VOLPAK INC.

VOLPAK INC.
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2012-009

Décision et motifs rendus
le mardi 20 janvier 2015

TABLE DES MATIÈRES

 

EU ÉGARD À un appel entendu le 16 octobre 2014, aux termes de l’article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 15 mars 2012 concernant une demande de révision aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

VOLPAK INC. Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

Ann Penner
Ann Penner
Membre présidant

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)
Date de l’audience : le 16 octobre 2014

Membre du Tribunal : Ann Penner, membre présidant

Conseillers juridiques pour le Tribunal : Alexandra Pietrzak
Kalyn Eadie

Gestionnaire du greffe par intérim : Lindsay Vincelli

Agent principal du greffe par intérim : Hayley Raynor

PARTICIPANTS :

Appelante

Conseiller/représentant

Volpak Inc.

Michael Kaylor

 

Intimé

Conseiller/représentant

Président de l’Agence des services frontaliers du Canada

Luc Vaillancourt

TÉMOINS :

Marina Riccardi
Adjointe administrative
Service alimentaire Desco Inc.

Benoît Chevalier
Président
Volpak Inc.

Veuillez adresser toutes les communications au :

Greffier
Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario) K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

EXPOSÉ DES MOTIFS

INTRODUCTION

  1. Le présent appel a été interjeté par Volpak Inc. (Volpak) le 6 juin 2012 aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes[1] à l’égard d’une décision rendue le 15 mars 2012 par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) aux termes du paragraphe 60(4).
  2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les marchandises importées par Volpak sont correctement classées dans le numéro tarifaire 0207.13.92 de l’annexe du Tarif des douanes[2] à titre de viandes et abats comestibles, frais, réfrigérés ou congelés, des volailles de la position no 01.05, au-dessus de l’engagement d’accès, non désossés, comme l’a déterminé l’ASFC, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 0207.13.91 à titre de viandes et abats comestibles, frais, réfrigérés ou congelés, des volailles de la position no 01.05, dans les limites de l’engagement d’accès, comme le soutient Volpak.

Programme d’importation pour réexportation

  1. Volpak participait au Programme d’importation pour réexportation (PIR), qui permet aux entreprises de transformation de certains produits de demander une licence en vue d’importer certaines marchandises en quantité additionnelle, de les transformer et de les réexporter à un taux de droits de douane moins élevé que celui en vigueur.
  2. L’administration du PIR est partagée entre le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (MAECD) (auparavant le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international [MAECI]) et l’ASFC. En vertu du PIR, le MAECD délivre des licences aux participants, qui ont alors le droit d’importer les marchandises, de les transformer et de les réexporter. L’ASFC demeure responsable du classement tarifaire des marchandises importées dans le cadre du PIR.
  3. Les marchandises déclarées pour lesquelles une licence a été délivrée dans le cadre du PIR sont désignées comme étant « dans les limites de l’engagement d’accès ». Les marchandises importées en quantité excédant la quantité prévue par la licence sont considérées comme étant « au-dessus de l’engagement d’accès » et sont donc assujetties à un taux de droits de douane plus élevé.
  4. Comme le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) l’a indiqué dans ses décisions antérieures apparentées au présent appel, il n’a compétence qu’en ce qui concerne le classement tarifaire dans le cadre du PIR[3]. Les décisions du MAECD concernant la délivrance et l’annulation de licences en vertu du PIR ne relèvent pas de la compétence du Tribunal et ne sont donc pas visées par le présent appel.

CONTEXTE

  1. Dans le cadre de l’appel interjeté auprès du Tribunal, les parties ont présenté un exposé conjoint des faits qui explique le contexte du présent appel[4]. Par conséquent, le Tribunal accepte les faits et les événements décrits dans l’exposé conjoint des faits tels qu’ils sont présentés ci-après.
  2. Le 16 février 2011, le ministre des Affaires étrangères et du Commerce international (le ministre) a délivré une licence à Volpak dans le cadre du PIR, en vertu de l’article 8.3 de la Loi sur les licences d’exportation et d’importation[5].
  3. La licence de Volpak (la licence initiale) autorisait l’importation de 17 781 kg de poitrines de poulet fraîches, non désossées, en provenance des États-Unis à un taux de droits de douane moins élevé que celui en vigueur, à condition que les produits transformés soient réexportés aux États-Unis dans les 90 jours suivant leur importation.
  4. Le 18 février 2011, Volpak a importé des États-Unis 17 781 kg de poitrines de poulet fraîches, non désossées, dans le cadre de la transaction no 14035028992032, que l’ASFC a d’abord classés dans le numéro tarifaire 0207.13.91 (dans les limites de l’engagement d’accès).
  5. Le ou vers le 25 juillet 2011, le ministre a annulé la licence initiale de Volpak et a délivré « unilatéralement »[6] [traduction] une autre licence (la nouvelle licence) visant le même numéro de transaction, qui autorisait l’importation de 4 379 kg de poitrines de poulet fraîches, non désossées.
  6. Le 4 août 2011, le MAECI a informé l’ASFC que le ministre avait annulé la licence initiale de Volpak et avait délivré la nouvelle licence autorisant l’importation de 4 379 kg de poitrines de poulet fraîches, non désossées.
  7. Le 15 août 2011, l’ASFC a entrepris une vérification des transactions effectuées par Volpak du 1er juillet 2010 au 1er juillet 2011, conformément aux articles 42 et 42.01 de la Loi.
  8. L’ASFC a conclu que Volpak avait importé 17 781 kg de poitrines de poulet fraîches, non désossées, desquels :
  • 4 379 kg étaient autorisés par la nouvelle licence et avaient été réexportés aux États-Unis dans les 90 jours suivant leur importation, en conformité avec la nouvelle licence;
  • 13 402 kg n’étaient pas autorisés par la nouvelle licence.
  1. Le 8 novembre 2011, l’ASFC a reclassé les 13 402 kg de poitrines de poulet fraîches, non désossées, dans le numéro tarifaire 0207.13.92 (au-dessus de l’engagement d’accès, non désossés), conformément au paragraphe 59(1) de la Loi.
  2. Toutefois, l’ASFC n’a pas reclassé les 4 379 kg de poitrines de poulet fraîches, non désossées, autorisés par la nouvelle licence, qui sont demeurés classés dans le numéro tarifaire 0207.13.91 (dans les limites de l’engagement d’accès).
  3. Le 15 mars 2012, l’ASFC a maintenu sa décision de reclasser les 13 402 kg de poitrines de poulet fraîches, non désossées, dans le numéro tarifaire 0207.13.92 (au-dessus de l’engagement d’accès, non désossés) aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi.

