SANDVIK TAMROCK CANADA INC.

Décisions


SANDVIK TAMROCK CANADA INC.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
v.
SECOROC, A DIVISION OF ATLAS COPCO CANADA INC.
Appel no AP-99-083

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le vendredi 30 juin 2000

Appel no AP-99-083

EU ÉGARD À un appel entendu le 14 avril 2000 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1;

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national les 18 août et 20 octobre 1999 concernant une demande de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

SANDVIK TAMROCK CANADA INC. Appelante

ET

LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

ET

SECOROC, A DIVISION OF ATLAS COPCO CANADA INC. Intervenante

DÉCISION DU TRIBUNAL

L'appel est rejeté.


Richard Lafontaine

Richard Lafontaine
Membre présidant


Michel P. Granger

Michel P. Granger
Secrétaire
 
 

RÉSUMÉ OFFICIEUX

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national (désormais le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada) aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si certaines tiges de forage et certains manchons d'accouplement importés par l'appelante sont admissibles aux avantages du numéro tarifaire 9908.00.00 à titre d'articles devant servir dans des machines d'extraction pour l'extraction des minéraux directement au front de taille. L'appelante, avec l'appui de l'intervenante, soutient que les marchandises en cause sont admissibles aux avantages du numéro tarifaire 9908.00.00. L'intimé a déterminé qu'elles ne le sont pas.

DÉCISION : L'appel est rejeté. Selon les éléments de preuve mis à la disposition du Tribunal, les marchandises en cause sont principalement utilisées dans les perforatrices montées sur jumbo. Le Tribunal est d'avis que les perforatrices montées sur jumbo ne sont pas des machines d'extraction. Elles accomplissent la fonction d'une perforatrice. La fonction d'extraction n'est pas accomplie par la perforatrice montée sur jumbo. Les quantités minuscules de minéraux évacués par le produit de rinçage au cours du procédé de forage ne suffisent pas pour changer la nature de la fonction de la perforatrice de celle d'une perforatrice à celle d'une machine d'extraction. De la même manière, les boulonneuses, dans lesquelles les marchandises en cause sont utilisées, ne constituent pas non plus des machines d'extraction pour l'extraction des minéraux directement au front de taille. Par conséquent, les marchandises en cause ne sont pas admissibles aux avantages du numéro tarifaire 9908.00.00.

Lieu de l'audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l'audience :

Le 14 avril 2000

Date de la décision :

Le 30 juin 2000

   

Membre du Tribunal :

Richard Lafontaine, membre présidant

   

Conseiller pour le Tribunal :

Tamra Alexander

   

Greffier :

Anne Turcotte

   

Ont comparu :

Richard A. Wagner, pour l'appelante et l'intervenante

 

Greg Moore, pour l'intimé

 
 

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes 1 à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national (désormais le commissaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada) aux termes de l'article 63 de la Loi, les 18 août et 20 octobre 1999. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si certaines tiges de forage et certains manchons d'accouplement importés par l'appelante sont admissibles aux avantages du numéro tarifaire 9908.00.00 de l'annexe du Tarif des douanes 2 à titre d'articles devant servir dans des machines d'extraction pour l'extraction des minéraux directement au front de taille. L'appelante, avec l'appui de l'intervenante, soutient que les marchandises en cause sont admissibles aux avantages du numéro tarifaire 9908.00.00. L'intimé a déterminé qu'elles ne le sont pas. La nomenclature tarifaire pertinente se lit comme suit :

9908.00.00 Véhicules utilitaires de la position no 87.03 et chariots ou camions-navettes de la position no 87.04, devant servir à l'usage souterrain dans les mines ou à la mise en valeur de gisements minéraux;

Articles (à l'exclusion des pneumatiques et chambres à air) devant servir dans les équipements qui précèdent, ou devant servir dans des machines de chargement pour charger du charbon ou pour charger des minéraux directement au front de taille, ou devant servir dans des machines d'extraction pour l'extraction des minéraux directement au front de taille.

