CHARLES LEUNG

Décisions


CHARLES LEUNG
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-99-080

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mercredi 27 février 2002

Appel no AP-99-080

EU ÉGARD À un appel entendu le 9 novembre 2001 aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le sous-ministre du Revenu national le 14 juillet 1999 concernant une demande de réexamen aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

CHARLES LEUNG Appelant

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

DÉCISION DU TRIBUNAL

L'appel est rejeté.



Patricia M. Close

Patricia M. Close
Membre présidant


Michel P. Granger

Michel P. Granger
Secrétaire
 
 

RÉSUMÉ OFFICIEUX

Il s'agit d'un appel entendu par voie de vidéoconférence à Hull (Québec) et à Vancouver (Colombie-Britannique), aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes, à l'égard d'une décision rendue le 14 juillet 1999 par le sous-ministre du Revenu national, aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les armes Airsoft, que l'intimé a retenues le 5 mai 1999, sont des répliques et, par conséquent, des dispositifs prohibés correctement classés dans le numéro tarifaire 9898.00.00.

L'intimé a soutenu que l'appelant a omis de déposer son appel dans les 90 jours suivant la décision de l'intimé, contrairement aux prescriptions de l'article 67 de la Loi sur les douanes. Par conséquent, l'intimé soutient, d'abord, que l'appel doit être rejeté.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Selon le Tribunal, les marchandises en cause sont des répliques et, de ce fait, sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9898.00.00. Il s'agit cependant là d'un point qu'il est inutile de discuter, puisque le Tribunal est d'avis que l'appel n'a pas été déposé dans le délai prescrit. Aux termes de l'article 149 de la Loi sur les douanes, la date de l'avis de décision est réputée celle qui paraît sur l'avis, à savoir le 14 juillet 1999. Conformément au paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes, il pouvait être interjeté appel dans les 90 jours qui suivaient, à savoir au plus tard le 12 octobre 1999. Il n'a pas été interjeté appel devant le Tribunal avant le 20 octobre 1999. Cependant, le Tribunal a décidé d'entendre la preuve et la plaidoirie tant sur la question de sa compétence que sur la question du classement, étant donné qu'un document d'information du Tribunal concernant la date pertinente du début de la période de 90 jours n'était pas compatible avec la Loi. L'appelant avait invoqué ledit document d'information, qui a subséquemment été modifié. Ni le Tribunal ni l'intimé, au cours des deux années qui ont suivi, n'ont avisé l'appelant au sujet de l'écart susmentionné concernant le délai.

Lieux de l'audience

 

par voie de vidéoconférence :

Hull (Québec) et Vancouver (Colombie-Britannique)

Date de l'audience :

Le 9 novembre 2001

Date de la décision :

Le 27 février 2002

   

Membre du Tribunal :

Patricia M. Close, membre présidant

   

Conseiller pour le Tribunal :

Dominique Laporte

   

Greffiers :

Anne Turcotte

 

Margaret Fisher

   

Ont comparu :

Charles Leung, pour l'appelant

 

Michael Roach, pour l'intimé

 
 

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il s'agit d'un appel entendu par voie de vidéoconférence à Hull (Québec) et à Vancouver (Colombie-Britannique), aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes 1 , à l'égard d'une décision rendue le 14 juillet 1999 par le sous-ministre du Revenu national, aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les armes Airsoft, que l'intimé a retenues le 5 mai 1999, sont des répliques et, par conséquent, des dispositifs prohibés correctement classés dans le numéro tarifaire 9898.00.00 de l'annexe du Tarif des douanes 2 .

Le numéro tarifaire 9898.00.00 se lit, notamment, ainsi :

9898.00.00 Armes à feu, armes prohibées, armes à autorisation restreinte, dispositifs prohibés, munitions prohibées et éléments ou pièces conçus exclusivement pour être utilisés dans la fabrication ou l'assemblage d'armes automatiques, désignés comme « marchandises prohibées » au présent numéro tarifaire, [...]

Pour l'application du présent numéro tarifaire,
b) « arme à autorisation restreinte », « arme à feu à autorisation restreinte », « arme à feu prohibée », « arme automatique », « arme prohibée », « dispositif prohibé », « munitions prohibées » et « permis » s'entendent au sens du paragraphe 84(1) du Code criminel.

Le paragraphe 84(1) du Code criminel 3 prévoit que l'expression « dispositif prohibé » comprend, notamment, une réplique.

