SHARP ÉLECTRONIQUE DU CANADA LTÉE

Décisions


SHARP ÉLECTRONIQUE DU CANADA LTÉE
c.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
c.
CANON CANADA INC., TOSHIBA DU CANADA LIMITÉE
ET RICOH CANADA
Appel no AP-98-092

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mercredi 7 juin 2000

Appel no AP-98-092

EU ÉGARD À un appel entendu le 7 octobre 1999 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national le 27 octobre 1998 concernant une demande de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

SHARP ÉLECTRONIQUE DU CANADA LTÉE Appelante

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

ET

CANON CANADA INC., TOSHIBA DU CANADA LIMITÉE
ET RICOH CANADA Intervenantes

DÉCISION DU TRIBUNAL

L'appel est admis.


Arthur B. Trudeau

Arthur B. Trudeau
Membre présidant

Peter F. Thalheimer

Peter F. Thalheimer
Membre

Richard Lafontaine

Richard Lafontaine
Membre


Michel P. Granger

Michel P. Granger
Secrétaire
 
 

RÉSUMÉ OFFICIEUX

Les marchandises en cause sont des cartouches de toner pour photocopieurs qui sont temporairement fixées aux photocopieurs pour transvaser le toner qu'elles contiennent dans la trémie de toner du photocopieur. Dans le procédé de photocopie, le toner sert à rendre visible sur papier ordinaire l'image qui est photocopiée. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les cartouches de toner sont correctement classées dans le numéro tarifaire 3707.90.00 à titre d'autres préparations chimiques pour usages photographiques, comme l'a déterminé l'intimé, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 9009.90.90 à titre d'autres parties et accessoires d'appareils de photocopie, comme l'a soutenu l'appelante.

DÉCISION : L'appel est admis. Les éléments de preuve indiquent que les cartouches sont classables dans le numéro tarifaire 9009.90.90 à titre d'accessoires d'appareils de photocopie. Elles sont fixées à des modèles spécifiques de photocopieurs et en améliorent l'efficacité. Les cartouches facilitent la distribution sans déversement du toner au photocopieur. Aux termes de la Règle 1 des Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé, le Tribunal conclut que la Note 2 du Chapitre 90, qui prévoit que les parties et accessoires, lorsqu'ils sont reconnaissables comme exclusivement ou principalement destinés à une machine particulière, sont classés dans la position afférente à ces machines, instruments ou appareils, commande le classement des marchandises en cause dans le numéro tarifaire 9009.90.90.

Lieu de l'audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l'audience :

Le 7 octobre 1999

Date de la décision :

Le 7 juin 2000

   

Membres du Tribunal :

Arthur B. Trudeau, membre présidant

 

Peter F. Thalheimer, membre

 

Richard Lafontaine, membre

   

Conseillers pour le Tribunal :

Gerry Stobo

 

John Dodsworth

   

Greffier :

Anne Turcotte

   

Ont comparu :

Michael Kaylor, pour l'appelante

 

Meghan Castle, pour l'intimé

 

Darrel H. Pearson et J. Peter Jarosz, pour les intervenantes

 
 

MOTIFS DE LA DÉCISION

INTRODUCTION

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes 1 à l'égard d'une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national (désormais le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada) aux termes de l'article 63 de la Loi. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les cartouches de toner importées par l'appelante sont correctement classées dans la position no 37.07 de l'annexe I du Tarif des douanes 2 à titre de préparations chimiques pour usages photographiques, comme l'a déterminé l'intimé, ou si elles doivent être classées dans la position no 90.09 à titre de parties et accessoires d'appareils de photocopie, comme l'a soutenu l'appelante.

Le 10 mai 1999, Canon Canada Inc., Toshiba du Canada Limitée et Ricoh Canada (Ricoh) ont demandé l'autorisation d'intervenir dans l'appel. Dans une lettre du 3 juin 1999, le Tribunal a avisé les parties que les sociétés susmentionnées avaient été autorisées à comparaître à titre d'intervenantes.

Les marchandises en cause sont des cartouches de toner Sharp, qui sont temporairement fixées à des photocopieurs pour permettre le transvasement du toner dans la trémie de toner du photocopieur. Le toner est utilisé dans le procédé de photocopie pour produire une image visible.

Les parties pertinentes des positions et sous-positions en question sont les suivantes :

37.07 Préparations chimiques pour usages photographiques, autres que les vernis, colles, adhésifs et préparations similaires; produits non mélangés, soit dosés en vue d'usages photographiques, soit conditionnés pour la vente au détail pour ces mêmes usages et prêts à l'emploi.