PREUVE

M. Frederick Schmelzle, directeur principal, Sandvik Rock Tools, Sandvik Tamrock Canada Inc., et M. Michael Grace, surintendant, Division de l'exploitation, Recherches minières, Inco Limitée (Inco), ont témoigné au nom de l'appelante. M. Schmelzle a témoigné que l'appelante est la propriété de Sandvik AB. La société mère exploite trois secteurs d'entreprise : Hard Materials Division(fabrication d'aciers spéciaux), Coromant Division (outils à mises rapportées en carbure ou outils de coupe) et Sandvik Mining and Construction (SMC) Division. L'appelante fait partie de la SMC Division. Elle fabrique et vend des perforatrices, des chargeuses, des camions, des outils pour roches et des broyeurs. L'appelante fournit aussi des services de support technique pour ses produits.

M. Schmelzle a témoigné qu'il existe deux types de roche : la roche dure et la roche tendre. La résistance ponctuelle de la roche tendre se situe aux alentours de 20 000 psi. La roche ayant une résistance ponctuelle plus élevée est considérée de la roche dure. Le calcaire et le grès sont des exemples de roche tendre. Le granit est un exemple de roche dure. Une machine de creusage, dotée d'une tête de coupe rotative, sert dans l'exploitation minière en roche tendre. Ce type de machine ne peut servir dans l'exploitation minière en roche dure. Le forage et l'abattage à l'explosif sont utilisés dans l'exploitation minière en roche dure au Canada. L'exploitation minière au Canada est en majeure partie souterraine et en roche dure.

M. Schmelzle a guidé le Tribunal dans l'examen de diverses publications de l'appelante et de sa société mère. Il a attiré l'attention du Tribunal sur des exemples de tiges de forage, de trépans, de manchons d'accouplement, de perforatrices montées sur jumbo, de chargeuses et de boulonneuses mécaniques. M. Schmelzle a témoigné qu'il existe trois principaux types de techniques de forage de la roche : par percussion, par concassage giratoire et par coupe rotative. Le forage par percussion est utilisé pour l'exploitation minière en roche dure au Canada. La fonction de la tige de forage en forage par percussion est triple : 1) la transmission de l'énergie de percussion à la roche hôte; 2) la transmission du mouvement rotatif au trépan; 3) la transmission de la pression d'alimentation pour tenir constamment le trépan au fond du trou.

M. Schmelzle a témoigné qu'il faut toujours utiliser un manchon d'accouplement avec une tige de forage. La tige de forage est munie, à une de ses extrémités, d'un trépan qui effectue le forage véritable. L'autre extrémité est accouplée, au moyen du manchon d'accouplement, directement à la perforatrice de roches. Il est possible d'accoupler plusieurs tiges de forage pour permettre le forage de trous plus profonds. Le centre de la tige de forage est creux pour faire passer un produit de rinçage. Ce produit est habituellement de l'eau, de l'air ou un jet d'air humide. Il sert à évacuer les déblais de roche du fond du trou de forage. M. Schmelzle a témoigné que toutes les tiges de forage servent dans des machines de forage et que plus de 80 p. 100 de telles machines vendues par l'appelante sont utilisées dans l'exploitation minière en roche dure.

M. Schmelzle a témoigné que le « procédé d'extraction » en exploitation minière comprend ce qui suit : déterminer l'endroit où se trouve le minerai souterrain; forer, abattre à l'explosif (faire sauter), enlever le mort-terrain et boulonner, durant la phase d'exploitation minière du procédé; concentrer les minéraux; les faire fondre; procéder à leur affinage final. Dans la phase d'exploitation minière, des trous sont forés au front de taille au moyen de jumbos de forage. De la dynamite est ensuite déposée dans les trous, et le minerai est abattu par explosif et séparé de la roche hôte. Toutes les machines sont enlevées du front de taille durant l'abattage à l'explosif. M. Schmelzle a témoigné que, durant la phase d'exploitation minière, le minéral enfoui est extrait de la roche hôte. Il a aussi témoigné que la fonction des jumbos de forage est d'extraire des minéraux.

