UNITOOL INC.

UNITOOL INC.
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2013-060

Décision et motifs rendus
le jeudi 4 décembre 2014

TABLE DES MATIÈRES

 

EU ÉGARD À un appel entendu le 26 août 2014, aux termes de l’article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 13 décembre 2013 et le 22 janvier 2014 concernant une demande de révision d’une décision anticipée et une demande de révision aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

UNITOOL INC. Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

Jean Bédard
Jean Bédard
Membre présidant

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)
Date de l’audience : le 26 août 2014

Membre du Tribunal : Jean Bédard, membre présidant

Conseillers juridiques pour le Tribunal : Anja Grabundzija
Alexandra Pietrzak

Agent du greffe : Alexis Chénier

PARTICIPANTS :

Appelante

Conseiller/représentant

Unitool Inc.

Marco Ouellet

 

Intimé

Conseiller/représentant

Président de l’Agence des services frontaliers du Canada

Lune Arpin

TÉMOIN :

Hapet Jay Tutunjian
Vice-président, Ventes et marketing
Unitool Inc.

 

Veuillez adresser toutes les communications au :

Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario)  K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : secretaire@tcce-citt.gc.ca

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

  1. Le présent appel est interjeté par Unitool Inc. (Unitool) aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes[1], à l’égard de décisions rendues le 13 décembre 2013 et le 22 janvier 2014 par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) aux termes du paragraphe 60(4). Les décisions confirmaient les révisions réputées du classement tarifaire de certaines marchandises importées par Unitool et confirmaient une décision anticipée concernant le classement tarifaire desdites marchandises ou de marchandises similaires.
  2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si certaines marchandises importées par Unitool sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9403.20.00 de l’annexe du Tarif des douanes[2] à titre d’autres meubles en métal, comme l’a déterminé l’ASFC, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 7326.90.90 à titre d’autres ouvrages en fer ou en acier, comme le soutient Unitool.

HISTORIQUE DE LA PROCÉDURE

  1. Le 21 mai, le 5 août et le 26 août 2009, Unitool a importé des armoires mobiles (les marchandises en cause), qui ont été classées dans le numéro tarifaire 9403.20.00.
  2. Le 18 février 2013, Unitool a présenté trois demandes, aux termes de l’alinéa 74(4)b) de la Loi, pour obtenir le remboursement des droits versés pour les marchandises en cause.
  3. Entre le 19 et le 21 mars 2013, l’ASFC a rendu trois décisions dans lesquelles elle rejetait les demandes de remboursement. Aux termes de l’alinéa 74(4)b) de la Loi, ces décisions étaient assimilées à être des révisions en vertu du paragraphe 59(1). À la suite de ces révisions réputées, les marchandises en cause sont demeurées classées dans le numéro tarifaire 9403.20.00.
  4. Le ou vers le 21 mars 2013, Unitool a demandé le réexamen de ces révisions réputées aux termes du paragraphe 60(1) de la Loi, soutenant que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 7326.90.90.
  5. Le 22 janvier 2014, l’ASFC a procédé à un réexamen aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi, dans lequel elle a confirmé sa décision antérieure selon laquelle les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9403.20.00.
  6. Le 15 novembre 2012, Unitool a demandé une décision anticipée, aux termes du paragraphe 43.1(1) de la Loi, à l’égard du classement tarifaire de marchandises identiques ou similaires aux marchandises en cause.
  7. Le 2 janvier 2013, l’ASFC a rendu sa décision anticipée dans laquelle elle concluait que les marchandises identiques ou similaires étaient correctement classées dans le numéro tarifaire 9403.20.00.
  8. Le 14 janvier 2013, Unitool a déposé une demande de révision de la décision anticipée aux termes du paragraphe 60(2) de la Loi. Unitool soutenait que les marchandises identiques ou similaires doivent être classées dans le numéro tarifaire 7326.90.90.
  9. Le 13 décembre 2013, l’ASFC a rendu sa décision aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi, dans laquelle elle a confirmé la décision anticipée, concluant de ce fait que les marchandises identiques ou similaires sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9403.20.00.
  10. Le 5 mars 2014, Unitool a déposé un avis d’appel conformément au paragraphe 67(1) de la Loi à l’égard des décisions rendues par l’ASFC aux termes du paragraphe 60(4).
  11. Le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a tenu une audience publique le 26 août 2014 à Ottawa (Ontario).
  12. Unitool a fait entendre M. Hapet Jay Tutunjian, vice-président, Ventes et marketing, de Unitool. L’ASFC n’a fait entendre aucun témoin.

MARCHANDISES EN CAUSE

  1. Les marchandises en cause sont divers modèles d’armoires mobiles[3] conçues pour le rangement de différents types d’outils[4]. Ces modèles sont tous des sections inférieures d’un ensemble comprenant un coffre en partie supérieure (non en cause) et une section inférieure (l’armoire mobile).
  2. Les marchandises en cause sont en acier épais recouvert de peinture enduite de poudre. Elles sont dotées de poignées latérales robustes et sont montées sur quatre roulettes, dont deux sont pivotantes, pour permettre de déplacer les marchandises en cause. Elles sont équipées de 13 à 15 tiroirs, selon le modèle. Même si la taille et le poids des marchandises en cause peuvent différer selon leur conception, il n’y a aucun doute qu’elles sont des marchandises robustes et résistantes, pouvant supporter une charge importante. M. Tutunjian a affirmé que l’un des modèles des marchandises en cause peut, par exemple, peser jusqu’à 1 000 livres avec les outils. Malgré le poids lourd, les roulettes permettent de déplacer les marchandises en cause en les roulant d’un endroit à un autre dans une pièce, par exemple d’une aire de travail à une autre dans un atelier de mécanicien[5].

