XEROX CANADA LTD.

XEROX CANADA LTD.
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2013-015

Décision et motifs rendus
le mardi 25 février 2014

Errata publiés
le lundi, 10 mars, 2014

TABLE DES MATIÈRES

 

EU ÉGARD À un appel entendu le 12 novembre 2013 en vertu de l’article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 25 février 2013 concernant une demande de révision d’une décision anticipée en matière de classement tarifaire aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

XEROX CANADA LTD. Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L’appel est admis.

Jason W. Downey
Jason W. Downey
Membre présidant

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

EU ÉGARD À un appel entendu le 12 novembre 2013 en vertu de l’article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 25 février 2013 concernant une demande de révision d’une décision anticipée en matière de classement tarifaire aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

XEROX CANADA LTD. Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

ERRATA

Le paragraphe 2 de l’exposé des motifs aurait dû être formulé comme suit :

La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si de l’encre chimique en vrac importée en bidons de 52 kilogrammes (les marchandises en cause), en plus de pouvoir être classée dans le numéro tarifaire 3707.90.90 de l’annexe du Tarif des douanes, peut être classée dans le numéro tarifaire 9927.00.00 à titre d’articles et matières devant être utilisés dans la fabrication de certains produits répertoriés pour imprimeurs et, par conséquent, bénéficier de la franchise de droits.

La deuxième phrase du paragraphe 21 de l’exposé des motifs aurait dû être formulée comme suit :

Les parties conviennent que les marchandises en cause peuvent être classées dans le numéro tarifaire 3707.90.90 du chapitre 37 à titre d’autres préparations chimiques pour usages photographiques.

Par ordre du Tribunal,
Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)
Date de l’audience : le 12 novembre 2013

Membre du Tribunal : Jason W. Downey, membre présidant

Conseiller juridique pour le Tribunal : Carrie Vanderveen

Gestionnaire par intérim, Programmes et
services du greffe : Lindsay Vincelli

Agent du greffe par intérim : Haley Raynor

PARTICIPANTS :

Appelante

Conseillers/représentants

Xerox Canada Ltd.

Michael Kaylor
John M. Peterson
Maria E. Celis

 

Intimé

Conseiller/représentant

Président de l’Agence des services frontaliers du Canada

Aileen Jones

TÉMOIN :

James Stevens
Directeur national de la commercialisation
Xerox Canada Ltd.

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario)  K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : secretaire@tcce-citt.gc.ca

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

  1. Le présent appel a été interjeté par Xerox Canada Ltd. (Xerox) le 23 mai 2013, aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes[1], à l’égard d’une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), aux termes du paragraphe 60(4), relativement à une demande de révision d’une décision anticipée en matière de classement tarifaire.
  2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si de l’encre chimique en vrac importée en bidons de 52 kilogrammes (les marchandises en cause), en plus de pouvoir être classée dans le numéro tarifaire 3703.90.90 de l’annexe du Tarif des douanes[2], peut être classée dans le numéro tarifaire 9927.00.00 à titre d’articles et matières devant être utilisés dans la fabrication de certains produits répertoriés pour imprimeurs et, par conséquent, bénéficier de la franchise de droits.

HISTORIQUE DE LA PROCÉDURE

  1. Le 3 juillet 2012, Xerox a demandé une décision anticipée, aux termes de l’article 43.1 de la Loi. Le 16 août 2012, l’ASFC a rendu une décision anticipée dans laquelle elle refusait l’application aux marchandises en cause des dispositions spéciales du numéro tarifaire 9927.00.00.
  2. Aux termes du paragraphe 60(2) de la Loi, Xerox a demandé une révision de la décision anticipée le 30 août 2012. Le 30 janvier 2013, l’ASFC a rendu une décision provisoire confirmant sa décision anticipée et a invité Xerox à présenter des renseignements supplémentaires à l’appui de son affirmation. Le 18 février 2013, Xerox a répondu à la décision provisoire rendue par l’ASFC.
  3. Le 25 février 2013, l’ASFC a confirmé sa décision provisoire.
  4. Le 23 mai 2013, Xerox a déposé un avis d’appel auprès du Tribunal aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi.
  5. Le Tribunal a tenu une audience publique à Ottawa (Ontario) le 12 novembre 2013. Xerox a fait entendre un témoin, M. James Stevens, directeur national de la commercialisation, Groupe de production de produits, Xerox. L’ASFC n’a fait entendre aucun témoin. Elle n’a soumis que peu d’éléments de preuve factuels dans ses observations écrites et orales, dont aucun ne contredisait le témoignage de M. Stevens.