Au cours du contre-interrogatoire, M. Schmelzle a reconnu que le volume de minerai qui est évacué de la tige de forage par le produit de rinçage est « minuscule » par rapport au tas de déblais produits par l'explosion de la roche. Il a aussi déclaré que la composition de la roche abattue serait similaire à celle du front de taille. Dans l'extraction du calcaire, la roche peut être composée de 80 à 100 p. 100 de calcaire. Dans l'extraction du cuivre, ce dernier peut ne représenter que 1 p. 100 de la roche. M. Schmelzle a aussi reconnu qu'il existe d'autres utilisations des tiges de forage, par exemple, dans la construction de routes et de fondations de maisons. Environ 5 p. 100 des ventes de tiges de forage de l'appelante sont destinées à de telles autres fins.

En réponse à des questions du Tribunal, M. Schmelzle a témoigné que, à son avis, l'extraction consiste à séparer les minéraux de la roche hôte. Pour ce faire, il faut forer, puis abattre à l'explosif. À son avis, l'excavation consiste à enlever, par après, la roche fragmentée de la mine.

M. Grace a témoigné que le principal secteur d'activité d'Inco est l'extraction du nickel. Inco possède des mines à Sudbury (Ontario), à Thompson (Manitoba), en Indonésie et en Nouvelle-Guinée. M. Grace a témoigné que l'extraction des minéraux comprend quatre phases : l'exploitation minière, le broyage (ou la concentration), la fonte et l'affinage. Le Tribunal a visionné certaines parties de deux vidéos d'Inco illustrant ces phases.

M. Grace a témoigné que les équipements de forage forent au front de taille. Il a aussi déclaré qu'il est impossible d'abattre à l'explosif sans d'abord forer et qu'il est impossible de recourir à l'excavation mécanique pour exploiter une mine en roche dure.

En réponse à des questions du Tribunal, M. Grace a témoigné que, à son avis, le mot excavation signifie « la progression du front de taille [de la mine] vers l'avant » [traduction] et que l'extraction commence lorsque le minerai quitte la mine et que le procédé de broyage débute. Au cours du réinterrogatoire, M. Grace a adopté la définition du mot « extraction » contenue dans A Dictionary of Mining, Mineral, and Related Terms.

M. Michael Land, directeur, Administration des ventes, Boart Longyear Inc. (Boart), a témoigné au nom de l'intimé. Il a témoigné que le siège social de Boart est situé à North Bay (Ontario) et que cette dernière a des installations de fabrication à Mississauga et à Hailebury (Ontario). Les installations de Mississauga fabriquent des outils de forage par percussion qui font concurrence aux marchandises en cause.

M. Land a témoigné que la perforatrice montée sur jumbo est une perforatrice. Elle fore des trous au front de taille. Aucun minerai n'est extrait lorsque la perforatrice a accompli sa fonction. Il a décrit un appareil appelé Continuous Miner (une haveuse mécanique), utilisé dans les applications d'exploitation minière en roche tendre. La haveuse est munie d'une tête rotative dentée qui est en contact physique avec le front de taille. La tête détache la roche ou le minerai qui est ensuite dirigé vers l'arrière de la machine au moyen d'un système de convoyeur. M. Land a témoigné que, à son avis, le Continuous Miner est une machine d'extraction parce qu'elle extrait le minerai ou la roche directement au front de taille. Aucune « machine d'extraction » n'est utilisée en exploitation minière en roche dure, parce qu'aucune machine unique n'accomplit complètement la fonction d'extraction à elle seule.

Au cours du contre-interrogatoire, M. Land a témoigné que, selon lui, l'extraction est l'enlèvement du minerai ou de la roche du front de taille. Il a donné la même définition pour le mot excavation. M. Land a défini l'exploitation minière comme étant le procédé d'enlèvement du minerai ou de matières précieuses d'une roche hôte sous une forme qui convienne au broyage. M. Land a aussi adopté la définition du mot « extraction » que donne A Dictionary of Mining, Mineral, and Related Terms. M. Land a témoigné que les machines utilisées dans le procédé d'extraction de l'exploitation minière en roche dure comprennent le jumbo, le chargeur de Na-M, la chargeuse et la boulonneuse. M. Land a témoigné que l'expression « machine d'extraction » n'est pas utilisée dans l'industrie de l'exploitation minière.