CADRE LÉGISLATIF

  1. Dans des appels interjetés aux termes de l’article 67 de la Loi concernant des questions de classement tarifaire, le Tribunal détermine le classement tarifaire approprié des marchandises conformément à la méthode prescrite aux articles 10 et 11 du Tarif des douanes.
  2. Le paragraphe 10(1) du Tarif des douanes prévoit que le classement des marchandises importées est effectué, sauf indication contraire, en conformité avec les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé[6] et les Règles canadiennes[7] énoncées à l’annexe.
  3. Les Règles générales sont composées de six règles structurées en paliers, de sorte que si le classement des marchandises ne peut être déterminé conformément à la règle 1, il faut alors tenir compte de la règle 2, et ainsi de suite, jusqu’à ce que le classement soit établi.
  4. L’article 11 du Tarif des douanes prévoit que, pour l’interprétation des positions et des sous‑positions, le Tribunal doit tenir compte des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[8] et du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[9], publiés par l’Organisation mondiale des douanes. Bien que les Notes explicatives et les Avis de classement n’aient pas force exécutoire pour le Tribunal, le Tribunal les applique à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire[10].
  5. Par conséquent, le Tribunal doit d’abord déterminer si les marchandises en cause peuvent être classées au niveau de la position conformément à la règle 1 des Règles générales selon les termes de la position et les notes de section ou de chapitre pertinentes du Tarif des douanes, compte tenu des notes explicatives et des avis de classement pertinents. Si les marchandises en cause ne peuvent être classées au niveau de la position par application de la règle 1, le Tribunal doit alors examiner les autres règles[11].
  6. Après que le Tribunal a utilisé cette méthode pour déterminer la position dans laquelle les marchandises en cause doivent être classées, l’étape suivante consiste à utiliser une méthode similaire pour déterminer la sous-position appropriée[12]. La dernière étape consiste à déterminer le numéro tarifaire approprié[13].

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES

  1. Unitool soutient que les dispositions suivantes de l’annexe du Tarif des douanes doivent s’appliquer :

Section XV

MÉTAUX COMMUNS ET OUVRAGES EN CES MÉTAUX

[...]

Chapitre 73

OUVRAGES EN FONTE, FER OU ACIER

[...]

73.26 Autres ouvrages en fer ou en acier.

[...]

7326.90 -Autres

[...]

7326.90.90 - - -Autres

  1. Les notes pertinentes de la section XV prévoient ce qui suit :

1. La présente Section ne comprend pas :

[...]

k) les articles du Chapitre 94 (meubles, sommiers, appareils d’éclairage, enseignes lumineuses, constructions préfabriquées, par exemple);

[...]

3. Dans la Nomenclature, on entend par métaux communs : la fonte, le fer et l’acier, le cuivre, le nickel, l’aluminium, le plomb, le zinc, l’étain, le tungstène (wolfram), le molybdène, le tantale, le magnésium, le cobalt, le bismuth, le cadmium, le titane, le zirconium, l’antimoine, le manganèse, le béryllium, le chrome, le germanium, le vanadium, le gallium, le hafnium (celtium), l’indium, le niobium (columbium), le rhénium et le thallium.

  1. Aucune des notes du chapitre 73 n’est pertinente. Toutefois, les notes explicatives pertinentes du chapitre 73 prévoient ce qui suit :

Le présent Chapitre couvre sous les nos 73.01 à 73.24, un certain nombre d’ouvrages bien déterminés et, sous les nos 73.25 et 73.26, un ensemble d’ouvrages non repris dans les Chapitres 82 ou 83 et qui ne relèvent pas d’autres Chapitres de la Nomenclature, en fonte (telle que définie à la Note 1 du présent Chapitre), fer ou acier.

  1. Les notes explicatives de la position no 73.26 prévoient ce qui suit :

Dans cette position sont englobés les ouvrages en fer ou en acier obtenus par forgeage ou estampage, par découpage ou emboutissage ou par d’autres ouvraisons telles que pliage, assemblage, soudure, tournage, fraisage ou perçage, non repris soit dans les positions précédentes du présent Chapitre, soit dans la Note 1 de la Section XV, soit dans les Chapitres 82 ou 83, soit enfin dans les autres parties de la Nomenclature.

On y range notamment :

[...]

3) Certaines boîtes et étuis, tels que boîtes ou coffrets à outils qui n’ont pas été spécialement conçus ou aménagés à l’intérieur pour recevoir des outils particuliers avec ou sans leurs accessoires (voir la Note explicative du no 42.02), boîtes d’herborisateurs et similaires, coffrets à bijoux, boîtes à poudre et à fards, étuis à cigarettes ou à cigares, boîtes à tabac, bonbonnières, etc. (à l’exclusion des contenants du no 73.10, des boîtes de ménage du no 73.23 et des articles d’ornement du no 83.06).

[...]

Sont en outre exclus de la présente position :

[...]

f) Les rayonnages de grandes dimensions destinés à être montés et fixés à demeure dans les magasins, ateliers et autres lieux de stockage de marchandises (no 73.08), ainsi que les autres rayonnages et étagères du no 94.03.

  1. Les notes explicatives de la position no 73.26 renvoient à la position no 42.02, dont les notes explicatives prévoient ce qui suit :

Sous réserve des dispositions des Notes 2 et 3 du présent Chapitre, les articles repris dans la première partie du libellé peuvent être en toutes matières. Dans cette première partie, l’expression contenants similaires englobe les boîtes à chapeaux, les étuis pour accessoires d’appareils photographiques, les cartouchières, les gaines de couteaux de chasse ou de camping, les boîtes ou coffrets à outils portatifs spécialement conçus ou aménagés à l’intérieur pour recevoir des outils particuliers avec ou sans leurs accessoires, etc.

  1. En revanche, l’ASFC soutient que les dispositions suivantes de l’annexe du Tarif des douanes doivent s’appliquer :

Section XX

MARCHANDISES ET PRODUITS DIVERS

[...]

