C.A.S. SPORTS INTERNATIONAL INC. ET ATOMIC SKI CANADA INC.

Décisions


C.A.S. SPORTS INTERNATIONAL INC. ET ATOMIC SKI CANADA INC.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appels nos AP-96-241 et AP-96-242

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le vendredi 13 février 1998

Appels n os AP - 96 - 241 et AP - 96 - 242

EU ÉGARD À des appels entendus le 2 septembre 1997 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national les 8 et 22 janvier 1997 concernant une demande de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

C.A.S. SPORTS INTERNATIONAL INC. ET
ATOMIC SKI CANADA INC. Appelants

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

Les appels sont rejetés.


Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre présidant

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Les présents appels sont interjetés aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national. La question en litige dans les présents appels consiste à déterminer si les planches à neige sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9506.11.90 à titre d'autres skis, comme l'a déterminé l'intimé, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 9506.11.10 à titre de « [s]kis alpin » [sic], comme l'ont soutenu les appelants.

DÉCISION : Les appels sont rejetés. Le Tribunal reprend le même raisonnement que dans l'affaire Gilmour Sports Ltd. c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise, dans laquelle il a conclu que les planches à neige sont un type de skis, mais qu'elles sont manifestement différentes des skis alpins. Le Tribunal ne peut accueillir l'argument du représentant des appelants, selon lequel le numéro tarifaire 9506.11.10 décrit tous les types de skis utilisés pour descendre une pente. Le Tribunal est d'avis que le numéro tarifaire susmentionné décrit les skis alpins classiques, indépendamment de l'ordre des mots « downhill » et « skis » dans la version anglaise. Conclure autrement signifierait que tous les types de skis pourraient fondamentalement être classés dans ce numéro tarifaire puisque, selon le Tribunal, à un moment ou à un autre, tous les types de skis servent à descendre une pente, y compris les skis de fond. Le Tribunal fait observer que la version française du numéro tarifaire 9506.11.10 se lit « skis alpin » [sic]. Selon le Tribunal, ce dernier libellé confirme sa conclusion que le législateur avait l'intention de n'inclure que les skis alpins classiques dans ledit numéro tarifaire. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9506.11.90 à titre d'autres skis.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 2 septembre 1997 Date de la décision : Le 13 février 1998
Membre du Tribunal : Arthur B. Trudeau, membre présidant
Avocat pour le Tribunal : Joël J. Robichaud
Greffier : Anne Jamieson
Ont comparu : Michael Sherbo, pour les appelants Edward (Ted) Livingstone, pour l'intimé





Les présents appels, entendus par un seul membre du Tribunal [1] , sont interjetés aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [2] (la Loi) à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national les 8 et 22 janvier 1997 aux termes de l'article 63 de la Loi.

La question en litige dans les présents appels consiste à déterminer si les planches à neige sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9506.11.90 de l'annexe I du Tarif des douanes [3] à titre d'autres skis, comme l'a déterminé l'intimé, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 9506.11.10 à titre de « [s]kis alpin » [sic], comme l'ont soutenu les appelants. Aux fins du présent appel, les dispositions pertinentes de la nomenclature tarifaire sont les suivantes :

95.06 Articles et matériel pour la culture physique, la gymnastique, l'athlétisme, les autres sports (y compris le tennis de table) ou les jeux de plein air, non dénommés ni compris ailleurs dans le présent Chapitre; piscines et pataugeoires.

-Skis de neige et autre matériel pour la pratique du ski de neige :

9506.11 --Skis

9506.11.10.00 ---Skis alpin

9506.11.90 ---Autres

10 -----Skis de fond

90 -----Autres

Au cours de l'audience, M. Jean-Yves Arsenault, directeur des ventes pour la société Grizzly Mfg., a témoigné au nom de l'intimé. Le Tribunal l'a reconnu à titre d'expert en fabrication de planches à neige et d'instructeur de planche à neige et de ski alpin. Il a témoigné que la longueur des planches à neige varie entre environ 95 cm à 190 cm et que leur largeur et leur épaisseur peuvent atteindre jusqu'à 14 po et 1/2 po respectivement. Elles sont généralement fabriquées en bois, leurs faces latérales sont en phénol, leur face supérieure est revêtue de fibre de verre et elles sont dotées de carres métalliques. Les fixations sont montées sur la face supérieure de la planche à neige. M. Arsenault a expliqué que les fixations d'une planche à neige sont complètement différentes de celles des skis alpins, une des principales différences étant que les planches à neige ne sont pas munies d'un dispositif de relâche. Il a témoigné que les matériaux et méthodes de fabrication des planches à neige et des skis alpins sont similaires. D'une façon générale, les planches à neige sont fabriquées au moyen des mêmes presses et machines à injecter qui servent à fabriquer les skis alpins. M. Arsenault a expliqué que les planches à neige sont différentes des skis alpins à plusieurs égards. Il a souligné, par exemple, que les skis alpins se vendent en paires, qu'ils sont plus longs et plus épais que les planches à neige et sont utilisés d'une façon différente.

