TIFFANY WOODWORTH

Ordonnances et motifs de prolongation de délai (Loi sur les douanes)


TIFFANY WOODWORTH
Demande no EP-2006-001

Ordonnance rendue
le mercredi 8 novembre 2006

Motifs rendus
le vendredi 1er décembre 2006


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une demande présentée par Mme Tiffany Woodworth, aux termes de l’article 67.1 de la Loi sur les douanes, en vue d’obtenir une ordonnance de prolongation de délai pour signifier, aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes, un avis d’appel concernant une décision datée du 28 décembre 2005 rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ORDONNANCE

Le Tribunal canadien du commerce extérieur fait droit à la demande et accepte les documents datés du 10 mai 2006, déposés par Mme Tiffany Woodworth, à titre d’avis d’appel aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes de la décision susmentionnée.

Ellen Fry
Ellen Fry
Membre présidant

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

L’exposé des motifs sera publié à une date ultérieure.

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

1. Il s’agit d’une demande présentée par Mme Tiffany Woodworth, aux termes de l’article 67.1 de la Loi sur les douanes 1 , en vue d’obtenir une ordonnance de prolongation de délai pour signifier, aux termes du paragraphe 67(1), un avis d’appel concernant une décision datée du 28 décembre 2005 rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), aux termes du paragraphe 60(4).

2. Le produit en cause est décrit comme étant un collier orné d’un pendentif plaqué argent qui, selon l’ASFC, est une arme dont l’importation au Canada n’est pas autorisée aux termes du paragraphe 84(1) du Code criminel 2 , du paragraphe 136(1) de la Loi et du numéro tarifaire 9898.00.00 de l’annexe du Tarif des douanes 3 . L’ASFC a également invoqué l’article 4 du Règlement désignant des armes à feu, armes, éléments ou pièces d’armes, accessoires, chargeurs, munitions et projectiles comme étant prohibées ou à autorisation restreinte 4 , lequel stipule ce qui suit :

4. The weapons listed in Part 3 of the schedule are prohibited weapons for the purposes of paragraph (b) of the definition “prohibited weapon” in subsection 84(1) of the Criminal Code.

4. Les armes énumérées à la partie 3 de l’annexe sont désignées des armes prohibées pour l’application de l’alinéa b) de la définition de « arme prohibée » au paragraphe 84(1) du Code criminel.

En outre, l’ASFC a invoqué les articles 9 et 10 de la partie 3 de l’annexe du Règlement, lesquels stipulent ce qui suit :

9. Any knife commonly known as a “push-dagger” that is designed in such a fashion that the handle is placed perpendicular to the main cutting edge of the blade and any other similar device other than the aboriginal “ulu” knife.

9. Tout couteau communément appelé « dague à pousser », conçu de telle façon que le manche est perpendiculaire au tranchant principal de la lame, ainsi que tout autre instrument semblable, à l’exception du couteau autochtone « ulu ».

10. Any device having a length of less than 30 cm and resembling an innocuous object but designed to conceal a knife or blade, including the device commonly known as the “knife-comb”, being a comb with the handle of the comb forming a handle for the knife, and any similar device.

10. Tout appareil d’une longueur inférieure à 30 cm, qui ressemble à un objet inoffensif mais qui est conçu pour dissimuler un couteau ou une lame, notamment l’instrument communément appelé « peigne-couteau », lequel est un peigne dont le manche sert de poignée au couteau, et tout autre appareil semblable.

3. Le 9 septembre 2005, Mme Woodworth a présenté une demande de réexamen aux termes du paragraphe 60(1) de la Loi et l’ASFC en a accusé réception le 29 septembre 2005. Cette demande a été rejetée selon un relevé détaillé de rajustement daté du 28 décembre 2005. Le 10 mai 2006, Mme Woodworth a interjeté appel de cette décision auprès du Tribunal aux termes du paragraphe 67(1). Étant donné que le délai réglementaire normal pour ce faire était écoulé, le Tribunal doit d’abord déterminer s’il y avait lieu d’accorder, aux termes de l’article 67.1, une prolongation de délai pour interjeter appel. C’est cette question qui fait l’objet de la présente procédure.

