PHILIPS ÉLECTRONIQUE LTÉE

Décisions


PHILIPS ÉLECTRONIQUE LTÉE
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appels nos AP-96-208 et AP-97-009

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le jeudi 5 février 1998

Appels n os AP-96-208 et AP-97-009

EU ÉGARD À des appels entendus le 30 juillet 1997 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national les 15, 22, 23, 24, 25 et 30 octobre 1996, et les 5 février et 27 mars 1997 aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

PHILIPS ÉLECTRONIQUE LTÉE Appelant

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

Les appels sont rejetés.


Raynald Guay ______ Raynald Guay Membre présidant

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Les présents appels sont interjetés aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes. La question en litige dans les présents appels consiste à déterminer si les ballasts électroniques sont correctement classés dans le numéro tarifaire 8504.10.00 à titre de ballasts pour lampes ou tubes à décharge, comme l'a déterminé l'intimé, ou s'ils doivent être classés dans le numéro tarifaire 8504.40.99 à titre d'autres convertisseurs statiques, comme l'a soutenu l'appelant.

DÉCISION : Les appels sont rejetés. Le Tribunal est d'avis que les définitions du mot « ballast » présentées à titre d'éléments de preuve indiquent clairement qu'un ballast peut exercer deux fonctions séparées, c.-à-d. un ballast peut être utilisé non seulement pour assurer le contrôle du courant dans la lampe mais aussi pour fournir le niveau de tension nécessaire pour l'allumer. Selon le Tribunal, les marchandises en cause sont des ballasts électroniques et sont correctement classées dans le numéro tarifaire 8504.10.00 à titre de ballasts pour lampes ou tubes à décharge.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 30 juillet 1997 Date de la décision : Le 5 février 1998
Membre du Tribunal : Raynald Guay, membre présidant
Avocat pour le Tribunal : Joël J. Robichaud
Greffier : Anne Jamieson
Ont comparu : Jean-Pierre Boucher, pour l'appelant Jan Brongers, pour l'intimé





Les présents appels, entendus par un membre du Tribunal [1] , sont interjetés aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [2] (la Loi) à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national les 15, 22, 23, 24, 25 et 30 octobre 1996, et les 5 février et 27 mars 1997 aux termes de l'article 63 de la Loi.

La question en litige dans les présents appels consiste à déterminer si les ballasts électroniques sont correctement classés dans le numéro tarifaire 8504.10.00 de l'annexe I du Tarif des douanes [3] à titre de ballasts pour lampes ou tubes à décharge, comme l'a déterminé l'intimé, ou s'ils doivent être classés dans le numéro tarifaire 8504.40.99 à titre d'autres convertisseurs statiques, comme l'a soutenu l'appelant. Aux fins des présents appels, les dispositions pertinentes de la nomenclature tarifaire sont les suivantes :

85.04 Transformateurs électriques, convertisseurs électriques statiques (redresseurs, par exemple), bobines de réactance et selfs.

8504.10.00 -Ballasts pour lampes ou tubes à décharge

8504.40 -Convertisseurs statiques

8504.40.99 ----Autres

Au cours de l'audience, M. Ronald Peterson, directeur d'ingénierie de produits de la société Advance Transformer Co., A Division of Philips Electronics North America Corporation, a témoigné au nom de l'appelant à titre d'expert en électrotechnique. M. Peterson a décrit le premier élément de preuve (pièce A-1) comme étant un ballast de réactance linéaire pour lampes fluorescentes. Il a expliqué que cet appareil comporte, entre autres, un transformateur et une bobine magnétique et qu'il est utilisé pour contrôler la circulation du courant. M. Peterson a décrit le deuxième élément de preuve (pièce A-2) comme étant un transformateur automatique qui fonctionne également comme une bobine de réactance. De plus, cet appareil fournit le chauffage de filaments et le niveau de tension nécessaire pour faire fonctionner une lampe fluorescente. Un simple conducteur, telle la pièce A-1, ne comporte pas ces deux dernières caractéristiques. M. Peterson a expliqué que les pièces A-1 et A-2 fonctionnent toutes les deux selon un principe de réactance magnétique ou inductive. Ce sont des bobines de réactance et selfs qui sont conçues pour contrôler la circulation du courant dans des lampes fluorescentes. Étant donné qu'elles fonctionnent de cette façon, ce sont des ballasts.