MARCHANDISES EN CAUSE

  1. Les marchandises en cause sont importées du Japon pour être utilisées dans la production de cartouches d’encre conçues expressément pour être utilisées dans les modèles d’imprimantes 4590/4110 EPS et 4110 CP de Xerox.
  2. Les cartouches d’encre de Xerox contenant les marchandises en cause sont spécialement conçues pour ne convenir qu’à des modèles d’imprimantes particuliers de Xerox[3]. Les cartouches d’encre contiennent une « micropuce remplaçable par le client » [traduction] et une antenne[4]. La micropuce surveille constamment le fonctionnement de la cartouche et le niveau d’encre et, au moyen de l’antenne, communique avec les imprimantes pour informer les utilisateurs lorsque le niveau d’encre est faible et qu’une nouvelle cartouche doit être commandée[5]. Elle garantit également que la cartouche d’encre ne fonctionnera pas si elle placée dans la mauvaise imprimante[6]. Lorsque l’encre dans une cartouche est épuisée, la cartouche est envoyée à un tiers en sous-traitance pour être recyclée ou éliminée; elle n’est ni remplie ni reconditionnée[7].
  3. Selon M. Stevens, le modèle d’imprimante 4110 entre dans le « segment du marché de la production légère » [traduction] et le modèle d’imprimante 4590, qu’il décrit comme un « produit mitoyen » [traduction], entre dans la « portion des services numériques d’entreprise de la société » [traduction]. Il a déclaré que le segment des services numériques d’entreprise correspond aux produits technologiques de bureau haut de gamme de Xerox, mais qu’il s’agit d’une catégorie inférieure au segment de la production légère qui, pour sa part, a une identité commerciale plus définie[8]. Il qualifie également le modèle d’imprimante 4590 de solution de rechange aux imprimantes des ateliers d’imprimerie, puisqu’il fera le même travail en quelque sorte, mais à un prix moindre[9].
  4. Le manuel du produit déposé par Xerox indique que le modèle d’imprimante 4110 a un moteur d’impression de 110 pages par minute, six bacs d’alimentation d’une capacité maximale de 4 000 feuilles, un disque dur de 40 gigaoctets, des contrôleurs DocuSP et EFI® intégrés permettant de contrôler la sortie et d’automatiser le prépresse[10], un scanneur, un module d’insertion après fusion, une agrafeuse à position variable et un perforateur de 2/3 ou 3/4 trous[11]. Les éléments en option comprennent des chargeurs de grande capacité, un module de finition de brochures et une plieuse[12]. Le modèle d’imprimante 4110 produit généralement 100 000 impressions par mois, tandis que le modèle d’imprimante 4590 produit 60 000 impressions par mois[13].
  5. Les clients qui ont acheté le modèle d’imprimante 4110 au Canada sont à 50 p. 100 des imprimeurs commerciaux (comme Office Max, Staples, Office Depot et Print-for-Pay), à 25 p. 100 des entreprises de marketing, des détaillants et des sociétés professionnelles et à 25 p. 100 des clients des secteurs financier, gouvernemental et manufacturier[14]. Lorsque Xerox vendait les modèles d’imprimantes 4110 et 4590, leur prix de départ habituel était d’environ 30 000 $, mais il pouvait augmenter en fonction des options logicielles ou matérielles supplémentaires[15].

CADRE LÉGISLATIF

  1. Dans des appels interjetés aux termes de l’article 67 de la Loi concernant les questions de classement tarifaire, le Tribunal détermine le classement tarifaire des marchandises en cause conformément aux règles d’interprétation prescrites.
  2. La nomenclature tarifaire est énoncée en détail dans l’annexe du Tarif des douanes, qui est conforme au Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (le Système harmonisé) élaboré par l’Organisation mondiale des douanes (OMD)[16]. L’annexe est divisée en sections et en chapitres et chaque chapitre de l’annexe contient une liste de marchandises classées dans des positions, sous-positions et numéros tarifaires. Les sections et chapitres peuvent comprendre des notes concernant leur interprétation. Les articles 10 et 11 du Tarif des douanes prescrivent la méthode que le Tribunal doit appliquer pour l’interprétation de l’annexe afin de déterminer le classement tarifaire approprié de marchandises.
  3. Le paragraphe 10(1) du Tarif des douanes prévoit que le classement des marchandises importées est effectué, sauf indication contraire, en conformité avec les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé[17] et les Règles canadiennes[18] énoncées à l’annexe.
  4. Les Règles générales sont composées de six règles structurées en cascade, de sorte que si le classement des marchandises ne peut être déterminé conformément à la règle 1, il faut alors tenir compte de la règle 2, et ainsi de suite, jusqu’à ce que le classement soit établi. Le classement commence donc par l’application de la règle 1, qui prévoit ce qui suit : « [...] le classement [est] déterminé légalement d’après les termes des positions et des Notes de Sections ou de Chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et Notes, d’après les Règles suivantes. »
  5. L’article 11 du Tarif des douanes prévoit que, pour l’interprétation des positions et des sous-positions, le Tribunal doit tenir compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[19] et des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[20], publiés par l’OMD. Bien que les Avis de classement et les Notes explicatives n’aient pas force exécutoire pour le Tribunal, le Tribunal les applique à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire[21].
  6. Après que le Tribunal a utilisé cette méthode pour déterminer la position dans laquelle les marchandises en cause doivent être classées, l’étape suivante consiste à déterminer la sous-position et le numéro tarifaire appropriés, par application de la règle 6 des Règles générales dans le cas de la sous-position et des Règles canadiennes dans le cas du numéro tarifaire.

CLASSEMENT TARIFAIRE EN CAUSE

  1. Le chapitre 99 prévoit des dispositions de classement spéciales qui permettent que certaines marchandises soient importées au Canada en franchise de droits. Puisque aucune des positions du chapitre 99 n’est subdivisée au niveau des sous-positions ou des numéros tarifaires, il suffit que le Tribunal tienne compte, dans la mesure nécessaire, des règles 1 à 5 des Règles générales pour déterminer si des marchandises peuvent être classées dans ce chapitre. De plus, puisque le Système harmonisé réserve le chapitre 99 à des fins de classement spécial (c’est-à-dire à l’usage exclusif de pays pris individuellement), il n’y a pas d’avis de classement ni de notes explicatives à prendre en compte.
  2. La section XXI ne comporte aucune note. Cependant, le Tribunal estime que les notes 3 et 4 du chapitre 99 sont pertinentes dans le cadre du présent appel. Ces notes prévoient ce qui suit :

3. Les marchandises peuvent être classées dans un numéro tarifaire du présent Chapitre et peuvent bénéficier des taux de droits de douane du tarif de la nation la plus favorisée ou du tarif de préférence prévus au présent Chapitre qui s’appliquent à ces marchandises selon le traitement tarifaire applicable selon le pays d’origine, mais ce classement est subordonné au classement préalable de celles-ci dans un numéro tarifaire des Chapitres 1 à 97 et à l’observation des conditions prévues par les textes d’application qui leurs sont applicables.