M. Land a reconnu que les perforatrices et les chargeuses sont utilisées au front de taille et que tout les équipements sont enlevés du front de taille au moment de l'abattage à l'explosif. M. Land a aussi reconnu que, bien que le charbon soit plus pur que la roche dure une fois enlevé du front de taille, il doit tout de même encore être raffiné avant d'être vendu.

PLAIDOIRIE

Au cours de la plaidoirie, l'appelante, avec l'appui de l'intervenante, a soutenu que les marchandises en cause sont admissibles aux avantages du numéro tarifaire 9908.00.00 à titre d'articles devant servir dans des machines d'extraction pour l'extraction des minéraux directement au front de taille. L'appelante a soutenu que, pour être admissibles aux avantages du numéro tarifaire, trois conditions doivent être remplies : 1) les marchandises doivent être des articles; 2) les marchandises doivent servir dans des machines d'extraction; 3) les machines d'extraction doivent être utilisées pour l'extraction des minéraux directement au front de taille. L'appelante a soutenu qu'elle et l'intimé sont d'accord sur le fait que les marchandises en cause sont des articles et que les perforatrices montées sur jumbo sont utilisées au front de taille de la mine. L'appelante a soutenu que les perforatrices montées sur jumbo sont des « machines d'extraction » pour l'extraction des minéraux et que les marchandises en cause servent dans les perforatrices montées sur jumbo.

L'appelante a soutenu que, pour définir « extraction », il faut tenir compte du sens technique de ce mot dans la profession3 . Le dictionnaire A Dictionary of Mining, Mineral, and Related Terms définit « extraction » ainsi qu'il suit :

Procédé d'exploitation minière et d'enlèvement du charbon ou du minerai d'une mine . . . Séparation d'un métal ou d'un minéral précieux du minerai, ou du concentré . . . Extraction du métal du minerai, souvent exprimée en pourcentage4 .

[Traduction]

Par conséquent, l'appelante a soutenu que, en exploitation minière en roche dure, l'extraction est un procédé qui inclut l'extraction du minerai, la concentration ou le broyage du minerai, la fonte et l'affinage. L'appelante a soutenu que tous les témoins étaient d'accord sur le fait que l'extraction est un procédé.

L'appelante a soutenu que toutes les machines utilisées dans le procédé d'extraction sont des « machines d'extraction ». Pour extraire les minéraux en roche dure, il faut forer et abattre à l'explosif. Par conséquent, la perforatrice montée sur jumbo est une machine d'extraction. L'appelante a aussi soutenu que les jumbos sont des machines d'extraction parce que les minerais sont extraits au moyen du produit de rinçage. Il a été soutenu que le volume de matière extraite n'est pas pertinent. L'appelante a soutenu que la prépondérance de l'utilisation des marchandises en cause se rapporte aux perforatrices montées sur jumbo. L'appelante a soutenu qu'il n'est pas nécessaire de démontrer que les marchandises en cause sont exclusivement utilisées dans des machines d'extraction.

L'appelante a soutenu que les perforatrices montées sur jumbo extraient des minéraux. Le minerai est enlevé de la mine et le minerai contient des minéraux. Même en exploitation minière en roche tendre, un traitement ultérieur doit être effectué avant que le minéral atteigne une forme où il peut être vendu.

En réponse à une question du Tribunal, l'appelante a soutenu que l'utilisation de l'expression « machine de forage » dans le numéro tarifaire 9909.00.00 se rapporte aux machines utilisées pour l'exploration. Puisque seulement du forage est effectué durant l'exploration, cette expression était suffisante. Cependant, elle n'était pas suffisante pour servir dans le numéro tarifaire 9908.00.00, puisqu'elle aurait limité la portée du numéro tarifaire aux applications d'exploitation minière en roche dure. Le numéro tarifaire vise une vaste gamme d'équipements d'exploitation minière utilisés tant dans l'exploitation minière en roche tendre qu'en roche dure, selon l'appelante. L'appelante a aussi soutenu que le renvoi aux numéros tarifaires du système pré-harmonisé n'est pas pertinent aux questions dont le Tribunal est saisi.