Le paragraphe 84(1) du Code criminel définit « réplique » ainsi :

« réplique » Tout objet, qui n'est pas une arme à feu, conçu de façon à en avoir l'apparence exacte-ou à la reproduire le plus fidèlement possible-ou auquel on a voulu donner cette apparence. La présente définition exclut tout objet conçu de façon à avoir l'apparence exacte d'une arme à feu historique-ou à la reproduire le plus fidèlement possible-ou auquel on a voulu donner cette apparence.

PREUVE

L'intimé a déposé les marchandises en cause à titre de pièces. Les marchandises comprennent : a) une carabine à gaz Airsoft MGC modèle M16A2 de calibre 6 mm; b) un fusil à gaz Airsoft Mossberg modèle M500 de MARUSHIN de calibre 6 mm; c) une carabine à gaz Airsoft Colt AR-15 modèle M16A1 de JAC de calibre 6 mm; d) une carabine à gaz Airsoft Galil de FALCON TOY LTD. de calibre 6 mm; e) une mitraillette à gaz Airsoft Uzi de JAC de calibre 6mm. L'appelant a confirmé que les pièces étaient les marchandises qu'il avait tenté d'importer.

L'appelant a expliqué qu'il avait tenté, en mars 1999, d'importer au Canada les marchandises en cause de Hong Kong, mais que celles-ci avaient été retenues à leur arrivée aux Douanes canadiennes le 5 mai 1999. Il a témoigné avoir eu les marchandises en cause en sa possession pendant un long moment. Certaines lui avaient été données par des amis et sont pour lui des souvenirs. Il a en outre expliqué que, étant donné que des répliques similaires sont vendues dans des boutiques ordinaires en Colombie-Britannique sans certificat ni permis, il croyait pouvoir importer les marchandises en cause. Il a aussi dit que, avant d'expédier les marchandises, il s'était informé des lois canadiennes et avait compris, à ce moment-là, que leur importation était autorisée. Il a dit ne pas avoir été au fait que les lois canadiennes avaient été modifiées le 1er décembre 1998.

L'appelant a dit au Tribunal que l'intimé a rendu sa décision le 14 juillet 1999. Mme Phyllis Loke, qui détenait une procuration, a reçu l'avis de décision le 21 juillet 1999. L'avis stipulait que les marchandises en cause sont visées par le numéro tarifaire 9898.00.00 et, de ce fait, qu'elles étaient des armes prohibées au Canada. L'appelant a déclaré que, le 19 octobre 1999, un appel de cette décision a été envoyé par télécopieur au Tribunal.

En réponse à une question de l'intimé à savoir s'il convenait que les marchandises en cause étaient des répliques conçues de façon à avoir l'apparence exacte de véritables armes à feu et qu'une personne n'ayant pas de connaissances spécialisées des armes à feu pourrait les considérer par erreur comme de véritables armes, l'appelant a répondu par l'affirmative.

M. Deryk V.R. Penk, Direction du service des laboratoires judiciaires de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), a témoigné au nom de l'intimé. Le Tribunal a reconnu à M. Penk le titre d'expert en identification d'armes à feu, y compris l'identification et le classement de répliques. Il a expliqué qu'il avait procédé à des examens et à des essais des marchandises en cause. Il a témoigné que, bien que les marchandises en cause soient dotées d'un canon et tirent des projectiles, la vitesse desdits projectiles n'atteignait pas la vitesse minimum de 129 mètres par seconde nécessaire pour infliger une lésion corporelle grave à une personne, lésion qu'il a définie comme la mise dans l'incapacité d'une personne, soit provisoire, soit permanente. Il a en outre témoigné que, à la lumière d'une comparaison entre les marchandises en cause et la collection normale d'armes à feu véritables de la GRC, les marchandises ont l'apparence presque exacte des armes à feu véritables. Il a déclaré que, à son avis, les marchandises en cause étaient des répliques, conçues de façon à avoir l'apparence exacte d'armes à feu véritables, toutes fabriquées après 1898 et, par conséquent, non pas des armes historiques. Il a en outre témoigné qu'il est courant que des répliques, telles les marchandises en cause, soient fabriquées par des sociétés de jouets au Japon.

PLAIDOIRIE

Au sujet de la question préliminaire de la compétence du Tribunal concernant le moment du dépôt de l'appel, l'appelant a soutenu que le Tribunal a compétence pour entendre l'affaire, étant donné que l'appel a été interjeté devant le Tribunal le 19 octobre 1999, soit à l'intérieur du délai de 90 jours prescrit dans un document d'information du Tribunal intitulé Information sur les appels de décisions concernant les douanes, l'accise et la LMSI. Il a indiqué que, conformément au document d'information, l'appel doit être déposé dans les 90 jours suivant la réception d'une décision.