3707.90.00 -Autres

90.09 Appareils de photocopie à système optique ou par contact et appareils de thermocopie.

-Appareils de photocopie électrostatiques :

9009.90 -Parties et accessoires

9009.90.90 ---Autres

PREUVE

M. Graeme Donald, élaborateur de cours d'instruction à titre de membre du personnel du département de l'éducation technique chez Sharp Électronique du Canada Ltée où il travaille depuis 1991, a témoigné au nom de l'appelante.

Il a été expliqué que la cartouche de toner permet de transvaser le toner sans arrêter le photocopieur. La cartouche de toner est composée de deux sections relativement distinctes : la bouteille, qui contient le toner, et la partie supérieure de ladite bouteille, qui est dotée d'un mécanisme à glissière. Le mécanisme à glissière, qui permet l'utilisation de la cartouche avec certains modèles spécifiques de photocopieur, est fixé à l'orifice d'accès du toner du photocopieur.

Lorsqu'il faut remplir à nouveau la trémie de toner du photocopieur, la bouteille de toner est fixée à l'ouverture de la trémie de toner, sur la paroi extérieure du photocopieur. Cela se fait en glissant la plaque de la bouteille de toner dans le mécanisme à glissière correspondant du photocopieur. Une fois la bouteille de toner correctement fixée, le dispositif scellant qui recouvre l'ouverture de la bouteille est enlevé, ce qui permet au toner de passer dans la trémie de toner du photocopieur.

Une fois le toner tranvasé dans la trémie, la cartouche peut être enlevée. Le mécanisme à glissière de la cartouche de toner déclenche un commutateur électronique compris dans l'appareil, informant le photocopieur que la quantité correcte de toner a été ajoutée. M. Donald a précisé que cette manoeuvre nécessite environ 30 secondes. La cartouche de toner peut demeurer fixée pendant que le photocopieur fait des copies.

La formule du toner est préparée spécifiquement pour un type particulier de photocopieur. L'usage du mauvais type de toner dans un appareil de photocopie peut entraîner des copies de mauvaise qualité et endommager le photoconducteur. La cartouche de toner est conçue de façon à ne pouvoir être fixée qu'au type de machine auquel le toner qu'elle contient est destiné. Une telle conception de la cartouche empêche le client de verser le mauvais toner dans un appareil de photocopie.

M. Donald a expliqué la différence entre le toner et le révélateur. Le toner est fait de noir de carbone et de résines; c'est lui qui rend l'image reproduite visible sur le papier. Le révélateur, par ailleurs, est une perle en ferrite, dont l'action attire le toner sur le photoconducteur (le tambour). Par opposition à l'approvisionnement en toner au moyen d'une cartouche de toner, le révélateur est placé dans la machine uniquement au moment de l'installation et est réapprovisionné dans le cadre de l'entretien. M. Donald a témoigné qu'il n'existe pas de révélateur dans le toner contenu dans les marchandises en cause. Cependant, il existe un peu de toner dans le révélateur.

En réponse à des questions du Tribunal, M. Donald a déclaré que les détaillants achètent les cartouches de toner de l'appelante, en paquets de dix. Chaque récipient individuel est enveloppé d'une matière plastique. Les divers détaillants vendent aux clients le nombre de cartouches qu'ils veulent.

M. Donald a déclaré que les marchandises en cause pourraient être rechargées en enlevant le mécanisme de verrouillage noir, en remplissant à nouveau la bouteille de toner elle-même, et en insérant et bloquant en place un récent bouchon ou un bouchon neuf. Par ailleurs, M. Donald a témoigné que l'appelante ne recharge pas les cartouches. Il a aussi déclaré que les cartouches de toner ne sont pas produites ni remises à neuf par de tierces parties avant qu'un type particulier de photocopieur auquel la cartouche de toner est destinée ait été sur le marché depuis environ trois ans.

En réponse à une question du Tribunal, M. Donald a déclaré que le versement, à la main, du toner dans la trémie de toner du photocopieur ne peut se faire sans causer de problèmes de photocopie.

M. Kevin Derrick a témoigné au nom de l'une des intervenantes, Ricoh. M. Derrick, directeur, Distribution et Remise à neuf, chez Ricoh, travaille dans le domaine depuis 1972.