M. Arsenault a expliqué les différences entre les techniques de ski et de planche à neige. Il a dit que les skieurs se servent généralement de bâtons, tandis que les néviplanchistes ne s'en servent jamais. De plus, à son avis, il faut plus longtemps pour apprendre à skier que pour faire de la planche à neige. Il a expliqué que, jusqu'à récemment, il était interdit de pratiquer le sport de la planche à neige dans les centres de ski alpin. De nos jours, des aires spéciales sont réservées aux néviplanchistes. De plus, les centres de ski organisent parfois des événements spéciaux pour permettre aux néviplanchistes de pratiquer leur sport. M. Arsenault a ajouté qu'un adepte du ski alpin ne peut pas simplement sauter sur une planche à neige et savoir spontanément comment pratiquer ce sport. Il faut prendre des leçons et se pratiquer à descendre les pentes. Enfin, M. Arsenault a souligné que la planche à neige est commercialisée en tant que produit distinct. Les planches à neige ne sont pas vendues en tant que skis alpins. Il a témoigné que, bien qu'il soit possible de trouver des planches à neige dans les boutiques où se vendent les skis alpins, il existe des boutiques spécialisées qui ne vendent que des planches à neige.

Au cours du contre-interrogatoire, M. Arsenault a témoigné que les néviplanchistes ne pratiquent pas nécessairement leur sport sur les pentes de ski traditionnelles. Ils vont parfois dans des parcs spécialement aménagés en vue de permettre des manœuvres acrobatiques sur des pistes incurvées à bords relevés, creusées dans la neige, appelées demi-lunes. M. Arsenault a reconnu que les néviplanchistes descendent effectivement la pente lorsqu'ils sont sur ces pistes. Il a témoigné que, selon lui, la planche à neige et le ski alpin sont deux activités sportives complètement différentes.

Le représentant des appelants a soutenu que les marchandises en cause sont plus correctement décrites dans le numéro tarifaire 9506.11.10 à titre de « [s]kis - downhill » (« [s]kis alpin » [sic]) que dans le numéro tarifaire 9506.11.90 à titre d'autres skis. Par conséquent, invoquant la Règle 4 des Règles canadiennes [4] et la Règle 6 des Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé [5] (les Règles générales), il a soutenu que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 9506.11.10. Si le Tribunal est d'avis que les marchandises en cause peuvent être classées dans les deux numéros tarifaires, le représentant a invoqué la Règle 3 a) des Règles générales qui prévoit que, lorsque des marchandises paraissent devoir être classées dans deux ou plusieurs positions, la position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d'une portée plus générale, à l'appui de son argument selon lequel les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 9506.11.10. Invoquant la Règle 3 b) des Règles générales, le représentant a soutenu que la nature intrinsèque et essentielle d'une planche à neige est d'être utilisée pour descendre une pente (« to go downhill »).

Le représentant des appelants a soutenu que l'intimé place, à tort, en anglais, le mot « skis » après le mot « downhill » pour interpréter le numéro tarifaire 9506.11.10, pour se lire « downhill skis » (« skis alpins »). À son avis, le mot « skis » [dans la version anglaise] ne peut être placé que devant le mot « downhill » de sorte que le libellé du numéro tarifaire se lit « [s]kis - [d]ownhill » (« skis pour descendre une pente »). Il a soutenu que la nomenclature tarifaire ne nomme pas les produits; elle les décrit. Par exemple, la nomenclature tarifaire ne désigne pas les ordinateurs nommément; ils sont classés dans la position no 84.71, qui englobe les « [m]achines automatiques de traitement de l'information ». Le représentant a soutenu que, de même, la nomenclature tarifaire [en anglais] ne désigne pas nommément les planches à neige ni les « downhill skis » (« skis alpins »). À son avis, le numéro tarifaire 9506.11.10 dénomme [en anglais] des skis utilisés pour descendre des pentes et, par conséquent, inclut les marchandises en cause. À l'appui de son argument, le représentant a renvoyé à la décision du Tribunal dans l'affaire San Francisco Gifts Ltd. c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [6] , où il a été conclu que les patins à roues alignées sont correctement décrits comme étant des patins à roulettes. Il a souligné que le Tribunal a rendu la conclusion susmentionnée même s'il existe beaucoup de différences entre ces deux activités.

Le représentant des appelants a soutenu que la position de l'intimé dans la présente affaire n'est pas conforme à celle prise dans l'affaire San Francisco Gifts. Il a souligné que, dans l'affaire susmentionnée, l'intimé a décidé que le libellé de la position tarifaire était de nature descriptive, tandis que, dans la présente affaire, l'intimé prend comme position que les titres des positions désignent nommément un produit donné. Le représentant a souligné une autre incohérence dans la position prise par l'intimé. Il a fait valoir que l'intimé avance l'argument que les planches à neige sont différentes des skis parce qu'elles sont beaucoup plus larges et sont utilisées seules plutôt qu'en paires, même si le Tribunal a décidé dans l'affaire Gilmour Sports Ltd. c.Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [7] que ces différences n'étaient pas pertinentes pour déterminer le classement correct des planches à neige. Enfin, le représentant a soutenu que l'intimé ne peut invoquer la déclaration du Tribunal dans l'affaire Gilmour Sports selon laquelle « le fait que le classement statistique des planches dans le numéro tarifaire 9506.11.00 prévoit une catégorie “autres” indique bien que le législateur avait l'intention de classer les skis de neige autres que les skis alpins et les skis de fond dans ce numéro tarifaire » [8] à l'appui de la position de l'intimé dans le présent appel. Il a soutenu qu'il est bien établi que les 9e et 10e chiffres ne font pas partie intégrante de la législation douanière.