Chapitre 94

MEUBLES; MOBILIER MÉDICO-CHIRURGICAL; ARTICLES DE LITERIE ET SIMILAIRES; APPAREILS D’ÉCLAIRAGE NON DÉNOMMÉS NI COMPRIS AILLEURS; LAMPES-RÉCLAMES, ENSEIGNES LUMINEUSES, PLAQUES INDICATRICES LUMINEUSES ET ARTICLES SIMILAIRES; CONSTRUCTIONS PRÉFABRIQUÉES

[...]

94.03 Autres meubles et leurs parties.

[...]

9403.20.00 – Autres meubles en métal

  1. Les notes pertinentes du chapitre 94 prévoient ce qui suit :

2. Les articles (autres que les parties) visés dans les nos 94.01 à 94.03 doivent être conçus pour se poser sur le sol.

Restent toutefois compris dans ces positions, même s’ils sont conçus pour être suspendus, fixés au mur ou posés les uns sur les autres :

a) les armoires, les bibliothèques, les étagères et les meubles à éléments complémentaires;

b) les sièges et lits.

  1. Les notes explicatives pertinentes du chapitre 94 prévoient ce qui suit :

Le présent Chapitre englobe, sous réserve des exceptions mentionnées dans les Notes explicatives de ce Chapitre :

1) L’ensemble des meubles, ainsi que leurs parties (nos 94.01 à 94.03).

[...]

Au sens du présent Chapitre, on entend par meubles ou mobilier :

A) Les divers objets mobiles, non compris dans des positions plus spécifiques de la Nomenclature qui sont conçus pour se poser sur le sol (même si dans certains cas particuliers - meubles et sièges de navires, par exemple -ils sont appelés à être fixés ou assujettis au sol) et qui servent à garnir, dans un but principalement utilitaire, les appartements, hôtels, théâtres, cinémas, bureaux, églises, écoles, cafés, restaurants, laboratoires, hôpitaux, cliniques, cabinets dentaires, etc., ainsi que les navires, avions, voitures de chemin de fer, voitures automobiles, remorques-camping et engins de transport analogues. Les articles de même nature (bancs, chaises, etc.) utilisés dans les jardins, squares, promenades publiques, sont également compris ici.

  1. Les notes explicatives de la position no 94.03 prévoient ce qui suit :

Parmi les meubles de cette position, dans laquelle sont groupés, non seulement les articles eux‑mêmes non repris dans les positions précédentes, mais aussi leurs parties, il y a lieu de mentionner tout d’abord ceux qui se prêtent généralement à l’utilisation en différents lieux, tels qu’armoires, vitrines, tables, porte-téléphone, bureaux, secrétaires, bibliothèques, étagères.

Viennent ensuite les articles d’ameublement particulièrement conçus :

1) Pour appartements, hôtels, etc., tels que : bahuts, coffres à linge, coffres à pain ou huches, chiffonniers, colonnes, tables de toilette, coiffeuses, guéridons, garde-robes, lingères, portemanteaux, porte-parapluies, buffets, dressoirs, argentiers, garde-manger, tables de nuit, lits (y compris les lits réversibles, les lits de camp, les lits pliants, les berceaux), travailleuses, bancs et tabourets (même basculants) pour reposer les pieds, écrans de foyer, paravents, cendriers sur socle, casiers à musique, pupitres, parcs pour enfants, tables roulantes (à hors d’oeuvres, à liqueurs, par exemple), même équipées de résistances chauffantes.

[...]

5) Pour magasins, entrepôts, ateliers, etc., tels que : comptoirs, porte-vêtements, meubles à étagères, meubles à casiers ou à tiroirs, armoires pour outillage, meubles spéciaux d’imprimerie (à casses ou à tiroirs).

6) Pour laboratoires et bureaux techniques, tels que : tables de microscopie, bancs de laboratoire (même avec vitrines, prises de gaz, robinetterie, etc.), sorbonnes, tables à dessin non équipées.

Sont exclus de la présente position :

a) Les coffres et malles n’ayant pas le caractère de meubles (no 42.02).

POSITION DES PARTIES

Unitool

  1. Unitool soutient que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 7326.90.90 à titre d’autres ouvrages en fer ou en acier, par application de la règle 1 des Règles générales.
  2. Pour soutenir cet argument, Unitool indique que les marchandises en cause sont fabriquées, importées, commercialisées et vendues comme boîtes à outils, qui sont définies dans le dictionnaire Merriam-Webster comme étant des « [...] [boîtes] pour ranger ou transporter des outils »[14] [traduction]. Unitool soutient que la définition de « toolbox » (boîte à outils) ne contient aucune indication à l’égard de la taille de l’objet[15].
  3. Unitool renvoie à la décision du Tribunal dans Bauer Hockey Corporation c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada[16], dans laquelle le Tribunal a conclu ce qui suit :

[...] la conception, la meilleure utilisation, la commercialisation et la distribution des marchandises en cause constituent des critères indicatifs du classement tarifaire approprié des marchandises[17].

Par conséquent, Unitool soutient que les marchandises en cause, étant fabriquées et vendues comme boîtes à outils, doivent être classées à titre de boîtes à outils dans le numéro tarifaire 7326.90.90.

  1. En ce qui concerne le classement proposé par l’ASFC[18], Unitool soutient que le libellé des notes explicatives du chapitre 94 empêche le classement des marchandises en cause dans cette position. Plus particulièrement, Unitool soutient que les notes explicatives du chapitre 94 prévoient expressément que les meubles de la position no 94.03 excluent les objets mobiles non compris dans des positions plus spécifiques de la nomenclature. Même si Unitool reconnaît que les « boîtes à outils » ne sont nommées dans aucune autre position, elle souligne qu’elles sont spécifiquement nommées dans la note 3 des notes explicatives de la position no 73.26 ainsi que dans d’autres notes explicatives. Par conséquent, Unitool soutient que les marchandises en cause ne peuvent être classées dans la position no 94.03 à titre de meubles, car elles sont reprises plus spécifiquement dans la position no 73.26, par application des notes explicatives pertinentes.

