JONIC INTERNATIONAL INC.

Décisions


JONIC INTERNATIONAL INC.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-97-078

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le lundi 28 septembre 1998

Appel n o AP-97-078

EU ÉGARD À un appel entendu le 9 mars 1998 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national le 25 septembre 1997 concernant une demande de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

JONIC INTERNATIONAL INC. Appelante

ET

L E SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté.


Patricia M. Close ______ Patricia M. Close Membre présidant

Anita Szlazak ______ Anita Szlazak Membre

Charles A. Gracey ______ Charles A. Gracey Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi sur les douanes. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les systèmes pour la réception de la télévision par satellite (SRTS), chacun étant constitué d'une antenne parabolique, d'un transformateur-abaisseur à faible niveau de bruit avec alimentation intégrée, d'un récepteur et d'une télécommande, sont correctement classés dans le numéro tarifaire 8528.12.99 à titre d'autres appareils récepteurs de télévision en couleurs, comme l'a déterminé l'intimé, ou s'ils doivent être classés dans le numéro tarifaire 8529.90.91 à titre de câblosélecteurs, soit des parties reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinées aux appareils des positions nos 85.25 à 85.28, comme l'a soutenu l'appelante.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Le Tribunal est d'avis que les SRTS en cause sont correctement classés dans le numéro tarifaire 8528.12.99 à titre d'autres appareils récepteurs de télévision en couleurs. Un SRTS ne peut être classé dans la position no 85.29 à titre de partie d'un appareil récepteur de télévision. Tout en reconnaissant que chaque affaire doit être jugée selon ses particularités propres et qu'il n'existe pas de critère universel, le Tribunal, dans l'affaire York Barbell Company Limited c. L e sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise, a indiqué que les critères suivants sont pertinents pour déterminer si un produit est une partie : 1) le produit est essentiel au fonctionnement d'un autre produit; 2) le produit est une composante nécessaire et intégrante de l'autre produit; 3) le produit est installé dans l'autre produit; 4) les pratiques et usages commerciaux courants. Dans le présent appel, il n'est satisfait à aucun des critères susmentionnés. Un SRTS n'est pas essentiel au fonctionnement d'un appareil récepteur de télévision, par exemple un téléviseur, n'est pas une composante nécessaire et intégrante d'un tel appareil et n'est pas installé dans un tel appareil. Aucun des éléments de preuve liés aux pratiques et usages commerciaux courants n'a été soumis pour appuyer le classement d'un SRTS à titre de partie d'un appareil récepteur de télévision.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 9 mars 1998 Date de la décision : Le 28 septembre 1998
Membres du Tribunal : Patricia M. Close, membre présidant Anita Szlazak, membre Charles A. Gracey, membre
Avocat pour le Tribunal : Philippe Cellard
Greffier : Margaret Fisher
Ont comparu : Richard A. Wagner et Larry N. James, pour l'appelante Jocelyn Sigouin, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] (la Loi) à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national le 25 septembre 1997 aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi.

La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les systèmes pour la réception de la télévision par satellite (SRTS), importés par l'appelante en février et en mars 1997, sont correctement classés dans le numéro tarifaire 8528.12.99 de l'annexe I du Tarif des douanes [2] à titre d'autres appareils récepteurs de télévision en couleurs, comme l'a déterminé l'intimé, ou s'ils doivent être classés dans le numéro tarifaire 8529.90.91 à titre de câblosélecteurs, soit des parties reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinées aux appareils des positions nos 85.25 à 85.28, comme l'a soutenu l'appelante.

Les dispositions pertinentes de l'annexe I du Tarif des douanes sont les suivantes :

85.28 Appareils récepteurs de télévision, même incorporant un appareil récepteur de radiodiffusion ou un appareil d'enregistrement ou de reproduction du son ou des images; moniteurs vidéo et projecteurs vidéo.