HISTORIQUE DE LA PROCÉDURE

  1. Il est nécessaire de prendre en compte l’historique complet du présent appel pour bien en comprendre la portée.
  2. Le 6 juin 2012, Volpak a interjeté appel auprès du Tribunal à l’égard d’une décision rendue le 15 mars 2012 par l’ASFC concernant le classement tarifaire de poulets et de produits du poulet (les marchandises en cause).
  3. Le 7 septembre 2012, Volpak a déposé son mémoire.
  4. Le 2 novembre 2012, l’ASFC a demandé au Tribunal de rejeter le présent appel pour défaut de compétence.
  5. Le 14 mai 2013, le Tribunal a décidé de rejeter la demande de l’ASFC. Ce faisant, le Tribunal a jugé qu’il avait compétence pour entendre l’appel concernant la décision de l’ASFC de reclasser les marchandises en cause dans le numéro tarifaire 0207.13.92 (au-dessus de l’engagement d’accès, non désossés).
  6. Toutefois, le Tribunal a également ordonné à Volpak de déposer des observations supplémentaires sur les allégations d’erreurs commises par l’ASFC dans sa révision du classement tarifaire des marchandises en cause. Plus particulièrement, dans sa lettre aux parties faisant part de sa décision, le Tribunal a ordonné à Volpak d’aborder les questions suivantes dans ses observations supplémentaires :
  • L’ASFC avait-elle le pouvoir discrétionnaire de maintenir le classement des marchandises en cause dans le numéro tarifaire 0207.13.91 (dans les limites de l’engagement d’accès) après l’annulation de la licence initiale de Volpak par le ministre?
  • Compte tenu de l’annulation de la licence initiale visant les marchandises en cause, l’ASFC était-elle tenue d’effectuer une enquête indépendante pour déterminer le volume des marchandises exportées par Volpak?
  • Si l’ASFC avait une obligation de mener une enquête indépendante, y a-t-il des restrictions quant à la méthode qu’elle peut utiliser pour calculer le volume des marchandises exportées?
  1. Le 31 mai 2013, Volpak a déposé son mémoire supplémentaire.
  2. Le 25 juillet 2013, l’ASFC a déposé son mémoire. Le même jour, l’ASFC a également demandé à ce que l’appel soit instruit sur la foi des pièces versées au dossier.
  3. Le 30 juillet 2013, Volpak s’est opposée à la demande de l’ASFC visant à ce que l’appel soit instruit sur la foi des pièces versées au dossier.
  4. Le 1er août 2013, le Tribunal a informé les parties qu’il rejetait cette demande de l’ASFC. Le Tribunal a également informé les parties que l’audience relative à l’appel était prévue le 24 septembre 2013.
  5. Le 21 août 2013, Volpak a demandé le report de l’audience.
  6. Le 23 août 2013, le Tribunal a écrit aux parties pour les informer qu’il accordait la demande de report de l’audience présentée par Volpak. Le Tribunal a indiqué que l’audience était reportée au 18 février 2014.
  7. Le 29 janvier 2014, Volpak a écrit au Tribunal pour lui demander de convoquer Mme Manon Levasseur en qualité de témoin à l’audience, aux motifs qu’elle avait signé la lettre du 15 mars 2012 dans laquelle l’ASFC maintenait sa décision de reclasser les marchandises en cause et que son témoignage s’avérait donc essentiel pour statuer sur l’appel. Volpak a également demandé au Tribunal d’ordonner à Mme Levasseur de déposer tout document sur lequel elle s’est fondée pour conclure « [...] que Volpak n’a pas respecté les conditions de la licence d’importation numérotée ci-dessus [...] »[7] [traduction].
  8. Le 30 janvier 2014, l’ASFC a informé le Tribunal que Mme Levasseur serait à l’extérieur du pays à la date fixée pour l’audience et lui a demandé d’obtenir des éclaircissements quant à la demande de renseignements supplémentaires présentée par Volpak.
  9. Le 3 février 2014, Volpak a écrit au Tribunal pour lui demander de convoquer Mme Suzanne Beaudette en qualité de témoin à l’audience, au motif qu’elle était l’agente de l’ASFC qui a rendu la décision aux termes de l’article 59 de la Loi. Volpak a également indiqué que « [l]’audience se déroulera comme prévu le 18 février 2014 »[8] [traduction].
  10. Le 5 février 2014, l’ASFC a écrit au Tribunal pour l’informer que Mme Beaudette serait disponible à la date d’audience prévue du 18 février 2014. Néanmoins, l’ASFC a aussi affirmé que « [...] le témoignage de Mme Beaudette devait se limiter à l’objet de l’appel en question, c’est-à-dire le classement tarifaire des marchandises en cause »[9] [traduction].
  11. Le 6 février 2014, le Tribunal a écrit aux parties pour les informer qu’il accordait la demande d’assignation à comparaître. En réponse aux observations de l’ASFC, le Tribunal a toutefois invité les parties à expressément aborder les questions suivantes à l’audience :
  • Quel texte législatif ou autre base juridique régit la délivrance et l’annulation de licences dans le cadre du PIR?
  • Quel texte législatif ou autre base juridique, s’il y a lieu, régit la révocation rétroactive de licences dans le cadre du PIR?
