PATAGONIA INTERNATIONAL, INC.

Décisions


PATAGONIA INTERNATIONAL, INC.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-99-014

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le jeudi 28 septembre 2000

Appel no AP-99-014

EU ÉGARD À un appel entendu le 29 novembre 1999 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national les 11 et 12 mars et le 7 avril 1999 concernant des demandes de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

PATAGONIA INTERNATIONAL, INC. Appelante

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

DÉCISION DU TRIBUNAL

L'appel est admis. L'affaire est renvoyée à l'intimé pour réexamen de la valeur en douane des marchandises en cause d'une façon conforme aux présents motifs.


Pierre Gosselin

Pierre Gosselin
Membre présidant

Richard Lafontaine

Richard Lafontaine
Membre

Arthur B. Trudeau

Arthur B. Trudeau
Membre


Michel P. Granger

Michel P. Granger
Secrétaire
 
 

RÉSUMÉ OFFICIEUX

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national (désormais le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada) aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes. La question en litige dans le présent appel porte sur la valeur en douane correcte de certains vêtements importés par l'appelante. Plus précisément, la question en litige porte sur la méthode correcte d'appréciation de la valeur des marchandises en cause. L'appelante soutient que la méthode fondée sur la valeur transactionnelle doit s'appliquer ou, subsidiairement, la méthode fondée sur la valeur de référence. L'appelante a soutenu, dans le cadre d'une deuxième position subsidiaire, que la méthode fondée sur la valeur reconstituée devrait s'appliquer. L'intimé a déterminé que la méthode dite dernière méthode d'appréciation doit s'appliquer.

DÉCISION : L'appel est admis. L'appelante a soutenu qu'une vente pour exportation au Canada a eu lieu entre les entrepreneurs américains et Patagonia, Inc. (PI). Même si le Tribunal devait accepter que la transaction entre les entrepreneurs américains et PI a constitué une vente, il ne pourrait pas conclure que ladite vente a été pour exportation au Canada. De fait, au moment d'une vente donnée, rien n'indiquait que certaines marchandises vendues étaient destinées au Canada. Ainsi que l'a reconnu le témoin de l'appelante, les vêtements n'étaient pas réservés au Canada à ce moment, et les marchandises reçues à l'entrepôt de PI n'étaient pas séparées en vue de leur exportation ultérieure au Canada. Étant donné la conclusion du Tribunal que la transaction entre les entrepreneurs américains et PI n'a pas constitué une vente pour exportation au Canada, la méthode fondée sur la valeur transactionnelle ne peut s'appliquer relativement à ladite transaction.

L'appelante a soutenu, dans le cadre d'une position subsidiaire, que la transaction entre PI et l'appelante devrait servir de base pour l'application de la méthode fondée sur la valeur transactionnelle. Pour qu'il soit indiqué de se servir de cette méthode, il faut qu'il y ait une vente pour exportation au Canada. Pour qu'une vente ait lieu, il doit y avoir deux parties établies dans une relation du type acheteur-vendeur l'une par rapport à l'autre. Dans le présent appel, le Tribunal doit déterminer si telle était la relation entre PI et l'appelante. Dans les circonstances et étant donné, particulièrement, le degré très élevé de contrôle exercé par PI sur l'appelante, le Tribunal est d'avis que l'appelante n'était pas établie dans une position d'acheteur relativement aux transactions entre elle-même et PI, mais plutôt dans une position de mandataire. Par conséquent, il n'y a pas eu vente entre PI et l'appelante. La méthode fondée sur la valeur transactionnelle ne peut donc servir à l'égard des transactions entre PI et l'appelante pour apprécier la valeur des vêtements en cause.

La méthode suivante dans l'ordre d'applicabilité des méthodes d'appréciation est la méthode fondée sur la valeur de référence. C'est le retranchement d'un montant pour les bénéfices qui a été objet de litige entre l'appelante et l'intimé. L'intimé a déterminé qu'aucun montant pour les bénéfices ne pouvait être retranché. L'appelante a déposé un état des revenus concernant les opérations canadiennes de l'appelante. Cependant, aucune méthode de répartition des bénéfices de l'appelante entre les États-Unis et le Canada n'a été proposée. Étant donné les activités conduites par l'appelante aux États-Unis, manifestement, une telle répartition aurait, au minimum, été requise. Dans les circonstances, le Tribunal convient avec l'intimé que la méthode de la valeur de référence ne pouvait pas être appliquée afin d'apprécier les vêtements en cause.

Selon l'avis du Tribunal, le « producteur », pour les fins de l'application de la méthode de la valeur reconstituée, doit être vu comme étant le responsable, la personne ou la compagnie qui fait exister les marchandises. Dans les circonstances du présent appel, le Tribunal en vient à la conclusion que PI était le producteur des vêtements en cause. De l'avis du Tribunal, les vêtements en cause devraient être appréciés en utilisant la valeur reconstituée. L'appelante a fourni les données relatives aux coûts des vêtements en cause. L'appelante a aussi fourni des chiffres relatifs aux bénéfices et frais généraux de PI. Rien n'indique et l'intimé n'a pas démontré que ces chiffres ne correspondaient pas au montant des bénéfices et frais généraux généralement supporté par les ventes effectuées pour l'exportation au Canada par des producteurs de marchandises de même nature ou de même espèce qui traitent avec leurs importateurs au même titre que des personnes non liées.