M. Derrick a expliqué que le procédé moderne de photocopie est connu sous le nom de xérographie et qu'il diffère de la photographie. En photographie, selon M. Derrick, l'image finale est produite sur une surface photosensible, c'est-à-dire du papier photographique. Cependant, en xérographie, l'image finale est produite sur du papier ordinaire, qui ne peut être considéré comme une surface photosensible.

M. Brian Finch, chef, Laboratoire des produits textiles et polymères, ministère du Revenu national (Revenu Canada) (désormais l'Agence des douanes et du revenu du Canada), a témoigné pour le compte de l'intimé. L'intimé a tenté d'obtenir que le Tribunal reconnaisse à M. Finch le titre de témoin expert dans le domaine de la photographie. Cependant, les intervenantes ont déposé un avis de requête auprès du Tribunal dans lequel elles ont fait opposition, invoquant le fait que M. Finch n'était pas un expert pour ce qui concerne les questions soulevées dans le présent appel. Dans une lettre datée du 15 juillet 1999, le Tribunal a avisé les parties qu'il avait décidé d'accueillir la requête des intervenantes et qu'il ne reconnaîtrait pas à M. Finch le titre de témoin expert dans le domaine de la photographie ni dans celui de la signification des termes et des procédés décrits dans le Tarif des douanes. M. Finch a cependant témoigné à titre de témoin non expert.

M. Finch a déclaré que l'analyse chimique du toner contenu dans les marchandises en cause, effectuée par Revenu Canada, a révélé que le toner est un mélange composé à 80 p. 100 de copolymère de styrène (une résine), à 8 p. 100 de noir de carbone et de petites quantités d'autres matières (oxyde de fer et silice).

En réponse à des questions du Tribunal, M. Finch a expliqué qu'une surface photosensible est une surface qui réagit à l'action de la lumière. Le tambour d'un photocopieur est une surface photosensible. M. Finch a déclaré que, tant en photographie ordinaire qu'en photocopie, une image latente est formée sur une surface photosensible et qu'un deuxième procédé de développement est nécessaire pour rendre cette image latente visible. Au cours de son interrogatoire, M. Finch a témoigné que le toner était un coagent dans le procédé qui rend l'image photographique latente visible.

POSITION DES PARTIES

L'appelante a soutenu que les cartouches de toner sont des parties et accessoires de photocopieurs et qu'elles doivent donc être classées dans la position no 90.09.

L'appelante a invoqué l'article 11 du Tarif des douanes qui prévoit que, pour l'interprétation des positions et sous-positions, il est tenu compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises 3 . À l'appui de son argument, l'appelante a invoqué deux Avis de classement publiés par l'Organisation mondiale des douanes. L'appelante a soutenu que les avis susmentionnés classent deux types de cartouches de toner, l'un comportant des parties mobiles et l'autre n'en comportant pas, à titre de parties et accessoires d'appareils de photocopie.

Selon l'appelante, les marchandises en cause sont, pour l'essentiel, identiques aux cartouches d'au moins un des deux types de cartouches classées à titre de parties et accessoires dans les avis susmentionnés. La seule différence se rapporte au fait que ces dernières sont fixées à l'intérieur du photocopieur, tandis que les marchandises en cause sont fixées à l'extérieur du photocopieur. Par conséquent, l'appelante a soutenu qu'il n'existe pas de motif qui justifierait de ne pas classer aussi les marchandises en cause à titre de parties et accessoires de photocopieurs.

L'appelante a soutenu que les cartouches de toner sont des parties parce qu'elles doivent servir avec des types particuliers de photocopieurs et peuvent demeurer fixées au photocopieur pendant qu'il fonctionne. L'appelante a rejeté la notion selon laquelle un produit doit être fixé en permanence à une machine particulière pour qu'il soit réputé être une partie, comme le démontrent les Avis de classement.

L'appelante a de plus soutenu que les cartouches de toner ne peuvent être classées dans la position no 37.07, puisqu'elles ne constituent pas des préparations chimiques pour usages photographiques. L'appelante a demandé au Tribunal de conclure que la photocopie n'est pas la photographie, puisque toute image visible formée dans le procédé de photocopie est formée sur du papier ordinaire, qui n'est pas une surface photosensible.

L'appelante a soutenu que les Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises 4 de la position no 32.15 corroborent l'opinion selon laquelle le toner contenu dans les cartouches de toner en cause ne peut pas être classé dans la position no 37.075 . L'appelante a invoqué le témoignage de M. Donald qui a déclaré que le toner qui se trouve dans les marchandises en cause est un mélange de noir de carbone et de résines thermoplastiques et ne contient ni révélateur ni véhicule. L'appelante a soutenu que le fait que, aux termes des Notes explicatives, les révélateurs, dont la composition est différente de celle du toner dans les marchandises en cause, sont classés dans la position no 37.07 a indiqué que les rédacteurs n'avaient pas l'intention que le toner compris dans les marchandises en cause soit classé dans ladite position.

