BROTHER INTERNATIONAL CORPORATION (CANADA) LTD.

Décisions


BROTHER INTERNATIONAL CORPORATION (CANADA) LTD.
Appel no AP-97-100

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le vendredi 27 novembre 1998

Appel n o AP-97-100

EU ÉGARD À un appel entendu le 15 septembre 1998 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national les 2, 4, 9, 18 et 23 septembre 1997 concernant une demande de réexamen aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

BROTHER INTERNATIONAL CORPORATION (CANADA) LTD. Appelante

ET

L E SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté en partie. La partie de l'appel portant sur les cartouches d'impression a été ajournée indéfiniment.


Richard Lafontaine ______ Richard Lafontaine Membre présidant

Pierre Gosselin ______ Pierre Gosselin Membre

Peter F. Thalheimer ______ Peter F. Thalheimer Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si certaines cartouches à ruban importées par l'appelante sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9612.10.90 à titre d'autres rubans encreurs pour machines à écrire et rubans encreurs similaires, encrés ou autrement préparés en vue de laisser des empreintes, comme l'a déterminé l'intimé, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 8473.40.30 à titre de parties et accessoires reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinés aux machines ou appareils des nos 84.69 à 84.72, comme l'a soutenu l'appelante. L'appelante a soutenu que les marchandises en cause étaient des parties de machines à étiqueter P-touch.

De plus, dans l'appel qu'elle a initialement déposé, l'appelante a demandé le reclassement de certaines cartouches d'impression qu'elle avait importées. Cependant, le représentant de l'appelante a demandé que la partie de l'appel portant sur les cartouches d'impression soit ajournée. L'avocat de l'intimé a consenti à l'ajournement.

DÉCISION : L'appel est rejeté en partie. Le Tribunal n'est pas convaincu que les marchandises en cause sont des parties de machines à étiqueter P-touch et elles ne peuvent donc pas être classées dans le numéro tarifaire 8473.40.30. Le Tribunal est d'avis que c'est le ruban encreur inclus dans chaque cartouche qui lui confère son caractère essentiel et que les cartouches en cause sont donc correctement classées dans le numéro tarifaire 9612.10.90.

La partie de l'appel portant sur les cartouches d'impression a été ajournée indéfiniment.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 15 septembre 1998 Date de la décision : Le 27 novembre 1998
Membres du Tribunal : Richard Lafontaine, membre présidant Pierre Gosselin, membre Peter F. Thalheimer, membre
Avocat pour le Tribunal : John L. Syme
Greffier : Anne Jamieson
Ont comparu : Michael Sherbo, pour l'appelante Louis Sébastien, pour l'intimé





INTRODUCTION

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] (la Loi) à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national aux termes de l'article 63 de la Loi. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si certaines cartouches à ruban importées par l'appelante sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9612.10.90 de l'annexe I du Tarif des douanes [2] à titre d'autres rubans encreurs pour machines à écrire et rubans encreurs similaires, encrés ou autrement préparés en vue de laisser des empreintes, comme l'a déterminé l'intimé, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 8473.40.30 à titre de parties et accessoires reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinés aux machines ou appareils des nos 84.69 à 84.72 [3] , comme l'a soutenu l'appelante. Les dispositions pertinentes de la nomenclature tarifaire sont les suivantes :

84.73 Parties et accessoires (autres que les coffrets, housses et similaires) reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinés aux machines ou appareils des nos 84.69 à 84.72.

8473.40 -Parties et accessoires des machines du no 84.72

8473.40.30 ---Des marchandises des nos tarifaires 8472.20.00, 8472.30.00 ou 8472.90.90

96.12 Rubans encreurs pour machines à écrire et rubans encreurs similaires, encrés ou autrement préparés en vue de laisser des empreintes, même montés sur bobines ou en cartouches; tampons encreurs même imprégnés, avec ou sans boîte.