Selon l'appelant, les marchandises en cause sont des répliques qu'il n'est pas nécessaire d'enregistrer en vertu de la Loi sur les armes à feu 4 . L'appelant a prétendu que des particuliers n'ont pas besoin de permis pour en posséder et qu'une disposition spéciale concernant leur exportation figure dans la Loi sur les armes à feu. Il a renvoyé à l'alinéa 84(3)d) du Code criminel 5 , qui prévoit, notamment, que « toute autre arme pourvue d'un canon dont il est démontré qu'elle n'est ni conçue ni adaptée pour tirer du plomb, des balles ou tout autre projectile à une vitesse initiale de plus de 152,4 m par seconde » est réputée ne pas être une arme à feu. L'appelant a aussi invoqué des passages du Manuel des policiers, patrouilleurs et enquêteurs, Classes d'armes à feu, de dispositifs et de munitions, en vue de démontrer qu'il ne faut pas de permis ni de certificat d'enregistrement pour les armes qui ne sont pas conçues ni adaptées pour tirer des projectiles à une vitesse initiale de plus de 152,4 mètres par seconde.

L'appelant a invoqué le Manuel de référence des préposés aux armes à feu, Classification des armes, qui traite plus particulièrement des répliques et prévoit qu'il n'est pas nécessaire qu'elles soient enregistrées et que des particuliers n'ont pas besoin de permis pour en posséder. Il a soutenu que des répliques similaires étaient vendues ouvertement dans divers magasins à Vancouver. Enfin, l'appelant a soutenu que, si l'importation des marchandises en cause est prohibée, l'importateur peut abandonner les marchandises en les exportant à un pays qui en permet l'importation, aux termes du paragraphe 102(1) de la Loi. L'appelant a demandé que les marchandises en cause soient exportées à Hong Kong.

Traitant d'abord de la question de compétence, l'intimé a soutenu que l'appel n'a pas été déposé dans le délai prescrit de 90 jours. Il a soutenu que la décision a été rendue le 14 juillet 1999, aux soins de Mme Loke, à qui le pouvoir de traiter l'affaire au nom de l'appelant avait été délégué. L'intimé a renvoyé à l'article 149 de la Loi, qui prévoit que, en cas d'envoi par la poste, la date des avis est réputée celle de leur mise à la poste, cette dernière étant, sauf preuve contraire, celle qu'ils semblent indiquer comme telle. Étant donné que l'avis de décision est daté du 14 juillet 1999, l'appel aurait dû être déposé, au plus tard, le 14 octobre 1999. Selon l'intimé, étant donné que le timbre-dateur de l'avis d'appel indique le 20 octobre 1999, l'appel n'a donc pas été déposé dans le délai de 90 jours. L'intimé a exhorté le Tribunal à appliquer le raisonnement adopté dans l'appel no AP-99-0426 , où un appel qui avait été déposé le 91e jour a été rejeté parce que le Tribunal n'avait pas compétence. L'intimé a de plus soutenu que le Tribunal n'est pas un tribunal d'équité, mais uniquement un organisme créé par une loi, dont le pouvoir d'enquêter est limité au pouvoir que lui confère la loi.

Au sujet du bien-fondé de l'affaire, l'intimé a soutenu que les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9898.00.00 à titre de dispositifs prohibés. L'intimé a aussi soutenu que ce numéro tarifaire reprend la définition de l'expression « dispositif prohibé » qui se trouve au paragraphe 84(1) du Code criminel, qui stipule expressément que ladite expression englobe les répliques. L'intimé a prétendu ce qui suit : les marchandises en cause satisfont aux trois critères de la définition de « réplique » au sens du Code criminel, étant donné que les éléments de preuve montrent clairement que les marchandises en cause sont conçues de façon à avoir l'apparence exacte d'une arme à feu, ou à la reproduire le plus fidèlement possible; elles ne sont pas des armes à feu, étant donné que le projectile qu'elles tirent n'est pas capable d'infliger des lésions corporelles graves ou la mort à une personne; enfin, elles ne sont pas conçues de façon à avoir l'apparence d'une arme à feu historique. Conformément au paragraphe 136(1) du Tarif des douanes, l'importation des marchandises du numéro tarifaire 9898.00.00 est interdite. L'intimé a soutenu que, si l'appel est rejeté, les marchandises en cause doivent être confisquées par la Couronne et, invoquant la décision du Tribunal dans l'appel no AP-96-0577 , il a soutenu que le Tribunal n'avait pas compétence pour statuer sur la disposition des marchandises en cause.