Lieu de l'audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l'audience :

Le 29 novembre 1999

Date de la décision :

Le 28 septembre 2000

   

Membres du Tribunal :

Pierre Gosselin, membre présidant

 

Richard Lafontaine, membre

 

Arthur B. Trudeau, membre

   

Conseillers pour le Tribunal :

Philippe Cellard

 

John Dodsworth

   

Agent du greffe :

Anne Turcotte

   

Ont comparu :

Richard S. Gottlieb et J. Peter Jarosz, pour l'appelante

 

Meghan Castle, pour l'intimé

 
 

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes 1 à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national (désormais le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada) aux termes de l'article 63 de la Loi en mars et avril 1999. La question en litige dans le présent appel porte sur la valeur en douane correcte de certains vêtements importés par l'appelante de 1993 à 1997. Plus précisément, la question en litige porte sur la méthode d'appréciation correcte des marchandises en cause. L'appelante a soutenu que la méthode fondée sur la valeur transactionnelle doit s'appliquer ou, subsidiairement, la méthode fondée sur la valeur de référence. L'appelante a soutenu, dans le cadre d'une deuxième position subsidiaire, que la méthode fondée sur la valeur reconstituée devrait s'appliquer. L'intimé a déterminé que la méthode dite dernière méthode d'appréciation doit s'appliquer. Les dispositions pertinentes de la Loi prévoient ce qui suit :

48. (1) [. . .] la valeur en douane des marchandises est leur valeur transactionnelle si elles sont vendues pour exportation au Canada, si le prix payé ou à payer est déterminable.
51. (1) [. . .] la valeur en douane des marchandises est, dans les cas où elle n'est pas déterminée par application des articles 48 à 50, leur valeur de référence, si elle est déterminable.
(3) [. . .] le prix unitaire des marchandises à apprécier, de marchandises identiques ou de marchandises semblables désigne le prix unitaire auquel ces marchandises sont vendues, au premier niveau commercial après leur importation.
(4) [. . .] le prix unitaire [. . .] est ajusté en retranchant la somme des montants suivants :

a) [. . .]
(i) soit le montant de la commission normale payée sur une base unitaire,
(ii) soit le montant pour les bénéfices et frais généraux, considérés comme un tout et comprenant tous les frais de commercialisation, normalement inclus dans le prix unitaire.

52. (1) [. . .] la valeur en douane des marchandises, dans le cas où elle n'est pas déterminée par application des articles 48 à 51, est leur valeur reconstituée, si elle peut être déterminée.
(2) La valeur reconstituée des marchandises à évaluer est la somme des éléments suivants :

a) les coûts et frais supportés à l'égard de la valeur - déterminés de manière réglementaire :
(i) des matières utilisées dans la production des marchandises à apprécier d'une part,
(ii) des opérations de production ou de transformation des marchandises à apprécier d'autre part;
b) le montant, déterminé de manière réglementaire, de l'ensemble des bénéfices et frais généraux, généralement supportés dans les ventes de marchandises de même nature ou de même espèce que les marchandises à apprécier, effectuées pour l'exportation au Canada par des producteurs qui se trouvent dans le pays d'exportation.

53. Lorsqu'elle n'est pas déterminée conformément aux articles 48 à 52, la valeur en douane des marchandises se fonde sur les deux éléments suivants :

a) une valeur obtenue en utilisant celle des méthodes d'appréciation prévues aux articles 48 à 52 qui, appliquée avec suffisamment de souplesse pour permettre de déterminer une valeur en douane pour les marchandises, comporte plus de règles adaptables au cas que chacune des autres méthodes;
b) les données accessibles au Canada.

PREUVE

M. Tom Lowe, directeur des exportations, Patagonia International, Inc., a témoigné au nom de l'appelante. M. Lowe a adopté les faits énoncés dans le mémoire de l'appelante à titre de témoignage. Selon le mémoire de l'appelante, au moment des transactions visées dans le présent appel, l'appelante était une corporation dont le siège social était situé aux États-Unis. L'appelante était liée, au sens du paragraphe 45(3) de la Loi, à Patagonia, Inc. (PI), qui lui a fourni les vêtements qu'elle a importés au Canada. Le siège social de PI était aussi situé aux États-Unis. Lost Arrow Corporation (Lost Arrow), une autre société américains, était aussi liée à PI et à l'appelante.

Le mémoire de l'appelante décrit l'ordre des étapes qui ont mené à l'importation au Canada des vêtements en cause. D'abord, PI achetait les matières et les garnitures (intrants) auprès de producteurs de textile américains. PI donnait des directives pour que les intrants soient expédiés à divers entrepreneurs non liés des États-Unis. Les entrepreneurs américains recevaient des plans, des croquis et d'autres dessins nécessaires à la confection des vêtements Patagonia. M. Lowe a témoigné que ces entrepreneurs coupaient, cousaient et conditionnaient le produit. Par la suite, les entrepreneurs américains expédiaient les produits finals à l'entrepôt de PI situé aux États-Unis. Finalement, les marchandises étaient expédiées à l'entrepôt de l'appelante, situé à Cowansville (Québec). L'appelante était un importateur non résident. Après leur importation, les vêtements en cause étaient vendus à des détaillants canadiens par des représentants de commerce indépendants.