9612.10 -Rubans encreurs

9612.10.90 ---Autres

PREUVE

M. Allan G. MacCaul, gérant de la logistique, Vente et Distribution, et M. Reuben J. Brecher, gérant de produit, tous deux à l'emploi de Brother International Corporation (Canada) Ltd., ont témoigné au nom de l'appelante.

En guise de contexte, M. MacCaul a témoigné que l'appelante importe au Canada deux types de machines à étiqueter P-touch. Au moment de leur importation, les machines sont classées dans le numéro tarifaire 8472.90.90. M. MacCaul a déclaré qu'il existe deux types de marchandises en cause, les cartouches à ruban TC et TZ, chacune ne pouvant servir que dans un type particulier de machine à étiqueter P-touch, c.-à-d. les cartouches ne sont pas interchangeables. Les machines à étiqueter sont importées dans une boîte avec des cartouches destinées au type particulier de machines. Cependant, lorsque le ruban compris dans les marchandises en cause est épuisé, il est possible d'acheter des cartouches de rechange [4] .

Le Tribunal a reconnu à M. Brecher le titre d'expert en fonctionnement des machines à écrire et des machines à étiqueter ainsi que dans le domaine des processus d'impression connexes. M. Brecher a témoigné que les marchandises en cause sont constituées de trois composants principaux : un ruban laminé, un ruban d'impression et un envers adhésif, chacun des composants étant stocké sur des bobines logées dans les marchandises en cause.

M. Brecher a témoigné que, lorsque les marchandises en cause sont chargées dans les machines à étiqueter correspondantes, une tête thermique, qui fait partie de la machine à étiqueter, fait saillie dans les marchandises en cause. De plus, une série d'engrenages s'insèrent dans les marchandises en cause. Lorsque la machine est mise en marche, les engrenages font tourner les bobines, ce qui déroule le ruban laminé, le ruban d'impression et l'envers adhésif au besoin. Un cylindre appuie ensemble le ruban laminé et le ruban encreur contre la tête thermique. Lorsque la tête thermique entre en contact avec le ruban, elle transfère l'encre du ruban encreur sur le ruban laminé. Une fois un caractère imprimé, le ruban laminé et le ruban encreur avancent et d'autres caractères sont imprimés jusqu'à la formation des mots voulus. Après son passage sur la tête thermique, la partie utilisée du ruban encreur est bobinée. Le ruban laminé avance et, avec l'envers adhésif, entre dans un dispositif de dévidement de bande, qui fait partie des marchandises en cause, et un rouleau secondaire, qui fait partie de la machine à étiqueter. Ensemble, ces deux dispositifs réunissent le ruban laminé et l'envers adhésif par pression. Une fois l'opération terminée, l'étiquette sort de la machine.

M. Brecher a témoigné qu'il n'est pas commode de recharger ou d'encrer de nouveau les bobines étant donné la taille et la complexité des pièces en jeu. Lorsque le ruban contenu dans une cartouche a été utilisé, la cartouche entière est mise au rebut. Il a aussi déclaré que les machines à étiqueter ne peuvent pas fonctionner sans les marchandises en cause et que les marchandises en cause ne sont destinées qu'à servir dans les machines à étiqueter P-touch. Enfin, il a fait observer que la longueur des rubans laminés et des rubans encreurs compris dans les marchandises en cause est habituellement de 25 pieds et qu'ils peuvent servir à produire, en moyenne, entre 30 et 50 étiquettes.

ARGUMENTATION

Le représentant de l'appelante a divisé sa plaidoirie en deux parties. Il a d'abord contesté les motifs sur lesquels l'intimé s'est appuyé pour classer les marchandises en cause dans la position no 96.12. Le représentant a ensuite présenté des exposés à l'appui de la position selon laquelle les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 8473.40.30.