ASFC

  1. L’ASFC soutient que, en raison de la note 1k) de la section XV (qui comprend la position no 73.26), qui exclut de cette section « les articles du chapitre 94 (meubles, [...] par exemple) », le Tribunal doit commencer son analyse en déterminant si les marchandises en cause sont des articles du chapitre 94. Ce faisant, l’ASFC soutient que les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9403.20.00 à titre d’« autres meubles en métal », en vertu de la règle 1 des Règles générales. Plus particulièrement, l’ASFC soutient que les marchandises en cause sont conçues pour se poser sur le sol, conformément à la note 2 du chapitre 94, et qu’elles sont des objets mobiles servant à garnir, dans un but principalement utilitaire, les appartements (c’est-à-dire garages, hangars) et les ateliers (garages de mécanicien, etc.).
  2. En ce qui concerne la position de Unitool, l’ASFC allègue que les notes explicatives pertinentes de la position no 73.26 n’empêchent pas le classement des marchandises en cause dans la position no 94.03 à titre de meubles. Même si les boîtes à outils sont mentionnées dans les notes explicatives de la position no 73.26, l’ASFC renvoie aux définitions de dictionnaire des mots « box » (boîte) et « cases » (coffrets) pour soutenir que les boîtes ou les coffrets sont des marchandises qui sont petites et portatives et qui s’ouvrent généralement sur le dessus[19]. Comme l’indique l’ASFC, les marchandises en cause ne correspondent pas à ces descriptions.
  3. En outre, l’ASFC allègue que l’expression « boîtes ou coffrets à outils » dans les notes explicatives de la position no 73.26 doit être interprétée à la lumière des autres termes énumérés dans la liste[20]. Puisque ces autres termes renvoient tous à des articles qui sont petits et portatifs, l’ASFC soutient que cela appuie sa position selon laquelle les marchandises en cause ne peuvent être classées dans la position no 73.26.

ANALYSE

  1. Comme l’ont reconnu les deux parties[21], le Tribunal doit commencer son analyse en appliquant la règle 1 des Règles générales. Par conséquent, le Tribunal examinera d’abord le libellé des positions concurrentes en cause ainsi que les notes de section et de chapitre ou les notes explicatives pertinentes.
  2. Puisque la note 1k) de la section XV (qui comprend la position no 73.26) exclut les articles du chapitre 94 (qui comprend la position no 94.03) et qu’il n’y a aucune note d’exclusion comparable qui s’applique à la position no 94.03, le Tribunal déterminera d’abord si les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 94.03 à titre de meubles, plus particulièrement à titre d’autres meubles en métal du numéro tarifaire 9403.20.00[22].

Les marchandises en cause sont-elles des « meubles »?

  1. La note 1 des notes explicatives du chapitre 94 prévoit que le chapitre englobe « l’ensemble des meubles ». De plus, les notes explicatives prévoient que, pour être considérées comme meubles, les marchandises doivent posséder les caractéristiques suivantes :
  • être des objets mobiles;
  • être conçues pour se poser sur le sol;
  • avoir un but principalement utilitaire;
  • servir à garnir un ou plusieurs des endroits énumérés dans la liste non exhaustive d’endroits, y compris les appartements, hôtels, théâtres, cinémas, bureaux, églises, écoles, cafés, restaurants, laboratoires, hôpitaux, cliniques, cabinets dentaires, etc.;
  • ne pas être comprises dans des positions plus spécifiques de la nomenclature.
  1. Par conséquent, pour déterminer si les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 94.03 à titre de meubles et, par conséquent, exclues de la portée de la position no 73.26, le Tribunal examinera la question de savoir si les marchandises en cause remplissent chacune des conditions susmentionnées.

Les marchandises en cause sont-elles des objets mobiles?

  1. En ce qui concerne la question de savoir si les marchandises en cause sont ou non des objets mobiles, le Tribunal remarque que les notes explicatives pertinentes du chapitre 94 prévoient ce qui suit :

[...] on entend par meubles [l]es divers objets mobiles [...] même si dans certains cas particuliers – meubles et sièges de navires, par exemple – ils sont appelés à être fixés ou assujettis au sol [...]. Les articles de même nature (bancs, chaises, etc.) utilisés dans les jardins, squares, promenades publiques, sont également compris ici[23].

  1. M. Tutunjian a confirmé dans son témoignage que les marchandises en cause pouvaient être déplacées d’un endroit à un autre, car elles sont dotées de roulettes[24]. De plus, les deux parties n’ont pas contesté le fait que les marchandises en cause sont des objets ou articles, dans la mesure où elles sont des produits finis ou semi-finis. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont des objets mobiles, conformément à la première condition énoncée ci-dessus.

Les marchandises en cause sont-elles conçues pour se poser sur le sol?

  1. La deuxième condition que doivent respecter les marchandises en cause pour être considérées comme des meubles est d’être conçues pour se poser sur le sol. Encore ici, le Tribunal remarque qu’il n’a aucunement été allégué que les marchandises en cause n’étaient pas conçues pour se poser sur le sol et que, dans son témoignage, M. Tutunjian a confirmé que les marchandises en cause étaient effectivement conçues pour se poser sur le sol[25]. Par conséquent, la deuxième condition prévue par les notes explicatives du chapitre 94 est satisfaite, et le Tribunal conclut en ce sens.

Les marchandises en cause ont-elles un but principalement utilitaire?

