CALEGO INTERNATIONAL INC.

Décisions


CALEGO INTERNATIONAL INC.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-98-102

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le lundi 29 mai 2000

Appel no AP-98-102

EU ÉGARD À un appel entendu le 26 octobre 1999 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national le 20 novembre 1998 concernant une demande de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

CALEGO INTERNATIONAL INC. Appelante

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

DÉCISION DU TRIBUNAL

L'appel est admis.


Arthur B. Trudeau

Arthur B. Trudeau
Membre présidant

Raynald Guay

Raynald Guay
Membre

Patricia M. Close

Patricia M. Close
Membre


Michel P. Granger

Michel P. Granger
Secrétaire
 
 

RÉSUMÉ OFFICIEUX

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national (désormais le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada) aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si certains articles de peluche importés par l'appelante sont correctement classés dans le numéro tarifaire 4202.92.11 à titre de sacs à outils, havresacs et sacs à dos à surface extérieure en matières textiles, comme l'a déterminé l'intimé, ou s'ils doivent être classés dans le numéro tarifaire 9503.41.00 à titre d'autres jouets rembourrés représentant des animaux ou des créatures non humaines, comme l'a soutenu l'appelante.

DÉCISION : L'appel est admis. Le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont à première vue des sacs à dos de la position no 42.02. Le Tribunal conclut également que les marchandises en cause sont à première vue d'autres jouets de la position no 95.03. Puisque le libellé de chacune des positions considérées se rapporte uniquement à l'une des deux fonctions des marchandises en cause, le Tribunal est d'avis que les deux positions sont également descriptives aux fins de la Règle 3 a) des Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé. Le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont composées de différentes matières, mais quel que soit le caractère essentiel de ces marchandises, qu'il s'agisse d'un sac à dos ou d'un jouet, aucune matière ne confère aux marchandises leur caractère essentiel. Ainsi, le Tribunal conclut que la Règle 3 b) ne s'applique pas. Aux termes de la Règle 3 c), le Tribunal doit classer les marchandises en cause dans la position placée la dernière par ordre de numérotation parmi celles susceptibles d'être valablement prises en considération. Le Tribunal conclut que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 9503.41.00 à titre d'autres jouets rembourrés représentant des animaux ou des créatures non humaines.

Lieu de l'audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l'audience :

Le 26 octobre 1999

Date de la décision :

Le 29 mai 2000

   

Membres du Tribunal :

Arthur B. Trudeau, membre présidant

 

Raynald Guay, membre

 

Patricia M. Close, membre

   

Conseillers pour le Tribunal :

Tamra Alexander

 

John Dodsworth

   

Greffier :

Anne Turcotte

   

Ont comparu :

Michael Kaylor, pour l'appelante

 

Claude Morissette, pour l'intimé

 
 

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes 1 à l'égard de décisions rendues le 20 novembre 1998 par le sous-ministre du Revenu national (désormais le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada) aux termes de l'article 63 de la Loi. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si certains articles de peluche importés par l'appelante sont correctement classés dans le numéro tarifaire 4202.92.11 de l'annexe I du Tarif des douanes 2 à titre de sacs à outils, havresacs et sacs à dos à surface extérieure en matières textiles, comme l'a déterminé l'intimé, ou s'ils doivent être classés dans le numéro tarifaire 9503.41.00 à titre d'autres jouets rembourrés représentant des animaux ou des créatures non humaines, comme l'a soutenu l'appelante3 . La nomenclature tarifaire pertinente prévoit ce qui suit :

42.02 Malles, valises et mallettes, y compris les mallettes de toilette et les mallettes porte-documents, serviettes, cartables, étuis à lunettes, étuis pour jumelles, appareils photographiques, caméras, instruments de musique ou armes et contenants similaires; sacs de voyage, trousses de toilette, sacs à dos, sacs à main, sacs à provisions, portefeuilles, porte-monnaie, porte-cartes, étuis à cigarettes, blagues à tabac, trousses à outils, sacs pour articles de sport, boîtes pour flacons ou bijoux, boîtes à poudre, écrins pour orfèvrerie et contenants similaires, en cuir naturel ou reconstitué, en feuilles de matières plastiques, en matières textiles, en fibre vulcanisée ou en carton, ou recouverts, en totalité ou en majeure partie, de ces mêmes matières ou de papier.