Le représentant de l'appelante a soutenu que les marchandises en cause n'étaient pas correctement classées dans la position no 96.12, à titre d'autres rubans encreurs pour machines à écrire et rubans encreurs similaires. Selon son exposé, bien que les marchandises en cause contiennent un ruban encreur et accomplissent une fonction d'impression, elles contiennent aussi d'autres composants qui accomplissent trois autres fonctions (c.-à-d. l'alimentation et l'alignement du ruban laminé et du ruban encreur; l'assemblage et l'alignement du ruban laminé et de l'envers adhésif; la réunion, par pression, de l'envers adhésif et du ruban laminé). Étant donné les fonctions susmentionnées, il a soutenu que les marchandises en cause ne sont pas de simples rubans encreurs pour machines à écrire ou rubans encreurs similaires. Le représentant a invoqué la jurisprudence où, a-t-il fait valoir, le Tribunal a classé les marchandises constituées de plus d'un composant en tant qu'articles composites plutôt qu'en se fondant sur un de leurs composants [5] .

Le représentant de l'appelante a aussi soutenu que le ruban encreur compris dans les marchandises en cause n'est pas en soi un ruban encreur pour machines à écrire ni un ruban encreur selon le libellé de la position no 96.12. Il a fait observer que la position no 96.12 vise les rubans encreurs ou les rubans encreurs similaires encrés ou autrement préparés en vue de laisser des empreintes. Le représentant a soutenu que le verbe « to impress» (« laisser une empreinte ») signifie « to make a mark on something using pressure [6] » (faire une marque sur quelque chose, par pression). Puisque les marchandises en cause transfèrent l'encre du ruban encreur au ruban laminé sous l'action de la chaleur plutôt que de la pression, le ruban encreur, selon le représentant, même s'il est importé séparément, n'entre pas dans le champ de la position no 96.12.

Le représentant de l'appelante a aussi renvoyé le Tribunal au paragraphe 25 du Mémorandum D10-0-1 [7] (le Mémorandum), qui énonce certains critères appliqués par l'intimé pour déterminer si un article précis est une partie. Le représentant a soutenu que les marchandises en cause répondent aux critères énoncés au paragraphe 25 du Mémorandum, qui prévoit ce qui suit :

Cinq critères se sont dégagés au fil des ans, qui établissent les considérations de base à retenir dans le classement des parties. Il faut que les parties :

— forment une unité complète avec la machine;

— n'aient pas d'autre fonction;

— soient commercialisées et expédiées comme une unité;

— soient nécessaires à l'emploi sans danger et prudent de l'unité;

— soient destinées à l'unité.

Devançant un argument de l'avocat de l'intimé, le représentant de l'appelante a soutenu que rien dans le Mémorandum n'indique que des articles qui sont consommés dans le cadre de leur utilisation ne peuvent être considérés comme étant des parties. Il a aussi soutenu qu'aucune des causes invoquées dans le mémoire de l'intimé ne corrobore la proposition selon laquelle un article qui est consommé dans le cadre de son utilisation ne peut être une partie. Finalement, le représentant a fait observer que le Mémorandum prévoit que le fait qu'un article puisse être jetable ne l'empêche pas d'être considéré comme une partie.

Le représentant de l'appelante a soutenu que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 8473.40.30. Il a fait observer que la Règle 1 des Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé [8] (les Règles générales), précise, en partie, que le classement est déterminé d'après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres. Il a ensuite renvoyé le Tribunal à la Note 2 b) de la Section XVI de l'annexe I du Tarif des douanes. La Note 2 prévoit, en partie, ce qui suit :

2. Sous réserve des dispositions de la Note 1 de la présente Section et de la Note 1 des Chapitres 84 et 85, les parties de machines (à l'exception des parties des articles des nos 84.84. 85.44, 85.45, 85.46 ou 85.47) sont classées conformément aux règles ci-après :

a) les parties consistant en articles compris dans l'une quelconque des positions des Chapitres 84 ou 85 (à l'exception des nos 84.09, 84.31, 84.48, 84.66, 84.73, 84.85, 85.03, 85.22, 85.29, 85.38 et 85.48) […]

b) lorsqu'elles sont reconnaissables comme exclusivement ou principalement destinées à une machine particulière ou à plusieurs machines d'une même position (même des nos 84.79 ou 85.43), les parties, autres que celles visées au paragraphe précédent, sont classées dans la position afférente à cette ou à ces machines ou, selon le cas, dans [le no] […] 84.73.