  • Dans l’exercice de ses fonctions d’application de la loi, l’ASFC a-t-elle le pouvoir discrétionnaire de continuer de classer les marchandises visées par une licence du PIR comme étant « dans les limites de l’engagement d’accès » si cette licence est subséquemment annulée après leur importation[10]?
  1. Le 7 février 2014, l’ASFC a déposé des observations en réponse aux questions que le Tribunal avait indiquées dans sa lettre du 6 février 2014.
  2. Le 10 février 2014, Volpak a écrit au Tribunal pour l’informer qu’elle ferait entendre deux témoins à l’audience. Dans une lettre distincte portant la même date, Volpak a également informé le Tribunal qu’elle ne signifierait pas à Mme Beaudette l’assignation à comparaître qu’il avait délivrée.
  3. Le 10 février 2014 également, l’ASFC a déposé un recueil de jurisprudence et a écrit au Tribunal pour l’informer qu’elle avait l’intention de faire entendre un témoin à l’audience. Dans une lettre distincte déposée le même jour, l’ASFC s’est aussi opposée au dépôt par Volpak de 43 documents consistant en un recueil de législation et de jurisprudence ainsi qu’un recueil de documents et de jurisprudence supplémentaire.
  4. Le 11 février 2014, le Tribunal a reçu le recueil de documents et de jurisprudence supplémentaire de Volpak[11].
  5. Le 11 février 2014, Volpak a écrit au Tribunal pour faire valoir la nécessité des documents supplémentaires déposés. En outre, Volpak a proposé de reporter l’audience afin d’accorder à l’ASFC un délai pour examiner les documents supplémentaires déposés.
  6. Le 11 février 2014, l’ASFC a écrit au Tribunal pour réitérer ses oppositions au dépôt par Volpak de documents supplémentaires.
  7. Le 12 février 2014, le Tribunal a avisé les parties que l’audience était reportée au 22 mai 2014 et a demandé aux parties de déposer des observations sur la pertinence des documents supplémentaires déposés.
  8. Le 12 février 2014, Volpak a écrit au Tribunal pour lui demander de fixer une nouvelle date d’audience parce que son conseiller juridique n’était pas disponible le 22 mai 2014. Le 12 février 2014 également, Volpak a déposé ses observations en réponse aux questions que le Tribunal avait indiquées dans sa lettre du 6 février 2014.
  9. Le 17 février 2014, le Tribunal a informé les parties que l’audience était reportée au 5 juin 2014.
  10. Les 18 et 20 mars 2014, l’ASFC a présenté ses observations sur la pertinence des documents déposés.
  11. Le 20 mars 2014, Volpak a déposé des observations en réponse aux observations de l’ASFC sur la pertinence des documents déposés et a indiqué qu’elle retirait quatre documents. Volpak a également proposé de déposer un mémoire supplémentaire afin d’officialiser sa position.
  12. Le 24 mars 2014, le Tribunal a rejeté la suggestion de Volpak de déposer un mémoire supplémentaire.
  13. Le 14 mai 2014, l’ASFC a déposé un exposé conjoint des faits au nom des deux parties.
  14. Le 22 mai 2014, le Tribunal a rendu une ordonnance dans laquelle il indiquait que, parmi les documents déposés, 25 seraient versés au dossier, tandis que 18 ne le seraient pas parce qu’ils n’étaient pas pertinents ou parce qu’ils concernaient des questions déjà résolues dans l’exposé conjoint des faits déposé par les parties. Plus particulièrement, le Tribunal a indiqué dans son exposé des motifs daté du 5 juin 2014 que « [...] le Tribunal n’a pas compétence pour examiner les décisions du MAECI et [...] il n’est donc pas dûment saisi de cette question [...] »[12].
  15. Le 26 mai 2014, Volpak a écrit au Tribunal pour l’aviser qu’elle avait l’intention de déposer une requête demandant au Tribunal de reconsidérer sa position quant à l’ordonnance qu’il avait rendue le 22 mai 2014 (la requête). Volpak a aussi demandé que l’audience prévue le 5 juin 2014 soit reportée jusqu’à ce qu’une décision soit prise concernant sa requête.
  16. Le 26 mai 2014, le Tribunal a écrit aux parties pour les informer que l’audience prévue le 5 juin 2014 était reportée, à la demande de Volpak, et pour leur communiquer les dates pour le dépôt de leurs observations concernant la requête de Volpak.
  17. Volpak a déposé ses observations concernant sa requête le 29 mai 2014.
  18. Le 2 juin 2014, l’ASFC a déposé ses observations en réponse dans lesquelles elle s’opposait à la requête de Volpak.
  19. Le 19 juin 2014, le Tribunal a informé les parties que l’audience était reportée au 16 octobre 2014.
  20. Le 8 juillet 2014, le Tribunal a rendu sa décision dans laquelle il rejetait la requête de Volpak.
  21. Le Tribunal a tenu une audience publique le 16 octobre 2014 à Ottawa (Ontario).
  22. Volpak a fait entendre à titre de témoins Mme Marina Riccardi, adjointe administrative, Service alimentaire Desco Inc., et M. Benoît Chevalier, président de Volpak. L’ASFC n’a fait entendre aucun témoin.