L'appelante a aussi soutenu que, comme il est indiqué dans la Règle 5 b) des Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé 6 , les marchandises en cause ne peuvent être classées dans la position no 37.07, puisque la cartouche dans laquelle le toner se trouve est susceptible d'être utilisée d'une façon répétée7 . L'appelante a donc soutenu que, conformément à la Règle 1 des Règles générales, la position no 37.07 ne pouvait s'appliquer aux fins du classement des cartouches.

Les intervenantes ont soutenu que les cartouches de toner peuvent être réparties selon trois types. Les cartouches du type A sont insérées dans le photocopieur et y demeurent jusqu'à ce qu'elles soient vides. Elles comportent des parties mobiles qui interagissent avec le photocopieur. Les cartouches du type B sont insérées dans le photocopieur et y demeurent jusqu'à ce qu'elles soient vides. Elles ne comportent pas de parties mobiles dans la cartouche même. Les cartouches du type C sont celles qui s'ajustent dans une fente sur le dessus du photocopieur; le toner est versé dans la trémie de toner, puis la cartouche est retirée. Les cartouches du type C sont appelées cartouches amovibles et décrivent les marchandises en cause.

Les intervenantes ont déclaré que les cartouches de toner du type A et du type B sont des types mentionnés dans les Avis de classement comme étant classables dans la position no 90.09. Les intervenantes ont soutenu que les cartouches du type C devraient aussi être classées dans la même position, puisqu'elles ne sont pas tellement différentes. Les cartouches du type C, selon elles, ne constituent qu'une simple amélioration, et non une nouvelle conception, des deux autres produits.

Les intervenantes ont soutenu que les marchandises peuvent être classées à titre de parties de photocopieurs dans la position no 90.09. Elles ont soutenu que les marchandises en cause sont uniquement destinées à servir dans des photocopieurs et que les éléments de preuve indiquent qu'il serait impossible de faire des photocopies sans toner. En outre, les cartouches de toner sont uniquement destinées à servir dans une certaine marque de photocopieur et, à l'intérieur de ladite marque, uniquement destinées à servir dans certains modèles et séries de modèles. De ce fait, les intervenantes ont soutenu que les cartouches satisfont à plusieurs des critères qui s'appliquent au classement des parties, tels qu'ils sont énoncés dans S-MRNDA c. Dannyco Trading 8 et, par conséquent, doivent être classées dans la position no 90.09.

Les intervenantes ont aussi soutenu que l'affaire invoquée par l'intimé, Xerox Canada c. S-MRNDA 9 , est différente du présent appel parce que, dans Xerox, la position en question décrivait complètement les marchandises en cause. D'une manière analogue, en l'espèce, l'expression « parties de photocopieurs » décrit la totalité des marchandises, tandis que l'expression « préparations chimiques pour usages photographiques » ne décrit manifestement pas la totalité des marchandises, elle ne décrit que le toner et non la cartouche.

À titre de solution de rechange, les intervenantes ont aussi soutenu que les marchandises doivent être classées dans le numéro tarifaire 9009.90.90 à titre d'accessoires pour photocopieurs. Dans Dannyco, les marchandises n'étaient pas intégrées dans la fabrication d'un autre produit, et il a été conclu qu'elles étaient des accessoires. Les diffuseurs d'air dans Dannyco, selon elles, avaient un rôle très proche de celui des cartouches de toner. Ils étaient brièvement fixés au moment nécessaire, accomplissaient une fonction et étaient enlevés lorsqu'ils n'étaient pas nécessaires.

En réponse à des questions du Tribunal, les intervenantes ont souligné que la distinction entre une partie et un accessoire se rapporte au fait qu'un accessoire n'est ni intégré d'une façon permanente à la machine ni nécessaire au fonctionnement de cette dernière. Une partie, par ailleurs, s'entend d'un article destiné à servir dans une machine et qui est nécessaire au fonctionnement de cette dernière. Les intervenantes ont soutenu que les cartouches de toner sont à la fois des parties et des accessoires.