Le représentant de l'appelante a soutenu que, selon la Note 2 de la Section XVI, le classement des parties se fait en trois étapes. En premier lieu, il doit être déterminé si la partie est assujettie à la Note 1 de la Section XVI, la Note 1 du Chapitre 84 ou la Note 1 du Chapitre 85. Il a fait valoir qu'aucune des notes susmentionnées n'exclut les marchandises en cause. En deuxième lieu, il doit être déterminé si la partie est nommément désignée dans l'une quelconque des positions des Chapitres 84 ou 85. Il a fait valoir que les marchandises en cause n'y sont pas ainsi désignées. Finalement, aux termes de la Note 2 b) de la Section XVI, il doit être déterminé si la partie est reconnaissable comme exclusivement ou principalement destinée à une machine particulière. Si elle l'est, elle est classée dans la position afférente à cette machine ou, selon le cas, dans certaines positions visant les « parties », comme la position no 84.73. Le représentant a fait valoir que, puisque les éléments de preuve ont montré que les marchandises en cause sont des parties et sont reconnaissables comme exclusivement ou principalement destinées aux machines à étiqueter P-touch qui sont classées dans la position no 84.72, les marchandises en cause doivent être classées dans la position no 84.73 et, plus précisément, dans le numéro tarifaire 8473.40.30.

L'avocat de l'intimé a soutenu que les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 96.12 parce qu'elles sont expressément décrites dans ladite position. Il a soutenu qu'un article doit répondre à deux critères pour être classé dans la position no 96.12. En premier lieu, il doit s'agir d'un ruban encreur pour machines à écrire ou d'un ruban encreur similaire. En deuxième lieu, il doit être encré ou autrement préparé en vue de laisser des empreintes. L'avocat a soutenu que les marchandises en cause répondent aux deux critères susmentionnés. Quant au premier critère, l'avocat a soutenu que, bien que les marchandises en cause ne soient pas des rubans encreurs pour machines à écrire, elles sont des rubans encreur similaires parce qu'elles accomplissent la même fonction que des rubans encreurs pour machines à écrire, c.-à-d. imprimer quelque chose. Quant au deuxième critère, l'avocat a soutenu que le ruban encreur qui, combiné avec une tête thermique, transfère de l'encre sur le ruban laminé est un dispositif encré ou autrement préparé en vue de laisser des empreintes. Quant à l'observation présentée par le représentant de l'appelante selon laquelle les marchandises en cause ne laissent pas une empreinte par un procédé d'impression, l'avocat a renvoyé le Tribunal à la définition suivante du mot anglais « impression» (« empreinte») : « form, or figure resulting from physical contact usu. with pressure [9] » (« forme, ou image laissée à la suite d'un contact physique, habituellement par pression »).

L'avocat de l'intimé a soutenu que le contact entre le ruban encreur et le ruban laminé laisse une empreinte aux termes de la position no 96.12. L'avocat a renvoyé le Tribunal à la décision de la Commission du tarif dans l'affaire Xerox Canada Inc. c. L e sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [10] à l'appui de cette proposition. L'avocat a aussi souligné que les Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [11] (les Notes explicatives) de la position no 96.12 précisent que ladite position comprend non seulement les rubans encreurs pour machines à écrire, mais aussi pour « toutes machines comportant un dispositif imprimant par l'intermédiaire d'un tel ruban ».