MARCHANDISES EN CAUSE

  1. Les marchandises en cause sont 13 402 kg[13] de poitrines de poulet fraîches, non désossées, qui ont été importés le 18 février 2011 par Volpak sous le régime du PIR et pour lesquels la licence délivrée dans le cadre du PIR a par la suite été annulée le ou vers le 25 juillet 2011. À la suite de la décision rendue le 8 novembre 2011 par l’ASFC aux termes du paragraphe 59(1) de la Loi, les marchandises en cause ont été classées dans le numéro tarifaire 0207.13.92 (au-dessus de l’engagement d’accès, non désossés).

CADRE LÉGISLATIF

  1. Comme décrit ci-dessus, l’administration du PIR est partagée entre le MAECD et l’ASFC. Le pouvoir du MAECD de délivrer des licences en vertu du PIR est énoncé à l’article 8.3 de la LLEI, qui prévoit ce qui suit :

(3) Malgré le paragraphe 8(1) et les paragraphes (1) et (2), en cas d’inscription de marchandises sur la liste des marchandises d’importation contrôlée, s’il a déterminé la quantité de marchandises bénéficiant du régime d’accès en application du paragraphe 6.2(1), le ministre peut délivrer à tout résident du Canada qui en fait la demande une licence pour l’importation des marchandises en quantité additionnelle ou aux résidents du Canada une licence de portée générale autorisant leur importation en quantité additionnelle, sous réserve des conditions prévues dans la licence ou les règlements.

  1. En outre, l’article 8.5 et le paragraphe 10(1) de la LLEI prévoient ce qui suit :

8.5 Toute licence d’exportation ou d’importation délivrée en vertu de la présente loi peut avoir un effet rétroactif si elle comporte une disposition en ce sens.

[...]

10(1) Sous réserve du paragraphe (3), le ministre peut modifier, suspendre, annuler ou rétablir les licences, certificats, autorisations d’importation ou d’exportation ou autres autorisations délivrés ou concédés en vertu de la présente loi.

  1. Les parties conviennent que les dispositions pertinentes du Tarif des douanes concernant le classement tarifaire par l’ASFC de marchandises importées aux termes du PIR prévoient ce qui suit :

10(1) Sous réserve du paragraphe (2), le classement des marchandises importées dans un numéro tarifaire est effectué, sauf indication contraire, en conformité avec les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé et les Règles canadiennes énoncées à l’annexe.

(2) Des marchandises ne peuvent être classées dans un numéro tarifaire comportant la mention « dans les limites de l’engagement d’accès » que dans le cas où leur importation procède d’une licence délivrée en vertu de l’article 8.3 de la Loi sur les licences d’exportation et d’importation et en respecte les conditions.

  1. Les dispositions pertinentes de l’annexe du Tarif des douanes prévoient ce qui suit :

Section I

ANIMAUX VIVANTS ET PRODUITS DU RÈGNE ANIMAL

[...]

02.07 Viandes et abats comestibles, frais, réfrigérés ou congelés, des volailles du no 01.05.

[...]

0207.13 - -Morceaux et abats, frais ou réfrigérés

[...]

0207.13.91 - - - -Dans les limites de l’engagement d’accès

0207.13.92 - - - -Au-dessus de l’engagement d’accès, non désossés

  1. Quant au reclassement tarifaire déterminé par l’ASFC, la Loi sur les douanes prévoit ce qui suit :

59(1) L’agent chargé par le président, individuellement ou au titre de son appartenance à une catégorie d’agents, de l’application du présent article peut :

a) dans le cas d’une décision prévue à l’article 57.01 ou d’une détermination prévue à l’article 58, réviser l’origine, le classement tarifaire ou la valeur en douane des marchandises importées, ou procéder à la révision de la décision sur la conformité des marques de ces marchandises, dans les délais suivants :

(i) dans les quatre années suivant la date de la détermination, d’après les résultats de la vérification ou de l’examen visé à l’article 42, de la vérification prévue à l’article 42.01 ou de la vérification de l’origine prévue à l’article 42.1,

(ii) dans les quatre années suivant la date de la détermination, si le ministre l’estime indiqué;

b) réexaminer l’origine, le classement tarifaire ou la valeur en douane dans les quatre années suivant la date de la détermination ou, si le ministre l’estime indiqué, dans le délai réglementaire d’après les résultats de la vérification ou de l’examen visé à l’article 42, de la vérification prévue à l’article 42.01 ou de la vérification de l’origine prévue à l’article 42.1 effectuée à la suite soit d’un remboursement accordé en application des alinéas 74(1) c.1), c.11), e), f) ou g) qui est assimilé, conformément au paragraphe 74(1.1), à une révision au titre de l’alinéa a), soit d’une correction effectuée en application de l’article 32.2 qui est assimilée, conformément au paragraphe 32.2(3), à une révision au titre de l’alinéa a).

  1. De plus, en ce qui concerne la vérification, l’article 42.01 de la Loi prévoit ce qui suit :

42.01 L’agent chargé par le président, individuellement ou au titre de son appartenance à une catégorie d’agents, de l’application du présent article peut effectuer la vérification de l’origine des marchandises importées, autres que celles visées à l’article 42.1, ou la vérification de leur classement tarifaire ou de leur valeur en douane selon les modalités réglementaires; à cette fin, il a accès aux lieux désignés par règlement à toute heure convenable.

