E. WALLACE

E. WALLACE
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2015-008

Décision et motifs rendus
le lundi 30 novembre 2015

TABLE DES MATIÈRES

 

EU ÉGARD À un appel entendu le 26 novembre 2015 aux termes de l’article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 13 mai 2015 concernant une demande de révision aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

E. WALLACE Appelant

ET

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

Daniel Petit
Daniel Petit
Membre présidant

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)
Date de l’audience : le 26 novembre 2015

Membre du Tribunal : Daniel Petit, membre présidant

Conseiller juridique pour le Tribunal : Peter Jarosz

Agent principal du greffe : Lindsay Vincelli

PARTICIPANTS :

Appelant

 

E. Wallace

 

 

Intimé

Conseiller/représentant

Président de l’Agence des services frontaliers du Canada

Peter Nostbakken

Veuillez adresser toutes les communications au :

Greffier
Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario)  K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

EXPOSÉ DES MOTIFS

INTRODUCTION

  1. Il s’agit d’un appel interjeté par M. E. Wallace auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes[1] à l’égard d’une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) le 13 mai 2015 conformément au paragraphe 60(4).
  2. M. Wallace a acheté la reproduction d’une peinture au cours d’un voyage de 20 jours à Hawaï en compagnie de sa femme. La reproduction, qui a coûté 595 $ US, était de trop grandes dimensions pour faire partie de ses bagages à son retour au Canada. Il l’a donc envoyée par la poste à son domicile au Canada.
  3. À son retour au Canada, M. Wallace a rempli un formulaire de déclaration dans lequel il a déclaré des marchandises d’une valeur de 400 $ au titre de son exemption personnelle (plus des marchandises d’une valeur de 400 $ au titre de l’exemption de sa femme), mais ni l’un ni l’autre n’a déclaré de marchandises non accompagnées.
  4. Dans sa décision, l’ASFC a conclu que l’importation de la peinture par M. Wallace n’était pas admissible à l’exemption de droits et de taxes à laquelle ont accès les voyageurs qui reviennent au Canada après une absence de 7 jours ou plus, aux termes du numéro tarifaire 9804.20.00 de l’annexe du Tarif des douanes[2]. L’ASFC a donc déterminé que des droits de 94,12 $ s’appliquaient à l’importation de la peinture; soit 84,17 $ au titre de la taxe sur les produits et services (TPS)[3] et 9,95 $ au titre des frais de manutention de Postes Canada.
  5. M. Wallace et l’ASFC ont tous deux déposé des mémoires.
  6. Le Tribunal a tenu une audience sur pièces le 26 novembre 2015.

CADRE LÉGISLATIF

  1. Le numéro tarifaire 9804.20.00 prévoit l’exemption de droits[4] pour les marchandises suivantes :

98.04 Marchandises acquises à l’étranger par un résident ou un résident temporaire du Canada ou par un ancien résident revenant au Canada pour reprendre résidence, pour son usage personnel ou domestique, ou comme souvenirs ou cadeaux, mais non achetées à la demande d’autres personnes ni pour rendre service, ni pour la vente, et déclarées par ladite personne lors de son retour au Canada.

[...]

9804.20.00 -Évaluées au plus à huit cents dollars, même contenues dans les bagages accompagnant la personne revenant de l’étranger après une absence du Canada d’au moins sept jours.

Aux fins du présent numéro tarifaire :

a) les marchandises peuvent comprendre du vin n’excédant pas 1,5 litre ou des boissons alcooliques n’excédant pas 1,14 litre et une quantité de tabac n’excédant pas cinquante cigares, deux cents cigarettes, deux cents bâtonnets de tabac et deux cents grammes de tabac fabriqué, s’ils sont contenus dans les bagages accompagnant la personne lors de son retour au Canada; et

b) lorsque les marchandises (sauf les boissons alcooliques, les cigares, les cigarettes, les bâtonnets de tabac et le tabac fabriqué) acquises à l’étranger ne sont pas contenues dans les bagages accompagnant la personne, elles peuvent être classées dans le présent numéro tarifaire si elles sont déclarées par la personne lors de son retour au Canada.

[Nos italiques]

  1. Pour bénéficier de cette exemption de droits et de taxes, les voyageurs doivent déclarer les marchandises pertinentes, par écrit, à leur retour au Canada. Le paragraphe 2(1) du Règlement sur l’exemption accordée aux personnes revenant au Canada[5] prévoit ce qui suit :

2(1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), quiconque revient au Canada doit, à son retour, déclarer par écrit les marchandises pour lesquelles il demande une exemption, ainsi que leur valeur en monnaie canadienne.

[Nos italiques]

  1. Dans le cas des voyageurs qui reviennent au Canada par avion, cette déclaration doit être faite sur une carte de déclaration (formulaire E311). Ce formulaire comprend notamment un énoncé déclarant si des « biens non accompagnées », c’est-à-dire des marchandises qui ne font pas partie des bagages du voyageur, sont visés par l’exemption. Cette déclaration est enregistrée dans le formulaire E24 « Déclaration de l’ASFC relative aux exemptions personnelles », qui est remis au voyageur pour lui permettre de réclamer ou d’attester l’exemption à la livraison des articles déclarés[6].

POSITION DES PARTIES

  1. M. Wallace fait valoir qu’il avait droit à une exemption personnelle pour la peinture. Il affirme n’avoir pas réalisé qu’il devait indiquer, sur la carte de déclaration qu’il a remplie à son retour, que la peinture lui parviendrait par la poste. Il fait aussi valoir que la valeur non utilisée de son exemption est suffisante pour couvrir la peinture.
  2. L’ASFC fait valoir que l’exemption ne s’applique pas étant donné qu’elle n’a pas été réclamée par une déclaration de marchandise non accompagnée — cette déclaration devait être faite lors du retour de M. Wallace au Canada. L’ASFC fait aussi valoir que l’ignorance des exigences en matière de déclaration ne constitue pas une excuse valable pour l’omission de déclarer l’article.