-Appareils récepteurs de télévision, même incorporant un appareil récepteur de radiodiffusion ou un appareil d'enregistrement ou de reproduction du son ou des images :

8528.12 --En couleurs

---Autres :

8528.12.99 ----Autres

85.29 Parties reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinées aux appareils des nos 85.25 à 85.28.

8529.90 -Autres

---Autres :

8529.90.91 ----Des marchandises du no tarifaire 8526.92.91; télécommandes et leurs parties; câblosélecteurs et leurs parties

L'avocat et le représentant de l'appelante ont convoqué un témoin, M. Andy Redmond, président de la société Jonic International Inc. Ce dernier a décrit au Tribunal les composantes d'un SRTS importé par l'appelante. Le système est constitué de quatre composantes : une antenne parabolique, un transformateur-abaisseur à faible niveau de bruit avec alimentation intégrée (TAFB), un récepteur et une télécommande.

L'avocat et le représentant de l'appelante et l'avocate de l'intimé ont chacun convoqué un témoin-expert. M. David Lester, directeur de la Technologie à la société Motorola, a témoigné pour l'appelante, et M. Yiyan Wu, Ph.D., chercheur scientifique au Centre de recherches sur les communications, a témoigné pour l'intimé. Les experts se sont dits d'accord sur le mode de fonctionnement du TAFB. L'antenne parabolique reflète vers le TAFB les signaux micro-ondes de télévision transmis par satellite. Le TAFB convertit les signaux de 11 000 MHz à 1 000 MHz. Le TAFB amplifie aussi les signaux et les envoie par l'intermédiaire de câbles coaxiaux jusqu'au récepteur. Le récepteur convertit ensuite les signaux à 61-67 MHz, c'est-à-dire la fréquence du canal 3 sur un sélecteur de canaux de télévision, ou à une bande de base des fréquences vidéo que certains téléviseurs peuvent capter. Si l'utilisateur est abonné au canal de télévision par satellite choisi, un décodeur intégré au récepteur désembrouille les signaux pour que l'utilisateur puisse visionner l'émission sur son téléviseur. La télécommande permet de faire fonctionner le récepteur par l'entremise de menus affichés à l'écran.

M. Lester a indiqué que les SRTS en cause sont conçus pour servir exclusivement avec des téléviseurs et ne peuvent être utilisés sans ces derniers, puisque toutes les commandes sont interactives et nécessitent l'affichage à l'écran. Un SRTS peut servir avec un téléviseur en couleurs ou en noir et blanc. M. Lester a défini un câblosélecteur comme étant un dispositif qui permet au téléviseur de recevoir davantage de canaux qu'il ne le pourrait autrement. Il a expliqué que le câblosélecteur permet la réception de la plupart des canaux offerts dans l'industrie de la câblodistribution. Bien qu'à l'origine les câblosélecteurs étaient des dispositifs distincts branchés sur les téléviseurs, ils sont maintenant intégrés à ces derniers. Selon M. Lester, un SRTS accomplit la même fonction que les câblosélecteurs susmentionnés, en permettant au téléviseur de capter les signaux de télévision transmis par satellite. Par conséquent, il a conclu qu'un SRTS est, en fait, un câblosélecteur.

M. Wu a déclaré qu'il existe des différences entre un SRTS et un câblosélecteur qui reçoit des signaux transmis par câblodistribution. Il a souligné que les fréquences en jeu sont différentes et que le SRTS fonctionne en mode numérique, tandis que le câblosélecteur fonctionne en mode analogique.

Bien que l'avocat et le représentant de l'appelante aient convenu qu'un SRTS peut être décrit comme étant un appareil récepteur de télévision, ils ont soutenu que le SRTS devait être classé à titre de câblosélecteur dans le numéro tarifaire 8529.90.91, puisqu'il accomplit fondamentalement la même fonction qu'un câblosélecteur. Pour appuyer leur argument, ils ont invoqué les décisions rendues par le Tribunal dans les affaires Les Communications par satellite canadien Inc. c. L e sous-ministre du Revenu national [3] et Philips Electronics Ltd. c. L e sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [4] . Ils ont également avancé qu'un SRTS ne pouvait être classé dans la sous-position no 8528.12 à titre d'appareil récepteur de télévision « en couleurs », en faisant valoir le fait qu'un SRTS peut capter à la fois les signaux de télévision en couleurs et ceux de télévision en noir et blanc.