-Autre :

4202.92 --À surface extérieure en feuilles de matières plastiques ou en matières textiles

4202.92.11 ----Sacs à outils, havresacs et sacs à dos

95.03 Autres jouets; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animés ou non; puzzles de tout genre.

-Jouets représentant des animaux ou des créatures non humaines :

9503.41.00 --Rembourrés

PREUVE

M. Stephen Rapps, président de Calego International Inc., et Mme Dawn Hilton, acheteuse chez Toys "R" Us (Canada) Ltd., ont témoigné au nom de l'appelante. M. Rapps a indiqué que l'appelante importe des sacs à main, des sacs à dos, des boîtes à lunch et des articles de fantaisie. Il a déclaré que l'appelante détenait une licence de Disney pour des sacs à dos, des valises, des boîtes à lunch, des sacs pour enfants, des portefeuilles, des ceintures bananes, et d'autres sacs ou contenants. M. Rapps a indiqué que l'appelante n'est pas détentrice d'une licence de fabrication de jouets et qu'elle n'obtiendrait jamais une telle licence. L'appelante vend aux détaillants partout au Canada.

M. Rapps a décrit les marchandises en cause comme étant constituées du corps en peluche d'un personnage ainsi que de bandoulières et d'une pochette de grandeur variée. Le corps de peluche du personnage est modelé sur le jouet de peluche sous licence et est confectionné d'un tricot bourré d'ouate pour lui donner forme. Les extrémités du personnage peuvent bouger. Les bandoulières sont fermement fixées au corps de peluche et ne peuvent être enlevées. La taille de la pochette varie, allant d'une pochette plutôt petite ne pouvant contenir que quelques petits articles, tels un bâton de rouge à lèvre ou une carte d'appel, à une autre de plus grande taille pouvant contenir un plus grand nombre d'articles. M. Rapps a précisé que la plus grande pochette se trouve dans le corps de peluche du personnage Winnie l'ourson.

M. Rapps a témoigné que les marchandises en cause sont des jouets de peluche. Il a indiqué que les seules différences entre les marchandises en cause et les jouets sous licence sont les bandoulières et les fermetures à glissière, et qu'il y a un peu plus d'ouate dans la tête ou le ventre des jouets sous licence puisque ceux-ci ne renferment pas de pochettes. Bien qu'il recommande qu'un enfant ne se couche pas avec les marchandises en cause, en raison des bandoulières, ces articles sont divertissants. Il a indiqué que les enfants jouent avec les marchandises en cause et qu'on les achète parce qu'elles sont moins coûteuses que les jouets sous licence. M. Rapps a indiqué que les marchandises en cause sont des articles de mode. M. Rapps a ajouté que les marchandises en cause n'ont jamais été conçues pour recevoir des objets à des fins précises, et que les bandoulières et les fermetures à glissière qu'elles comportent permettent, notamment, à l'appelante de commercialiser des jouets de peluche sans contrevenir aux contrats de licence.

M. Rapps a témoigné que les marchandises en cause sont fabriquées dans une usine de jouet et une maison de commerce qui fabrique toutes sortes d'articles en République populaire de Chine. Il a ajouté que les marchandises en cause subissent des essais conformément aux normes pour les jouets et que ces essais sont effectués par « ACTS » et « ITLS ». L'avertissement « Contre-indiqué pour les enfants de moins de trois ans » [traduction] se trouve sur toutes les marchandises. M. Rapps a précisé qu'il en coûte très peu pour les bandoulières, les boucles et les fermetures à glissière, matières qui distinguent les marchandises en cause des jouets sous licence.