M. Peterson a décrit le troisième élément de preuve (pièce A-3) comme étant un onduleur ou un convertisseur statique à haute fréquence. Cet appareil convertit le courant alternatif en courant continu et, ensuite, le courant continu à une plus haute fréquence. M. Peterson a expliqué que la pièce A-3 n'est pas un ballast. Selon lui, un onduleur n'est pas un ballast. Il a expliqué que cet appareil est vendu à titre de « ballast électronique », car cette expression décrit l'utilité pour laquelle il a été conçu à son origine. Le convertisseur statique est une nouvelle invention qui permet de mettre en œuvre une nouvelle technologie, c'est-à-dire la conversion de fréquence, tandis que les pièces A-1 et A-2 fonctionnent toujours à la même fréquence et la fonction qu'exécute le ballast y est intégrée. Il a expliqué que la pièce A-3 comporte une bobine de réactance qui contrôle la circulation du courant, mais qu'elle ne fonctionne pas comme un ballast. Le ballast est auxiliaire à la fonction principale du convertisseur statique. M. Peterson a décrit le quatrième élément de preuve (pièce A-4) comme étant un convertisseur statique alimenté de courant à trois étapes. Il a expliqué que la pièce A-3 est astable. Le convertisseur à trois étapes sert à réguler le courant continu et fonctionne à très haute fréquence.

En contre-interrogatoire, M. Peterson a expliqué que seulement les pièces A-3 et A-4 font partie des marchandises en cause. Il a expliqué qu'au début des années 40, pendant la Deuxième Guerre mondiale, il n'existait qu'une sorte de ballast, soit une simple bobine de réactance et selfs, telle la pièce A-1, qui contrôlait la circulation du courant à la lampe. Chaque lampe comportait un ballast. Il a expliqué que, par définition, un ballast est quelque chose qui contrôle. Sans le ballast, la force du courant pourrait détruire la lampe. M. Peterson a témoigné qu'il était d'accord avec la définition suivante du terme « ballast » (« ballast ») retrouvée dans la documentation de l'appelant : « Device for starting and regulating fluorescent and high intensity discharge lamps » (« Dispositif employé pour assurer l'allumage et la stabilisation des lampes à fluorescence et à haute intensité »). Il a témoigné que les convertisseurs statiques, telles les pièces A-3 et A-4, ont été conçus pour transformer la tension pour assurer l'allumage de la lampe. Selon M. Peterson, cela n'a rien à voir avec la fonction d'un ballast, c'est-à-dire le contrôle du courant pour garder la lampe allumée.

L'avocat de l'intimé a présenté plusieurs définitions du terme « ballast » à M. Peterson. Ce dernier a expliqué que, selon lui, il s'agit de définitions de « ballasts magnétiques », telles les pièces A-1 et A-2, et non de « convertisseurs à haute fréquence », telles les pièces A-3 et A-4, soit les marchandises en cause. Il a réitéré que le convertisseur statique fonctionne indépendamment du ballast, mais qu'il faut un ballast pour faire fonctionner la lampe fluorescente. Le fabricant a choisi de placer le ballast sur le même dispositif que le convertisseur, car il y avait de l'espace disponible. M. Peterson a expliqué que l'appareil est vendu à titre de « ballast électronique à haute fréquence », car c'est de cette façon qu'il est connu dans l'industrie. Il a expliqué que les consommateurs ne connaissent pas l'expression « convertisseur statique à haute fréquence », car il s'agit d'un nouveau produit.