L'avocate de l'intimé a soutenu qu'un SRTS est un système fonctionnel complet et ne peut être classé dans une position qui vise des parties, comme la position no 85.29. L'avocate a renvoyé à la décision du Tribunal dans l'affaire York Barbell Company Limited c. L e sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [5] , où il est fait mention des critères qui permettent de déterminer si un produit peut être considéré comme étant une partie. Elle a soutenu qu'aucun de ces critères n'est satisfait dans le présent appel. L'avocate a aussi renvoyé le Tribunal à une décision du Comité du Système harmonisé qui a classé un SRTS dans la sous-position no 8528.12 à titre d'appareil récepteur de télévision. Enfin, l'avocate a soutenu qu'un SRTS n'est pas un câblosélecteur.

Aux termes de l'article 10 du Tarif des douanes, le Tribunal doit classer les marchandises importées conformément aux Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé [6] (les Règles générales). La Règle 1 des Règles générales prévoit que le classement est déterminé d'après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres pertinentes. La position no 85.28 vise les appareils récepteurs de télévision, tandis que la position no 85.29 vise les parties reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinées aux appareils des positions nos 85.25 à 85.28. La question en litige consiste donc à déterminer si un SRTS est un appareil récepteur de télévision ou une partie d'un tel appareil.

Le Tribunal est d'avis qu'un SRTS ne peut être classé dans la position no 85.29 à titre de partie d'un appareil récepteur de télévision, même s'il accomplit des fonctions similaires à celles d'un câblosélecteur. Tout en reconnaissant que chaque cause doit être jugée selon ses particularités propres et qu'il n'existe pas de critère universel, le Tribunal, dans l'affaire York Barbell, a indiqué que les critères suivants sont pertinents pour déterminer si un produit est une partie : 1) le produit est essentiel au fonctionnement d'un autre produit; 2) le produit est une composante nécessaire et intégrante de l'autre produit; 3) le produit est installé dans l'autre produit; 4) les pratiques et usages commerciaux courants. Dans le présent appel, aucun de ces critères n'est satisfait. Un SRTS n'est pas essentiel au fonctionnement d'un appareil récepteur de télévision, n'est pas une composante nécessaire et intégrante d'un tel appareil, et il n'est pas installé dans cet appareil. Aucun élément de preuve lié aux pratiques et usages commerciaux courants n'a été soumis pour appuyer le classement d'un SRTS à titre de partie d'un appareil récepteur de télévision. Un tel état des choses peut être mis en opposition avec l'application des mêmes critères à un câblosélecteur. Comme en sont convenus les deux témoins-experts, de nos jours, un câblosélecteur est une composante nécessaire et intégrante d'un téléviseur, et il est considéré comme telle dans l'industrie. Le câblosélecteur est intégré au téléviseur. Il est clair qu'un câblosélecteur peut être classé à titre de partie d'un appareil récepteur de télévision dans la position no 85.29 et, plus précisément, à titre de câblosélecteur dans le numéro tarifaire 8529.90.91. Tel n'est pas le cas d'un SRTS.

