces marchandises sont vendues, au premier niveau commercial après leur importation, à des personnes qui, à la fois :

a) ne sont pas liées, au moment de la vente, aux vendeurs des marchandises en question;

b) n'ont fourni, directement ou indirectement, sans frais ou à coût réduit, aucune des marchandises ou aucun des services visés au sous-alinéa 48(5)a)(iii) pour être utilisés lors de la production et de la vente à l'exportation des marchandises en question.

Le prix unitaire retenu à cet égard est le prix unitaire de vente du plus grand nombre de ces marchandises lorsque, selon le ministre ou son délégué, ce nombre est suffisamment important pour permettre la détermination de ce prix.

(4) Pour l'application du paragraphe (2), le prix unitaire qui y est visé est ajusté en en retranchant la somme des montants suivants :

a) le montant, déterminé de la manière réglementaire, représentant, dans le cadre de la vente au Canada de marchandises de même nature ou de même espèce que les marchandises en question :

(i) soit le montant de la commission normale payée sur une base unitaire,

(ii) soit le montant pour les bénéfices et frais généraux, considérés comme un tout et comprenant tous les frais de commercialisation, normalement inclus dans le prix unitaire;

b) les coûts et frais de transport et d'assurance des marchandises à l'intérieur du Canada, y compris les coûts et frais connexes, généralement supportés lors de la vente au Canada des marchandises à apprécier, des marchandises identiques ou des marchandises semblables, dans la mesure où ils ne sont pas déduits avec les frais généraux visés à l'alinéa a);

c) les coûts et frais supportés afférents aux marchandises en question et visés au sous-alinéa 48(5)b)(i), dans la mesure où ils ne sont pas déduits avec les frais généraux visés à l'alinéa a);

d)les droits et taxes visés à la division 48(5)b)(ii)(B), dans la mesure où ils ne sont pas déduits avec les frais généraux visés à l'alinéa a);

e) dans le cas visé à l'alinéa (2)c), la valeur ajoutée aux marchandises en question par suite de leur assemblage, emballage ou transformation complémentaire au Canada.

(5) Si, en l'absence de renseignements suffisants, la valeur visée à l'alinéa (4)e) n'est pas déterminable, la valeur en douane des marchandises à apprécier ne doit pas se fonder sur l'alinéa (2)c).

52.(1) Sous réserve du paragraphe 47(3), la valeur en douane des marchandises, dans le cas où elle n'est pas déterminée par application des articles 48 à 51, est leur valeur reconstituée, si elle peut être déterminée.

(2) La valeur reconstituée des marchandises à évaluer est la somme des éléments suivants :

a) les coûts et frais supportés à l'égard ou la valeur — déterminés de manière réglementaire :

(i) des matières utilisées dans la production des marchandises à apprécier d'une part,

(ii) des opérations de production ou de transformation des marchandises à apprécier d'autre part;

b) le montant, déterminé de manière réglementaire, de l'ensemble des bénéfices et frais généraux, généralement supportés dans les ventes de marchandises de même nature ou de même espèce que les marchandises à apprécier, effectuées pour l'exportation au Canada par des producteurs qui se trouvent dans le pays d'exportation.

(Soulignement ajouté)

Les produits de l'appelant sont généralement vendus à ses clients canadiens par des courtiers en alimentation mandatés qui se servent de la liste de prix de l'appelant. Le courtier communique la commande à l'appelant et, si elle est correctement documentée, la commande est acceptée au Canada et approvisionnée au moyen des stocks tenus à l'entrepôt canadien. Les documents afférents à la commande sont alors envoyés à TRIUS, qui prépare une facture pour l'appelant. Il est manifeste que la vente au client canadien est une vente au premier niveau commercial au Canada. Les éléments de preuve montrent que les produits de l'appelant sont transférés à l'installation canadienne à leur prix coûtant, c'est-à-dire leur coût de fabrication.

L'avocate de l'intimé a soutenu que, en théorie, les diverses méthodes d'appréciation devraient donner la même valeur transactionnelle aux fins de l'imposition de droits. Le Tribunal est d'accord sur ce point. La diversité des démarches offertes aux articles 48 à 53 vise à prévoir les différents scénarios généralement appliqués pour faire entrer des marchandises au Canada, par exemple les ventes internes au sein d'une entreprise, les ventes sans lien de dépendance entre deux parties non liées ou les ventes entre des parties qui soumettent des renseignements qui ne sont ni complets ni fiables. Bien que les calculs effectués aux termes des divers articles devraient tous donner approximativement le même montant pour la valeur en douane, il est possible que ce ne soit pas le cas. Par exemple, si les renseignements fournis ne sont pas exacts ou si les différentes méthodes d'appréciation devaient permettre (à dessein ou par mégarde) des déductions différentes, il se peut bien alors que la valeur en douane diffère.