Le représentant de l'appelant a soutenu que les marchandises en cause sont bien des convertisseurs statiques et que, par conséquent, elles doivent être classées dans la sous-position no 8504.40. Selon lui, le témoignage de M. Peterson a clairement établi que les marchandises en cause ne sont pas des ballasts. Le représentant a soutenu que les marchandises en cause ne sont exclues de la sous-position no 8504.40 par aucune des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [4] (les Notes explicatives) de la position n° 85.04, du Chapitre 85 ou de la Section XVI. Selon le représentant, le fait que les marchandises en cause soient vendues à titre de « ballasts électroniques à haute fréquence » n'est pas pertinent aux fins de classement. Se référant aux Notes explicatives de la position n° 85.04, le représentant a soutenu que le fait que les marchandises en cause incorporent un ballast à titre de dispositif auxiliaire ne modifie pas leur classement.

L'avocat de l'intimé a soutenu que les marchandises en cause sont des ballasts électroniques utilisés dans des lampes à décharge, et que, par conséquent, elles sont correctement classées dans le numéro tarifaire 8504.10.00. Il s'est référé aux éléments de preuve, surtout à la documentation de l'appelant, qui, selon lui, indiquent clairement que les marchandises en cause sont des ballasts, ou, plus spécifiquement, des ballasts électroniques à haute fréquence. Il a soutenu que les marchandises en cause sont des ballasts malgré la position de l'appelant et le témoignage de son témoin expert. L'avocat a renvoyé à plusieurs définitions de dictionnaires du mot « ballast » qui, selon lui, décrivent les marchandises en cause.

L'avocat de l'intimé a admis, cependant, que les marchandises en cause peuvent également être décrites comme des « convertisseurs statiques », étant donné la définition de cette expression dans les Notes explicatives, c'est-à-dire « appareils serv[ant] à convertir l'énergie électrique afin de l'adapter en vue d'utilisations ultérieures spécifiques ». L'avocat a soutenu qu'il faut donc se référer à la Règle 3 a) des Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé [5] (les Règles générales) qui prévoit que « [l]a position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d'une portée plus générale ». Selon l'avocat, les marchandises en cause sont plus spécifiquement décrites comme étant des ballasts pour lampes ou tubes à décharge que des convertisseurs statiques. L'avocat a soutenu que le numéro tarifaire qui englobe les ballasts pour lampes ou tubes à décharge doit, sans doute, être considéré plus spécifique que le numéro tarifaire qui englobe la catégorie « [a]utres ». Il a fait référence à deux décisions du Tribunal à l'appui de cet argument dans les affaires Praher Canada Products Ltd. c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [6] et Smith & Nephew Inc. c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [7] .

L'avocat de l'intimé a ajouté que, selon lui, l'expression « convertisseurs statiques » vise une vaste gamme de produits, tandis que l'expression « ballasts pour lampes ou tubes à décharge » vise uniquement un groupe très restreint de produits utilisés avec des lampes fluorescentes. De l'avis de l'avocat, la plupart des ballasts pour lampes ou tubes à décharge pourraient aussi être classés en tant que convertisseurs statiques, mais l'inverse ne serait pas possible, car seulement une petite proportion des convertisseurs statiques sont aussi des ballasts pour lampes ou tubes à décharge.

La Règle 1 des Règles générales est d'une importance cruciale pour le classement des marchandises dans l'annexe I du Tarif des douanes. La Règle 1 prescrit que le classement est d'abord déterminé d'après les termes des positions et des Notes de Chapitres. Par conséquent, le Tribunal doit déterminer si les marchandises en cause sont dénommées ou décrites de façon générique dans une position donnée. Si elles le sont, elles doivent y être classées, sous réserve de toute Note de Chapitre pertinente. L'article 11 du Tarif des douanes prévoit en outre qu'en interprétant les positions et sous-positions, le Tribunal doit tenir compte des Notes explicatives.

L'intimé a classé les marchandises en cause dans le numéro tarifaire 8504.10.00 à titre de ballasts pour lampes ou tubes à décharge. Le mot « ballast » n'est pas défini dans les Notes explicatives. Le Tribunal a donc fait référence aux éléments de preuve afin d'en déterminer le sens. Lors de son témoignage, M. Peterson a expliqué que le convertisseur statique transforme la tension pour assurer l'allumage de la lampe, tandis que le ballast contrôle le courant pour garder la lampe allumée. Selon M. Peterson, il s'agit de deux différents appareils qui ont deux fonctions séparées. Il y a plusieurs définitions du mot « ballast » dans la documentation de l'appelant. L'avocat de l'intimé a renvoyé à quelques-unes de ces définitions.