M. Rapps a témoigné que la mise en marché des marchandises en cause est fonction des acheteurs éventuels. Tout d'abord, M. Rapps offre les marchandises à son principal acheteur, chez un détaillant particulier, qui est habituellement chargé de l'approvisionnement de sacs à main. Si le principal acheteur ne veut pas les marchandises, M. Rapps les offre à d'autres acheteurs chez le détaillant. Si l'acheteur de sacs à main achète les marchandises, celles-ci sont placées au rayon des sacs à main. Si l'acheteur de jouets achète les marchandises, elles sont placées au rayon des jouets. M. Rapps a précisé que, pendant la dernière année, les marchandises en cause ont été transférées fondamentalement du rayon des sacs à main au rayon des jouets. M. Rapps a précisé que les marchandises en cause sont vendues aux acheteurs de jouets de Zellers, de Sears et de la Baie et à l'acheteur de sacs à dos de Toys "R" Us. M. Rapps a indiqué que les créneaux commerciaux ne sont plus aussi étanches qu'avant. À titre d'exemple, il a indiqué que Bentley, magasin de malletterie et de sacs à main, vend maintenant des pantoufles « Teletubbies ».

M. Rapps a indiqué que les marchandises en cause se distinguent des sacs à dos « habituels », ces derniers étant de taille plus grande et peuvent contenir des livres, des chaussures, des boîtes à lunch, etc. De plus, un sac à dos comporte des bandoulières rembourrées. Au cours du contre-interrogatoire, M. Rapps a affirmé que les sacs à dos sont actuellement disponibles dans des tailles variées, et que certains sont de très petites tailles.

Mme Hilton a témoigné qu'on peut porter les marchandises en cause sur le dos, qu'elles servent de jouet ainsi qu'à transporter de petits objets, mais pas des livres. Mme Hilton a également témoigné qu'on achète les marchandises en cause parce qu'elles sont moins onéreuses que les jouets sous licence. Mme Hilton a précisé que les différents secteurs de marchandises de Toys "R" Us se chevauchent beaucoup. Elle a indiqué que les marchandises en cause sont vendues à la fois au rayon des sacs à dos et avec des jouets de peluche ainsi qu'avec d'autres articles sur des îlots promotionnels. Elle a ajouté qu'elle annonce les sacs à dos au moment de la rentrée des classes, car la clientèle cherche quelque chose pour porter des livres, et qu'elle annonce les marchandises en cause durant la période des Fêtes car la clientèle achète plus de jouets.

M. Luc Villeneuve, applicateur du Tarif et des valeurs de la Division de la cotisation des douanes, et M. Manmahipal Ahara, applicateur du Tarif, Division de l'administration des politiques commerciales et du règlement des différends, tous deux du ministère du Revenu national (désormais l'Agence des douanes et du revenu du Canada), ont témoigné au nom de l'intimé. M. Villeneuve a indiqué que les marchandises en cause sont des personnages de peluche comportant une pochette à fermeture à glissière dans laquelle on peut ranger divers objets. Il a indiqué que les marchandises ont des bandoulières réglables qui ne peuvent être enlevées.

M. Villeneuve a témoigné que les marchandises en cause sont des sacs à dos. Il a précisé que les étiquettes volantes fixées sur les marchandises les décrivent comme des « sacs à dos en peluche ». Il a indiqué avoir vu des personnes utiliser les marchandises en cause comme des sacs à dos et qu'un grand nombre d'objets peuvent y être rangés, suivant la taille de la pochette. Il a indiqué que son neveu a un sac à dos de peluche, et qu'il ne l'a jamais vu jouer avec ce sac. M. Villeneuve a également fait part des résultats d'une enquête qu'il a menée dans les magasins. Il a précisé qu'il n'a pas vu les marchandises en cause mises en vente au rayon des jouets dans aucun des magasins qu'il a visités, et qu'aucun des commis de vente, chefs de rayon ou gérants de magasin qu'il a interviewés n'étaient d'avis que les marchandises étaient des jouets. Durant le contre-interrogatoire, M. Villeneuve a reconnu qu'il n'a pas interviewé d'acheteur.

M. Ahara a témoigné que les marchandises en cause sont annoncées dans les circulaires de malletterie et d'articles de cuir, et que Sears a annoncé les marchandises dans sa publicité pour la rentrée des classes.