En réponse à une autre question du Tribunal, l'appelante a soutenu que la désignation des « machines de chargement », tout comme celle des « machines d'extraction », dans le numéro tarifaire 9908.00.00 a été effectuée pour viser spécifiquement les chargeuses puis, ensuite, dénommer toutes les autres machines utilisées dans le procédé d'extraction, au moyen de l'étiquette générique « machines d'extraction ». L'appelante a soutenu que l'intimé a reconnu, dans sa lettre du 11 avril 2000 au Tribunal, que les chargeuses sont des « machines d'extraction ». L'appelante a soutenu qu'une telle mention distincte des chargeuses dans le numéro tarifaire n'était peut-être pas nécessaire.

L'appelante a soutenu que la position de l'intimé, selon laquelle seule la haveuse mécanique est une « machine d'extraction », n'est pas défendable. Le témoin de l'intimé a reconnu qu'aucune machine n'est connue sous l'expression « machine d'extraction » dans l'industrie. De plus, une telle interprétation limiterait l'application du numéro tarifaire à l'exploitation minière en roche tendre. Puisque l'exploitation minière au Canada se fait en majeure partie en roche dure, la position de l'appelante était que le Parlement n'a pas pu avoir l'intention de limiter la portée du numéro tarifaire d'une telle façon.

L'intimé a soutenu que le numéro tarifaire 9908.00.00 s'applique uniquement aux articles devant servir dans des machines d'extraction et non aux articles devant servir dans n'importe quelle machine utilisée dans le cadre du procédé d'extraction. L'intimé a soutenu que les perforatrices montées sur jumbo ne sont pas des machines d'extraction et qu'elles n'extraient pas de minéraux. Par conséquent, les marchandises en cause ne servent pas dans des machines d'extraction pour l'extraction des minéraux directement au front de taille.

L'intimé a soutenu que les machines d'extraction vont au front de taille de la mine, creusent au front de taille, recueillent le minéral au front de taille et le transportent à partir du front de taille. Un exemple d'une machine d'extraction est le Continuous Miner. La perforatrice montée sur jumbo n'est pas une machine d'extraction, puisque sa tâche est complétée avant que le minerai ne soit séparé du front de taille. La quantité minuscule de matières qui est enlevée du front de taille dans le produit de rinçage ne suffit pas pour constituer de l'« extraction ».

L'intimé a en outre soutenu que les minéraux ne sont pas extraits durant les phases de forage et d'abattage à l'explosif du processus. Il a soutenu que la composition de la roche abattue par explosif est la même que celle au front de taille; par conséquent, il n'y a eu extraction d'aucun minéral. L'intimé a soutenu que l'extraction ne survient pas avant la phase finale de l'affinage et que cette extraction ne survient pas au front de taille de la mine.

L'intimé a soutenu que les termes du numéro tarifaire 9908.00.00 font ressortir la contradiction inhérente dans la position de l'appelante. Si toutes les machines utilisées dans le procédé d'extraction étaient des machines d'extraction, les chargeuses ne seraient pas mentionnées séparément. En les mentionnant séparément, le numéro tarifaire indique que les chargeuses ne sont pas des machines d'extraction. Par conséquent, puisque les chargeuses font partie du procédé d'extraction, l'expression machines d'extraction ne peut désigner toutes les machines utilisées dans le procédé d'extraction. Le numéro tarifaire doit renvoyer à une machine spécialisée et non aux nombreuses machines utilisées dans un procédé.

L'intimé a soutenu que, si le Parlement avait voulu que le numéro tarifaire s'applique aux machines devant servir dans le procédé d'extraction, et non seulement aux machines d'extraction, il aurait pu le dire en se servant de ces mots. Puisqu'il ne l'a pas fait, une interprétation aussi vaste ne doit pas être donnée au numéro tarifaire5 . L'intimé a aussi soutenu qu'un renvoi aux termes du numéro tarifaire du système pré-harmonisé appuie la position de l'intimé.