Le mémoire de l'appelante a précisé que, puisque PI doit prendre les engagements relatifs à l'achat des intrants et à l'espace en usine au moins six mois avant la livraison, l'appelante était obligée de passer des commandes auprès de PI avant que les acheteurs détaillants canadiens aient passé leurs commandes auprès de l'appelante en vue d'une saison donnée. PI transmettait des accusés de réception de commande et des factures pro forma à l'appelante juste avant la saison de livraison. Le prix de vente de PI à l'appelante était établi à un montant qui représentait le coût d'acquisition par PI, plus un montant pour les frais supplémentaires et une majoration pour les bénéfices. M. Lowe a témoigné que le prix de cession entre PI et l'appelante était fondé sur une ébauche de rapport sur les prix de cession préparée par un cabinet comptable. Bien qu'il n'ait jamais fait l'objet d'une publication formelle, M. Lowe a témoigné que PI et l'appelante appliquaient la méthode exposée dans le rapport pour déterminer les prix de cession.

M. Lowe a témoigné que PI inscrivait ses ventes à l'appelante au poste des comptes débiteurs. L'appelante tenait un compte de stock dans ses livres. Quant aux frais, les frais directs engagés au Canada étaient payés par l'appelante. Ces coûts directs comprenaient le loyer de l'espace à l'entrepôt de Cowansville et le paiement des services qui y étaient rendus. Ils comprenaient aussi des charges afférentes aux télécommunications, aux services de courtage et aux frais juridiques. Les honoraires versés aux représentants de commerce indépendants qui résidaient au Canada et vendaient les marchandises en cause étaient aussi considérés comme des frais généraux dans les livres de l'appelante. L'appelante payait le fret lié à l'expédition depuis l'entrepôt de PI jusqu'à l'entrepôt de l'appelante au Canada. Quant aux dépenses engagées par PI, mais attribuées à l'appelante, M. Lowe a témoigné que certaines charges du service de la paie sont attribuées à l'appelante. Il a aussi indiqué que, bien que Lost Arrow soit titulaire de la police aux fins de l'assurance des marchandises du groupe des sociétés Patagonia, les frais liés aux primes sont attribués aux diverses filiales de Patagonia. À partir d'octobre 1996, une partie de la prime d'assurance payée par Lost Arrow a été attribuée à l'appelante. M. Lowe a aussi indiqué que l'appelante était titulaire d'un compte bancaire au Canada où les recettes qu'elle tirait de ses ventes étaient déposées.

Au cours du contre-interrogatoire, M. Lowe a reconnu que les vêtements destinés au Canada n'étaient pas fabriqués, conditionnés ou étiquetés différemment, ni entreposés séparément, des vêtements qui demeuraient aux États-Unis ou qui étaient destinés à d'autres pays. Relativement aux structures d'entreprise de PI et de l'appelante, M. Lowe a indiqué que les conseils d'administration de ces dernières étaient parfois composés des mêmes personnes. D'une façon générale, une majorité des directeurs de l'appelante faisaient également partie du conseil d'administration de PI. Quant aux opérations quotidiennes de l'appelante au Canada, M. Lowe a reconnu qu'elles étaient traitées au bureau de PI par des employés de PI. M. Lowe a aussi reconnu que, bien que l'appelante ait été exploitée depuis les bureaux de PI à Ventura (Californie), elle ne payait pas de loyer ni une part des frais de bureau engagés par PI. L'attribution des dépenses engagées par PI à Ventura au bénéfice de l'appelante était limitée au salaire du principal employé des services aux détaillants. Selon M. Lowe, l'attribution de toutes les autres dépenses a été jugée un fardeau trop lourd, étant donné le fait que les états de l'exploitation canadienne étaient intégrés aux états financiers consolidés d'une société américaine en vue de l'impôt et d'autres fins comptables. En réponse à une question du Tribunal, M. Lowe a indiqué que le salaire du principal employé des services aux détaillants au Canada, qui était versé par PI, était attribué à l'appelante, même si cette personne ne consacrait pas toutes ses heures de travail au service de l'appelante.

En réponse à une question du Tribunal au sujet de la comptabilité de l'appelante, M. Lowe a indiqué qu'il existait des états financiers pour l'appelante, mais qu'il s'agissait davantage d'un état interne qui servait à des fins financières à Lost Arrow. Les chèques émis par l'appelante étaient signés soit par des employés de PI soit par des employés de Lost Arrow. Quant aux transactions passées entre PI et l'appelante, M. Lowe a témoigné que les marges selon lesquelles PI cédait les marchandises en cause à l'appelante n'étaient pas les mêmes que les marges selon lesquelles elle vendait les marchandises à des distributeurs indépendants. Au cours du contre-interrogatoire, M. Lowe a reconnu que l'appelante ne prenait pas de décisions autonomes au sujet des modalités des ventes entre elle-même et PI.