La Loi précise que l'intimé doit choisir la méthode d'appréciation selon un ordre d'applicabilité [2] . Si la première méthode d'appréciation ne peut s'appliquer, la méthode suivante doit être prise, dans l'ordre. La méthode de la valeur de référence précède celle fondée sur la valeur reconstituée. La Loi, cependant, permet au contribuable, à sa demande, de passer de la méthode de la valeur de référence à la méthode de la valeur reconstituée [3] . Seul le contribuable dispose de cette option. L'intimé n'a d'autre choix que d'appliquer une autre méthode d'appréciation que celle de la valeur de référence si, en appliquant cette dernière, la valeur en douane ne peut être déterminée ou en l'absence de renseignements suffisants (paragraphe 51(1)).

Dans la présente affaire, bien qu'il semble que l'appelant puisse avoir cru à l'origine que la méthode de la valeur de référence ne pouvait être appliquée, il est manifeste qu'il n'a pas demandé la méthode de la valeur reconstituée de préférence à celle de la valeur de référence. Le Tribunal fait observer que, dans l'échange de pièces de courrier entre les parties, alors que Revenu Canada a indiqué quelle méthode d'appréciation devait être appliquée, Revenu Canada n'a aucunement fait mention des raisons pour lesquelles la méthode de la valeur de référence ne convenait pas. Revenu Canada a simplement indiqué que la méthode de la valeur reconstituée allait s'appliquer [4] . Puisque l'appelant n'a pas demandé que soit appliquée la méthode de la valeur reconstituée, il incombe à l'intimé de démontrer que la méthode de la valeur de référence ne peut être retenue pour déterminer la valeur transactionnelle.

Pour démontrer que la méthode de la valeur de référence ne convenait pas, l'avocate de l'intimé a cité le professeur Maureen Irish qui, dans sa discussion de la méthode de la valeur de référence et celle de la valeur reconstituée, déclare ce qui suit : « au lieu de procéder en retranchant du prix de revente au Canada, [pour calculer la valeur de référence], la méthode de la valeur reconstituée procède en ajoutant, à partir du coût de production [5] ») [traduction] (soulignement ajouté). Selon l'avocate, cela signifie que la méthode de la valeur de référence n'est applicable que s'il y a une vente de TRIUS à l'appelant. Il doit y avoir une vente des marchandises qui fasse qu'elles viennent au Canada et une revente de ces marchandises une fois rendues au Canada. Autrement dit, si un produit est transféré au prix coûtant, comme dans la présente situation, la méthode de la valeur de référence ne peut être retenue.

L'avocate de l'intimé a ensuite soutenu que l'interprétation que fait l'appelant des bénéfices et des frais généraux selon la méthode de la valeur de référence donne une valeur transactionnelle légèrement supérieure au coût de production. Selon l'avocate, il n'en résulte tout simplement pas un montant juste ou précis de la « valeur réelle ». Le Tribunal partage dans une certaine mesure les préoccupations de l'avocate au sujet de la façon dont l'appelant interprète les bénéfices et les frais généraux, particulièrement la façon dont ils sont liés aux dépenses engagées aux États-Unis. Cela ne veut pas dire, cependant, que la valeur en douane ne peut être déterminée selon la méthode de la valeur de référence. Les articles 52 et 53 abordent d'une manière différente l'ajustement afférent aux bénéfices et aux frais généraux, mais, une fois encore, ces méthodes ont été conçues pour finalement arriver à la même valeur transactionnelle.

Les avocats de l'appelant, d'autre part, ont soutenu qu'il n'est pas essentiel qu'il y ait vente entre TRIUS et l'appelant pour appliquer la méthode de la valeur de référence. Ils ont cité Sherman et Glashoff, qui indiquent que le calcul de la valeur de référence « a) […] part du prix de revente dans le pays d'importation et b) retranche les montants pertinents pour dégager la valeur au lieu d'importation [6] » [traduction] (soulignement ajouté). Il est manifeste que la notion de revente est, selon les avocats, compatible avec l'application de la méthode de la valeur de référence.

Les avocats de l'appelant ont poursuivi en définissant une revente comme étant une vente dans le pays d'importation, indépendamment de l'existence ou de l'absence de vente antérieure. De plus, ils ont donné l'exemple suivant de l'application de la méthode de la valeur de référence :

L'une des situations les plus courantes où l'on applique la méthode de la valeur de référence est celle où le fabricant expédie des marchandises en consignation à un mandataire ou à une succursale dans le pays d'importation, qui commercialise ensuite le produit au nom de l'exportateur. Dans cette situation, la vente par le mandataire est incluse dans ce que nous désignons par le terme « revente » même s'il n'y a pas déjà eu de vente. L'emploi du terme « vente » risquerait de créer une ambiguïté par rapport à la vente pour exportation [7] .