Ainsi qu'il a déjà été indiqué, l'avocat et le représentant de l'appelante ont invoqué la décision du Tribunal dans l'affaire Communications par satellite à l'appui de leur argument selon lequel un SRTS doit être classé à titre de câblosélecteur. Dans l'appel susmentionné, le Tribunal a examiné la question du classement d'un décodeur utilisé avec un récepteur. Le récepteur était une des composantes d'un SRTS en mode analogique. Le Tribunal a déterminé que le décodeur était une partie du récepteur. Le Tribunal a en outre conclu que le récepteur accomplissait des fonctions similaires à celles d'un câblosélecteur et devait, par conséquent, être classé à titre de câblosélecteur dans le numéro tarifaire 8543.80.50. Ce numéro tarifaire a cependant été remplacé le 1er janvier 1996 par le numéro tarifaire 8529.90.91 qui comprend maintenant les câblosélecteurs. Le Tribunal est d'avis qu'il s'agit-là d'un changement d'une importance cruciale puisque, tandis que la position no 85.43 comprenait les « [m]achines et appareils électriques ayant une fonction propre, non dénommés ni compris ailleurs dans le présent Chapitre », la position no 85.29 comprend les « [p]arties reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinées aux appareils des nos 85.25 à 85.28 ». Bien que la décision rendue dans l'affaire Communications par satellite vienne appuyer la position de l'appelante selon laquelle un SRTS accomplit des fonctions similaires à celles d'un câblosélecteur, elle ne corrobore pas l'opinion de l'appelante selon laquelle un SRTS doit être classé à titre de partie dans la position no 85.29.

L'avocat et le représentant de l'appelante ont aussi invoqué une affaire antérieure, soit Philips Electronics, dans laquelle le Tribunal a classé les anciens câblosélecteurs, qui étaient alors des éléments séparés des appareils récepteurs de télévision, à titre de parties d'appareils récepteurs de télévision. Il faut souligner que les marchandises en cause dans l'affaire Philips Electronics ont été importées avant l'entrée en vigueur du numéro tarifaire 8543.80.50 qui comprend de façon expresse les câblosélecteurs. En promulguant ce numéro tarifaire, le législateur a indiqué que les anciens câblosélecteurs ne devaient pas être considérés comme étant des parties d'appareils récepteurs de télévision.

Le Tribunal est d'avis que les SRTS en cause [7] sont correctement classés dans la position no 85.28 à titre d'appareils récepteurs de télévision [8] . Le Tribunal fait observer que l'avocat et le représentant de l'appelante et l'avocate de l'intimé sont convenus qu'il peut être dit d'un SRTS qu'il s'agit d'un appareil récepteur de télévision [9] . Le Tribunal est en outre d'avis que les SRTS en cause sont correctement classés dans la sous-position no 8528.12 à titre d'appareils récepteurs de télévision « en couleurs ». Un SRTS peut capter tout aussi bien les signaux en couleurs que les signaux en noir et blanc et les transmettre au téléviseur. D'une manière similaire, un téléviseur en couleurs peut recevoir et afficher les signaux en couleurs ou en noir et blanc. Par contre, un téléviseur en noir et blanc peut recevoir des signaux en couleurs, mais ne peut les afficher.

Enfin, le Tribunal fait observer que, à la suite d'une modification publiée en juillet 1997, le Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [10] inclut maintenant un Avis qui vise expressément les SRTS et les classe dans la sous-position no 8528.12.

Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal est d'avis que les SRTS en cause sont correctement classés dans le numéro tarifaire 8528.12.99 à titre d'autres appareils récepteurs de télévision en couleurs. Par conséquent, l'appel est rejeté.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

2. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

3. Appel no AP-94-202, le 8 décembre 1995.

4. Appel no AP-90-211, le 15 juin 1992.

5. Appel no AP-90-161, le 19 août 1991.

6. Supra note 2, annexe I.

7. Ainsi qu'il a déjà été indiqué, un SRTS comprend une antenne parabolique, un TAFB , un récepteur et une télécommande.

8. La note 4 de la section XVI de l'annexe I du Tarif des douanes indique que « [l]orsqu'une machine ou une combinaison de machines sont constituées par des éléments distincts (même séparés ou reliés entre eux par des conduites, des dispositifs de transmission, des câbles électriques ou autre aménagement) en vue d'assurer concurremment une fonction bien déterminée comprise dans l'une des positions du Chapitre 84 ou du Chapitre 85, l'ensemble est à classer dans la position correspondant à la fonction qu'il assure ».

9. Transcription de l'argumentation publique, le 9 mars 1998 à la p. 2.

10. Conseil de coopération douanière, 1re éd., Bruxelles, 1987.


Publication initiale : le 1 décembre 1998