4. Les termes utilisés dans ce Chapitre et dans les Chapitre 1 à 97 s’entendent au sens de ces derniers Chapitres.

  1. Conformément à la note 3 du chapitre 99, les marchandises en cause ne peuvent être classées dans le chapitre 99 que si elles ont préalablement été classées dans un numéro tarifaire des chapitres 1 à 97. Les parties conviennent que les marchandises en cause peuvent être classées dans le numéro tarifaire 3703.90.90 du chapitre 37 à titre d’autres préparations chimiques pour usages photographiques. Selon les éléments de preuve, le Tribunal accepte ce classement. Par conséquent, aux fins du présent appel, le Tribunal est d’avis que la condition énoncée dans la note 3 du chapitre 99 est remplie.
  2. Par conséquent, la seule question en litige qui demeure en suspens devant le Tribunal consiste à déterminer si les marchandises en cause respectent les conditions du numéro tarifaire 9927.00.00, qui prévoit ce qui suit :

Articles et matières devant être utilisés dans la fabrication des produits suivants pour imprimeurs, lithographes, relieurs, convertisseurs de papier ou de feuilles métalliques, fabricants de stéréotypes, d’électrotypes, de plaques d’imprimerie ou de cylindres d’impression ou par des fabricants d’articles en papier, en carton ou en feuilles métalliques :

[...]

Machines et appareils de bureau et leurs accessoires, autres que machines à écrire et machines pour le traitement des textes, machines à calculer, machines comptables, machines à affranchir, machines à établir les tickets et machines similaires comportant un dispositif de calcul, caisses enregistreuses, machines automatiques de traitement de l’information et leurs unités, lecteurs magnétiques ou optiques, machines de mise d’information sur support sous forme codée et machines de traitement de ces informations, machines et appareils à brocher ou agrafer des types utilisant le fil métallique, agendas électroniques portatifs, et leurs accessoires;

Machines et appareils à imprimer et machines auxiliaires pour l’impression;

[...]

Parties de tout ce qui précède.

POSITION DES PARTIES

Xerox

  1. Xerox soutient que les marchandises en cause peuvent être classées dans le numéro tarifaire 9927.00.00 pour les motifs suivants : a) elles sont des « matières »; b) elles sont utilisées dans la fabrication d’une « partie » d’une machine à imprimer; c) les acheteurs des cartouches d’encre de Xerox peuvent être considérés comme des « imprimeurs ».
  2. À l’appui de son premier argument, Xerox soutient que les marchandises en cause sont des « matières » d’après la jurisprudence selon laquelle une « matière » est une substance n’ayant pas d’utilisation finale en soi et n’ayant pas été fabriquée en un article de conception, de taille ou de forme particulière[22].
  3. Concernant l’élément de « fabrication » de son deuxième argument, Xerox maintient que les étapes suivies pour faire une cartouche d’encre complète respectent la définition du mot « fabrication » donnée par la Cour suprême du Canada[23]. Dans The Queen v. York Marble, Tile and Terrazzo Ltd.[24], la Cour suprême du Canada a défini la « fabrication » comme « [...] la production d’articles destinés à certains usages, à partir de matières premières ou préparées, en donnant à ces matières de nouvelles formes, qualités et propriétés ou combinaisons soit à la main, soit à la machine[25] » [italiques dans l’original, traduction].
  4. Xerox allègue que les cartouches d’encre respectent un nombre suffisant des critères établis par la jurisprudence pour être des « parties[26] ». Les cartouches d’encre font partie intégrante de la conception d’imprimantes Xerox, sont essentielles à leur fonction et sont spécialement conçues pour ne fonctionner qu’avec des modèles particuliers d’imprimantes Xerox[27].
  5. Xerox affirme que ses machines à imprimer sont décrites par le passage « [m]achines et appareils à imprimer et machines auxiliaires pour l’impression », puisqu’elles sont publicisées et vendues en tant que machines à imprimer[28].
  6. À l’appui de son troisième argument, Xerox souligne un sens ordinaire du mot « imprimeur » comme « [u]ne personne qui imprime, dans tous les sens du terme [...][29] » [traduction] et la définition large du mot « imprimantes » en tant qu’appareils dans les notes explicatives de la position no 84.43[30].
  7. En outre, Xerox souligne que les expressions « ne [devant] servir [...] qu’aux [imprimeurs] » et « dans l’exercice de leur profession » ont été supprimées du passage « ne devant servir dans l’exercice de leur profession qu’aux imprimeurs » des versions antérieures à 1997 du numéro tarifaire. Elle allègue que le Parlement, en supprimant ces mots, visait à élargir la catégorie de personnes pouvant bénéficier du numéro tarifaire au-delà de celles dont la seule activité est l’imprimerie[31].
  8. Xerox allègue également que si le Parlement avait l’intention de limiter le mot « imprimeurs » aux « imprimeurs commerciaux » [traduction], il aurait pu le préciser[32]. Enfin, elle maintient que les éléments de preuve indiquent que tous les clients de Xerox qui ont acheté les modèles d’imprimantes 4590 et 4110 prennent part à l’impression commerciale dans le cadre de leur activité professionnelle générale et que personne n’utilise ces imprimantes dans son bureau à domicile[33].