  1. Pour être considérées comme des meubles, il doit également être démontré que les marchandises en cause ont un but principalement utilitaire. À cet effet, le Tribunal remarque la définition suivante, adoptée dans Zellers : « [...] destiné à être pratique plutôt qu’attrayant; fonctionnel [...] »[26]. Tant les éléments de preuve documentaires dont dispose le Tribunal[27] que le témoignage de M. Tutunjian démontrent que les marchandises en cause sont destinées à être pratiques plutôt qu’attrayantes[28]. En outre, les éléments de preuve indiquent que les marchandises en cause servent dans le but principalement utilitaire de ranger des outils[29]. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ont un but principalement utilitaire et que la troisième condition est satisfaite.

Les marchandises en causes servent-elles à garnir un ou plusieurs des endroits énumérés dans la liste non exhaustive d’endroits?

  1. En ce qui concerne la quatrième condition, pour être considérées comme des meubles, il doit être démontré que les marchandises en cause servent à garnir un ou plusieurs des endroits énumérés dans la liste non exhaustive d’endroits. Plus particulièrement, les notes explicatives de la position no 94.03 indiquent que la position comprend les meubles devant servir, notamment, dans les « [...] magasins, entrepôts, ateliers, etc. ». Puisque les parties ne contestent pas le fait que les marchandises en cause servent dans des ateliers[30], le Tribunal conclut que cette condition est satisfaite.

Les marchandises en cause sont-elles comprises dans des positions plus spécifiques de la nomenclature?

  1. Enfin, pour que les marchandises en cause soient considérées comme des meubles de la position no 94.03, le Tribunal doit être convaincu qu’elles ne sont pas comprises dans des positions plus spécifiques de la nomenclature. À cette fin, Unitool soutient que les notes explicatives de la position no 73.26 font spécifiquement référence aux « boîtes à outils » et que, par conséquent, la cinquième condition n’est pas satisfaite.
  2. Après avoir examiné les notes explicatives de la section XV (qui comprend le chapitre 73), le Tribunal remarque que la mention des boîtes à outils, dans les notes explicatives de la position no 73.26, renvoie expressément à la position no 42.02, comme suit :

On y range notamment :

[...]

3) Certaines boîtes et étuis, tels que boîtes ou coffrets à outils qui n’ont pas été spécialement conçus ou aménagés à l’intérieur pour recevoir des outils particuliers avec ou sans leurs accessoires (voir la Note explicative du n° 42.02); [...].

  1. Par conséquent, dans son examen de la signification de l’expression « boîtes à outils » comprise dans les notes explicatives de la section XV, le Tribunal doit examiner les notes explicatives de la position no 42.02.
  2. À titre de référence, la position no 42.02 prévoit ce qui suit :

Chapitre 42

OUVRAGES EN CUIR; ARTICLES DE BOURRELLERIE OU DE SELLERIE; ARTICLES DE VOYAGE, SACS À MAIN ET CONTENANTS SIMILAIRES; OUVRAGES EN BOYAUX

[...]

42.02 Malles, valises et mallettes, y compris les mallettes de toilette et les mallettes porte-documents, serviettes, cartables, étuis à lunettes, étuis pour jumelles, appareils photographiques, caméras, instruments de musique ou armes et contenants similaires; sacs de voyage, sacs isolants pour produits alimentaires et boissons, trousses de toilette, sacs à dos, sacs à main, sacs à provisions, portefeuilles, portemonnaie, porte-cartes, étuis à cigarettes, blagues à tabac, trousses à outils, sacs pour articles de sport, boîtes pour flacons ou bijoux, boîtes à poudre, écrins pour orfèvrerie et contenants similaires, en cuir naturel ou reconstitué, en feuilles de matières plastiques, en matières textiles, en fibre vulcanisée ou en carton, ou recouverts, en totalité ou en majeure partie, de ces mêmes matières ou de papier.

  1. Dans l’énumération des « contenants similaires », les notes explicatives de la position no 42.02 font référence à ce qui suit :

[...] les boîtes ou coffrets à outils portatifs spécialement conçus ou aménagés à l’intérieur pour recevoir des outils particuliers avec ou sans leurs accessoires [...].

  1. Le Tribunal remarque également que les notes explicatives de la position no 42.02 excluent expressément ce qui suit :

Les boîtes ou coffrets à outils, qui ne sont pas spécialement conçus ou aménagés à l’intérieur pour recevoir des outils particuliers avec ou sans leurs accessoires (en général nos 39.26 ou 73.26)

[Nos italiques]