DÉCISION

La seule question dont le Tribunal est saisi est celle de savoir si les marchandises en cause sont admissibles aux avantages du numéro tarifaire 9908.00.00 à titre d'articles devant servir dans des machines d'extraction pour l'extraction des minéraux directement au front de taille. Le Tribunal est d'avis que, pour être admissibles aux avantages du numéro tarifaire 9908.00.00, toutes les conditions suivantes doivent être remplies :

1) les marchandises doivent être des articles;

2) les marchandises doivent servir dans des machines d'extraction;

3) les machines d'extraction doivent être utilisées pour l'extraction des minéraux directement au front de taille.

Si l'une des conditions susmentionnées n'est pas remplie, les marchandises en cause ne seront pas admissibles aux avantages du numéro tarifaire 9908.00.00.

Les éléments de preuve dont dispose le Tribunal indiquent que les marchandises en cause servent, d'une façon prédominante, dans des perforatrices montées sur jumbo utilisées dans les applications d'exploitation minière en roche dure. Le Tribunal est d'avis que les perforatrices montées sur jumbo ne sont pas des machines d'extraction. L'appelante a soutenu que les machines d'extraction sont toutes les machines utilisées dans le procédé d'extraction. Le Tribunal est d'avis qu'une telle interprétation de l'expression « machines d'extraction » n'est pas conforme avec les autres termes du numéro tarifaire. Le numéro tarifaire 9908.00.00 renvoie à ce qui suit :

Véhicules utilitaires de la position no 87.03 et chariots ou camions-navettes de la position no 87.04, devant servir à l'usage souterrain dans les mines ou à la mise en valeur de gisements minéraux;

Articles (à l'exclusion des pneumatiques et chambres à air) devant servir dans les équipements qui précèdent, ou devant servir dans des machines de chargement pour charger du charbon ou pour charger des minéraux directement au front de taille, ou devant servir dans des machines d'extraction pour l'extraction des minéraux directement au front de taille.

Le matériel et les articles visés par le numéro tarifaire peuvent être répartis en catégories distinctes :

1) les véhicules utilitaires, chariots et camions-navettes de certaines positions devant servir à l'usage souterrain dans les mines ou à la mise en valeur de gisements minéraux;

2) les articles devant servir dans les équipements énumérés en 1);

3) les articles devant servir dans des machines de chargement pour charger du charbon;

4) les articles devant servir dans des machines de chargement pour charger des minéraux directement au front de taille;

5) les articles devant servir dans des machines d'extraction pour l'extraction des minéraux directement au front de taille.

Si l'expression « machines d'extraction » devait être interprétée comme s'entendant de toute machine utilisée dans le procédé d'extraction et si l'on acceptait la définition de l'appelante selon laquelle le procédé d'extraction inclut l'exploitation minière du minerai, la concentration ou le broyage du minerai, la fonte et l'affinage, la quatrième catégorie ci-dessus ne serait plus nécessaire, puisque les machines de chargement de la quatrième catégorie seraient dénommées dans la cinquième catégorie6 . Pour donner une signification à tous les termes du numéro tarifaire, une interprétation plus restrictive de l'expression « machines d'extraction » est nécessaire.

Le Tribunal est d'avis que l'expression « machines d'extraction » renvoie à une machine distincte qui accomplit la fonction d'extraction des minéraux. Les éléments de preuve dont dispose le Tribunal indiquent que le Continuous Miner accomplit cette fonction. Par conséquent, une telle interprétation du numéro tarifaire ne vide pas la cinquième catégorie, énoncée ci-dessus, de son sens. Le Tribunal est d'avis que la perforatrice montée sur jumbo n'accomplit pas la fonction d'extraction des minéraux. La perforatrice montée sur jumbo accomplit la fonction d'une perforatrice. Elle fore un trou qui est ensuite rempli d'explosifs. La fonction d'extraction n'est pas accomplie à cette étape du procédé. Le Tribunal est d'avis que les quantités minuscules de minéraux évacués par le produit de rinçage au cours du procédé de forage ne suffisent pas pour changer la nature de la fonction de la perforatrice de celle d'une perforatrice à celle d'une machine d'extraction.