ANALYSE

4. L’article 67.1 de la Loi stipule ce qui suit :

67.1(1) If no notice of appeal has been filed within the time set out in section 67, a person may make an application to the Canadian International Trade Tribunal for an order extending the time within which a notice of appeal may be filed, and the Tribunal may make an order extending the time for appealing and may impose any terms that it considers just.

67.1(1) La personne qui n’a pas interjeté appel dans le délai prévu à l’article 67 peut présenter au Tribunal canadien du commerce extérieur une demande de prorogation du délai pour interjeter appel. Le tribunal peut faire droit à la demande et imposer les conditions qu’il estime justes.

(2) The application must set out the reasons why the notice of appeal was not filed on time.

(2) La demande de prorogation énonce les raisons pour lesquelles l’avis d’appel n’a pas été déposé dans le délai prévu.

(3) The application must be made by filing with the President and the Secretary of the Canadian International Trade Tribunal the application accompanied by the notice of appeal.

(3) La demande de prorogation se fait par dépôt, auprès du président et du secrétaire du Tribunal canadien du commerce extérieur, de la demande et de l’avis d’appel.

(4) No order may be made under this section unless

(a) the application is made within one year after the expiry of the time set out in section 67; and

(b) the person making the application demonstrates that

(i) within the time set out in section 67 for appealing, the person was unable to act or to give a mandate to act in the person’s name or the person had a bona fide intention to appeal,

(ii) it would be just and equitable to grant the application,

(iii) the application was made as soon as circumstances permitted, and

(iv) there are reasonable grounds for the appeal.

(4) Il n’est fait droit à la demande de prorogation que si les conditions suivantes sont réunies:

a) la demande est présentée dans l’année suivant l’expiration du délai d’appel prévu à l’article 67;

b) l’auteur de la demande établit ce qui suit:

(i) au cours du délai d’appel prévu à l’article 67, il n’a pu ni agir ni mandater quelqu’un pour agir en son nom, ou il avait véritablement l’intention d’interjeter appel,

(ii) il serait juste et équitable de faire droit à la demande,

(iii) la demande a été présentée dès que possible,

(iv) l’appel est fondé sur des motifs raisonnables.

5. La première condition, énoncée à l’alinéa 67.1(4)a) de la Loi, exige que le Tribunal vérifie que la demande qui fait l’objet de la présente procédure a été présentée dans l’année suivant l’expiration du délai prévu à l’article 67 (c.-à-d. une année suivant l’expiration du délai de 90 jours suivant la date à laquelle l’ASFC a donné avis de sa décision en vertu du paragraphe 60[4]). L’ASFC a donné avis de cette décision le 28 décembre 2005. Donc, 90 jours à compter du 28 décembre 2005 était le 28 mars 2006. L’année suivant cette date se terminera le 29 mars 2007. Mme Woodworth a déposé la demande qui fait l’objet de la présente procédure le 10 mai 2006, soit avant le 29 mars 2007. Par conséquent, la première condition est remplie. L’ASFC n’a pas soutenu le contraire.

6. La deuxième condition, énoncée au sous-alinéa 67.1(4)b)(i) de la Loi, exige que, au cours de la période entre le 28 décembre 2005 et le 28 mars 20065 , l’auteur de la demande n’a pu ni agir ni mandater quelqu’un pour agir en son nom, ou qu’il avait véritablement l’intention d’interjeter appel. Mme Woodworth a soutenu ce qui suit : « Les documents ont été égarés au cours de quelques rénovations effectuées chez moi. Dès que j’ai pu repérer les documents, j’ai fait parvenir le tout par télécopieur au Tribunal qui l’a reçu le 10 mai 2006 »6 [traduction]. L’ASFC a prétendu que des rénovations domiciliaires n’entraînaient pas, dans une mesure raisonnable, une incapacité d’agir et que Mme Woodworth n’avait pas tenté d’obtenir un exemplaire de la décision de l’ASFC et, par conséquent, qu’elle « n’avait tout simplement pas agi dans le délai prévu »7 [traduction]. Par conséquent, selon l’ASFC, Mme Woodworth n’a pas rempli cette condition de la Loi. L’ASFC a prétendu que « faire parvenir son avis d’appel “dès qu’elle avait pu repérer les documents” n’établissait pas qu’elle avait véritablement l’intention d’agir dans le délai prévu de 90 jours »8 [traduction].