  1. Le mot « portatif », notamment, n’est pas repris dans la description des boîtes à outils exclues de la position no 42.02. Une explication possible pour cette omission serait que, en omettant le mot « portatif », les notes explicatives indiquent que toutes les boîtes à outils qui ne sont pas spécialement conçues ou aménagées à l’intérieur, nonobstant leur taille, sont comprises dans la position no 73.26 (si elles sont en fer ou en acier). Toutefois, lorsqu’elles sont interprétées dans leur contexte[31], les notes explicatives ont un sens différent.
  2. Comme indiqué ci-dessus, la mention de la position no 42.02 dans les notes explicatives de la position no 73.26 renvoie à la teneur de la position no 42.02 et des notes explicatives de cette position. Par conséquent, les notes explicatives de la position no 73.26 doivent être interprétées dans le contexte des notes explicatives de la position no 42.02 et en tenant compte de la teneur de celles-ci. Adopter une autre méthode aurait pour effet d’enlever toute signification au renvoi à la position no 42.02.
  3. Plus particulièrement, les notes explicatives d’exclusion de la position no 42.02 renvoient aux boîtes à outils qui ne sont pas spécialement conçues ou aménagées à l’intérieur pour recevoir des outils particuliers avec ou sans leurs accessoires. Lorsque ces notes explicatives sont interprétées conjointement avec les notes explicatives de la position no 73.26, la distinction devient claire : les boîtes à outils qui ne sont pas spécialement conçues ou aménagées à l’intérieur pour recevoir des outils particuliers avec ou sans leurs accessoires, étant exclues de la position no 42.02, sont comprises dans la position no 73.26 (si elles sont en fer ou en acier). De plus, les boîtes à outils qui sont spécialement conçues ou aménagées à l’intérieur pour recevoir des outils particuliers avec ou sans leurs accessoires demeurent comprises dans la position no 42.02.
  4. Le fait que le mot « portatif » n’ait pas été repris dans les notes explicatives d’exclusion de la position no 42.02 n’a pas pour effet de créer une nouvelle catégorie de boîtes à outils. La distinction dans les notes explicatives d’exclusion se rapporte plutôt à la forme ou à l’aménagement intérieur des boîtes à outils. Les seules boîtes à outils mentionnées dans les notes explicatives de la position no 42.02, y compris les notes explicatives d’exclusion, sont les boîtes ou coffrets à outils portatifs. Par conséquent, les boîtes à outils mentionnées dans les notes explicatives de la position no 73.26 sont les boîtes à outils portatives qui sont exclues de la position no 42.02 par application des notes explicatives d’exclusion, c’est-à-dire les boîtes à outils portatives qui ne sont pas spécialement conçues ou aménagées à l’intérieur pour recevoir des outils particuliers avec ou sans leurs accessoires.
  5. Puisque le Tribunal a déterminé que les boîtes à outils doivent être portatives pour être classées dans la position no 73.26, le Tribunal doit maintenant examiner le sens du mot « portatif » dans ce contexte. Dans son mémoire, Unitool a présenté la définition de dictionnaire suivante du mot « portable » (portatif), qui apparaît dans la version anglaise des notes explicatives :

[...] pouvant être transporté ou déplacé [...][32]

[Traduction]

  1. Unitool allègue que les marchandises en cause correspondent à la définition du mot « portatif », car elles peuvent être déplacées grâce aux roulettes qui y sont fixées. Pour interpréter l’adjectif « portable » (portatif) et la mention de « portable tool boxes or cases » dans la version anglaise des notes explicatives, il convient d’examiner la version française de cette expression. La version française des notes explicatives de la position no 42.02 fait référence aux « [...] boîtes ou coffrets à outils portatifs [...] ». Unitool a présenté la définition de dictionnaire suivante du mot « portatif » :

[...] Se dit d’un objet de taille et de poids réduits, conçu pour être facilement porté avec soi[33].

  1. Par conséquent, la version française des notes explicatives de la position no 42.02 fait expressément référence aux boîtes ou coffrets à outils pouvant être qualifiés d’objets de taille et de poids réduits, conçus pour être facilement portés avec soi.
  2. Bien que la même spécificité ne se retrouve pas dans la définition de dictionnaire du terme anglais « portable » (portatif), le contexte dans lequel se trouve l’expression « portable tool boxes or cases » (boîtes ou coffrets à outils portatifs) indique clairement que le mot anglais « portable » a le même sens que le mot français « portatif » et désigne des objets qui possèdent les mêmes caractéristiques. La preuve en est que les caractéristiques communes des autres contenants énumérés dans la position no 42.02 et les notes explicatives connexes sont leur taille et leur poids réduits, qui permettent ainsi à une personne de les porter facilement[34]. Pour être considérés comme des « contenants similaires », les boîtes ou coffrets portatifs mentionnés dans les notes explicatives de la position no 42.02 doivent posséder des caractéristiques similaires, c’est-à-dire être de taille et de poids relativement faibles, de sorte qu’ils puissent être facilement portés. Il est à noter que les mêmes caractéristiques se retrouvent également dans les objets énumérés à la suite des boîtes ou coffrets à outils dans la note 3 des notes explicatives de la position no 73.26[35].
  3. En outre, le Tribunal remarque que, selon le principe général d’interprétation des lois bilingues, les divergences entre les deux versions officielles d’une même disposition sont habituellement résolues en dégageant le sens qui est commun aux deux versions[36]. Par conséquent, même si le contexte laissait planer une ambiguïté dans la portée de la version anglaise des notes explicatives de la position no 42.02, une telle ambiguïté doit être résolue en se référant au libellé plus restreint de la version française qui, en l’espèce, constitue le sens commun. À cet égard, même si les principes d’interprétation des lois ne s’appliquent pas de manière stricte aux notes explicatives, qui ne sont pas une loi adoptée par le parlement[37], ils servent néanmoins de guide, en l’absence de divergences avec la nomenclature ou les notes explicatives, pour concilier des versions divergentes des notes explicatives et, par conséquent, permettre d’assurer une application cohérente de la nomenclature, nonobstant la langue dans laquelle elle est interprétée.
  4. En résumé, le Tribunal conclut que le mot « portatif » dans l’expression « boîtes ou coffrets portatifs » s’entend de contenants relativement petits qui, dans le cadre de leur utilisation ordinaire, permettent à une personne de porter d’autres objets (c’est-à-dire des outils) d’un endroit à un autre. Le Tribunal conclut que la pièce B-01 présentée par l’ASFC est représentative du type de « boîte à outils » mentionné dans les notes explicatives des positions nos 42.02 et 73.26.
  5. Le Tribunal remarque qu’une grande partie des arguments de Unitool portent sur le fait que les marchandises en cause sont « [...] fabriquées, importées, commercialisées et vendues comme boîtes à outils, comme il appert du catalogue ci-joint »[38] [traduction]. De plus, Unitool renvoie le Tribunal à ses décisions antérieures dans Bauer et Partylite Gifts Ltd. c. Commissaire de l’Agence des douanes et du revenu du Canada[39] pour appuyer sa position selon laquelle les marchandises en cause, ayant été fabriquées et vendues comme boîtes à outils, doivent être classées comme telles. Tant dans le mémoire de Unitool que dans le témoignage de M. Tutunjian, il a été allégué à plusieurs reprises que les marchandises en cause sont toujours commercialisées et vendues comme boîtes à outils[40].
  6. Dans sa décision dans Confiserie Regal inc. c. Sous-M.R.N.[41], citée dans PartyLite, le Tribunal a affirmé ce qui suit :

L’apparence, la conception, la meilleure utilisation, la commercialisation et la distribution dont l’avocat de l’intimé a fait état ne sont pas en elles-mêmes des critères, mais des facteurs individuels qu’il peut être utile de considérer, de temps à autre, pour le classement des marchandises. Le Tribunal est d’avis, cependant, qu’aucun de ces facteurs n’est décisif, et que l’importance de chacun varie en fonction du produit en cause[42].