Par exemple, dans un document que M. Peterson a identifié comme faisant partie des documents de publicité de l'appelant, le mot « ballast » est défini comme suit : « Device for starting and regulating fluorescent and high intensity discharge lamps » (« Dispositif employé pour assurer l'allumage et la stabilisation des lampes à fluorescence et à haute intensité »). L'expression « electronic ballast » (« ballast électronique ») est définie comme suit : « A ballast that, with the aid of electronic components, transforms current at a high frequency to operate discharge lamps » (« Ballast qui, à l'aide de composantes électroniques, transforme un courant à haute fréquence pour l'alimentation de lampes à décharge »). Dans le Grand dictionnaire encyclopédique Larousse [8] , le mot « ballast » est défini comme suit : « Dispositif employé dans les lampes à décharge pour assurer la stabilisation et, éventuellement, l'allumage de la décharge [9] ». Dans le IEEE Standard Dictionary of Electrical and Electronics Terms [10] , le mot « ballast » (« ballast ») est défini comme suit : « Devices that by means of inductance, capacitance, or resistance, singly or in combination, limit the lamp current of fluorescent or mercury lamps, to the required value for proper operation, and also, where necessary, provide the required starting voltage and current and, in the case of ballasts for rapid-start lamps, provide for low-voltage cathode heating. Note: Capacitors for power-factor correction and capacitor-discharge resistors may form part of such a ballast [11] » (« Dispositifs qui, par inductance, capacité ou résistance, séparément ou ensemble, limitent le courant de la lampe à fluorescence ou à vapeur de mercure, à la puissance appropriée pour son bon fonctionnement et, le cas échéant, fournissent la tension d'amorçage et le courant requis et, pour ce qui est des ballasts pour lampes à allumage rapide, effectuent le chauffage de la cathodique par basse tension. Nota : Les condensateurs pour la correction de facteur de puissance et les résistances à décharge de condensateur peuvent faire partie d'un tel ballast »).

Le Tribunal est d'avis que les définitions ci-dessus décrivent les marchandises en cause. Contrairement au témoignage de M. Peterson, ces définitions indiquent clairement qu'un ballast peut exercer deux fonctions séparées, c'est-à-dire, un ballast peut être utilisé non seulement pour assurer le contrôle du courant dans la lampe mais aussi pour fournir le niveau de tension nécessaire pour l'allumer. Selon le Tribunal, les marchandises en cause sont des ballasts électroniques et sont correctement classées dans le numéro tarifaire 8504.10.00 à titre de ballasts pour lampes ou tubes à décharge. Même si le Tribunal était d'avis que les marchandises en cause pouvaient être décrites comme des convertisseurs statiques, selon lui, l'expression « ballasts pour lampes ou tubes à décharge » les décrit de manière plus spécifique et, aux termes de la Règle 3 a) des Règles générales, elles seraient quand même correctement classées dans le numéro tarifaire 8504.10.00.

Par conséquent, les appels sont rejetés.


[ Table des matières]

1. L’article 3.2 du Règlement sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, ajouté par DORS/95-27 , le 22 décembre 1994, Gazette du Canada Partie II, vol. 129, no 1 à la p. 96, prévoit, en partie, que le président du Tribunal peut, compte tenu de la complexité des questions en litige et du précédent susceptible d’en découler, décider qu’un seul membre constitue le quorum aux fins de connaître de tout appel interjeté devant le Tribunal aux termes de la Loi sur les douanes.

2. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

3. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

4. Conseil de coopération douanière, 1re éd., Bruxelles, 1986.

5. Supra note 3, annexe I.

6. Appel n° AP-92-112, le 31 août 1993.

7. Appel n° AP-92-073, le 10 janvier 1994.

8. Tome 1, Paris, Librairie Larousse, 1982.

9. Ibid. à la p. 1002.

10. Troisième éd., New York, Institute of Electrical and Electronic Engineers, 1984.

11. Ibid. à la p. 79.


Publication initiale : le 5 février 1998