Enfin l'avocat de l'intimé a soutenu que les marchandises en cause ne sont pas des parties. Il a aussi renvoyé le Tribunal au paragraphe 25 du Mémorandum. L'avocat a soutenu que, la plupart du temps, au moment de leur importation, les marchandises en cause ne répondent pas au troisième critère, c.-à-d. que les marchandises soient commercialisées et expédiées comme une unité. L'avocat a rappelé au Tribunal que les éléments de preuve indiquaient que, pour chaque unité des marchandises en cause importée avec des machines à étiqueter P-touch, environ 13 cartouches de rechange ont été importées séparément. De plus, l'avocat a soutenu que les décisions rendues par le Tribunal et la Commission du tarif ont établi que, pour qu'un article soit considéré comme une partie, sa présence dans la machine dont il est dit faire partie doit revêtir un certain caractère de permanence [12] . Selon l'exposé de l'avocat, les marchandises en cause ne revêtent pas un tel caractère.

Enfin, l'avocat de l'intimé a fait observer que les positions nos 84.69 à 84.72 décrivent toutes différents types de machines de bureau, les premières étant les machines à écrire classées dans la position no 84.69. Les rubans encreurs utilisés avec les machines à écrire sont classés dans la position no 96.12. L'avocat a avancé que cette disposition de la nomenclature démontre clairement que le fait qu'un ruban encreur puisse être utilisé avec une machine à écrire ne fait pas dudit ruban encreur une partie de la machine à écrire. Selon l'exposé de l'avocat, le même raisonnement s'applique aux marchandises en cause et aux machines à étiqueter P-touch.

DÉCISION

L'article 10 du Tarif des douanes prévoit que le classement de marchandises importées dans un numéro tarifaire est effectué en conformité avec les Règles générales et les Règles canadiennes [13] . L'article 11 du Tarif des douanes prévoit que, pour l'interprétation des positions et des sous-positions de l'annexe I, il est tenu compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [14] et des Notes explicatives.

La structure des Règles générales est une structure en cascade. Si le classement d'un article ne peut être effectué en conformité avec la Règle 1, il doit alors être tenu compte de la Règle 2, etc. La Règle 1 prévoit ce qui suit :

Le libellé des titres de Sections, de Chapitres ou de Sous-Chapitres est considéré comme n'ayant qu'une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d'après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et, lorsqu'elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d'après les Règles suivantes.

La Règle 1 des Règles canadiennes, qui est la seule règle canadienne qui s'applique dans le présent appel, prévoit que, pour décider dans quelle position tarifaire concurrente un article importé doit être classé, seules les positions tarifaires de même niveau peuvent être comparées. Il serait donc, par exemple, incorrect de comparer une position tarifaire au niveau de quatre chiffres avec une position tarifaire au niveau de six ou de huit chiffres.

Les positions concurrentes dans le présent appel sont les suivantes :

84.73 Parties et accessoires (autres que les coffrets, housses et similaires) reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinés aux machines ou appareils des nos 84.69 à 84.72.

96.12 Rubans encreurs pour machines à écrire et rubans encreurs similaires, encrés ou autrement préparés en vue de laisser des empreintes, même montés sur bobines ou en cartouches; tampons encreurs même imprégnés, avec ou sans boîte.

Le représentant de l'appelante a soutenu que les marchandises en cause sont plus que de simples rubans encreurs pour machines à écrire et rubans encreurs similaires et ne sont pas dénommés d'une façon générique dans la position no 96.12. Le Tribunal en convient. Bien qu'un des composants des marchandises en cause puisse être considéré comme un ruban encreur pour machines à écrire, ce dont il est traité plus loin, les marchandises en cause comprennent d'autres composants qui ne sont pas normalement des parties de rubans encreurs pour machines à écrire.

Invoquant la Note 2 b) de la Section XVI, le représentant de l'appelante a soutenu que les marchandises en cause doivent être classées dans la position no 84.73. La Note 2 se rapporte au classement des parties. Par conséquent, avant d'appliquer la Note 2, il doit d'abord être établi que les marchandises en cause sont des parties.

Lorsqu'il a plaidé que les marchandises en cause sont admissibles en tant que parties, le représentant de l'appelante a soutenu qu'elles répondent aux critères énoncés au paragraphe 25 du Mémorandum. Il a aussi renvoyé le Tribunal à ses décisions rendues dans les affaires Shop-Vac et Crosby Valve.