ANALYSE DU TRIBUNAL

  1. Les parties conviennent que la seule question à trancher est de savoir si l’omission par M. Wallace de déclarer les marchandises non accompagnées fait en sorte qu’il ne peut pas leur appliquer son exemption personnelle.
  2. Dès le départ, le Tribunal fait remarquer que dans les appels aux termes de l’article 67 de la Loi, les décisions de l’ASFC sont soumises à une procédure de novo[7]; c’est-à-dire que le Tribunal peut tenir compte de nouveaux éléments de preuve et de nouveaux témoignages. Cependant, cela ne change pas le fait que le Tribunal « [...] n’est pas un tribunal d’équité et qu’il doit appliquer la loi telle qu’elle est rédigée [...] »[8].
  3. Même si le Tribunal compatit avec M. Wallace et comprend sa déception à l’égard du comportement de l’ASFC, il conclut que les dispositions du Tarif des douanes et des règlements afférents exigent clairement que le voyageur fasse une déclaration écrite spécifique sur les marchandises non accompagnées pour avoir droit à l’exemption. L’erreur de bonne foi de M. Wallace par laquelle il a omis de se conformer à ces exigences n’en demeure pas moins une erreur dont il doit accepter les conséquences.
  4. Les déclarations dans les règles lors du retour au Canada sont nécessaires pour faire en sorte que l’exemption ne soit pas appliquée à des marchandises sans rapport avec la durée exigée du séjour hors Canada.
  5. Le Tribunal souligne que les exigences applicables à cette exemption sont présentées aux voyageurs par l’ASFC[9] et que, comme il a été décrit précédemment, la carte de déclaration demande aux voyageurs d’indiquer s’ils « [ont] des biens non accompagnés »[10].
  6. Quoi qu’il en soit, les observations ci-dessus ne modifient en rien la conclusion du Tribunal voulant que les marchandises n’ont pas été déclarées par écrit lors du retour au Canada de M. Wallace; si elles l’avaient été, les marchandises auraient été exemptées de droits et de taxes.

DÉCISION

  1. Par conséquent, le Tribunal statue que les marchandises en question ne sont pas admissibles au traitement du numéro tarifaire 9804.20.00.
  2. L’appel est rejeté.
 

[1].      L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.) [Loi].

[2].      L.C. 1997, ch. 36.

[3].      Aucuns droits de douane n’ont été ajoutés car les marchandises en étaient exemptées.

[4].      Aux fins de l’application de ces dispositions, « droits » s’entend aussi de la TPS, conformément à la note 4 du chapitre 98.

[5].      D.O.R.S./98-61.

[6].      Pièce AP-2015-008-08A aux par. 31-33, vol. 1.

[7].      La Société Canadian Tire Corporation Limitée c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (12 juin 2014), AP‑2013-042 (TCCE) au par. 23.

[8].      Jockey Canada Company c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (20 décembre 2012), AP‑2011‑008 (TCCE) au par. 292.

[9].      Voir les publications électroniques suivantes de l’ASFC : « Paiement des droits et des taxes » (http://www.cbsa-asfc.gc.ca/travel-voyage/pdt-pdt-fra.html) et « Je déclare » (http://www.cbsa-asfc.gc.ca/publications/pub/bsf5056-fra.html). À l’égard de l’exemption dont il est question, ces publications expliquent ce qui suit : « 7 jours ou plus Jusqu’à 800 $CAN [...] les marchandises seront admissibles à la franchise de droits si vous les déclarez à la frontière à votre retour au Canada » et « Lorsque vous revenez au Canada, vous devez déclarer toutes les marchandises que vous avez achetées ou reçues pendant votre séjour à l’extérieur du Canada, qu’il s’agisse d’un cadeau, d’un prix ou d’une récompense, que vous rapportiez les marchandises avec vous ou que vous les faites expédier. [...] Si des marchandises comprises dans votre exemption de 800 $CAN (7 jours) vous sont livrées avant ou après votre arrivée, demandez à l’agent des services frontaliers le formulaire E24, Déclaration de l’ASFC relative aux exemptions personnelles. Vous aurez besoin de votre copie de ce formulaire pour récupérer vos marchandises; sinon, vous pourriez être tenu de payer les droits et les taxes habituels sur celles-ci » [italiques dans l’original]. Cependant, les formulaires donnés aux voyageurs aériens ne donnent pas exactement les mêmes renseignements et ne sont pas aussi clairs que ce qui précède.

[10].    Le Tribunal n’est pas du tout convaincu que les voyageurs comprennent que cet énoncé se rapporte à des marchandises comme l’article visé par le litige, qui ont été acquis à l’étranger par le voyageur et expédiés au Canada par la poste, par messagerie ou d’une autre manière. Le Tribunal suggère que le formulaire E311 soit modifié pour mieux refléter les dispositions de la loi et éviter d’induire les voyageurs en erreur ou de les confondre. Par exemple, le texte actuel pourrait être remplacé par « J’ai (nous avons) envoyé au Canada, par la poste, par messagerie ou d’une autre façon, des biens acquis à l’étranger et qui ne font pas partie de mes (nos) bagages » ou « J’ai (nous avons) des biens non accompagnés (soit des biens acquis à l’étranger et envoyés au Canada par la poste, par messagerie ou d’une autre façon qui ne font pas partie de mes (nos) bagages) ».