ASFC

  1. L’ASFC allègue que les marchandises en cause ne peuvent être classées dans le numéro tarifaire 9927.00.00 pour les motifs suivants : a) les marchandises ne sont pas utilisées dans la fabrication d’un produit répertorié; b) les cartouches d’encre ne font pas partie d’un des produits énumérés dans le numéro tarifaire; c) les acheteurs des cartouches d’encre de Xerox ne sont pas des « imprimeurs ».
  2. Quant à l’exigence relative à la « fabrication », l’ASFC soutient que les cartouches d’encre sont fabriquées, puis remplies d’encre. La cartouche agit à titre de contenant pour l’encre, et l’encre ne joue aucun rôle dans la fabrication de la cartouche[34].
  3. L’ASFC soutient que les cartouches d’encre ne sont ni des « machines et appareils de bureau », ni des « machines et appareils à imprimer », ni des « parties » de ces produits. En ce qui concerne les « machines et appareils de bureau », l’ASFC souligne que Xerox qualifie ses imprimantes de « machines automatiques de traitement de l’information » (machines ATI), lesquelles sont explicitement exclues de la liste des « machines et appareils de bureau ».
  4. Quant à l’expression « machines et appareils à imprimer », l’ASFC allègue que, compte tenu de l’exclusion des « machines automatiques de traitement de l’information » des « machines et appareils de bureau », «  [...] il est illogique de penser que le législateur [...] voulait les inclure à titre de parties de l’élément suivant de la liste, soit les machines et appareils à imprimer[35] » [nos italiques, traduction]. L’ASFC ajoute que le contexte fourni par les autres éléments de la liste, qui ne fait pas mention du mot « imprimante » et qui renvoie le plus souvent aux mots « imprimerie » et « impression » pour décrire les parties d’une presse à imprimer, indique que les cartouches d’encre d’une imprimante laser ne sont pas comprises dans la portée voulue de la liste[36].
  5. En ce qui concerne les « parties », l’ASFC maintient que les cartouches d’encre sont semblables aux marchandises dans des causes antérieures, dans lesquelles le Tribunal n’a pas considéré ces marchandises comme des parties. Plus particulièrement, l’ASFC invoque une cause antérieure dans laquelle le Tribunal a conclu que les rouleaux de pellicule qui fournissent de l’encre à un télécopieur n’étaient pas des parties du télécopieur, bien que les marchandises « [...] ne [puissent] être utilisées que pour des modèles particuliers de télécopieurs Xerox, [...] [que] les marchandises ne [puissent] pas être utilisées avec d’autres machines et [...] [que] les télécopieurs ne [puissent] pas fonctionner sans les marchandises [...][37] ».
  6. Pour ce qui est de la portée du mot « imprimeurs », l’ASFC allègue que le contexte fourni par les autres métiers énumérés dans le numéro tarifaire 9927.00.00 indique que le sens de ce mot doit se limiter à ceux dont l’« activité centrale » [traduction] est liée au secteur de l’imprimerie[38].
  7. L’ASFC appuie cette position en alléguant que la liste des métiers figurant dans le numéro tarifaire indique que le mot « imprimeurs » doit être interprété dans le contexte des « [...] technologies d’impression plus traditionnelles des presses à imprimer[39] » [traduction]. Elle souligne également la décision du Tribunal dans Marmen Énergie Inc. et Marmen Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada[40] pour faire valoir que le numéro tarifaire 9927.00.00 vise à offrir un allégement tarifaire pour des produits utilisés par des professionnels du secteur de l’impression[41].
  8. Enfin, l’ASFC allègue qu’étant donné les éléments de preuve avancés par M. Stevens selon lesquels les entreprises dont l’activité première est l’imprimerie utilisent une technologie plus rapide et de plus grande envergure que les modèles d’imprimantes 4110 et 4590, les éléments de preuve ne suffisent pas pour conclure que les imprimantes Xerox en l’espèce sont utilisées par des entreprises dont l’activité centrale est l’imprimerie[42].

ANALYSE

Les marchandises en cause peuvent-elles être classées dans le numéro tarifaire 9927.00.00?

  1. Pour déterminer si les marchandises en cause peuvent être classées dans le numéro tarifaire 9927.00.00, le Tribunal doit déterminer si 1) les marchandises en cause sont des matières, 2) si elles sont utilisées dans la fabrication d’un produit, 3) si le produit dans lequel les marchandises sont utilisées figure dans le numéro tarifaire 9927.00.00 et 4) si le produit est pour imprimeurs.

Les marchandises en cause sont-elles des « matières »?

  1. Xerox soutient que les marchandises en cause sont des « matières ». Dans son sens ordinaire, le mot « materials » (matières) s’entend « [...] [d]es éléments, composants ou substances desquels un objet est composé ou peut être fait [...][43] » [traduction]. De plus, le Tribunal a considéré les « matières » comme ce qui entre dans la fabrication d’une marchandise[44]. Puisque les marchandises en cause sont des substances qui constituent des parties de cartouches d’encre et sont utilisées dans le procédé de fabrication de cartouches d’encre, le Tribunal conclut que ce sont des « matières ».

Les marchandises en cause sont-elles utilisées dans la fabrication d’un produit?

  1. Dans York Marble, la Cour suprême du Canada a défini la « fabrication » comme « [...] la production d’articles destinés à certains usages, à partir de matières premières ou préparées, en donnant à ces matières de nouvelles formes, qualités et propriétés ou combinaisons soit à la main, soit à la machine[45] » [italiques dans l’original].
  2. En l’espèce, la poudre d’encre en vrac est combinée, sur une chaîne de montage, à un boîtier de cartouche vide, à des bouchons et à une micropuce remplaçable par le client munie d’une antenne pour former une cartouche d’encre[46]. La combinaison de l’encre et du boîtier de cartouche donne au produit fini une nouvelle forme et de nouvelles propriétés; la poudre d’encre en vrac est transformée en un produit qui peut être exclusivement utilisé dans des machines à imprimer Xerox particulières. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont utilisées dans la fabrication d’un produit.