Les intervenantes ont aussi soutenu que les marchandises en cause ne peuvent être classées à titre de « préparations chimiques pour usages photographiques » dans la position no 37.07. Elles ont soutenu que le procédé photographique comprend la production d'une image latente sur une surface photosensible et que l'image visible doit être formée sur cette même surface photosensible. Les intervenantes ont aussi soutenu que les cartouches de toner ne peuvent être classées dans la position no 37.07, puisque ladite position ne décrit pas la totalité des cartouches de toner. Ainsi qu'il est indiqué dans la Règle 5 b) des Règles générales, puisque les cartouches peuvent être rechargées et ne sont pas des emballages, elles ne peuvent être classées avec le toner.

Finalement, les intervenantes ont soutenu que, si le Tribunal devait conclure que les marchandises en cause étaient classables dans les positions nos 37.07 et 90.09, la Note 2b) du Chapitre 90 du Tarif des douanes constitue un régime complet pour le classement de toutes les parties et accessoires des machines du Chapitre 90. La Note 2 du Chapitre 90 explique le classement de toutes ces marchandises, lorsqu'il a été conclu qu'elles sont des parties ou accessoires.

L'intimé a soutenu que la seule définition pertinente du mot « photographique » aux fins du classement se trouve à la Note 2 des Notes explicatives du Chapitre 3710 . Les éléments de preuve, selon l'intimé, établissent que la photocopie répond à cette définition, puisqu'une image visible est formée par l'action de la lumière sur une surface photosensible - le tambour du photocopieur.

L'intimé a soutenu que la cartouche est simplement un contenant et un système de distribution du toner et, à cet égard, il a renvoyé à Gillette Canada Inc. c. S-MRN 11 , une cause à l'issue de laquelle les marchandises en cause, composées de film correcteur et de distributeurs, ont été classées comme un ensemble à titre de film correcteur. Dans l'affaire susmentionnée, les distributeurs ont été considérés comme étant des applicateurs et, par conséquent, comme étant classables avec le film correcteur. Par analogie, en l'espèce, la cartouche est simplement un applicateur du toner pour usages en photocopie.

De plus, l'intimé a soutenu que les cartouches sont classées avec le toner conformément à la Règle 5 b) des Règles générales, puisque les éléments de preuve n'ont pas établi que les cartouches sont réutilisables et que, dans des circonstances normales, on les jette tout simplement après usage.

L'intimé a indiqué, dans son mémoire, qu'il ne contestait pas le classement des deux cartouches de toner décrites dans les Avis de classement à titre de parties et accessoires dans la position no 90.09. Cependant, il a soutenu que les cartouches de toner en cause, les cartouches du type C, diffèrent des cartouches mentionnées dans les Avis de classement, puisque lesdits Avis ont traité de cartouches dotées de parties mobiles, tandis que les cartouches de toner en cause ne comprennent pas de parties mobiles. Les cartouches mentionnées dans les Avis de classement servent à la même fonction que la trémie dans les photocopieurs.

L'intimé a soutenu que, dans Xerox, la Commission du tarif a conclu que le ruban pour machine à écrire présenté en cartouche est manifestement une fourniture et ne devient pas une partie simplement parce que son contenant sert de système de distribution. Dans Xerox, la cartouche de ruban pour machine à écrire entrait effectivement dans la composition de la machine à écrire, par voie d'incorporation, pour dispenser sur demande l'encre contenu sur le ruban. L'intimé a soutenu que, en l'espèce, le toner pour photocopieur, un produit de consommation, ne devient pas une partie simplement parce que son contenant accomplit la fonction d'un système de distribution.

De plus, l'intimé a soutenu que les cartouches de toner ne sont ni des parties ni des accessoires, puisqu'elles ne sont pas essentielles au procédé de photocopie. Les photocopieurs fonctionnent que la cartouche soit, ou non, fixée à la machine. La cartouche est fixée à la machine durant quelques secondes afin de verser le toner dans la machine et de déclencher un commutateur compris dans la machine lorsque le contenant est vide. L'intimé a soutenu que la cartouche ne fait rien qui améliore l'efficacité du photocopieur, pas plus qu'il peut être dit que le bec distributeur d'une pompe à essence améliore l'efficacité d'une automobile.

Dans son mémoire, l'intimé a avancé l'argument que la Note 2 de la Section VI de l'annexe I du Tarif des douanes était pertinente, si le Tribunal devait déterminer que les marchandises en cause sont classables dans les positions nos 37.07 et 90.0912 . Cependant, à l'audience, l'intimé a retiré son argument, après avoir indiqué que la Note 2 ne s'applique pas dans les circonstances de l'espèce.