M. Guy Parent, agent de la vérification de l'observation, Agence des douanes et du revenu du Canada, a témoigné au nom de l'intimé. Il a déclaré que, pour apprécier la valeur des marchandises en cause, l'intimé s'était servi de la méthode dite dernière méthode d'appréciation en appliquant, avec souplesse, la méthode fondée sur la valeur de référence. M. Parent a témoigné que toutes les dépenses engagées par l'appelante au Canada relativement aux marchandises en cause étaient soustraites aux fins de la détermination de la valeur en douane desdites marchandises.

PLAIDOIRIE

L'appelante a soutenu que la méthode fondée sur la valeur transactionnelle pouvait s'appliquer à la transaction entre les entrepreneurs américains et PI. Le montant payé aux entrepreneurs américains devrait servir de base à l'appréciation de la valeur en douane, le coût des intrants devant y être ajouté à titre d'aide. Les étapes qui ont mené à l'exportation des marchandises au Canada ont suivi un ordre précis. L'appelante a soutenu que le fait que les marchandises n'étaient pas réservées à l'exportation au Canada n'empêchait pas irrémédiablement l'applicabilité de la méthode fondée sur la valeur transactionnelle.

Dans le cadre d'une position subsidiaire, l'appelante a déclaré que la méthode fondée sur la valeur transactionnelle pouvait s'appliquer à la vente entre PI et l'appelante. L'appelante a soutenu que le lien entre les sociétés n'empêchait pas irrémédiablement l'existence d'une vente et l'applicabilité de la méthode fondée sur la valeur transactionnelle. L'appelante a déclaré que les deux causes invoquées dans le mémoire de l'intimé à l'appui de l'affirmation de ce dernier selon laquelle il ne pouvait y avoir eu vente entre PI et l'appelante sont différentes de la présente situation. À l'appui de sa position, l'appelante a souligné que le paiement afférent à la vente est fait au moyen des chèques de l'appelante, que l'appelante tient un compte de stock dans ses états financiers, tandis que PI inscrit un montant dans ses comptes débiteurs, qu'une facture est émise par PI à l'appelante indiquant une vente, que chaque article vendu est assorti d'un prix, que les recettes tirées des ventes faites par l'appelante sont déposées dans le compte bancaire de cette dernière et que cette dernière ne fournit pas d'apport dans la production des marchandises en cause.

L'appelante a soutenu que si la méthode fondée sur la valeur transactionnelle ne pouvait pas s'appliquer, la méthode fondée sur la valeur de référence devrait servir. L'appelante s'est dite d'accord avec l'intimé sur le fait qu'il n'y a pas eu de commission de verser aux représentants de commerce indépendants et que, par conséquent, le retranchement du montant de la commission ne s'appliquait pas. Cependant, elle a soutenu que l'autre possibilité de déduction se rapportant au montant pour les bénéfices et frais généraux s'appliquait et aurait dû être accepté par l'intimé. L'appelante a soutenu qu'il était évident qu'elle avait engagé des frais et réalisé des bénéfices.

L'appelante a déclaré que, si le Tribunal devait ne pas conclure à l'applicabilité de la méthode fondée sur la valeur transactionnelle ou de la méthode fondée sur la valeur de référence, il devrait alors se servir de la méthode fondée sur la valeur reconstituée. L'appelante a dit avoir fourni tous les renseignements sur l'établissement des coûts de revient nécessaires à l'application de ladite méthode d'appréciation.

Finalement, l'appelante a soutenu que, même en vertu de la méthode dite dernière méthode d'appréciation, l'appelante devrait avoir droit à une déduction très semblable à l'ajustement, par retranchement d'un montant pour les bénéfices et frais généraux, prévu dans le cadre de la méthode fondée sur la valeur de référence.

L'intimé a soutenu qu'aucune des trois principales méthodes d'appréciation ne peut s'appliquer à la détermination de la valeur en douane des marchandises en cause. L'intimé a déclaré que, pour appliquer la première méthode d'appréciation, la méthode fondée sur la valeur transactionnelle, il doit être satisfait à deux conditions. En premier lieu, il doit y avoir une vente et, en deuxième lieu, la vente doit être pour exportation au Canada. L'intimé a soutenu que la méthode fondée sur la valeur transactionnelle ne peut s'appliquer à la vente entre les entrepreneurs américains et PI parce que la vente n'est pas pour exportation au Canada. Étant donné que les marchandises produites par les entrepreneurs américains ne sont pas spécialement réservées en vue de leur exportation au Canada et ne sont pas séparées dans l'entrepôt de PI à Ventura, il est impossible de déterminer quelles marchandises vendues par les entrepreneurs américains sont pour exportation au Canada.