DÉCISION

Le Tribunal traitera d'abord de la question de sa compétence. Selon l'intimé, l'appel doit être rejeté, puisqu'il n'a pas été déposé dans le délai prescrit de 90 jours, et le Tribunal n'a pas compétence pour proroger ledit délai. Par contre, l'appelant a soutenu que le Tribunal a compétence pour entendre l'affaire, étant donné qu'il s'est appuyé sur le document d'information du Tribunal.

Le Tribunal reconnaît que son document d'information n'était pas conforme au paragraphe 67(1) de la Loi. De plus, il fait observer que, lorsqu'il y a contradiction entre un document d'information et un texte législatif, le texte législatif prévaut. Les articles pertinents de la Loi stipulent ce qui suit :

67.(1)Toute personne qui s'estime lésée par une décision du sous-ministre rendue conformément aux articles 60 ou 61 peut en interjeter appel devant le Tribunal canadien du commerce extérieur en déposant par écrit un avis d'appel auprès du sous-ministre et du secrétaire de ce Tribunal dans les quatre-vingt-dix jours suivant la réception de l'avis de décision. [Soulignement ajouté]
149.Pour l'application de la présente loi, la date des avis ou préavis prévus par cette loi ou ses règlements est, en cas d'envoi par la poste, réputée celle de leur mise à la poste, cette dernière date étant, sauf preuve contraire, celle qu'ils semblent indiquer comme telle, à moins de contestation par le ministre, son délégué ou celui de Sa Majesté.

Aux termes de l'article 149 de la Loi, l'avis de décision est réputé avoir été donné à la date qui paraît sur l'avis, soit le 14 juillet 1999. Conformément au paragraphe 67(1) de la Loi, la date la plus tardive à laquelle il pouvait être interjeté appel était 90 jours plus tard, soit le 12 octobre 1999. Étant donné que le Tribunal a reçu l'appel le 20 octobre 1999, c.-à-d. plus de 90 jours après que l'avis de décision a été donné, ledit appel a été interjeté en retard, conformément aux articles cités ci-dessus. Cependant, le Tribunal prend bien note de l'argument de l'appelant selon lequel ce dernier s'est appuyé sur le document d'information du Tribunal, qui prévoit que « [l]'appel doit être déposé dans les 90 jours suivant la réception d'une décision. » [Soulignement ajouté] Le Tribunal reconnaît que le document d'information, qui a été modifié subséquemment, n'était pas conforme au paragraphe 67(1) de la Loi8 . De plus, le Tribunal fait observer que l'appel, daté du 19 octobre 1999, soit le 90e jour, n'a pas été envoyé par télécopieur au Tribunal, contrairement à ce qu'a soutenu l'appelant, ce même jour. Plutôt, comme la date de la télécopie l'indique, il a seulement été envoyé au Tribunal, et reçu par ce dernier, le 20 octobre 1999. L'appel était donc tardif, peu importe la date du début du délai de 90 jours.

Le Tribunal fait aussi observer que l'espèce est différente de Pabla. Dans cette cause, la décision concernant la compétence a été prise dès réception de l'appel. En l'espèce, le Tribunal a reçu l'appel deux ans avant l'audience. Au cours de cette période, l'intimé ou le Tribunal, ou les deux, auraient pu aviser l'appelant que l'appel a été déposé en retard. Ni l'un ni l'autre ne l'a fait.

Étant donné le document d'information inexact et le fait que ni l'intimé ni le Tribunal n'ont soulevé la question auprès de l'appelant, le Tribunal a décidé d'entendre la preuve et la plaidoirie sur la question du classement, ainsi que sur la question de compétence.

Selon le Tribunal, l'appel ne devrait pas être admis. Non seulement l'appel a-t-il été déposé en retard, peu importe la manière dont le calcul du délai est effectué, mais le Tribunal est également d'avis que l'intimé a correctement classé les marchandises en cause à titre de répliques dans le numéro tarifaire 9898.00.00.

Les témoignages convainquent le Tribunal que les marchandises en cause sont des répliques. Non seulement l'appelant a-t-il désigné, pendant son témoignage, les marchandises comme étant des répliques, mais les éléments de preuve montrent clairement ce fait. L'appelant a reconnu que les marchandises en cause satisfont à tous les critères pour être des répliques réputées : ce sont des objets conçus de façon à avoir l'apparence exacte d'une arme à feu, ou à la reproduire le plus fidèlement possible; elles ne sont pas elles-mêmes des armes à feu; elles ne sont pas des objets conçus de façon à avoir l'apparence exacte, ou à les reproduire le plus fidèlement possible, d'armes à feu historiques. Étant donné que les répliques sont incluses dans la définition de l'expression « dispositif prohibé » qui se trouve au paragraphe 84(1) du Code criminel, le Tribunal est d'avis que l'intimé a correctement classé les marchandises en cause dans le numéro tarifaire 9898.00.00.