  1. En outre, le Règlement sur la vérification de l’origine (partenaires non libres-échangistes), du classement tarifaire et de la valeur en douane des marchandises importées[14] prévoit ce qui suit :

2(1) Sous réserve du paragraphe (2), les vérifications de marchandises se font selon l’une ou plusieurs des modalités suivantes :

a) l’examen d’un questionnaire de vérification rempli par l’une des personnes suivantes :

(i) l’importateur ou le propriétaire des marchandises,

(ii) la personne qui fait une déclaration en détail des marchandises aux termes des paragraphes 32(1), (3) ou (5) de la Loi;

b) l’examen de la réponse écrite de l’une des personnes visées à l’alinéa a) à une lettre de vérification;

c) l’examen de documents, renseignements, marchandises ou composants de marchandises reçus de l’une des personnes visées à l’alinéa a);

d) la collecte, dans l’un des lieux visés au paragraphe 3(1), et l’examen :

(i) soit de renseignements qui ont été demandés dans le questionnaire ou la lettre mais qui n’ont pas été fournis,

(ii) soit de renseignements aux fins de contre-vérification de ceux contenus dans le questionnaire rempli ou la réponse écrite.

ANALYSE

Position des parties

Volpak

  1. Volpak allègue que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 0207.13.91 puisqu’elles respectent les deux critères énumérés au paragraphe 10(2) du Tarif des douanes pour que des marchandises soient désignées comme étant « dans les limites de l’engagement d’accès ». Plus particulièrement, Volpak maintient que les marchandises en cause ont été importées en vertu d’une licence valide et qu’elle a respecté les conditions de la licence en réexportant toutes les marchandises en cause après leur transformation ultérieure[15].
  2. Quant au premier critère, Volpak soutient qu’aux fins du classement tarifaire, le moment pertinent est celui de l’importation. Puisqu’une licence valide avait été délivrée au moment de l’importation des marchandises en cause, Volpak maintient que ce critère est rempli[16]. Après avoir soutenu qu’une licence valide existait au moment de l’importation, Volpak affirme avoir entièrement respecté les conditions de cette licence en réexportant toutes les marchandises en cause[17].
  3. Volpak maintient avoir rempli les deux critères requis pour que les marchandises en cause soient désignées comme étant « dans les limites de l’engagement d’accès » aux termes du numéro tarifaire 0207.13.91. Cependant, elle allègue que l’ASFC n’a pas examiné de façon indépendante la question de savoir si elle avait respecté l’exigence relative à la réexportation énoncée dans sa licence initiale. Volpak soutient que l’ASFC a simplement adopté la conclusion du MAECI selon laquelle les marchandises en cause n’avaient pas été réexportées, plutôt que d’effectuer ses propres calculs quant à la quantité de poulet exporté.
  4. Volpak affirme que, ce faisant, l’ASFC a refusé d’exercer son pouvoir discrétionnaire[18]. Plus particulièrement, elle allègue que le libellé impératif du paragraphe 10(2) du Tarif des douanes indique clairement que « [...] le président et ses fonctionnaires sont tenus à une obligation publique de vérifier le classement tarifaire des marchandises en cause »[19] [traduction]. Volpak soutient qu’un classement tarifaire ne peut être révisé qu’à la suite d’une vérification effectuée aux termes de l’article 42 de la Loi. Elle soutient qu’au lieu d’effectuer une telle vérification, l’ASFC s’est simplement appuyée sur la décision du MAECI.

ASFC

  1. L’ASFC allègue que Volpak n’a pas démontré qu’elle avait commis une erreur dans son classement des marchandises en cause.
  2. L’ASFC soutient qu’étant donné que le MAECI avait le pouvoir légal de délivrer, de modifier et d’annuler des licences en vertu du PIR, le rôle de l’ASFC « [...] se limitait à s’assurer que les marchandises [avaient été] importées en vertu d’une licence et que les importateurs en respectent les conditions »[20] [traduction].
  3. En raison de la modification de la licence délivrée à Volpak, l’ASFC soutient qu’elle ne pouvait désigner les marchandises en cause comme étant « dans les limites de l’engagement d’accès », puisque des marchandises ne peuvent être désignées comme telles que dans le cas où elles sont importées en vertu d’une licence. L’ASFC affirme que son classement est adéquat étant donné que Volpak a importé les marchandises en cause en quantité plus grande que ce qui était autorisé par la nouvelle licence.
  4. En ce qui concerne la validité de la nouvelle licence, l’ASFC maintient qu’afin de contester la décision du ministre de modifier la licence, la voie de recours indiquée pour Volpak aurait été de déposer une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale. Puisque Volpak a décidé de ne pas le faire, l’ASFC soutient que Volpak ne peut contester indirectement la décision du ministre dans le cadre du PIR en interjetant appel auprès du Tribunal concernant le classement tarifaire.