Le produit fabriqué figure-t-il dans le numéro tarifaire 9927.00.00?

  1. Le Tribunal doit déterminer si a) les cartouches d’encre sont des parties, b) si les modèles d’imprimantes 4110 et 4590 sont des « machines ATI », c) si les modèles d’imprimantes 4110 et 4590 sont des machines et appareils de bureau et leurs accessoires et d) si les modèles d’imprimantes 4110 et 4590 sont des machines et appareils à imprimer et des machines auxiliaires pour l’impression.
–        Les cartouches d’encre sont-elles des « parties »?
  1. La jurisprudence a établi certains critères pouvant servir à déterminer si une marchandise donnée est une « partie ».
  2. Dans Sous-M.R.N c. Androck Inc., la Cour d’appel fédérale a exigé d’une « pièce » qu’elle se rapporte au tout avec lequel elle servira pour former une « partie essentielle et intégrante » et qu’elle « [...] [ne soit pas] seulement [...] un accessoire offert en option [...][47] ».
  3. Dans Staub Electronics Ltd. c. Sous-M.R.N.D.A.[48], le Tribunal a convenu qu’une marchandise, pour être considérée comme une « partie », ne doit être destinée qu’à servir avec une autre marchandise et doit être spécialement conçue pour l’autre marchandise.
  4. Dans York Barbell Co. Ltd. c. Sous-M.R.N.D.A.[49], le Tribunal a examiné la question de savoir si la partie était essentielle au fonctionnement de l’autre marchandise et si elle était installée dans l’autre marchandise au cours de la fabrication. Il a également considéré les pratiques et les usages commerciaux courants de la marchandise comme pertinents pour déterminer s’il s’agissait d’une « partie ». Cependant, le Tribunal a, à plusieurs occasions, indiqué que ces critères ne s’appliquent pas de manière universelle à chaque cause et que chaque ensemble de faits doit être jugé selon ses particularités propres[50].
  5. En l’espèce, le Tribunal conclut que les cartouches d’encre, dans lesquelles les marchandises en cause sont intégrées, sont des « parties ». Les cartouches d’encre sont des marchandises de haute technologie qui sont spécialement formées et contiennent une micropuce remplaçable par le client. La forme et la micropuce de la cartouche garantissent que la cartouche ne puisse être utilisée d’une manière autre que dans des modèles d’imprimantes particuliers et qu’aucune autre cartouche ne puisse être utilisée avec ces imprimantes[51].
  6. De plus, les imprimantes Xerox pour lesquelles les cartouches d’encre sont conçues ne fonctionneront pas sans une cartouche d’encre[52]. Par conséquent, les cartouches d’encre sont essentielles à la fonction des imprimantes Xerox pour lesquelles elles sont conçues, ne sont destinées qu’à servir avec ces imprimantes et en sont des parties essentielles et intégrantes.
  7. Dans Xerox, le Tribunal a conclu que les rouleaux de pellicule à transfert thermique pour télécopieurs étaient simplement des systèmes remplaçables et jetables servant à fournir une matière et n’étaient donc pas des parties, même si le télécopieur ne pouvait fonctionner sans eux[53]. L’ASFC allègue que le Tribunal doit suivre cette décision[54].
  8. Le Tribunal n’est pas de cet avis. Les deux causes présentent de nombreuses différences.
  9. Premièrement, M. Stevens a déclaré que de nombreuses parties autres que simplement les cartouches d’encre, comme les agrafeuses et les tambours, sont régulièrement changées par des techniciens de service et d’entretien[55]. Ce témoignage indique que de nombreuses parties essentielles au fonctionnement de ces imprimantes à grand volume s’usent avec le temps et sont régulièrement remplacées. Par conséquent, le Tribunal conclut que le critère de « permanence » appliqué dans Xerox ne s’applique pas aux faits particuliers de l’espèce.
  10. Deuxièmement, les marchandises en cause ne sont pas les mêmes. Dans Xerox, les marchandises étaient des rouleaux de pellicule à transfert thermique qui fournissaient de l’encre à des télécopieurs. Bien que les marchandises soient semblables, en ce sens qu’elles fournissent des matières à leur machine hôte[56], les marchandises en cause ne sont pas simplement des dispositifs temporaires servant à fournir de l’encre. Elles sont plutôt des unités de rechange de haute technologie qui accomplissent des fonctions en plus de fournir de l’encre. Grâce à sa puce électronique, une cartouche d’encre peut interagir avec le logiciel de l’imprimante pour surveiller le fonctionnement de la cartouche et les niveaux d’encre, améliorer la qualité de l’image et informer d’avance les utilisateurs lorsque les niveaux d’encre sont faibles et qu’une nouvelle cartouche doit être commandée[57]. Par l’entremise de sa puce électronique, la cartouche devient un élément essentiel de l’imprimante et donc une « partie ».
  11. Enfin, la nature de l’analyse est différente dans les deux causes. Dans Xerox, le Tribunal devait déterminer lequel des classements tarifaires concurrents décrivaient le mieux les marchandises. Cela n’est pas le cas de l’espèce. Ici, le Tribunal ne doit que déterminer si les termes du numéro tarifaire 9927.00.00 décrivent les marchandises en cause.
–        Les imprimantes Xerox sont-elles des « machines ATI »?
  1. Tel qu’indiqué ci-dessus, l’ASFC allègue que les modèles d’imprimantes 4110 et 4590 sont des machines ATI et que, par conséquent, elles n’entrent pas dans les catégories de « machines et appareils de bureau » ou de « machines et appareils à imprimer[58] ».
  2. En réponse, Xerox souligne la note 5 du chapitre 84 qui, selon elle, exclut expressément les imprimantes du classement à titre de machines ATI[59].
  3. La note 4 du chapitre 99 indique que les termes utilisés dans ce chapitre et dans les chapitres 1 à 97 s’entendent au sens de ces derniers chapitres. Par conséquent, le Tribunal examinera si ces autres chapitres donnent une orientation sur la question de savoir si les imprimantes laser Xerox sont des machines ATI.
  4. La note 5 du chapitre 84, qui définit le terme « machines ATI » et fournit une orientation sur la question de savoir si les imprimantes laser sont comprises dans le sens de ce terme, prévoit ce qui suit :