L'intimé a soutenu que la méthode fondée sur la valeur transactionnelle ne peut pas non plus s'appliquer à la transaction entre PI et l'appelante. Dans ce cas, l'intimé a soutenu qu'il n'y a pas eu vente entre PI et l'appelante. L'intimé a soutenu que l'activité canadienne de l'appelante ne revêt pas un caractère suffisamment indépendant de PI pour qu'il soit possible de considérer les deux sociétés comme deux entités distinctes dont chacune est capable de donner librement son accord, et ainsi de conclure valablement un contrat de vente. Selon l'intimé, divers facteurs ont indiqué manifestement un tel manque d'indépendance. Ces facteurs comprenaient le fait que l'appelante était une filiale de PI et que les deux sociétés avaient en commun certains administrateurs et dirigeants, le fait que les deux sociétés étaient exploitées à partir des mêmes bureaux et que, pourtant, aucune partie des frais d'exploitation généraux n'était attribuée à l'appelante et le fait que les personnes qui dirigent l'activité canadienne de l'appelante étaient toutes à l'emploi de PI et rémunérées par cette dernière. L'intimé a souligné qu'un seul salaire était attribué à l'appelante. L'intimé a aussi souligné que le prétendu prix de vente de PI à l'appelante était établi par PI en fonction d'un pourcentage de bénéfices plutôt que de faire suite à un accord réciproque.

Selon l'exposé de l'intimé, la méthode d'appréciation suivante, à savoir la méthode fondée sur la valeur de référence, ne pouvait pas être appliquée d'une manière stricte pour déterminer la valeur en douane des marchandises en cause. L'intimé a fait observer que les montants versés aux représentants de commerce indépendants n'étant pas des commissions, ils ne pouvaient être retranchés dans le cadre de la méthode fondée sur la valeur de référence. Quant à la possibilité de retrancher un montant pour les bénéfices et frais généraux, l'intimé a affirmé ne pas avoir eu suffisamment de renseignements pour le faire. Il a avancé que les bénéfices attribués à la vente aux détaillants au Canada, tels qu'ils peuvent être déterminés d'après les documents confidentiels déposés par l'appelante aux fins du présent appel, représentaient un montant déraisonnablement élevé et étaient inacceptables, étant donné l'activité de vente limitée de Patagonia au Canada par rapport aux ventes au Canada. Selon l'intimé, la méthode fondée sur la valeur reconstituée n'était pas applicable non plus. Il a soutenu que, afin d'appliquer la méthode fondée sur la valeur reconstituée, les marchandises appréciées doivent être vendues pour l'exportation.

L'intimé a soutenu qu'il devait, par conséquent, appliquer la méthode dite dernière méthode d'appréciation et que la méthode indiquée en vue de son application avec souplesse était la méthode fondée sur la valeur de référence. Dans un tel cadre, l'intimé a retranché du prix de vente, au premier niveau commercial après leur importation, les montants versés aux représentants de commerce indépendants et tous les autres frais engagés par l'appelante au Canada.

DÉCISION

La Loi prévoit trois principales méthodes d'appréciation de la valeur en douane de marchandises importées : la méthode fondée sur la valeur transactionnelle, la méthode fondée sur la valeur de référence et la méthode fondée sur la valeur reconstituée. Le paragraphe 47(1) de la Loi prévoit qu'il convient d'abord d'utiliser la méthode fondée sur la valeur transactionnelle, dans les conditions prévues à l'article 48. Le paragraphe 48(1) prévoit, notamment, que la valeur en douane des marchandises est leur valeur transactionnelle si elles sont vendues pour exportation au Canada. Par conséquent, pour que la méthode fondée sur la valeur transactionnelle puisse s'appliquer, les marchandises doivent être vendues et elles doivent être vendues pour exportation au Canada2 .

L'appelante a soutenu qu'une vente pour exportation au Canada a eu lieu entre les entrepreneurs américains et PI. Même si le Tribunal devait accepter que la transaction entre les entrepreneurs américains et PI a constitué une vente, il ne pourrait pas conclure que ladite vente a été pour exportation au Canada. De fait, au moment d'une vente donnée, rien n'indiquait que certaines marchandises vendues étaient destinées au Canada. Ainsi que l'a reconnu M. Lowe, les vêtements n'étaient pas spécialement réservés au Canada à ce moment, et les marchandises reçues à l'entrepôt de PI n'étaient pas non plus séparées en vue de leur exportation ultérieure au Canada. De tels faits sont contraires aux faits d'une situation comme celle qui prévalait dans les appels nos AP-96-129 à AP-96-1943 , où le Tribunal a conclu que les marchandises en cause dans cette affaire destinées au marché canadien avaient été acquises en exécution d'une commande d'achat distincte, dans des formats en mesures métriques, qu'elles portaient des étiquettes bilingues indiquant le nom et l'adresse de l'appelante et qu'elles étaient physiquement séparées des autres produits lorsqu'elles n'étaient pas expédiées directement au Canada. Étant donné la conclusion du Tribunal que la transaction entre les entrepreneurs américains et PI n'a pas constitué une vente pour exportation au Canada, la méthode fondée sur la valeur transactionnelle ne peut s'appliquer relativement à cette transaction.

L'appelante a soutenu que, dans le cadre d'une position subsidiaire, la transaction entre PI et l'appelante devrait servir de base pour l'application de la méthode fondée sur la valeur transactionnelle. Ainsi qu'il a déjà été fait observer, pour qu'il soit indiqué de se servir de cette méthode, il faut qu'il y ait une vente pour exportation au Canada.