Question préliminaire

  1. Avant d’entreprendre son analyse concernant le bien-fondé du présent appel, le Tribunal souhaite formuler certaines observations quant aux débats tenus à l’audience et, surtout, aux témoignages.
  2. Comme en témoigne l’historique de la procédure ci-dessus, le Tribunal a tenté à maintes reprises de s’assurer que les observations des parties soient axées sur des questions relevant de sa compétence. De même, le Tribunal a encouragé les parties à l’audience à se concentrer, dans leurs observations, sur les questions dont il était dûment saisi. Durant l’audience, le conseiller juridique de l’ASFC s’est opposé à plusieurs reprises aux questions et aux arguments soulevés par le conseiller juridique de Volpak en raison de leur manque de pertinence[21]. Bien que le Tribunal ait pris note des objections par rapport aux questions soulevées lors de l’audience qui étaient hors de sa compétence, il a tenu compte des principes d’équité procédurale et, plus particulièrement, du droit de Volpak de présenter tous ses arguments.
  3. Cependant, bien qu’ayant autorisé que ces questions et arguments soient entendus nonobstant ces objections, le Tribunal est préoccupé par certains aspects des témoignages offerts à l’audience. Plus particulièrement, il remarque que le conseiller juridique de Volpak a, à plusieurs occasions, contredit ou corrigé les réponses données par son témoin[22]. En outre, le conseiller juridique de Volpak a, à maintes reprises, répété la même question ou dirigé le témoin vers un passage particulier d’un document lorsqu’il semblait insatisfait de sa réponse initiale[23].
  4. Le rôle du conseiller juridique n’est ni de témoigner à la place des témoins ni de les corriger ou de les guider dans leurs réponses. Les témoins doivent pouvoir répondre librement et dans leurs propres mots durant leur témoignage. Par conséquent, comme indiqué à l’audience, en dépit des interruptions et des contradictions des conseillers juridiques lors de l’audience, les réponses fournies par les témoins constitueront les réponses inscrites au dossier.

Classement tarifaire des marchandises en cause

  1. Comme indiqué ci-dessus, le paragraphe 10(2) du Tarif des douanes prévoit que des marchandises ne peuvent être désignées comme étant « dans les limites de l’engagement d’accès » que dans le cas où leur importation procède d’une licence délivrée en vertu de l’article 8.3 de la LLEI et en respecte les conditions. Par conséquent, pour déterminer le classement des marchandises en cause, le Tribunal doit d’abord déterminer si elles ont été importées en vertu d’une licence. Si le Tribunal conclut que cette première condition est remplie, il doit alors déterminer si les marchandises en cause ont été importées en conformité avec les conditions de cette licence.

Les marchandises en cause ont-elles été importées en vertu d’une licence?

  1. Volpak allègue que la première condition est remplie puisque, en dépit du fait que la licence initiale ait par la suite été annulée par le MAECI, Volpak détenait une licence valide pour l’importation de l’ensemble des 17 781 kg de poitrines de poulet fraîches, non désossées, au moment de l’importation[24]. Elle soutient qu’étant donné que c’est le moment de l’importation qui est pertinent pour le classement de marchandises, la validité d’une licence ne peut être réexaminée après l’importation. Autrement dit, « [...] il importe peu de savoir si ou quand une licence a été annulée, car le classement tarifaire est fondé sur l’importation des marchandises, la transaction qui donne lieu à l’importation des marchandises. [...] [C]ette décision ne peut être modifiée en raison d’une annulation rétroactive de la licence »[25] [traduction].
  2. Bien que le Tribunal reconnaisse que la période pertinente à examiner pour le classement de marchandises est le moment de leur importation, il reconnaît également que le PIR est un programme unique conçu pour gérer non seulement l’arrivée de certaines marchandises au Canada, mais également leur retour aux États-Unis au cours d’une période donnée. Le PIR est un processus qui, combiné à une licence délivrée sous son égide, régit non seulement le moment de l’importation, mais également le processus complet consistant en l’importation, la transformation et la réexportation.
  3. En annulant la licence initiale de Volpak, le MAECI a essentiellement déterminé que les marchandises en cause ne faisaient plus partie du processus et ne pouvaient donc plus être désignées comme étant « dans les limites de l’engagement d’accès » aux termes du PIR. Par conséquent, l’ASFC n’avait guère d’autre choix, en raison des conditions énoncées au paragraphe 10(2) du Tarif des douanes, que de reclasser les marchandises en cause comme n’étant pas visées par le PIR et donc de les désigner comme étant « au-dessus de l’engagement d’accès ».
  4. Cette conclusion est renforcée par le rôle que joue l’ASFC dans le système à deux volets du PIR. L’ASFC n’est pas autorisée à délivrer des licences en vertu du PIR, et le paragraphe 10(2) du Tarif des douanes ne lui confère pas non plus le pouvoir d’examiner la justification du MAECD relativement à l’octroi ou à l’annulation de licences. Les dispositions de la LLEI confèrent au MAECD le pouvoir exclusif de délivrer, de modifier ou d’annuler des licences en vertu du PIR[26]. Si, dans les faits, l’ASFC disposait du pouvoir de faire fi de la décision du MAECD d’annuler une licence, cela compromettrait le cadre législatif que le Parlement a créé.
  5. Appliquant ce cadre législatif à l’espèce, Volpak allègue que les marchandises pour lesquelles le MAECI avait annulé la licence initiale et décidé de les exclure de la nouvelle licence devaient être désignées par l’ASFC comme étant « dans les limites de l’engagement d’accès ». Toutefois, le Tribunal conclut que si l’ASFC avait agi ainsi, cela aurait complètement miné la décision du MAECI dans le cadre du PIR selon laquelle seulement 4 379 kg de poitrines de poulet fraîches, non désossées, ont été importés à bon droit au taux de droits de douane moins élevé que celui en vigueur. Par conséquent, l’ASFC aurait dénué de sens le pouvoir conféré au MAECI par la loi.
  6. La position de Volpak méconnaît le fait que sa licence initiale n’était plus valide. Étant donné les conditions énoncées au paragraphe 10(2) du Tarif des douanes, ainsi que les limites du rôle de l’ASFC dans le PIR à deux volets, le Tribunal conclut que lorsque l’ASFC a été informée de l’annulation de la licence initiale et de la délivrance de la nouvelle licence visant seulement 4 379 kg de poitrines de poulet fraîches, non désossées[27], elle a agi correctement en désignant les 13 402 kg restants, qui n’étaient plus visés par une licence valide, comme étant « au-dessus de l’engagement d’accès » et en les classant dans le numéro tarifaire 0207.13.92.
  7. Volpak renvoie également à la décision de la Cour fédérale dans Dominion Sample Ltd. c. Canada (Commissaire de l’Agence des douanes et du revenu)[28] pour appuyer son affirmation selon laquelle l’ASFC ne peut « défaire » [traduction] une transaction d’importation en annulant de manière rétroactive un certificat d’importation et en réclamant au titulaire du certificat des droits qui ont déjà fait l’objet d’une exonération en vertu d’un certificat valide[29].
  8. Nonobstant l’argument de Volpak, le Tribunal conclut que la décision de la Cour fédérale comporte des différences factuelles importantes par rapport à l’espèce. Plus particulièrement, dans Dominion Sample, le prédécesseur de l’ASFC (l’Agence des douanes et du revenu du Canada) avait alors annulé la licence sur laquelle s’appuyait la demanderesse. En outre, la Cour fédérale a indiqué qu’une telle mesure rétroactive était inéquitable « [...] alors que les deux parties se sont déclarées satisfaites que les conditions du certificat avaient été respectées »[30] et que le titulaire du certificat « [...] n’a rien changé à sa façon d’exploiter son entreprise »[31]; cependant, « [s]oudainement, sans préavis, le certificat d’exonération lui est retiré par suite d’une décision unilatérale »[32]. Poursuivant son analyse, la Cour fédérale a indiqué qu’il existe « [...] une différence marquée entre le titulaire d’un certificat qui fait sciemment défaut d’observer les règles qu’il a acceptées au départ et la demanderesse [...] »[33].
  9. En revanche, c’est le MAECI, et non l’ASFC, qui a annulé la licence en l’espèce. Pour déterminer si l’annulation était justifiée, une analyse du pouvoir conféré au MAECI par la LLEI devrait être menée pour statuer sur le bien-fondé de la décision du MAECI vu toutes les circonstances de l’espèce. Toutefois, comme le reconnaissent les deux parties, le Tribunal n’a pas compétence pour enquêter sur des décisions du MAECI[34]. Par conséquent, le Tribunal ne peut rendre aucune ordonnance concernant le bien-fondé de la décision du MAECI d’annuler la licence initiale.
  10. Le Tribunal reconnaît que l’annulation rétroactive de la licence initiale ait pu entraîner des conséquences négatives pour Volpak. Cependant, comme il l’a indiqué dans son exposé des motifs de son ordonnance dans Toyota Tsusho America Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada[35], il « [...] n’a pas compétence pour traiter de questions d’équité »[36]. Comme le montre Dominion Sample, si Volpak avait souhaité mettre en doute l’équité d’une telle mesure, elle aurait pu demander réparation en présentant une demande de contrôle judiciaire. Le Tribunal, étant contraint par le mandat que lui confère la loi, n’a simplement pas la compétence pour mettre en doute l’équité d’une décision du MAECD.
  11. Le Tribunal conclut donc que la première condition n’est pas remplie, puisque les marchandises en cause n’ont pas été importées en vertu d’une licence valide. Par conséquent, les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 0207.13.92 et désignées comme étant « au-dessus de l’engagement d’accès, non désossées ».