A) On entend par machines [ATI] au sens du no 84.71 :

1) enregistrer le ou les programmes de traitement et au moins les données immédiatement nécessaires pour l’exécution de ce ou de ces programmes;

2) être librement programmées conformément aux besoins de l’utilisateur;

3) exécuter des traitements arithmétiques définis par l’utilisateur; et

4) exécuter, sans intervention humaine, un programme de traitement dont elles doivent pouvoir, par décision logique, modifier l’exécution au cours du traitement.

B) Les machines [ATI] peuvent se présenter sous forme de systèmes comprenant un nombre variable d’unités distinctes.

[...]

D) Le no 84.71 ne couvre pas les appareils ci-après lorsqu’ils sont présentés séparément, même s’ils remplissent toutes les conditions énoncées à la Note 5 C) :

1) les imprimantes, les copieurs, les télécopieurs, même combinés entre eux;

[...]

E) Les machines incorporant une machine automatique de traitement de l’information ou travaillant en liaison avec une telle machine et exerçant une fonction propre autre que le traitement de l’information, sont à classer dans la position correspondant à leur fonction ou à défaut, dans une position résiduelle.

  1. Le Tribunal est d’avis que les modèles d’imprimantes 4110 et 4590 sont en mesure d’exercer les fonctions indiquées dans la note 5A) du chapitre 84 et respectent donc la définition des machines ATI. Les deux modèles contiennent un disque dur[60] et une interface utilisateur à écran plat, et peuvent traiter le logiciel qui est vendu avec l’imprimante[61]. En outre, les deux modèles peuvent traiter des signaux reçus de la part de la micropuce sur la cartouche d’encre pour envoyer différents messages à l’utilisateur selon les signaux reçus[62].
  2. Cependant, la note 5E) du chapitre 84 indique que les machines incorporant une machine ATI et exerçant une fonction propre autre que le traitement de l’information sont à classer dans la position correspondant à leur fonction ou dans une position résiduelle.
  3. Les modèles d’imprimantes 4110 et 4590 ont comme principal objet d’imprimer des documents et non de traiter de l’information. Par conséquent, la note 5E) du chapitre 84 exclut les modèles d’imprimantes 4110 et 4590 de l’inclusion dans la position no 84.71 à titre de machines ATI. Cette conclusion est confirmée par la note 5D), qui indique que la position no 84.71 ne couvre pas les imprimantes et les copieurs, même combinés entre eux, lorsqu’ils sont présentés séparément.
  4. Par conséquent, bien que les modèles d’imprimantes 4110 et 4590 incluent des machines ATI et que Xerox qualifie ces modèles d’imprimantes ATI, ils ne seraient pas classés dans la position tarifaire des machines ATI. Ces modèles d’imprimantes ne sont donc pas visés par l’exclusion des machines ATI qui est prévue par le numéro tarifaire 9927.00.00 et pourraient être visés par ce numéro tarifaire.
–        « Machines et appareils de bureau et leurs accessoires »
  1. Puisque le Tribunal a conclu que les modèles d’imprimantes 4110 et 4590 ne seraient pas classés à titre de machines ATI, ils ne sont pas explicitement exclus de la catégorie des « machines et appareils de bureau et leurs accessoires ».
  2. Bien que la catégorie des « machines et appareils de bureau » soit vaste et pourrait sans doute contenir les modèles d’imprimantes 4110 et 4590, comme il en sera question ci-dessous, le Tribunal estime que la catégorie des « machines et appareils à imprimer » décrit plus précisément ces imprimantes et il préfère recourir à une description plus spécifique plutôt qu’à une description plus générale.
–        « Machines et appareils à imprimer et machines auxiliaires pour l’impression »
  1. Le terme « machinery » (machines et appareils) s’entend, dans son sens ordinaire, des « [...] machines en général ou en tant qu’unité fonctionnelle [...] » [traduction] et des « [...] parties mobiles d’une machine [...][63] » [traduction]. Le sens ordinaire du terme « machine » (machine) est « [...] un appareil utilisant ou appliquant une puissance mécanique et comportant plusieurs pièces, chacune ayant une fonction précise qui ensemble permet d’effectuer certains types de travaux » [traduction] ou un « [...] type d’engin particulier, par exemple un véhicule, une pièce d’un appareil électrique ou électronique, etc.[64] » [traduction].
  2. Puisque les modèles d’imprimantes 4110 et 4590 fonctionnent de manière mécanique et électronique[65] et ont de nombreuses parties qui fonctionnent ensemble pour imprimer des documents, le Tribunal conclut que ce sont des « machines et appareils à imprimer ».
  3. L’ASFC allègue que le contexte fourni par le numéro tarifaire 9927.00.00, dans lequel les mots « imprimerie », « impression » et « imprimant » sont le plus souvent utilisés pour décrire des parties de presses à imprimer, appuie son argument selon lequel les cartouches d’encre ne sont pas des parties de machines et appareils à imprimer[66]. Le Tribunal n’est pas convaincu.
  4. Chacun des éléments figurant dans la liste du numéro tarifaire 9927.00.00 est séparé par un point-virgule, qui indique qu’il s’agit d’éléments distincts[67]. En outre, rien dans le numéro tarifaire ou dans le chapitre 99 n’indique que les « machines et appareils à imprimer et machines auxiliaires pour l’impression » se limitent aux presses à imprimer. D’ailleurs, si c’était le cas, la liste d’éléments aurait probablement été considérablement plus courte.