Le Tribunal n'est pas d'accord sur l'affirmation de l'appelant selon laquelle les marchandises en cause sont exclues du numéro tarifaire 9898.00.00 en vertu de l'alinéa 84(3)d) du Code criminel. Le numéro tarifaire 9898.00.00 comporte une exclusion visant « d) les armes qui, conformément au paragraphe 84(3) du Code criminel,sont réputées ne pas être des armes à feu ». L'alinéa 84(3)d) stipule, notamment, ce qui suit :

(3) [...] sont réputés ne pas être des armes à feu :
d) toute autre arme pourvue d'un canon dont il est démontré qu'elle n'est ni conçue ni adaptée pour tirer du plomb, des balles ou tout autre projectile à une vitesse initiale de plus de 152,4 m par seconde ou pour tirer du plomb, des balles ou tout autre projectile conçus ou adaptés pour atteindre une vitesse de plus de 152,4 m par seconde.

Le Tribunal est d'avis que, même si les marchandises en cause ne sont pas capables de tirer un projectile à une vitesse de plus de 152,4 mètres par seconde, et de fait, qu'elles ne sont même pas capables de tirer un projectile à une vitesse de plus de 129 mètres par seconde, comme l'a déclaré le témoin expert, cela ne constitue pas un motif qui, à lui seul, justifie une exclusion. À la lumière des éléments de preuve dont dispose le Tribunal, les marchandises en cause n'ont pas été conçues, comme peut-être une arme à balles BB, pour tirer à une certaine faible vitesse. Plutôt, ce sont des sociétés qui les ont conçues de façon à ce qu'elles aient l'apparence d'armes à feu capables de tirer des projectiles à des vitesses qui excèdent de beaucoup les vitesses prévues à l'alinéa 84(3)d) du Code criminel. Selon le Tribunal, c'est cette apparence d'armes à feu, et non la capacité de tir, qui explique pourquoi les répliques sont comprises dans la liste des dispositifs prohibés figurant dans le Code criminel. Étant donné que les dispositifs prohibés sont classés dans le numéro tarifaire 9898.00.00, les marchandises en cause le sont aussi.

Même si le Tribunal n'a pas compétence eu égard à la Loi sur les armes à feu, l'appelant a invoqué le fait que cette loi n'oblige pas à enregistrer les répliques. Le Tribunal estime que l'information contenue dans le feuillet d'information du Centre canadien des armes à feu, qui était compris dans une pièce auxiliaire à l'argumentation de l'appelant, éclaire bien la question. Le feuillet indique que, à compter du 1er décembre 1998, l'importation, la fabrication et la vente de répliques seront illégales (sauf dans certaines circonstances réglementées). Le feuillet comprend aussi une note qui dit ceci : « Si vous transportez vos répliques d'armes à feu à l'extérieur du Canada pour n'importe quelle raison, on vous interdira de les rapporter au Canada. »

Les autres arguments soulevés par l'appelant gravitaient autour du principe de l'équité ou de la disposition des marchandises en cause, deux questions qui débordent la compétence du Tribunal. Le Tribunal n'est pas un tribunal d'équité. Il n'a pas non plus, ainsi qu'il l'a déjà indiqué dans Roozen, compétence pour statuer sur la disposition des marchandises. L'affaire devra être réglée par l'intimé ou par les tribunaux, si l'appelant souhaite y donner suite.

À la lumière de ce qui précède, l'appel est rejeté.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [ci-après Loi].

2 . L.C. 1997, c. 36.

3 . L.R.C. 1985, c. C-46.

4 . L.C. 1995, c. 39.

5 . Supra note 3.

6 . Pabla Fashions c. S-MRN (30 août 2000) (TCCE) [ci-après Pabla].

7 . Catherine Roozen c. S-MRN (1er mars 1999) (TCCE) [ci-après Roozen].

8 . Le Tribunal fait observer que des modifications apportées à l'article 67.1 de la Loi sont entrées en vigueur le 29 novembre 2001, permettant maintenant à un appelant, qui n'a pas interjeté appel dans le délai de 90 jours prescrit, de présenter une demande de prorogation dudit délai.


[ Table des matières]

Publication initiale : le 21 mars 2002