L’ASFC a-t-elle effectué une vérification adéquate?

  1. Bien que ce qui précède soit suffisant pour trancher la question en litige dans le cadre du présent appel, le Tribunal examinera néanmoins le deuxième aspect de l’argument de Volpak, selon lequel une révision du classement tarifaire aux termes de l’article 59 de la Loi ne peut avoir lieu qu’à la suite d’une vérification effectuée aux termes de l’article 42.
  2. Volpak maintient avoir réexporté les marchandises en cause conformément à la licence initiale[37]. Par conséquent, elle a présenté la plupart de ses éléments de preuve pour démontrer que l’ASFC n’a pas effectué une vérification aux termes de l’article 42.01 de la Loi et a plutôt simplement adopté la conclusion du MAECI selon laquelle 13 402 kg de poulet n’ont pas été dûment réexportés[38].
  3. À l’appui de sa position, M. Chevalier a déclaré que, après avoir reçu un avis de vérification aux termes de l’article 42.01 de la Loi, Volpak a fourni à l’ASFC la déclaration d’importation des marchandises en cause. Cependant, il a indiqué que Volpak n’a reçu aucune autre demande de renseignements. De même, l’ASFC n’a pas visité les locaux de Volpak[39]. Par conséquent, Volpak soutient que l’ASFC « [...] n’a effectué aucune enquête indépendante sur la méthode de détermination du chiffre de 13 402 kg et sur les transactions auxquelles cette quantité s’appliquait, et a simplement appliqué ce chiffre à la transaction en cause dans son ensemble, sans poser de questions ou enquêter sur la manière dont cette quantité en kilogrammes a été calculée »[40] [traduction].
  4. Le Tribunal remarque que cet argument est fondé sur l’hypothèse selon laquelle l’ASFC a révisé le classement tarifaire des marchandises en cause au motif qu’une partie des marchandises en cause importées en vertu du PIR n’a pas été dûment réexportée. Cependant, comme le montre clairement la correspondance transmise par l’ASFC, le reclassement a été fondé sur le fait que la licence initiale avait été annulée, et non sur le fait que Volpak n’avait pas respecté les conditions de la licence :