[Nos italiques]

  1. La commercialisation et la distribution des marchandises en cause peuvent, dans certaines circonstances, aider le Tribunal dans son analyse. Toutefois, ce processus ne peut pas dépendre que de ces seuls facteurs.
  2. Même si le Tribunal a examiné les éléments de preuve de Unitool à cet égard, il remarque que la position de Unitool comporte plusieurs problèmes. Premièrement, comme l’a révélé le contre-interrogatoire de M. Tutunjian, les documents de commercialisation de Unitool ne sont pas toujours constants en ce qui concerne ce qui est qualifié de boîte à outils. Par exemple, M. Tutunjian a reconnu qu’un siège, même si celui-ci était présenté dans la catégorie des boîtes à outils dans les documents de commercialisation, n’était effectivement pas une boîte à outils[43]. De plus, M. Tutunjian a expliqué cette incohérence en indiquant que les documents de commercialisation sont un outil de vente conçu pour attirer et diriger l’attention du client[44].
  3. De plus, bien que le Tribunal reconnaisse le but dans lequel les documents de commercialisation sont conçus, leur utilisation en tant qu’outil de vente démontre la nécessité d’aller au-delà de la commercialisation et de la distribution des marchandises en cause dans l’analyse de leur classement approprié. Comme le Tribunal l’a conclu dans Regal, même si la manière dont les marchandises en cause sont commercialisées et distribuées peut être utile pour déterminer leur classement approprié, elle n’est pas déterminante. Le Tribunal doit plutôt examiner les caractéristiques physiques des marchandises en cause.
  4. En ce qui concerne les marchandises en cause, le Tribunal conclut que rien dans les éléments de preuve n’indique que les marchandises en cause sont de taille et de poids suffisamment réduits pour permettre à une personne de les tenir, les porter ou les déplacer facilement. Les marchandises en cause sont, au contraire, lourdes et de taille importante; M. Tutunjian a spécifiquement affirmé qu’elles ne pouvaient être portées. Par ailleurs, selon les éléments de preuve, les marchandises en cause sont généralement utilisées en les roulant, au besoin, d’une aire de travail à l’autre dans un atelier. Par conséquent, peu importe que les marchandises en cause soient commercialisées et distribuées comme boîtes à outils, un examen de leurs caractéristiques physiques révèle qu’elles ne sont pas portatives (« portable »).
  5. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne sont pas des boîtes ou coffrets à outils portatifs au sens des notes explicatives de la position no 42.02 ni ne sont des « contenants similaires » aux contenants énumérés dans cette position et dans les notes explicatives de cette position. Le Tribunal conclut, par conséquent, que les marchandises en cause ne sont pas des boîtes à outils portatives qui ne sont pas spécialement conçues ou aménagées à l’intérieur pour recevoir des outils particuliers, selon le libellé des notes explicatives de la position no 73.26.
  6. Par conséquent, la cinquième condition prévue aux notes explicatives du chapitre 94 pour que les marchandises en cause puissent être considérées comme « meubles » est satisfaite, car, pour les motifs indiqués ci‑dessus, les marchandises en cause ne sont pas comprises dans des positions plus spécifiques de la nomenclature.

CLASSEMENT

  1. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal est d’accord avec la position de l’ASFC selon laquelle les marchandises en cause sont correctement classées, conformément à la règle 1 des Règles générales, dans la position no 94.03, car elles sont d’autres meubles compris dans le libellé de cette position. En ce qui concerne le classement aux niveaux de la sous-position et du numéro tarifaire, le Tribunal conclut, par application des règles 1 et 6 des Règles générales et de la règle 1 des Règles canadiennes, que les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9403.20.00 à titre d’autres meubles en métal.

DÉCISION

  1. Pour les motifs qui précèdent, l’appel est rejeté.
 

[1].      L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.) [Loi].

[2].      L.C. 1997, ch. 36.

[3].      Les marchandises en cause sont les modèles suivants : TBUT811B, TBUT205B, TBUT403B, TBUT405B, TBUT406B, TBUT407B, TBUT507B, TBUT515B, TBUT607B et TBUT1012B.

[4].      Pièce AP-2013-060-07A au par. 22, vol. 1.

[5].      Transcription de l’audience publique, 26 août 2014, aux pp. 6, 19, 21-24.

[6].      L.C. 1997, ch. 36 [Règles générales].

[7].      L.C. 1997, ch. 36.

[8].      Organisation mondiale des douanes, 5e éd., Bruxelles, 2012 [Notes explicatives].

[9].      Organisation mondiale des douanes, 2e éd., Bruxelles, 2003 [Avis de classement].

[10].    Voir Canada (Procureur général) c. Suzuki Canada Inc., 2004 CAF 131 (CanLII) aux par. 13, 17, où la Cour d’appel fédérale a interprété l’article 11 du Tarif des douanes comme signifiant que les Notes explicatives doivent être respectées, à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire. Le Tribunal est d’avis que cette interprétation s’applique également aux Avis de classement.

[11].    Les règles 1 à 5 des Règles générales s’appliquent au classement au niveau de la position.