L'avocat de l'intimé a reconnu que, à la suite de la décision du Tribunal dans l'affaire Gilmour Sports, les planches à neige sont maintenant classées dans la sous-position no 9506.11 à titre de skis. Il a aussi convenu avec le représentant des appelants que les termes « downhill » et « other », qui se trouvent [en anglais] dans la sous-position no 9506.11, sont de nature descriptive. Cependant, l'avocat a soutenu que les expressions « skis - downhill » ou « downhill skis », indépendamment de l'ordre des termes, décrivent un produit donné différent d'une planche à neige. À son avis, la sous-position no 9506.11 vise les skis alpins classiques, c.-à-d. une paire de skis utilisés avec des bâtons pour descendre une pente enneigée. Les planches à neige sont utilisées d'une façon différente. Le seul dénominateur commun entre les deux est qu'une planche à neige sert aussi à descendre une pente enneigée. L'avocat a soutenu que ce simple fait ne suffit cependant pas pour qu'une planche à neige soit classée à titre de skis alpins.

L'avocat de l'intimé a souligné que, à l'époque de l'affaire Gilmour Sports, un seul numéro tarifaire servait au classement de tous les types de skis. Il comprenait trois numéros de classement : un pour les skis alpins, un pour les skis de fond et un pour les autres types de skis. L'avocat a soutenu que le Tribunal a déclaré très clairement dans l'affaire Gilmour Sports que les planches à neige sont différentes des skis alpins et des skis de fond. Selon l'avocat, l'inclusion des numéros de classement dans la sous-position no 9506.11 a été uniquement un des facteurs sur lesquels le Tribunal s'est appuyé pour former son opinion. L'avocat a soutenu que le fait que les planches à neige sont considérées comme étant un type de ski ne signifie pas automatiquement qu'elles sont des skis alpins. Il a soutenu que l'affaire Gilmour Sports et les éléments de preuve présentés devant le Tribunal en l'espèce montrent clairement que les planches à neige sont différentes des skis alpins et qu'elles sont correctement classées à titre d'autres skis.

Ainsi qu'il a été indiqué au début, la question en litige dans les présents appels consiste à déterminer si les planches à neige sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9506.11.90 à titre d'autres skis ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 9506.11.10 à titre de « [s]kis alpin » [sic]. Dans l'affaire Gilmour Sports, le Tribunal a conclu qu'une planche à neige est un type de ski; cependant, il a clairement déclaré qu'une planche à neige est différente des skis alpins. Le Tribunal reprend le même raisonnement que dans l'affaire Gilmour Sports. Cependant, le Tribunal ne peut accueillir l'argument du représentant des appelants, selon lequel le numéro tarifaire 9506.11.10 décrit tous les types de skis utilisés pour descendre une pente. Le Tribunal est d'avis que le numéro tarifaire susmentionné décrit les skis alpins classiques, indépendamment de l'ordre des mots « downhill » et « skis » dans la version anglaise. Conclure autrement signifierait que tous les types de skis pourraient fondamentalement être classés dans ce numéro tarifaire puisque, selon le Tribunal, à un moment ou à un autre, tous les types de skis servent à descendre une pente, y compris les skis de fond. Le Tribunal fait observer que la version française du numéro tarifaire 9506.11.10 se lit « skis alpin » [sic]. Selon le Tribunal, ce dernier libellé confirme sa conclusion que le législateur avait l'intention de n'inclure que les skis alpins classiques dans ledit numéro tarifaire. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9506.11.90 à titre d'autres skis.

Par conséquent, les appels sont rejetés.


[ Table des matières]

1. L’article 3.2 du Règlement sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, ajouté par DORS/95-27, le 22 décembre 1994, Gazette du Canada Partie II, vol. 129, no 1 à la p. 96, prévoit, en partie, que le président du Tribunal peut, compte tenu de la complexité des questions en litige et du précédent susceptible d’en découler, décider qu’un seul membre constitue le quorum aux fins de connaître de tout appel interjeté devant le Tribunal aux termes de la Loi sur les douanes.

2. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

3. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

4. Ibid. annexe I.

5. Ibid.

6. Appel no AP-92-300, le 18 mars 1994.

7. Appels nos AP-92-102 et AP-92-354, le 1er novembre 1993.

8. Ibid. à la p. 5.


Publication initiale : le 13 juillet 1998