Le produit est-il pour imprimeurs?

  1. Comme indiqué ci-dessus, l’ASFC soutient que le sens du mot « imprimeurs » doit se limiter à ceux dont l’« activité centrale » est liée au secteur de l’imprimerie. En revanche, Xerox allègue que le mot « imprimeurs » pourrait comprendre toute personne qui imprime et que, quoi qu’il en soit, les éléments de preuve indiquent que tous les clients de Xerox qui ont acheté les modèles d’imprimantes 4110 et 4590 prennent part à l’impression commerciale dans le cadre de leurs activités professionnelles.
  2. Le Tribunal commencera son analyse par le sens ordinaire du mot « printer » (imprimeur) lorsqu’il renvoie à une personne plutôt qu’à un dispositif mécanique. Le Canadian Oxford Dictionary définit « printer » comme étant « [...] une personne ou une entreprise qui imprime des livres, des magazines, du matériel publicitaire, etc. » [traduction] et comme étant « [...] le propriétaire d’une imprimerie [...][68] » [traduction].
  3. Le Tribunal est d’avis que ces définitions indiquent qu’un « imprimeur » désigne celui qui prend part à l’impression de documents. Elles tendent également à orienter l’interprétation du mot « imprimeur » vers une entreprise commerciale, dans laquelle de grands volumes d’impression sont vraisemblablement traités. Par conséquent, le Tribunal conclut que les particuliers effectuant des travaux d’impression à partir d’imprimantes à domicile ne peuvent être considérés comme étant des « imprimeurs » aux fins du numéro tarifaire 9927.00.00, comme le soutient Xerox.
  4. Le Tribunal appuie cette opinion sur l’objet du chapitre 99. Il est d’avis que l’objet général du chapitre 99 est de soutenir des entreprises commerciales. La plupart des positions tarifaires concernent clairement des marchandises utilisées par des secteurs particuliers, comme ceux des mines, des forêts, de l’agriculture, du pétrole et du gaz naturel, des produits pharmaceutiques et de la fabrication. Il en ressort clairement que le sens du mot « imprimeurs » n’est pas assez large pour inclure toutes les personnes qui impriment, y compris celles qui effectuent des travaux d’impression sur leur ordinateur à domicile, comme le soutient Xerox. Il ne comprend plutôt que les personnes et les entreprises qui impriment dans le cadre d’une entreprise commerciale.
  5. En revanche, le Tribunal estime que ces définitions ne sont pas si étroites au point de ne limiter le sens du mot « imprimeurs » qu’à ceux dont l’activité centrale est l’imprimerie ou qui utilisent des technologies d’impression traditionnelles, telles que des presses à imprimer, comme le soutient l’ASFC.
  6. Le Tribunal appuie cette opinion sur la modification de 1997 du numéro tarifaire 9927.00.00, dans lequel les expressions « ne [devant] servir [...] qu’aux [imprimeurs] et « dans l’exercice de leur profession » ont été supprimées du passage « ne devant servir dans l’exercice de leur profession qu’aux imprimeurs ». Bien que le Tribunal n’estime pas que la suppression de ces mots modifie considérablement le sens du numéro tarifaire, il considère que leur suppression indique un assouplissement des règles concernant les utilisateurs des marchandises et que les personnes ou les entreprises utilisant les marchandises ne se limitent pas à celles dont l’activité principale est l’imprimerie.
  7. Le Tribunal conclut plutôt que les définitions susmentionnées indiquent que les « imprimeurs » sont ceux qui, comme les imprimeurs de relevés, les ateliers d’impression payante et les services d’imprimerie internes dans de grandes entreprises, impriment en grands volumes dans le cadre d’une entreprise commerciale.
  8. Au cours de l’audience, M. Stevens a déclaré que 100 p. 100 des modèles d’imprimantes 4110 et 4590 sont vendus à des entreprises[69]. Il a également confirmé que parmi les imprimantes du modèle 4110 qui sont vendues, 50 p. 100 le sont à des imprimeurs commerciaux, dont ceux qui impriment des livres pour des éditeurs et des relevés d’opérations pour les banques et les ateliers d’impression payante[70], 25 p. 100, à des entreprises de marketing, à des détaillants et à des sociétés professionnelles, comme de grands cabinets comptables et cabinets d’avocats, et les 25 p. 100 restants, à des comptes des secteurs financier, gouvernemental et manufacturier[71].
  9. Bien que Xerox n’ait pas fourni une ventilation des types de clients qui ont acheté les imprimantes de modèle 4590, M. Stevens a indiqué que Xerox cible le même type de clients pour les modèles d’imprimantes 4590 et 4110 et que de nombreux modèles d’imprimantes 4590 ont été vendus à des imprimeurs commerciaux, à des entreprises de marketing, à des détaillants et à des sociétés professionnelles[72].
  10. D’après les éléments de preuve, le Tribunal conclut que les modèles d’imprimantes 4110 et 4590 avec lesquels les marchandises en cause sont destinées à être utilisées sont « pour imprimeurs » aux fins du chapitre 99.