Pour qu'une vente ait lieu, il doit y avoir deux parties établies dans une relation du type acheteur-vendeur l'une par rapport à l'autre. En l'espèce, le Tribunal doit déterminer si telle était la nature de la relation établie entre PI et l'appelante. À la lumière des faits pertinents, le Tribunal tire la conclusion que la relation établie entre PI et l'appelante n'en n'était pas une du type acheteur-vendeur, mais plutôt une relation de mandat.

Divers facteurs ont été jugés pertinents pour déterminer s'il existe une relation de mandat. Les tribunaux ont tenu compte de facteurs tels que la mesure dans laquelle une partie contrôle l'autre et le degré de risque assumé par le prétendu mandataire. Cependant, le Tribunal fait observer qu'aucun facteur seul n'a été considéré par les tribunaux comme étant déterminant dans la question du mandat et que les tribunaux ont, en rendant leurs décisions, tenu compte de l'ensemble des faits et pondéré l'importance relative des facteurs dans la mesure où ils s'appliquent4 .

En l'espèce, le degré de contrôle exercé par PI sur l'appelante était considérable. Les faits suivants en font foi : (1) PI était propriétaire des actions de l'appelante; (2) certaines personnes étaient à la fois administrateurs de PI et de l'appelante; (3) les personnes qui participaient à la gestion de l'appelante étaient toutes des employées de PI; (4) tous ces employés étaient rémunérés par PI; (5) le pouvoir de signature aux fins des comptes bancaires et des chèques de l'appelante résidait soit chez PI, soit chez Lost Arrow.

D'autres facteurs illustraient aussi le manque d'indépendance de l'appelante. Certains de ces facteurs étaient les facteurs suivants : (1) il y avait des états financiers pour l'appelante, mais M. Lowe a reconnu qu'ils représentaient davantage un état interne destiné à servir aux fins financières de Lost Arrow; (2) même si l'appelante partageait les locaux de PI, elle ne versait pas de loyer; (3) le titulaire de la police d'assurance relative aux vêtements en cause était Lost Arrow, et le versement des primes d'assurance n'a été attribué à l'appelante que durant une partie de la période pendant laquelle les transactions ont eu lieu; (4) les autres coûts engagés par PI aux États-Unis au profit de l'appelante n'ont pas été attribués à cette dernière. Le fait que l'appelante ait possédé un compte bancaire au Canada et payé les dépenses engagées au Canada n'établit pas un degré suffisant d'indépendance de l'appelante. Sur ce point, le Tribunal rappelle que les retraits faits par l'appelante et les chèques qu'elle émettait devaient être signés par des employés de PI ou de Lost Arrow.

Plus précisément, relativement aux transactions en question, le Tribunal fait observer que les prévisions qui précédaient la commande des marchandises en provenance des entrepreneurs américains étaient faites par un employé de PI, que des employés de PI décidaient de la quantité de marchandises finalement expédiées à l'appelante et que le prétendu prix des transactions entre PI et l'appelante était également établi par PI. Le Tribunal fait en outre observer que, finalement, même le prix auquel les vêtements en cause étaient vendus aux détaillants canadiens devait être établi par PI.

Étant donné le degré de dépendance de l'appelante, et le fait que toutes les décisions financières ont été prises par des employés d'autres sociétés, il est difficile de parler de risque assumé par l'appelante. Le fait que toutes les dépenses liées à l'activité commerciale de l'appelante ne lui étaient pas attribuées fausse également ses résultats. Un tel état des choses s'explique du fait que lesdits résultats étaient regroupés avec ceux de Lost Arrow.

Dans de telles circonstances et étant donné, particulièrement, le degré très élevé de contrôle exercé par PI sur l'appelante, le Tribunal est d'avis que l'appelante n'était pas établie dans une position d'acheteur relativement aux transactions entre elle-même et PI, mais plutôt dans une position de mandataire. Par conséquent, il n'y a pas eu vente entre PI et l'appelante. La méthode fondée sur la valeur transactionnelle ne peut donc servir à l'égard des transactions entre PI et l'appelante pour apprécier la valeur des vêtements en cause.

Lorsque la valeur de marchandises ne peut être appréciée en se servant de leur valeur transactionnelle, le paragraphe 47(2) de la Loi prévoit qu'elle est déterminée d'après la valeur transactionnelle de marchandises identiques ou, si cette méthode ne s'applique pas, d'après la valeur transactionnelle de marchandises semblables. Étant donné que les parties ont convenu que ni l'une ni l'autre de ces deux méthodes ne s'appliquaient dans le cas des transactions en question, le Tribunal ne les prendra pas en considération.