[Traduction]

Il semble que la situation de l'appelant soit analogue à celle dans l'exemple de l'auteur. Le Tribunal est d'avis que la méthode de la valeur de référence peut s'appliquer sans qu'il y ait vente entre TRIUS et l'appelant.

Enfin, lorsqu'ils examinent les circonstances dans lesquelles la valeur de référence peut s'appliquer, les auteurs affirment :

Enfin, on peut se demander s'il peut y avoir une valeur de référence lorsque les ventes sont uniquement faites par l'entremise d'une succursale du fabricant située dans le pays d'importation. En principe, rien ne semble s'y opposer. Il devrait être assez facile de déterminer le montant pour les frais généraux supportés par la succursale dans ses activités de marketing dans le pays d'importation. Il devrait probablement aussi exister une méthode qui permette de correctement attribuer à la succursale une partie des bénéfices selon des principes comptables généralement reconnus [8] .

[Traduction]

Malgré l'appui ci-dessus à la position de l'appelant, le Tribunal doit examiner les dispositions de la Loi pour juger si la méthode de la valeur de référence peut servir à déterminer la valeur en douane, étant donné les faits de la présente affaire.

Le paragraphe 51(2) prévoit, entre autres, ce qui suit :

(2) La valeur de référence des marchandises à apprécier est un prix unitaire, déterminé conformément au paragraphe (3), ajusté conformément au paragraphe (4), choisi selon les modalités suivantes :

a) lorsque, au moment de l'importation des marchandises à apprécier ou à peu près à ce moment, ces marchandises, des marchandises identiques ou semblables sont vendues au Canada dans l'état où elle ont été importées, c'est le prix unitaire de vente du plus grand nombre de marchandises des trois catégories au moment sus-indiqué qui est retenu;

(3) Pour l'application du paragraphe (2), le prix unitaire des marchandises à apprécier, de marchandises identiques ou de marchandises semblables désigne le prix unitaire auquel ces marchandises sont vendues, au premier niveau commercial après leur importation, à des personnes qui, à la fois :

a)ne sont pas liées, au moment de la vente, aux vendeurs des marchandises en question.

Les éléments de preuve montrent clairement que les marchandises à apprécier sont vendues au Canada dans le même état à des clients comme Wal-Mart, Shoppers Drug Mart et Biway, au même moment ou « à peu près à ce moment », en général dans les 90 jours. Les ventes au Canada à ses clients sont des ventes au premier niveau commercial après l'importation. Ces clients ne sont pas liés à l'appelant. De plus, le prix auquel est vendu le plus grand nombre d'unités peut s'obtenir par renvoi à la liste de prix de l'appelant, en appliquant les déductions pertinentes. En se servant des renseignements fournis par l'appelant et en exécutant les calculs nécessaires, il est possible d'arriver au prix unitaire « prédominant ». Il est ensuite possible d'ajuster ce prix pour tenir compte des bénéfices et des frais généraux.

En ce qui a trait aux ajustements susmentionnés, les parties se reporteront, évidemment, aux dispositions de l'alinéa 51(4)a), qui traite de l'ajustement du prix unitaire. Plus précisément, le Tribunal fait observer que le sous-alinéa 51(4)a)(ii) prévoit que le montant de l'ajustement pour les bénéfices et frais généraux est déterminé d'après les ventes au Canada de marchandises de même nature ou de même espèce que les marchandises à apprécier. L'intimé peut ainsi tenir compte des bénéfices ou des ventes au Canada d'autres sociétés du même secteur commercial.

Il n'y a guère de doute qu'il soit aussi possible d'appliquer la méthode de la valeur reconstituée pour calculer la valeur en douane dans la présente affaire. De fait, il se peut fort bien que l'application de la méthode de la valeur reconstituée soit plus simple pour l'intimé. Là n'est cependant pas la question en litige.

L'intimé n'a pas démontré au Tribunal que, à partir des renseignements disponibles, la valeur en douane n'est pas déterminable avec la méthode de la valeur de référence. Le Tribunal renvoie l'affaire à l'intimé aux fins d'un nouveau calcul de la valeur en douane selon la méthode de la valeur de référence.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.). Tous les renvois législatifs dans le présent appel visent la Loi sur les douanes.

2. Paragraphe 47(2).

3. Paragraphe 47(3).

4. Mémoire de l'appelant, onglet 4.

5. M. Irish, Customs Valuation in Canada, Don Mills, CCH Canadian, 1985 à la p. 222.

6. S.L. Sherman et H. Glashoff, Customs Valuation - Commentary on the GATT Customs Valuation Code, New York, ICC Publishing, 1988 à la p. 209.

7. Ibid.

8. Ibid. aux pp. 217-18.


Publication initiale : le 8 octobre 1997