ANALYSE

L'article 10 du Tarif des douanes prévoit que le classement de marchandises importées dans un numéro tarifaire doit être déterminé conformément aux Règles générales et aux Règles canadiennes 13 . L'article 11 du Tarif des douanes prévoit que, pour l'interprétation des positions et des sous-positions de l'annexe I, il doit être tenu compte des Avis de classement et des Notes explicatives.

Les Règles générales sont structurées en cascade. Si le classement d'un article ne peut être déterminé conformément à la Règle 1, il doit alors être tenu compte de la Règle 2, etc. La Règle 1 prévoit ce qui suit :

Le libellé des titres de Sections, de Chapitres ou de Sous-Chapitres est considéré comme n'ayant qu'une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d'après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et, lorsqu'elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d'après les Règles suivantes.

Le Tribunal doit déterminer si les marchandises en cause sont correctement classées à titre de « préparations chimiques pour usages photographiques » dans le numéro tarifaire 3707.90.00 ou si elles doivent être classées à titre de parties et accessoires pour appareils de photocopie dans le numéro tarifaire 9009.90.90.

Le Tribunal admet que le toner contenu dans les marchandises en cause est effectivement une préparation chimique. Le toner est composé d'un mélange de produits chimiques qui a été préparé d'une manière à ce qu'il soit conforme aux exigences d'appareils de photocopie spécifiques. Cependant, beaucoup d'éléments de preuve ont été introduits sur la question de savoir si la photocopie pouvait être assimilée à la photographie aux fins du Chapitre 37 du Tarif des douanes. Si la photocopie est réputée être de la photographie aux fins du Chapitre 37, alors le toner, à titre de préparation chimique pour usages en photocopie, peut être considéré comme étant une préparation chimique pour usages photographiques14 .

Les éléments de preuve montrent que, qu'il soit appelé photocopie ou xérographie, le procédé actuel de reproduction de documents comprend la projection de lumière sur le document à reproduire. La lumière est soit absorbée dans ces parties du document qui contiennent une image soit réfléchie sur un tambour photosensible. La lumière réfléchie neutralise de façon sélective la charge électrique sur le tambour, le tambour ne conservant sa charge que sur les parties qui correspondent à l'image à reproduire.

Le toner est ensuite transporté au tambour par l'action du révélateur et est attiré par les parties chargées du tambour. Cependant, ce n'est pas avant qu'une autre étape s'accomplisse - le transfert du toner du tambour au papier ordinaire, suivi de la fixation de l'image sur le papier sous l'action de la chaleur - que le produit final, c.-à-d. une photocopie, est formé et que l'image devient visible pour l'utilisateur.

Le Tribunal, néanmoins, est d'avis que le procédé de photocopie, utilisé dans les photocopieurs auxquels les marchandises en cause sont destinées, répond à la définition du terme « photographique » aux fins du Chapitre 37. Manifestement, la définition exprime la notion que l'image visible doit être formée à la suite de l'action de la lumière sur une surface photosensible. Cependant, selon l'appelante et les intervenantes, la définition signifie autre chose - à savoir, que l'image visible finale doit être formée sur la même surface photosensible que celle sur laquelle s'exerce l'action de la lumière. Le Tribunal n'est pas d'accord sur une telle définition restrictive.

À cet égard, le Tribunal ne déduit pas ce que l'appelante lui a demandé de déduire des Notes explicatives de la position no 32.15. Le fait que les Notes explicatives précisent qu'un type de préparation chimique utilisé dans la reproduction photostatique devrait être classé dans la sous-position no 3707.90 ne signifie pas nécessairement que toutes les autres préparations chimiques utilisées pour la reproduction de documents ne sont pas classées dans ladite sous-position. D'une manière plus importante encore, les Notes explicatives de la position no 32.15 expriment clairement que la position no 37.07 s'applique aux machines à photocopier.

Des preuves substantielles ont été présentées au Tribunal concernant la question de savoir si la cartouche elle-même était « susceptible d'être utilisée valablement d'une façon répétée ». Conformément à la Règle 5 b) des Règles générales, la cartouche, en tant qu'emballage comprenant le toner, est classée avec le toner. Cependant, cette règle n'est pas contraignante lorsque l'emballage est « susceptible d'être utilisé valablement d'une façon répétée ».