Cependant, le Tribunal est d'avis qu'il existe une différence fondamentale entre les marchandises visées dans les affaires Shop-Vac et Crosby Valve et les marchandises en cause. Les marchandises dans l'affaire Shop-Vac étaient des blocs de tête destinés à servir comme aspirateurs. Les marchandises dans l'affaire Crosby Valve étaient des ressorts munis de rondelles destinés à servir avec des soupapes de trop-plein. Alors que les marchandises dans les affaires Shop-Vac et Crosby Valve pouvaient servir durant une période de temps indéterminée, les éléments de preuve dans le présent appel indiquent que les marchandises en cause pourraient, selon l'intensité de leur utilisation, être entièrement usées et jetées dans une période de temps relativement courte [15] .

Le représentant de l'appelante a aussi renvoyé le Tribunal à ses décisions rendues dans les affaires Procedair Industries Inc. c. L e sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [16] et SnyderGeneral Canada Inc. c. L e sous-ministre du Revenu national [17] . Comme l'a souligné le représentant, dans les causes susmentionnées, le Tribunal a conclu que certaines marchandises étaient des parties, même si elles étaient destinées à servir durant une certaine période de temps, puis à être jetées. Cependant, les éléments de preuve déposés devant le Tribunal dans les affaires Procedair et SnyderGeneral indiquaient que les marchandises étaient destinées à servir durant une longue période. Par exemple, les marchandises dans l'affaire Procedair étaient destinées à servir durant plusieurs années.

Selon le Tribunal, la nature des marchandises en cause s'apparente davantage à celle des rubans encreurs pour machines à écrire visés dans l'affaire Xerox et des bandes en papier pour ordinateurs visées dans l'affaire Canadian Totalisator Company, A Division of General Instruments of Canada c. L e sous - ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [18] . Dans l'affaire Xerox, lorsqu'elle a conclu que les rubans encreurs pour machines à écrire n'étaient pas des parties, la Commission du Tarif a déclaré ce qui suit :

Les marchandises composées pour l'essentiel de rubans imprégnés de l'encre nécessaire à la production d'une machine à écrire ne sont pas une partie intégrante de la machine même si elles sont placées dans un coffret destiné à être logé dans la machine et à fournir ladite encre au besoin aussi longtemps et dans la mesure où le ruban et le coffret ont été destinés à fournir ladite [...]

Toute la notion de parties d'une machine suppose un certain degré de permanence. Cela est particulièrement vrai d'une partie mobile ou travaillante, autrement dit, d'une partie qui se déplace dans le cadre du fonctionnement du reste de la machine. Un tel mouvement dans le cas d'une véritable partie est un élément essentiel au fonctionnement de la machine. Dans les marchandises en question, la cartouche est fixe, tandis que la bobine de ruban encré ne fait que se dérouler pour fournir passivement un accès au dispositif de la machine à écrire qui place le ruban en contact avec la surface du support en papier, le ruban y laissant la quantité d'encre que la touche du dispositif d'impression a détachée du ruban. Les marchandises sont un système qui sert à fournir la quantité d'encre essentielle pour laisser des empreintes des frappes de la machine à écrire [19] .

[Traduction]

Dans l'affaire Canadian Totalisator, la Commission du tarif a examiné la question à savoir si des bandes en papier pour ordinateurs pouvaient être considérées comme parties d'imprimantes sp 9‚cialisées. Les éléments de preuve indiquaient que le papier utilisé dans la fabrication des bandes était destiné spécifiquement à cette application particulière et que les bandes ne pouvaient servir qu'avec les imprimantes en question. La Commission du tarif a conclu que les bandes étaient essentielles au fonctionnement des imprimantes. Cependant, en concluant que les bandes n'étaient pas des parties des machines, la Commission du tarif a déclaré que « [t]outefois, le simple fait que le système ne fonctionne pas et que l'imprimante ne fonctionnera pas sans la bande n'en fait pas une pièce de l'imprimante [20] ». La Commission du tarif a poursuivi en déclarant que « [l]es pièces d'une machine sont utilisées pendant de longues périodes jusqu'à ce qu'elles s'usent ou se brisent et aient besoin d'être remplacées [21] ».