Dans l'ordre d'applicabilité des méthodes d'appréciation, la méthode suivante est la méthode fondée sur la valeur de référence. Dans le cadre de cette méthode, la base d'appréciation est le prix unitaire auquel les marchandises sont vendues, au premier niveau commercial après leur importation. En l'espèce, et étant donné que les vêtements en cause n'étaient vendus que lorsqu'ils étaient dans l'entrepôt de Cowansville, il ne fait aucun doute que le prix pertinent est le prix auquel les vêtements étaient vendus aux détaillants canadiens. Le Tribunal accueille aussi les éléments de preuve soumis par M. Lowe selon lesquels les marchandises en cause ont en général été vendues au Canada dans les 90 jours suivant leur importation. À partir du prix aux détaillants canadiens, il est possible, par application de l'alinéa 51(4)a) de la Loi, de retrancher le montant représentant, dans le cadre de la vente au Canada de marchandises de même nature ou de même espèce que les marchandises en question, soit le montant de la commission normale payée sur une base unitaire soit le montant pour les bénéfices et frais généraux, considérés comme un tout, normalement inclus dans le prix unitaire.

Les parties ont convenu que les honoraires et la prime fixe versés aux représentants de commerce indépendants ne constituaient pas des commissions et ne peuvent donc être retranchés dans le cadre de l'application de la méthode fondée sur la valeur de référence. Quant à la déduction d'un montant représentant le montant pour les bénéfices et frais généraux, les parties ont convenu qu'il est possible de retrancher le montant représentant tous les frais qui ont été engagés au Canada dans le cadre des ventes des vêtements en cause. Dans sa décision, qui fait l'objet du présent appel, l'intimé a accepté de retrancher lesdits frais dans le cadre de l'application, avec souplesse, de la méthode fondée sur la valeur de référence, conformément à la méthode dite dernière méthode d'appréciation. Le montant retranché comprend les frais qui se rapportent aux représentants de commerce indépendants. C'est le retranchement du montant pour les bénéfices qui a été objet de litige entre l'appelante et l'intimé. L'intimé a déterminé qu'aucun montant pour les bénéfices ne pouvait être retranché.

Le paragraphe 5(1) du Règlement sur la détermination de la valeur en douane 5 prévoit, en partie, que, pour les fins de la déduction à effectuer suivant la méthode de la valeur de référence, le montant pour les bénéfices et frais généraux sera un pourcentage calculé à partir des renseignements suffisants établis conformément aux principes de comptabilité généralement acceptés et fournis par l'importateur des marchandises à apprécier ou en son nom. Dans l'appel no AP-96-1056 , le Tribunal a indiqué que la déduction pour les bénéfices et frais généraux suivant la méthode de la valeur de référence était limitée aux bénéfices réalisés et aux dépenses engagées au Canada. Bien que l'appelante ait soutenu que, de toute évidence, des bénéfices ont été réalisés sur ses ventes au Canada, elle n'a pas renvoyé à un chiffre précis. Le Tribunal note que l'appelante a déposé un état des revenus concernant les opérations canadiennes de l'appelante. Suivant cet état, l'appelante a réalisé des bénéfices sur ses ventes au Canada. Même si le Tribunal oubliait les dépenses qui ne furent pas attribuées à l'appelante et acceptait la précision du chiffre des bénéfices, le Tribunal ne pourrait se baser sur le chiffre produit. En effet, aucune méthode de répartition des bénéfices de l'appelante entre les États-Unis et le Canada n'a été proposée. Étant donné les activités conduites par l'appelante aux États-Unis, manifestement, une telle répartition aurait, au minimum, été requise. Dans les circonstances, le Tribunal convient avec l'intimé que la méthode de la valeur de référence ne pouvait pas être appliquée afin d'apprécier les vêtements en cause.

La méthode d'appréciation suivante dans la hiérarchie comprise dans la Loi est la méthode de la valeur reconstituée. Le paragraphe 52(2) de la Loi stipule, en partie, que la valeur reconstituée des marchandises à évaluer est la somme des coûts et frais supportés à l'égard ou de la valeur des matières utilisées dans la production des marchandises et des opérations de production ou de transformation des marchandises à apprécier. À cela doit être ajouté le montant, déterminé de manière réglementaire, de l'ensemble des bénéfices et frais généraux, généralement supportés dans les ventes de marchandises de même nature ou de même espèce que les marchandises à apprécier, effectuées pour l'exportation au Canada, par des producteurs qui se trouvent dans le pays d'exportation.

Essentiellement, la méthode de la valeur reconstituée a pour base les coûts de production auxquels un montant pour les bénéfices et frais généraux est ajouté. L'appréciation des coûts de production des marchandises doit être fondée sur les comptes commerciaux du producteur des marchandises à apprécier ou sur d'autres renseignements suffisants sur la production de ces marchandises7 . Quant au montant à ajouter pour les bénéfices et frais généraux, il doit être établi à partir de données fournies par le producteur des marchandises à apprécier, ou en son nom8 . Pour utiliser la méthode de la valeur reconstituée dans le présent appel, le Tribunal doit donc déterminer si PI était le producteur des vêtements en cause.

Le mot « producteur » est défini comme « une personne, une compagnie, un pays etc., qui produit des marchandises ou du matériel »9 [traduction]. « Produire » est défini, à son tour, comme « 1) faire exister (quelque chose); 2) fabriquer (des marchandises) à partir de matières premières etc. »10 . Selon l'avis du Tribunal, le « producteur », pour les fins de l'application de la méthode de la valeur reconstituée, doit être vu comme étant le responsable, la personne ou la compagnie qui fait exister les marchandises. Dans un cas tel le présent appel, ceci résultera en une détermination qui est plus près de la valeur des marchandises au moment de l'exportation.