[12].    La règle 6 des Règles générales prévoit que « [l]e classement des marchandises dans les sous-positions d’une même position est déterminé légalement d’après les termes de ces sous-positions et des Notes de sous-positions ainsi que, mutatis mutandis, d’après les Règles ci-dessus [c’est-à-dire les règles 1 à 5] [...] » et que « [...] les Notes de Sections et de Chapitres sont également applicables sauf dispositions contraires ».

[13].    La règle 1 des Règles canadiennes prévoit que « [l]e classement des marchandises dans les numéros tarifaires d’une sous-position ou d’une position est déterminé légalement d’après les termes de ces numéros tarifaires et des Notes supplémentaires ainsi que, mutatis mutandis, d’après les [Règles générales] [...] » et que « [...] les Notes de Sections, de Chapitres et de sous-positions sont également applicables sauf dispositions contraires ». Les Avis de classement et les Notes explicatives ne sont pas applicables au classement au niveau du numéro tarifaire.

[14].    Pièce AP-2013-060-07A, onglet 5, vol. 1.

[15].    Ibid. au par. 32, vol. 1.

[16].    (26 avril 2012), AP-2011-011 (TCCE) [Bauer].

[17].    Bauer au par. 43.

[18].    Unitool allègue de plus que l’ASFC avait classé des marchandises similaires dans la position no 73.26 aux termes d’une décision anticipée. Toutefois, l’ASFC précise que la décision anticipée a été incorrectement transcrite sur son site Web et que celle-ci ne porte pas sur les mêmes types de marchandises que les marchandises en cause. Voir pièce AP-2013-060-13A aux par. 37-38, vol. 1A. Le Tribunal a été avisé pendant l’audience que l’ASFC avait procédé au retrait de la décision anticipée incorrectement transcrite de son site Web.

[19].    Pièce AP-2013-060-13A au par. 31, vol. 1A.

[20].    L’ASFC renvoie au principe des « mots associés » (« noscitur a sociis »), selon lequel il ne faut pas interpréter un terme ou une expression en faisant abstraction des termes voisins. Voir par exemple Opitz c. Wrzesnewskyj, [2012] 3 R.C.S. 76, aux par. 40, 41.

[21].    Pièce AP-2013-060-07A au par. 39, vol. 1; pièce AP-2013-060-13A au par. 16, vol. 1A.

[22].    Voir par exemple Maurice Pincoffs Canada Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (13 mars 2014), AP-2013-027 (TCCE) au par. 33; HBC Imports a/s de Zellers Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (6 avril 2011), AP-2010-005 (TCCE) [Zellers] au par. 42.

[23].    Le mot « article » est défini dans la jurisprudence du Tribunal comme étant « un produit fini ou semi-fini qui n’est pas considéré comme une matière ou un matériel ». Voir par exemple Zellers au par. 53; Wolseley Canada Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (18 janvier 2011), AP-2009-004 (TCCE).

[24].    Transcription de l’audience publique, 26 août 2014, à la p. 17.

[25].    Ibid. à la p. 18.

[26].    Zellers au par. 55.

[27].    Pièce AP-2013-060-07A aux par. 20-22, vol. 1.

[28].    Transcription de l’audience publique, 26 août 2014, aux pp. 5, 7.

[29].    Ibid. à la p. 5.

[30].    Ibid. aux pp. 6, 21, 41.

[31].    Cycles Lambert Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (28 novembre 2013), AP-2012-060 (TCCE) au par. 36; Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27 au par. 21.

[32].    Pièce AP-2013-060-21A, onglet 1 à la p. 5, vol. 1B.

[33].    Ibid. à la p. 16.

[34].    Les notes explicatives de la position no 42.02 prévoient que l’expression « contenants similaires » dans la première partie de la position (c’est-à-dire des coffrets) englobe « [...] les boîtes à chapeaux, les étuis pour accessoires d’appareils photographiques, les cartouchières, les gaines de couteaux de chasse ou de camping, les boîtes ou coffrets à outils portatifs spécialement conçus ou aménagés à l’intérieur pour recevoir des outils particuliers avec ou sans leurs accessoires, etc. ». De plus, ces notes explicatives prévoient que, dans la deuxième partie de la position (qui n’englobe que les articles en certaines matières), l’expression « contenants similaires » englobe « [...] les porte-billets, les nécessaires de correspondance, les étuis pour stylos, billets ou tickets, les étuis à aiguilles, à clefs, à cigares, à pipes, à outils, à bijoux, les boîtes à brosses, à chaussures, etc. ».

[35].    La note 3 des notes explicatives de la position no 73.26 indique que la position englobe, outre les boîtes et coffrets à outils, des articles comme des « [...] boîtes d’herborisateurs et similaires, coffrets à bijoux, boîtes à poudre et à fards, étuis à cigarettes ou à cigares, boîtes à tabac, bonbonnières, etc. [...] ».

[36].    Voir par exemple R. c. Daoust, [2004] 1 R.C.S. 217, 2004 CSC 6 (CanLII) au par. 26, citant le professeur Côté dans son ouvrage Interprétation des lois (3e éd., 1999) à la p. 410; Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, [2009] 1 R.C.S. 339, 2009 CSC 12 (CanLII) au par. 39.

[37].    Voir l’article 11 du Tarif des douanes et Suzuki aux par. 13, 17.

[38].    Pièce AP-2013-060-07A au par. 35, vol. 1.

[39].    (16 février 2004), AP-2003-008 (TCCE) [PartyLite].

[40].    Voir pièce AP-2013-060-07A au par. 35, vol. 1; Transcription de l’audience publique, 26 août 2014, à la p. 12.

[41].    (25 juin 1999), AP-98-043, AP-98-044 et AP-98-051 (TCCE) [Regal].

[42].    Regal à la p. 8.

[43].    Transcription de l’audience publique, 26 août 2014, à la p. 12.

[44].    Ibid.