Bien que les machines à étiqueter P-touch ne puissent fonctionner sans les marchandises en cause et que les marchandises en cause soient destinées auxdites machines, le Tribunal est d'avis que les marchandises en cause ne sont pas des parties des machines. Les marchandises en cause servent en partie de dispositif de stockage des trois types de rubans nécessaires pour l'impression d'une étiquette adhésive. Lorsque la machine à étiqueter P-touch est mise en marche, les bobines logées dans les marchandises en cause sont actionnées par les entraîneurs logés dans la machine et se déroulent passivement pour fournir la quantité nécessaire des divers rubans pour produire une étiquette. Puisqu'il n'est pas commode de remplir les marchandises en cause, lorsque les rubans ont été pleinement utilisés, ils sont tout simplement jetés. Selon le Tribunal, les marchandises en cause sont, pour l'essentiel, des versions un peu plus perfectionnées des cartouches à ruban pour machines à écrire visées dans l'affaire Xerox.

À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne sont pas des parties et, par conséquent, aux termes de la Règle 1 des Règles générales, ne peuvent être classées dans la position no 84.73. La Règle 2 ne s'applique pas aux marchandises en cause, puisqu'elles ne sont pas des articles incomplets, ou non finis ou à l'état démonté et ne sont pas constituées d'un mélange de matières.

Les marchandises en cause sont constituées de divers composants, y compris trois bobines de ruban (laminé, encré et adhésif). De ce fait, le Tribunal est d'avis que les marchandises en cause paraissent devoir être classées dans plus d'une position et, comme telles, doivent être classées en conformité avec la Règle 3 des Règles générales. La Règle 3 a) prévoit ce qui suit :

La position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d'une portée plus générale. Toutefois, lorsque deux ou plusieurs positions se rapportent chacune à une partie seulement des matières constituant un produit mélangé ou un article composite [...], ces positions sont à considérer, au regard de ce produit ou de cet article, comme également spécifiques même si l'une d'elles en donne par ailleurs une description plus précise ou plus complète.

Le Tribunal est d'avis que la Règle 3 a) des Règles générales n'est pas utile en l'espèce, puisque toutes les positions qui pourraient s'appliquer se rapportent à une partie seulement des matières constituant les marchandises en cause. Il faut donc passer à la Règle 3 b).

La Règle 3 b) des Règles générales précise, en partie, que les marchandises composées de matières différentes ou constituées par l'assemblage d'articles différents sont classés d'après la matière ou l'article qui leur confère leur caractère essentiel. La Note explicative VIII de la Règle 3 b) prévoit que le « facteur qui détermine le caractère essentiel varie suivant le genre de marchandises ». Il y est ensuite indiqué que le caractère essentiel « peut, par exemple, ressortir de la nature de la matière constitutive ou des articles qui les composent, de leur volume, leur quantité, leur poids ou leur valeur, de l'importance d'une des matières constitutives en vue de l'utilisation des marchandises ».

Le Tribunal est d'avis que les marchandises en cause sont correctement classées à titre de rubans encreurs pour machines à écrire dans la position no 96.12. Le représentant de l'appelante a soutenu que les marchandises en cause et, en vérité, les rubans encreurs contenus dans les marchandises en cause ne peuvent être classés dans la position no 96.12 parce que ladite position vise les rubans encreurs pour machines à écrire et rubans encreurs similaires, préparés en vue de laisser des « empreintes », ce qui signifie « faire une marque sur quelque chose, par pression ». Puisque les marchandises en cause utilisent la chaleur plutôt que la pression pour transférer l'encre du ruban encreur au ruban laminé, le représentant a soutenu que le ruban encreur, même s'il était importé séparément, ne serait pas visé dans la position no 96.12. Le Tribunal n'a pas été convaincu que le ruban pouvait être exclu de la position no 96.12 au motif susmentionné. Ainsi que l'a souligné l'avocat de l'intimé, le mot « empreinte » peut aussi être défini comme une « forme, ou image laissée à la suite d'un contact physique, habituellement par pression ». Le Tribunal fait observer que le Merriam-Webster's Collegiate Dictionary [22] définit le mot « impression» (« empreinte »), en partie, comme « a stamp, form, or figure resulting from physical contact [23] » (« un timbre, une forme ou un dessin laissé par un contact physique »). Selon le Tribunal, lorsque la tête thermique vient en contact physique avec le ruban encreur (qui est lui-même en contact avec le ruban laminé) et transfère de l'encre sur le ruban laminé, la marque ainsi laissée sur ce dernier est une empreinte.