À cet égard, le Tribunal est d'avis que la cartouche de toner elle-même n'est pas « susceptible d'être utilisée valablement d'une façon répétée ». Bien que certains éléments de preuve ont laissé croire qu'il était possible de remettre à neuf ou de recharger les cartouches de toner, il ne semblerait pas que cela puisse se faire par un procédé simple ni que cela soit habituellement fait. D'une façon générale, il ne se fait pas de remise à neuf ni de recharge avant que les photocopieurs auxquels les cartouches sont destinées aient été sur le marché depuis deux ou trois ans. Les tierces parties qui rechargent d'autres cartouches de toner Sharp ne sont pas autorisées à le faire par l'appelante. M. Donald, dans son témoignage au nom de l'appelante, a déclaré qu'il ne connaissait personne qui remette à neuf ou qui recharge les cartouches Sharp en cause. L'appelante elle-même ne procède ni à la remise à neuf ni à la recharge des cartouches.

Bien que la position no 37.07 paraisse viser les marchandises en cause, le Tribunal est convaincu que les marchandises doivent être classées dans le numéro tarifaire 9009.90.90 à titre de parties et accessoires pour appareils de photocopie.

Il ne fait aucun doute que les marchandises en cause sont utilisées de concert avec des appareils de photocopie. À cet égard, les Avis de classement invoqués par l'appelante convainquent le Tribunal. Le Tribunal fait observer que l'intimé ne conteste pas le classement des cartouches de toner du type A et du type B décrites dans les Avis de classement à titre de parties et accessoires. Comme les marchandises en cause, les cartouches de toner dénommées dans les Avis de classement sont conçues pour faciliter le transvasement du toner au photocopieur. Bien que les cartouches du type A visées dans les Avis de classement soient dotées de parties mobiles, les cartouches du type B diffèrent des marchandises en cause surtout quant au délai durant lequel elles demeurent fixées au photocopieur. Le Tribunal est d'avis qu'il ne s'agit pas là d'un motif suffisant pour établir une distinction entre les cartouches de toner du type C, les marchandises en cause, et les cartouches de toner du type B aux fins du classement conformément à l'annexe I du Tarif des douanes.

Le Tribunal est d'avis que les cartouches de toner peuvent être considérées comme étant des accessoires pour appareils de photocopie et, à ce titre, qu'elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 9009.90.90. Le Tribunal fait observer que, dans Dannyco, dans son raisonnement qui l'a amenée à conclure que les diffuseurs d'air étaient des accessoires, la Cour fédérale du Canada a déclaré :

Ils demeuraient plutôt une chose additionnelle ou supplémentaire, dont on pouvait se passer, dans l'atteinte de l'objectif ultime des sèche-cheveux, soit le séchage des cheveux. En général, ils demeuraient un accessoire ou une pièce de raccord et ils étaient fabriqués comme tel. Encore une fois, de façon générale, ils n'étaient pas intégrés aux sèche-cheveux mêmes. Ainsi, ils demeuraient des accessoires15 .

Les marchandises en cause améliorent la manière dont le toner est distribué au photocopieur. Comme le montrent les éléments de preuve, l'ancienne méthode manuelle de distribution du toner à la trémie de toner nécessitait souvent d'interrompre le fonctionnement du photocopieur pendant que le toner était transvasé dans la trémie de toner, ce qui se traduisait par des retards. De plus, le procédé était souvent accompagné d'un déversement de toner. Parfois, les utilisateurs versaient par erreur le mauvais type de toner dans les photocopieurs, ce qui les endommageait et réduisait la qualité de la copie. Les cartouches de toner éliminent la possibilité de telles erreurs et améliorent donc l'efficacité du photocopieur. Les cartouches de toner sont fixées aux photocopieurs, à l'encontre des becs distributeurs des pompes à essence qui sont, eux, fixés aux pompes à essence et non aux véhicules auxquels l'essence est distribuée.

En ce qui concerne l'argument de l'intimé selon lequel les marchandises en cause sont jetables et ne peuvent donc être considérées ni comme des parties ni comme des accessoires, le Tribunal est d'avis que le fait que des parties et accessoires soient jetables ne signifie pas nécessairement qu'elles ne sont ni des parties ni des accessoires. Le Tribunal est d'avis que les cartouches de toner sont des accessoires parce qu'elles sont conçues pour servir dans des modèles spécifiques de photocopieurs, leur seul usage se rapporte aux photocopieurs, elles jouent un rôle efficace dans la prévention du déversement de toner et elles augmentent l'efficacité de la machine.