Poitrines de poulet, fraîches, non désossées, déclarées au numéro 0207.13.91.00, alors qu’elles auraient dû l’être au numéro 0207.13.92.00. Selon les documents fournis par Volpak Inc. ainsi que l’information obtenu de MAECI le permis d’importation #24980514 est annulé et a été remplacé par le permis #25214413 pour une quantité de 4379kgm et pour une valeur de 8101.00$cdn. Donc 13,402kgm de poitrines de poulet doivent être classés sous le no. 0207.13.92.00 au-dessus de l’engagement d’accès.[41]

  1. Puisque l’ASFC a fondé sa révision du classement tarifaire des marchandises en cause sur l’annulation de la licence initiale, il s’ensuit que toute vérification effectuée serait axée sur l’état de la licence de Volpak dans le cadre du PIR. Dans la mesure où Volpak ne détenait pas de licence aux termes du PIR relativement aux marchandises en cause, l’ASFC n’était pas autorisée à désigner ces marchandises comme étant « dans les limites de l’engagement d’accès ».
  2. L’article 42.01 de la Loi et l’article 2.1 du Règlement démontrent clairement que le choix de la méthode de vérification est discrétionnaire. Même si l’ASFC pouvait décider de procéder à une visite sur place, le Règlement indique également qu’une vérification peut aussi être effectuée par le biais de l’examen de la réponse écrite d’un importateur à une lettre de vérification. Dans les présentes circonstances, le Tribunal conclut donc que l’ASFC a respecté ses obligations en matière de vérification prévues par la Loi en confirmant, d’après la réponse reçue à sa lettre de vérification, que la licence avait été annulée.

DÉCISION

  1. L’appel est rejeté.
 

[1].     L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.) [Loi].

[2].     L.C. 1997, ch. 36.

[3].     Voir l’ordonnance et l’exposé des motifs du Tribunal concernant la demande de l’ASFC visant à ce que l’appel soit rejeté pour défaut de compétence à la pièce AP-2012-009-19, vol. 1C, ainsi que l’ordonnance et l’exposé des motifs du Tribunal concernant la recevabilité de certains documents à la pièce AP-2012-009-55A, vol. 1E.

[4].     Pièce AP-2012-009-54A, vol. 1E.

[5].     L.R.C. (1985), ch. E-19 [LLEI].

[6].     Pièce AP-2012-009-54A au par. 4, vol. 1E.

[7].     Pièce AP-2012-009-28 à la p. 2, vol. 1C.

[8].     Pièce AP-2012-009-30, vol. 1C.

[9].     Pièce AP-2012-009-31, vol. 1C.

[10].   Pièce AP-2012-009-32, vol. 1C.

[11].   Volpak a subséquemment écrit au Tribunal pour lui expliquer que, bien que la personne qu’elle avait engagée ait déposé les documents auprès du Tribunal le lendemain de la date limite qu’il avait fixée pour le dépôt de documents supplémentaires, ce retard était le résultat de circonstances indépendantes de sa volonté. Voir pièce AP-2012-009-58 au par. 19, vol. 1E.

[12].   Pièce AP-2012-009-55A au par. 32, vol. 1E.

[13].   Bien que le Tribunal reconnaisse que Volpak a importé 17 781 kg de poitrines de poulet fraîches, non désossées, 4 379 kg de ces poitrines de poulet sont demeurés classés dans le numéro tarifaire 0207.13.91 (dans les limites de l’engagement d’accès). Volpak ne conteste pas le classement de cette quantité de poulet importé. Par conséquent, l’appel porte seulement sur les 13 402 kg de poitrines de poulet importés restants qui ont été reclassés dans le numéro tarifaire 0207.13.92 (au-dessus de l’engagement d’accès, non désossés).

[14].   D.O.R.S./98-45 [Règlement].

[15].   Transcription de l’audience publique, 16 octobre 2014, à la p. 45.

[16].   Pièce AP-2012-009-20A aux pp. 2-3, vol. 1C.

[17].   Transcription de l’audience publique, 16 octobre 2014, à la p. 29.

[18].   Pièce AP-2012-009-10A à la p. 16, vol. 1; pièce AP-2012-009-20A à la p. 2, vol. 1C.

[19].   Pièce AP-2012-009-20A à la p. 1, vol. 1C.

[20].   Pièce AP-2012-009-012B au par. 23, vol. 1F.

[21].   Transcription de l’audience publique, 16 octobre 2014, aux pp. 10, 18, 30, 33.

[22].   Ibid. aux pp. 13, 20, 42.

[23].   Ibid. aux pp. 26, 28, 30, 40.

[24].   Ibid. à la p. 46.

[25].   Ibid. à la p. 53.

[26].   Voir plus particulièrement les paragraphes 8.3(3) et 10(1) de la LLEI, dont il est question ci-dessus.

[27].   Pièce PR-2012-009-054A, vol. 1E.

[28].   2003 CF 1244 (CanLII) [Dominion Sample].

[29].   Dominion Sample au par. 66; Transcription de l’audience publique, 16 octobre 2014, aux pp. 68-69.

[30].   Dominion Sample au par. 66.

[31].   Dominion Sample au par. 68.

[32].   Ibid.

[33].   Ibid.

[34].   Transcription de l’audience publique, 16 octobre 2014, à la p. 10.

[35].   (27 avril 2011), AP-2010-063 (TCCE) [Toyota].

[36].   Toyota au par. 7.

[37].   Transcription de l’audience publique, 16 octobre 2014, à la p. 29.

[38].   Ibid.

[39].   Transcription de l’audience publique, 16 octobre 2014, à la p. 42.

[40].   Ibid. à la p. 50.

[41].   Pièce AP-2012-009-10A, onglet 12 à la p. 3, vol. 1.