Le Tribunal est d'avis que ce sont les rubans encreurs logés dans les marchandises en cause qui leur confèrent leur caractère essentiel. Il est vrai que tous les composants qui constituent les marchandises en cause sont nécessaires à leur fonctionnement; cependant, selon le Tribunal, les rubans encreurs sont les parties des marchandises en cause les plus importantes en vue de la production d'une étiquette. Bien que, comme dans toute opération d'impression, il soit nécessaire d'avoir un support sur lequel imprimer, dans le cas présent, le ruban laminé, c'est le ruban encreur et son interaction avec la tête thermique qui produit une étiquette imprimée dans le logement fermé de la machine à étiqueter qui confère aux marchandises en cause leur caractère essentiel. Le fait que les marchandises en cause soient, en partie, composées de plastique ne modifie par leur caractère. Si, par exemple, les marchandises en cause étaient identiques à tous égards, mais étaient composées d'une autre matière que le plastique, elles demeureraient ce qu'elles sont. Leur caractère essentiel ne changerait pas.

Le Tribunal est d'avis que les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9612.10.90. Par conséquent, l'appel est rejeté en partie. La partie de l'appel portant sur les cartouches d'impression a été ajournée indéfiniment.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

2. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

3. Dans l’appel qu’elle a initialement déposé, l’appelante a aussi demandé le reclassement de certaines cartouches d’impression qu’elle avait importées. Cependant, le représentant de l’appelante a demandé que la partie de l’appel portant sur les cartouches d’impression soit ajournée. L’ avocat de l’intimé a consenti à l’ajournement. Le Tribunal a ajourné indéfiniment la partie de l’appel portant sur les cartouches d’impression et peut donc entendre l’affaire plus tard.

4. La question en litige dans le présent appel porte sur le classement de ces cartouches de rechange.

5. Shop-Vac Canada Ltée c. Le sous-ministre du Revenu national, appel no AP-94-353, le 30 janvier 1996 ; Crosby Valve Ltd. c. Le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise, appel no AP-90-179, le 20 novembre 1991.

6. Mémoire de l'appelante, paragr. 39.

7. Classement des parties et des accessoires dans le Tarif des douanes, ministère du Revenu national, Accise, Douanes et Impôt, le 24 janvier 1994.

8. Supra note 2, annexe I.

9. Webster's Third New International Dictionary of the English Language, Springfield, Merriam-Webster, 1986 à la p. 1137.

10. Version française non publiée, appels nos 2678 et 2722, le 15 juillet 1988.

11. Conseil de coopération douanière, 1re éd., Bruxelles, 1986.

12. Supra note 10.

13. Supra note 2, annexe I.

14. Conseil de coopération douanière, 1re éd., Bruxelles, 1987.

15. Transcription de l'audience publique et de l'argumentation, le 15 septembre 1998 aux pp. 52-53.

16. Appel no AP-92-152, le 22 juillet 1993.

17. Appel no AP-92-091, le 19 septembre 1994.

18. (1986), 11 R.C.T. 120.

19. Supra note 10 à la p. 70.

20. Supra note 18 à la p. 124.

21. Ibid.

22. Dixième éd., Merriam-Webster, 1993.

23. Ibid. à la p. 584.


Publication initiale : le 8 décembre 1998