Le Tribunal est aussi d'avis que, si le Parlement avait voulu que le numéro tarifaire ait une plus vaste portée d'application, il aurait utilisé un libellé différent. Par exemple, le numéro tarifaire aurait pu se lire comme suit :

Articles (à l'exclusion des pneumatiques et chambres à air) devant servir dans les équipements qui précèdent, ou devant servir dans des machines de chargement pour charger du charbon ou pour charger des minéraux directement au front de taille, ou devant servir dans d'autres machines d'extraction pour l'extraction des minéraux directement au front de taille. [le soulignement indique la modification]7

Le libellé qui précède aurait indiqué que le Parlement voulait que les équipements énumérés avant l'expression « machines d'extraction » soient aussi considérés comme des machines d'extraction. Le Tribunal n'est pas convaincu non plus par l'argument de l'appelante selon lequel le Parlement n'a pas pu vouloir que l'expression « machines d'extraction » ne vise que certaines machines utilisées en exploitation minière en roche tendre, puisque l'exploitation minière au Canada se fait en majeure partie en roche dure. Les dispositions du Chapitre 99 revêtent un caractère exceptionnel. Ce n'est pas parce que l'exploitation minière au Canada est en majeure partie de l'exploitation minière en roche dure, qu'il s'ensuit que les dispositions du numéro tarifaire 9908.00.00 doivent s'appliquer comme le préconise l'appelante. Une fois encore, si telle avait été l'intention du Parlement, il aurait pu choisir des termes qui expriment clairement son intention.

En conclusion, le Tribunal est d'avis que les perforatrices montées sur jumbo ne sont pas des machines d'extraction. Les éléments de preuve dont dispose le Tribunal indiquent que les marchandises en cause sont principalement utilisées dans les jumbos. Les éléments de preuve indiquent que les marchandises en cause servent aussi dans les boulonneuses et dans les machines de construction de chemins et de fondations de maison. En ce qui a trait à l'utilisation des marchandises en cause dans les boulonneuses, certains témoignages et arguments indiquent que les boulonneuses servent aussi dans le procédé d'extraction et, donc, constituent des machines d'extraction. Pour les motifs susmentionnés relatifs aux perforatrices montées sur jumbo, le Tribunal n'accepte pas que les boulonneuses constituent des machines d'extraction. Aucun élément de preuve ni argument n'a été avancé pour affirmer que les marchandises en cause sont admissibles aux avantages du numéro tarifaire 9908.00.00 du fait de leur utilisation dans des machines de construction de chemins et de fondations de maison. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne remplissent pas la condition d'être des articles devant servir dans des machines d'extraction pour l'extraction des minéraux directement au front de taille et conclut donc que lesdites marchandises ne sont pas admissibles aux avantages du numéro tarifaire 9908.00.00. L'appel est donc rejeté.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [ci-après Loi].

2 . L.R.C. 1985 (3e supp.), c. 41.

3 . À l'appui de cette affirmation, l'affaire Olympia Floor and Wall Tile c. S-MRN (1983), 49 N.R. 66 (CFA) a été invoquée.

4 . 1968, s.v. « extraction ».

5 . À l'appui de cette proposition, les affaires Ballarat Corporation c. S-MRN (19 décembre 1995), AP-93-359 (TCCE), et Sealand of the Pacific c. S-MRN (11 juillet 1989), 3042 (TCCE) ont été invoquées.

6 . Selon le Tribunal, la déclaration de l'intimé, dans sa lettre du 11 avril 2000 au Tribunal, dans laquelle il était écrit qu'une benne à godets, ou chargeuse, est un exemple de machine d'extraction, n'est pas déterminante de la question de savoir si les chargeuses sont des machines d'extraction.

7 . Le Parlement aurait aussi pu faire mention des articles devant servir dans des machines utilisées dans le procédé d'extraction des minéraux directement au front de taille plutôt que de faire mention des articles devant servir dans des machines de chargement pour charger des minéraux directement au front de taille et des machines d'extraction pour l'extraction des minéraux directement au front de taille, s'il avait voulu que la portée d'application du numéro tarifaire soit plus vaste.


[ Table des matières]

Publication initiale : le 26 juillet 2000