Bien que dans plusieurs cas, le fabricant et le producteur puisse être la même entité, cela ne sera pas toujours le cas. Ceci est particulièrement vrai aujourd'hui alors que plusieurs compagnies sous-traitent certaines opérations mais conservent un degré élevé de contrôle sur la fabrication des marchandises. Les circonstances de cet appel illustrent un tel cas. PI a acheté les intrants et les a envoyés aux entrepreneurs américains. PI fournissait aussi aux entrepreneurs américains des plans, croquis et autres dessins nécessaires à la confection des vêtements Patagonia. Les activités des entrepreneurs américains étaient limitées à couper, coudre et conditionner les vêtements en cause suivant les directives de PI. N'eût été de PI, les vêtements en cause n'auraient jamais existé. Conséquemment, le Tribunal en vient à la conclusion que PI était le producteur des vêtements en cause.

L'intimé a soumis que, afin d'appliquer la méthode de la valeur reconstituée, les marchandises appréciées doivent être vendues pour exportation. Selon l'avis du Tribunal, le paragraphe 52(2) de la Loi et le Règlementne comprennent pas une telle exigence. Suivant leRèglement, les coûts et frais, ou la valeur, auxquels renvoit le paragraphe 52(2), doivent être déterminés à partir des comptes commerciaux du producteur des marchandises à apprécier ou d'autres renseignements suffisants sur la production des marchandises.

En ce qui a trait au montant à ajouter pour les bénéfices et frais généraux, le Règlementprévoit qu'il doit être calculé sur une base de pourcentage et déterminé à partir de renseignements suffisants établis conformément aux principes de comptabilité généralement acceptés dans le pays de production des marchandises à apprécier et fournis par le producteur des marchandises à apprécier. Il n'y a pas d'exigence que les marchandises produites par le producteur soient vendues pour exportation. Le pourcentage auquel on en arrivera en utilisant les renseignements fournis par un producteur qui ne vend pas ses marchandises pour l'exportation peut, ou non, correspondre au montant généralement reflété dans les ventes de marchandises de même nature ou de même espèce que les marchandises à apprécier, effectuées pour l'exportation au Canada par des producteurs qui se trouvent dans le pays d'exportation. Cela doit être déterminé à partir des faits relatifs aux transactions spécifiques. Par conséquent, de l'avis du Tribunal, il n'est pas interdit d'utiliser les renseignements fournis par un producteur et qui concernent des ventes qui ne sont pas effectuées pour l'exportation, en autant que le montant pour les bénéfices et frais généraux ne s'écarte pas du montant pour les bénéfices et frais généraux relatifs aux ventes de marchandises de même nature ou de même espèce que les marchandises à apprécier, effectuées pour l'exportation au Canada par des producteurs qui traitent avec leurs importateurs au même titre que des personnes non liées11 .

De l'avis du Tribunal, les vêtements en cause devraient être appréciés en utilisant la méthode de la valeur reconstituée. L'appelante a fourni les données relatives aux coûts des vêtements en cause12 . Afin d'en arriver à une valeur en douane correcte, un montant doit être ajouté pour les bénéfices et frais généraux. Le U.S. Wholesale Income Statement (État des revenus de gros des États-Unis) fourni par l'appelante pour les fins de cet appel a indiqué les bénéfices et frais généraux de PI pour l'année 1994-9513 . Rien n'indique et l'intimé n'a pas démontré que ces chiffres ne correspondaient pas au montant des bénéfices et frais généraux généralement supporté par les ventes effectuées pour l'exportation au Canada par des producteurs de marchandises de même nature ou de même espèce que les marchandises à apprécier qui traitent avec leurs importateurs au même titre que des personnes non liées. Conséquemment, pour les fins d'ajouter un montant pour les bénéfices et frais généraux aux termes de l'alinéa 52(2)(b) de la Loi, le Tribunal ordonne à l'intimé d'utiliser ces chiffres. Le Tribunal renvoie donc l'affaire à l'intimé pour réexamen de la valeur en douane des vêtements en cause d'une façon conforme aux présents motifs.

Pour les motifs qui précèdent, l'appel est admis.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [ci-après Loi].

2 . JewelWay International c. S-MRN (26 mars 1996), AP-94-359 et AP-94-360 à la p. 12 (TCCE).

3 . Nu Skin c. S-MRN (26 août 1997) aux p. 5-6 (TCCE).

4 . Supra note 2 à la p. 13.

5 . S.O.R./86-792 [ci-après Règlement].

6 . Armstrong Bros. Tool c. S-MRN (15 août 1997) aux pp. 6-7 (TCCE).

7 . Supra note 5, para. 6(1).

8 . Ibid. para. 6(2).

9 . The Canadian Oxford Dictionary, 1998, s.v. « producer ».

10 . Ibid., s.v. « produce ».

11 . Supra note 5, para. 6(3).

12 . « Book of Documents and Authorities » de l'appelante (cahier des documents, ouvrages et décisions) (protégé), onglet 2.

13 . Ibid., onglet 10.


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Publication initiale : le 29 septembre 2000