Par conséquent, le Tribunal conclut que les cartouches de toner doivent être classées dans le numéro tarifaire 9009.90.90 à titre d'accessoires d'appareils de photocopie. La question de savoir si le libellé de la position no 37.07 englobe les marchandises en cause devient inutile puisque la Note 2b) du Chapitre 90 prescrit le classement de ces marchandises dans la position no 90.09. Le Tribunal est d'avis que la Note 2 de la Section VI, aux termes de laquelle certaines marchandises qui sont classables dans la position no 37.07 doivent être classées dans cette position et non dans une autre position de la Nomenclature, ne s'applique pas en l'espèce. La Note 2 du Chapitre 90 prévoit, notamment, ce qui suit :

2. Sous réserve des dispositions de la Note 1 ci-dessus, les parties et accessoires pour machines, appareils, instruments ou articles du présent Chapitre sont classés conformément aux règles ci-après :

b) Lorsqu'ils sont reconnaissables comme exclusivement ou principalement destinés à une machine, un instrument ou un appareil particuliers ou à plusieurs machines, instruments ou appareils d'une même position (même des nos 90.10, 90.13 et 90.31), les parties et accessoires, autres que ceux visés au paragraphe précédent, sont classés dans la position afférente à cette ou ces machines, instruments ou appareils.

[Soulignement ajouté]

Le Tribunal a déjà conclu que les cartouches de toner sont des accessoires de photocopieurs, ces derniers étant classés dans le Chapitre 90. De plus, les éléments de preuve montrent clairement que les cartouches de toner sont reconnaissables comme exclusivement destinées à des modèles particuliers de photocopieurs que produit l'appelante. Par conséquent, le Tribunal est d'avis que la Note 2b) du Chapitre 90 s'applique, et commande donc le classement des cartouches de toner dans le numéro tarifaire 9009.90.9016 .

Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause doivent être classées à titre d'accessoires d'appareils de photocopie dans le numéro tarifaire 9009.90.90.

Pour les motifs qui précèdent, l'appel est admis.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [ci-après Loi].

2 . L.R.C. 1985 (3e supp.), c. 41.

3 . Conseil de coopération douanière, 1re éd., Bruxelles, 1987 [ci-après Avis de classement].

4 . Conseil de coopération douanière, 1re éd., Bruxelles, 1986 [ci-après Notes explicatives].

5 . Les Notes explicatives de la position no 32.15 précisent, notamment, ce qui suit :

Cette position ne comprend pas :
a) Les révélateurs constitués par un vireur (mélange de noir de carbone et de résines thermoplastiques) mélangé à un véhicule (grains de sable enrobés d'éthylcellulose) et utilisés dans les machines à photocopier (no 37.07).

6 . Supra note 2, annexe I [ci-après Règles générales].

7 . La Règle 5 b) des Règles générales prévoit ce qui suit :

Sous réserve des dispositions de la Règle 5 a) ci-dessus, les emballages contenant des marchandises sont classés avec ces dernières lorsqu'ils sont du type normalement utilisé pour ce genre de marchandises. Toutefois, cette disposition n'est pas obligatoire lorsque les emballages sont susceptibles d'être utilisés valablement d'une façon répétée.

8 . [1997] A.C.F. no 515, C.F. (1re inst.), en ligne : QL (ACF) [ci-après Dannyco].

9 . (15 juillet 1988), 17 C.E.R. 47 [ci-après Xerox].

10 . La Note 2 prévoit ce qui suit :

Dans le présent Chapitre, le terme photographique qualifie le procédé grâce auquel des images visibles sont formées, directement ou indirectement, par l'action de la lumière ou d'autres formes de rayonnement sur des surfaces photosensibles.

11 . (20 novembre 1998) AP-97-116 (TCCE).

12 . La Note 2 prévoit ce qui suit :

Sous réserve des dispositions de la Note 1 ci-dessus, tout produit qui, en raison, soit de sa présentation sous forme de doses, soit de son conditionnement pour la vente au détail, relève de l'un des nos 30.04, 30.05, 30.06, 32.12, 33.03, 33.04, 33.05, 33.06, 33.07, 35.06, 37.07 ou 38.08, devra être classé sous cette position et non dans une autre position de la Nomenclature.

13 . Supra note 2, annexe I.

14 . Supra note 9.

15 . Voir note 8 au paragr. 13.

16 . Le Tribunal fait observer que la décision de la Cour d'appel des États-Unis, Circuit fédéral, a appliqué un raisonnement semblable dans la cause Mita Copystar America c. United States, décidée le 6 novembre 1998.


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Publication initiale : le 16 juin 2000