PLAIDOIRIE

Au cours de la plaidoirie, l'appelante a indiqué que les marchandises en cause sont des jouets. Ces marchandises s'inspirent de jouets sous licence actuels et se distinguent seulement en raison des bandoulières, qui font qu'on peut les porter sur les épaules, et qu'elles ont une pochette à fermeture à glissière où on peut placer un nombre limité d'objets. L'appelante a indiqué que la commercialisation des marchandises en cause est surtout fonction de la structure organisationnelle du détaillant ainsi que des canaux traditionnels de distribution de l'appelante, au lieu de la nature des marchandises. L'appelante a indiqué que les marchandises en cause comportent une valeur ludique, d'amusement et de divertissement et qu'elles ont une fonction utilitaire restreinte, c'est-à-dire porter des objets.

L'appelante a soutenu que les marchandises en cause devraient être classées dans la position no 95.03 et qu'elles ne sont pas convenablement décrites dans la position no 42.02. L'appelante a soutenu que le seul article dans la position no 42.02 qui pourrait de loin décrire les marchandises en cause est « sacs à dos ». L'appelante a accepté la définition de sac à dos fournie par l'intimé et a déposé d'autres définitions possibles auprès du Tribunal. L'appelante a soutenu qu'en vertu de ces définitions et pour être reconnues en tant que « sac à dos », les marchandises en cause doivent pouvoir contenir une quantité importante de matériel ou de fournitures. L'appelante a soutenu que le compartiment des marchandises en cause est trop petit pour qu'elles puissent être considérées comme des « sacs à dos ». D'ailleurs, l'appelante a soutenu que les marchandises en cause ne pouvaient pas être considérées comme des « contenants similaires » à un sac à dos, parce qu'elles ne ressemblent pas de près à des sacs à dos, tel qu'il a été décidé dans Crupi c. La Commission de l'Emploi et de l'Immigration du Canada 4 . Plus particulièrement, l'objet premier des marchandises en cause n'est pas de porter des objets, mais bien de divertir les gens. Comme solution de rechange, l'appelante a soutenu que si les marchandises sont des « contenants similaires », il ne s'agit pas d'une description plus précise que « autres jouets » de la position no 95.03.

L'appelante a soutenu que les marchandises en cause sont des jouets, malgré qu'elles aient une fonction utilitaire limitée. L'appelante a soutenu que les Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises 5 de la position no 95.03 indiquent clairement que les jouets peuvent remplir une fonction utilitaire limitée.

Dans l'éventualité où le Tribunal détermine que les marchandises en cause sont à première vue classables dans les deux positions, c'est-à-dire nos 42.02 et 95.03, l'appelante a soutenu que ni l'une ni l'autre des positions ne permettent de décrire plus précisément les marchandises et que celles-ci ne pouvaient être classées aux termes de la Règle 3 b) des Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé 6 , car elles ne sont ni des mélanges ni des ouvrages composés. L'appelante a soutenu que les marchandises en cause ne sont pas composées de deux matières ou constituées par l'assemblage d'articles différents lesquels confèrent aux marchandises une qualité ou une utilité distincte. Ainsi, elles ne sont pas des ouvrages composés. Comme solution de rechange, si le Tribunal conclut que les marchandises sont des ouvrages composés, l'appelante a soutenu qu'aucune matière ne confère aux marchandises leur « caractère essentiel ». Ainsi, aux termes de la Règle 3 c), l'appelante a soutenu que les marchandises en cause devraient être classées dans la position placée la dernière dans l'ordre de numérotation, c'est-à-dire la position no 95.03.

Durant la plaidoirie, l'intimé a indiqué que les marchandises en cause sont des sacs à dos. Durant son témoignage, M. Rapps a parlé des marchandises en cause en tant que sacs à dos, et l'appelante est une compagnie de malletterie. Les marchandises sont commercialisées et annoncées à titre de sacs à dos, et l'un des plus importants acheteurs de ces marchandises de l'appelante est Bentley, détaillant de malletterie.