7. Mme Woodworth a présenté sa demande de réexamen de la décision originale de l’ASFC dans les moindres délais. Elle a présenté cette demande à l’ASFC aux termes du paragraphe 60(1) de la Loi le 9 septembre 2005, très peu de temps après que l’ASFC avait rendu sa décision le 24 août 2005. En tentant d’interjeter appel de la seconde décision de l’ASFC, pour laquelle elle demande une prolongation de délai dans le cadre de la présente procédure, Mme Woodworth a également agi rapidement après avoir repéré les documents qu’elle avait égarés. Le Tribunal observe que le collier en cause était un cadeau pour un membre de sa famille, une circonstance qui motiverait, dans une mesure raisonnable, la décision d’interjeter appel. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que Mme Woodworth avait véritablement l’intention d’interjeter appel de la décision de l’ASFC. Par conséquent, la deuxième condition est remplie.

8. La troisième condition, énoncée au sous-alinéa 67.1(4)b)(ii) de la Loi, exige qu’il soit juste et équitable de faire droit à la demande. Selon l’argument de l’ASFC, Mme Woodworth n’avait pas agi avec suffisamment de diligence lorsqu’elle avait laissé 42 jours s’écouler après l’expiration du délai réglementaire avant de traiter la demande.

9. Bien que la demande ait été présentée 42 jours après le délai d’expiration, Mme Woodworth a donné une explication plausible de ce retard. Le Tribunal observe que Mme Woodworth n’aurait pas nécessairement compris toutes les exigences procédurales applicables, et leurs conséquences, que ne l’aurait fait une appelante qui est représentée par un conseiller.

10. En outre, le Tribunal observe que la période de 42 jours n’est pas longue lorsqu’elle est examinée dans le contexte des délais qui ont été requis par l’ASFC pour prendre les mesures nécessaires dans le présent dossier, p. ex. 20 jours pour accuser réception de la demande de réexamen de Mme Woodworth (du 9 au 29 septembre 2005), puis 102 jours pour rendre une décision (du 9 septembre au 28 décembre 2005). Par conséquent, la troisième condition est remplie.

11. La quatrième condition, énoncée au sous-alinéa 67.1(4)b)(iii) de la Loi, exige que la demande soit présentée dès que possible. De l’avis du Tribunal, comme il est indiqué ci-dessus, Mme Woodworth semble avoir présenté la demande dès que possible. Par conséquent, la quatrième condition est remplie.

12. La cinquième condition, énoncée au sous-alinéa 67.1(4)b)(iv) de la Loi, exige que le Tribunal soit convaincu que l’appel est fondé sur des motifs raisonnables. L’ASFC a soutenu que cette condition n’a pas été remplie parce que, à son avis, le collier en cause est soit une « dague à pousser » au sens de l’article 9 de la partie 3 de l’annexe du Règlement, soit l’appareil décrit à l’article 10 de la partie 3 de l’annexe du Règlement et, par conséquent, est une arme prohibée. De l’avis du Tribunal, les renseignements versés au dossier à cette étape de la procédure indiquent qu’il est défendable que le collier en cause n’est pas une arme prohibée. Par conséquent, la cinquième condition est remplie.

DÉCISION

13. Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal fait droit à la demande.


1 . L.R.C. 1985 (2e supp.), c. 1 [Loi].

2 . L.R.C. 1985, c. C-46.

3 . L.C. 1997, c. 36.

4 . D.O.R.S./98-462 [Règlement].

5 . Cette période correspond au délai prévu à l’article 67 de la Loi, soit la période de 90 jours débutant le 28 décembre 2005, lorsque l’ASFC a donné avis de sa décision aux termes du paragraphe 60(4), et se terminant le 28 mars 2006.

6 . Lettre de Mme Woodworth adressée au Tribunal et datée du 13 juin 2006.

7 . Mémoire de l’ASFC, paras. 15, 20.

8 . Mémoire de l’ASFC, para. 21.