DÉCISION

  1. Compte tenu de ce qui précède, l’appel est admis.
 

[1].     L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.) [Loi].

[2].     L.C. 1997, ch. 36.

[3].     Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 30.

[4].     Ibid. à la p. 29.

[5].     Ibid. à la p. 29.

[6].     Ibid. à la p. 31.

[7].     Pièce AP-2013-015-22, vol. 1B.

[8].     Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, aux pp. 21-22.

[9].     Ibid. aux pp. 21-23.

[10].   Ibid. aux pp. 10-11.

[11].   Pièce AP-2013-015-16A, onglets 1, 5, vol. 1A; Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, aux pp. 14-15.

[12].   Pièce AP-2013-015-16A, onglets 1, 5, vol. 1A.

[13].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 17.

[14].   Pièce AP-2013-015-07A au par. 10, vol. 1; Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 40.

[15].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, aux pp. 19-20, 46. Ces imprimantes ne sont plus produites ni vendues par Xerox.

[16].   Le Canada est l’un des pays signataires de la Convention internationale sur le Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, qui régit le Système harmonisé.

[17].   L.C. 1997, ch. 36, annexe [Règles générales].

[18].   L.C. 1997, ch. 36, annexe.

[19].   Organisation mondiale des douanes, 2e éd., Bruxelles, 2003 [Avis de classement].

[20].   Organisation mondiale des douanes, 5e éd., Bruxelles, 2012 [Notes explicatives].

[21].   Voir Canada (Procureur général) c. Suzuki Canada Inc., 2004 CAF 131 (CanLII) aux par. 13, 17, où la Cour d’appel fédérale a interprété l’article 11 du Tarif des douanes comme signifiant que les Notes explicatives doivent être respectées, à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire. Le Tribunal est d’avis que cette interprétation s’applique également aux Avis de classement.

[22].   Pièce AP-2013-015-07A aux par. 67-69, vol. 1; Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 58.

[23].   Pièce AP-2013-015-07A au par. 65, vol. 1; Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, aux pp. 58-59.

[24].   [1968] SCR 140 [York Marble].

[25].   York Marble à la p. 145.

[26].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 65.

[27].   Pièce AP-2013-015-07A au par. 71, vol. 1; Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 62.

[28].   Pièce AP-2013-015-07A au par. 67, vol. 1.

[29].   Ibid. au par. 46.

[30].   Ibid. au par. 58.

[31].   Ibid. aux par. 34, 38, 39, 44; Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, aux pp. 70-71.

[32].   Pièce AP-2013-015-07A au par. 61, vol. 1.

[33].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, aux pp. 72-73.

[34].   Pièce AP-2013-015-09A, onglet 1 à la p. 7, vol. 1; Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 88.

[35].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 98.

[36].   Ibid. aux pp. 93-96.

[37].   Xerox Canada Ltée/The Document Company c. Sous-M.R.N. (10 juin 1999), AP-98-061 (TCCE) [Xerox] à la p. 4.

[38].   Pièce AP-2013-015-09A aux par. 45-52, vol. 1; Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, aux pp. 99-100.

[39].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 99.

[40].   (14 décembre 2012), AP-2011-057 et AP-2011-058 (TCCE).

[41].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 102; pièce AP-2013-015-09A au par. 47, vol. 1.

[42].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 107.

[43].   Merriam-Webster’s Collegiate Dictionary, 11e éd., s.v. « material ».

[44].   Grodan Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (7 juin 2012), AP-2011-030 (TCCE) au par. 25; Les Éditions Panini du Canada Ltée c. M.R.N. (28 octobre 1991), AP-90-167 et AP-90-168 (TCCE).

[45].   York Marble à la p. 145.

[46].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 29.

[47].   [1987] J.C.F. no 45.

[48].   (2 novembre 1989), 2764 (TCCE).

[49].   (16 mars 1992), AP-91-131 (TCCE) [York Barbell].

[50].   York Barbell; Nokia Products Limited et Primecell Communications Inc. c. Commissaire de l’Agence des douanes et du Revenu du Canada (5 août 2003), AP-2001-073, AP-2001-074 et AP-2001-084 (TCCE).

[51].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 30; pièce AP-2013-015-07A au par. 11, vol. 1.

[52].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 31.

[53].   Xerox au par. 26.

[54].   Pièce AP-2013-015-09A au par. 60, vol. 1.

[55].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, aux pp. 48-49.

[56].   Xerox à la p. 2.

[57].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, aux pp. 32-33.

[58].   Ibid. aux pp. 96-98.

[59].   Ibid. aux pp. 114-115.

[60].   Pièce AP-2013-015-16A, onglet 5, vol. 1A. Le Tribunal n’a aucune raison de douter que le modèle 4590 contient un disque dur semblable.

[61].   Pièce AP-2013-015-16A, onglet 1, vol. 1A; Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 20.

[62].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, aux pp. 31-32.

[63].   Merriam-Webster’s Collegiate Dictionary, 11e éd., s.v. « machinery ».

[64].   Canadian Oxford Dictionary, 2e éd., s.v. « machine ».

[65].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 31.

[66].   Ibid. aux pp. 94-96.

[67].   Le Tribunal a adopté une démarche semblable dans des causes antérieures. Voir Bauer Nike Hockey Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (18 mai 2006), AP-2005-019 (TCCE) au par. 23; Costco Wholesale Canada Ltd. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (29 juillet 2013), AP-2012-041 et AP-2012-042 (TCCE) au par. 45.

[68].   Deuxième éd., s.v. « printer ».

[69].   Transcription de l’audience publique, 12 novembre 2013, à la p. 27.

[70].   Ibid. aux pp. 26, 40-41.

[71].   Ibid. à la p. 40.

[72].   Ibid. aux pp. 22-23.