L'intimé a soutenu que les marchandises en cause devraient être classées dans la position no 42.02 et qu'elles ne sont pas des jouets de la position no 95.03. L'intimé a donné la définition suivante de « rucksack » (sac à dos) tirée du Concise Oxford Dictionary : « sac porté sur le dos à l'aide de bandoulières sur les épaules » [traduction], ainsi que celle de « backpack » (sac à dos), qui donne comme synonyme « a rucksack » (sac à dos)7 . L'intimé a précisé que les définitions ne donnent aucune indication relativement à la taille ou à la capacité des pochettes des marchandises. L'intimé a soutenu que l'apparence, la conception, la commercialisation et la distribution des marchandises en cause laissent entendre que celles-ci sont des sacs à dos.

L'intimé a soutenu que les marchandises en cause n'étaient pas des jouets, puisqu'il n'était pas sécuritaire pour les enfants de dormir avec elles. L'intimé a également indiqué qu'aucun élément de preuve ne montrait clairement la valeur d'amusement des marchandises. De plus, l'intimé a indiqué que Disney et Mattel ne croient pas que les marchandises soient des jouets. Toutefois, si le Tribunal détermine que les marchandises en cause sont des jouets, l'intimé a soutenu que les marchandises sont décrites de façon plus précise à la position no 42.02 à titre de sacs à dos, puisque la description « jouets rembourrés » ne figure qu'au niveau de la sous-position. Ainsi, aux termes de la Règle 3 a) des Règles générales, les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 42.02.

Comme mesure de rechange, si le Tribunal détermine que les marchandises en cause ne sont pas décrites plus précisément à la position no 42.02, l'intimé a soutenu que les marchandises devraient être classées aux termes de la Règle 3 b) des Règles générales, c'est-à-dire suivant la matière ou l'article qui confère aux marchandises leur caractère essentiel. L'intimé a avancé que les différents articles qui constituent le sac à dos, c'est-à-dire les bandoulières, les fermetures à glissière et les boucles, confèrent aux marchandises leur caractère essentiel, celui d'un sac à dos. Ainsi, les marchandises sont correctement classées dans la position no 42.02.

Le 11 novembre 1999, des exposés écrits ont été déposés par les parties auprès du Tribunal, à propos d'une décision des douanes américaines relativement au classement d'un sac à dos de fantaisie transformable8 .

DÉCISION

La première question en litige que le Tribunal doit trancher est de savoir si les marchandises en cause sont à première vue classables dans deux positions. Aux termes de l'article 10 du Tarif des douanes, le classement des marchandises importées dans un numéro tarifaire est déterminé conformément aux Règles générales et aux Règles canadiennes 9 . Aux termes de l'article 11 du Tarif des douanes, en ce qui a trait à l'interprétation des positions et des sous-positions de l'annexe I, il doit être tenu compte du Recueil des avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises 10 et des Notes explicatives.

Les Règles générales sont structurées en cascade. Si le classement de marchandises ne peut être déterminé conformément à la Règle 1, il doit alors être tenu compte de la Règle 2, et ainsi de suite. La Règle 1 prévoit ce qui suit :

Le libellé des titres de Sections, de Chapitres ou de Sous-Chapitres est considéré comme n'ayant qu'une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d'après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et, lorsqu'elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d'après les Règles suivantes.

Le libellé des positions concurrentes est le suivant :

42.02 Malles, valises et mallettes, y compris les mallettes de toilette et les mallettes porte-documents, serviettes, cartables, étuis à lunettes, étuis pour jumelles, appareils photographiques, caméras, instruments de musique ou armes et contenants similaires; sacs de voyage, trousses de toilette, sacs à dos, sacs à main, sacs à provisions, portefeuilles, porte-monnaie, porte-cartes, étuis à cigarettes, blagues à tabac, trousses à outils, sacs pour articles de sport, boîtes pour flacons ou bijoux, boîtes à poudre, écrins pour orfèvrerie et contenants similaires, en cuir naturel ou reconstitué, en feuilles de matières plastiques, en matières textiles, en fibre vulcanisée ou en carton, ou recouverts, en totalité ou en majeure partie, de ces mêmes matières ou de papier.

95.03 Autres jouets; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animés ou non; puzzles de tout genre.

Les Notes du Chapitre 42 prévoient que le Chapitre ne vise pas les articles du Chapitre 95. Dans le même ordre d'idées, les Notes du Chapitre 95 prévoient que le Chapitre ne comprend pas les sacs pour articles de sport ou tout autre contenant de la position no 42.02. Ainsi, les positions concurrentes s'excluent mutuellement.

Le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont à première vue des sacs à dos de la position no 42.02. Comme l'a indiqué l'intimé et comme l'a reconnu l'appelante, la définition de « rucksack » (sac à dos) du Concise Oxford Dictionary  est : « sac porté sur le dos à l'aide de bandoulières sur les épaules » [traduction] et celle de « backpack » (sac à dos) donne comme synonyme « a rucksack » (sac à dos)11 . Les éléments de preuve montrent clairement que les marchandises en cause comprennent un sac ou une pochette ainsi que des bandoulières qui permettent de porter le sac sur le dos. Le Tribunal reconnaît que bon nombre des marchandises en cause ont une capacité très limitée. Toutefois, le Tribunal conclut que la définition de sac à dos ne contient aucune référence à une quantité, un volume ou un poids minimal d'articles que les marchandises peuvent porter. Ainsi, le Tribunal est d'avis que les marchandises en cause sont à première vue classables à titre de sacs à dos dans la position no 42.02.

Le Tribunal conclut également que les marchandises en cause sont à première vue d'autres jouets de la position no 95.03. Les Notes explicatives du Chapitre 95 prévoient que le Chapitre comprend « les jouets et les jeux pour l'amusement des enfants et la distraction des adultes ». Les Notes explicatives de la position no 95.03 prévoient que la position comprend « les jouets destinés essentiellement à l'amusement des personnes (enfants ou adultes) ». Les Notes explicatives de la position no 95.03 prévoient également que des marchandises demeurent des « jouets » même si leur utilisation est limitée. Un jouet se distingue d'une marchandise « réelle » habituellement par sa taille et sa capacité restreinte. Dans Zellers c. S-MRN 12 et dans Confiserie Regal c. S-MRN 13 , le Tribunal a précisé que, essentiellement, un jouet est quelque chose qui confère de l'agrément ou de l'amusement. Un jouet « est un objet destiné à divertir et avec lequel quelqu'un peut jouer »14 .

Le Tribunal a fait remarquer que les marchandises en cause s'inspirent de jouets sous licence existants et qu'elles se distinguent de ces produits en raison seulement de bandoulières, d'une pochette à fermeture à glissière et de moins d'ouate afin d'accommoder la pochette à fermeture à glissière. Le Tribunal conclut que les marchandises en cause ont été conçues pour « ressembler » aux jouets sous licence et ainsi pour divertir les enfants. Le Tribunal conclut qu'à la lumière des Notes explicatives qui précisent qu'un jouet peut avoir une utilisation limitée, la fonction utilitaire restreinte des marchandises en cause, c'est-à-dire porter de petits objets, n'empêche pas les marchandises en cause d'être classables à titre de jouets. Ainsi, le Tribunal est d'avis que les marchandises en cause sont à première vue classables à titre d'autres jouets de la position no 95.03.

Puisque les marchandises en cause sont à première vue classables dans deux positions, il faut appliquer la Règle 3 a) des Règles générales. Le libellé de la première phrase de la Règle 3 a) est le suivant : « La position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d'une portée plus générale ». Comme il a été précisé ci-dessus, le Tribunal est d'avis que les marchandises en cause sont à la fois des sacs à dos, comme elles peuvent servir à porter des objets, et des jouets, puisqu'elles sont divertissantes. Puisque la description dans chacune des positions visées ne précise que l'une de ces fonctions, le Tribunal est d'avis que les deux positions sont également descriptives aux fins de la Règle 3 a). Ainsi, le Tribunal doit tenir compte de la Règle 3 b).

La Règle 3 b) des Règles générales vise les produits mélangés, les ouvrages composés de matières différentes ou constituées par l'assemblage d'articles différents et les marchandises présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail. De toute évidence, les marchandises en cause ne sont pas des produits mélangés ni des marchandises présentées en assortiment conditionnées pour la vente au détail. Par conséquent, le Tribunal doit déterminer si les marchandises en cause sont des ouvrages composés. Le Tribunal est d'avis que les marchandises en cause ne sont pas constituées par l'assemblage d'articles différents. Bien que les marchandises en cause aient deux fonctions différentes puisqu'elles sont décrites comme des sacs à dos et des jouets, ces fonctions sont remplies par des éléments qui se recoupent. Ces marchandises n'ont pas d'articles distincts qui remplissent séparément chacune des fonctions. À titre d'exemple, dans Regal, les biberons et les bonbons étaient des articles distincts qui à la fois remplissaient la fonction de jouet (le biberon) et de bonbons (les bonbons). De même, dans Proctor-Silex Canada c. S-MRN 15 , le réchauffeur d'air ainsi que le moteur électrique et le ventilateur étaient des articles distincts qui, séparément, remplissaient une fonction électrothermique (le réchauffeur d'air) et une fonction électromécanique (le moteur électrique et le ventilateur). En ce qui concerne les marchandises en cause, la pochette, qui constitue un élément principal de la fonction du sac à dos, est également le corps du jouet rembourré, qui forme un élément clé de la fonction de jouet. Ainsi, le Tribunal est d'avis que les marchandises en cause ne sont pas constituées par l'assemblage d'articles différents aux fins du classement tarifaire.

Toutefois, les marchandises en cause sont composées de matières différentes : peluche, ouate, fermeture à glissière, bandoulières et boucles. Aux termes de la Règle 3 b) des Règles générales, les marchandises doivent donc être classées « d'après la matière [...] qui leur confère leur caractère essentiel lorsqu'il est possible d'opérer cette détermination ». Le Tribunal conclut que, quel que soit le caractère essentiel des marchandises, qu'il s'agisse d'un sac à dos ou d'un jouet, aucune matière seule ne confère aux marchandises ni l'un ou l'autre des caractères. Ainsi, la Règle 3 b) ne s'applique pas.

À la lumière de ce qui précède, le Tribunal, conformément à la Règle 3 c) des Règles générales, doit classer les marchandises en cause dans la position placée la dernière par ordre de numérotation parmi celles susceptibles d'être valablement prises en considération. Ainsi, le Tribunal conclut que les marchandises en cause devraient être classées dans la position no 95.03 à titre d'« autres jouets ».

En dernière analyse, le Tribunal est d'avis que les marchandises en cause devraient être classées dans le numéro tarifaire 9503.41.00 à titre d'autres jouets rembourrés représentant des animaux ou des créatures non humaines. Par conséquent, l'appel est admis.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [ci-après Loi].

2 . L.R.C. 1985 (3e supp.), c. 41.

3 . L'appelante a entamé l'audience en précisant qu'elle retirait l'appel relativement aux sacs à main de peluche et aux écharpes. Le présent appel se rapporte seulement aux sacs à dos de peluche.

4 . [1986] 3 C.F. 3 (CAF).

5 . Conseil de coopération douanière, 2éd., Bruxelles, 1996 [ci-après Notes explicatives].

6 . Supra note 2, annexe I [ci-après Règles générales].

7 . 1990, s.v. « rucksack » et « backpack ».

8 . (7 novembre 1995), décision no HQ 958308.

9 . Supra note 2, annexe I.

10 . Conseil de coopération douanière, 1re éd., Bruxelles, 1987.

11 . Supra note 7.

12 . (29 juillet 1998), AP-97-057 (TCCE).

13 . (25 juin 1999), AP-98-043, AP-98-044 et AP-98-051 (TCCE) [ci-après Regal].

14 . Zellers, supra note 12 à la p. 8.

15 . (11 janvier 1994), AP-92-225 (TCCE).


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Publication initiale : le 14 juin 2000