EVER GREEN ECOLOGICAL SERVICES INC.

EVER GREEN ECOLOGICAL
SERVICES INC.
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

Appel no AP-2014-027

Décision rendue
le vendredi 18 septembre 2015

Motifs rendus
le vendredi 2 octobre 2015

TABLE DES MATIÈRES

 

EU ÉGARD À un appel entendu les 7 et 8 mai 2015, en vertu de l’article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À diverses demandes de réexamen, datées du 11 août 2014, aux termes de la Loi sur les douanes, telles que présentées au président de l’Agence des services frontaliers du Canada.

ENTRE

EVER GREEN ECOLOGICAL SERVICES INC. Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L’appel est admis. Les montants payés par Ever Green Ecological Services Inc., afin de pouvoir procéder au présent appel, doivent être remboursés par l’Agence des services frontaliers du Canada.

Jason W. Downey
Jason W. Downey
Membre présidant

L’exposé des motifs suivra à une date ultérieure.

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)
Dates de l’audience : les 7 et 8 mai 2015

Membre du Tribunal : Jason W. Downey, membre présidant

Conseillers juridiques pour le Tribunal : Eric Wildhaber
Courtney Fitzpatrick
Rebecca Marshall-Pritchard

Stagiaire en droit : Rohan Mathai

Agent principal du greffe par intérim : Haley Raynor

PARTICIPANTS :

Appelante

Conseiller/représentant

Ever Green Ecological Services Inc.

Peter E. Kirby

 

Intimé

Conseillers/représentants

Président de l’Agence des services frontaliers du Canada

Orlagh O’Kelly
Amy Smeltzer

TÉMOIN :

Glenn Smith
Président
H.H. Smith Ltd.

Veuillez adresser toutes les communications au :

Greffier
Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario)  K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE ET ANALYSE

  1. Le présent appel est interjeté par Ever Green Ecological Services Inc. (Ever Green) auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal), aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes[1].
  2. Entre le 22 mars et le 17 décembre 2012, Ever Green a importé des États‑Unis 12 camions d’occasion de collecte d’ordures et de collecte sélective (les marchandises en cause)[2]. Les marchandises sont originaires des États-Unis[3].
  3. Comme c’était le cas dans l’affaire Bri-Chem Supply Ltd. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada[4], laquelle a été instruite en même temps que le présent appel les 7 et 8 mai 2015[5], et dans l’affaire Southern Pacific Resource Corp. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada[6], le présent appel concerne exclusivement la capacité du contribuable de corriger des déclarations en douane erronées.
  4. Les trois appels ont été interjetés auprès du Tribunal en raison du refus du président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) d’appliquer la décision rendue par le Tribunal dans l’affaire Frito-Lay Canada, Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada[7].
  5. Ever Green interjette appel de l’allégation de l’ASFC selon laquelle elle doit verser des droits sur les marchandises en cause. Le Tribunal conclut qu’Ever Green ne doit rien verser.
  6. Au moment de l’importation, Ever Green a classé les marchandises en cause dans le numéro tarifaire 8705.90.90 de l’annexe du Tarif des douanes[8] à titre d’autres véhicules automobiles à usages spéciaux (case no 27 du formulaire de douane), déclaré que le pays d’origine était les États-Unis (case no 12, l’origine étant plus précisément « UAZ », c’est-à-dire États-Unis, Arizona) et indiqué le code 2 pour le traitement tarifaire (case no 14, le code 2 correspondant au tarif de la nation la plus favorisée). Le taux de droit applicable était de zéro.
  7. Comme c’était le cas dans les affaires Bri-Chem et Southern Pacific, les marchandises en cause auraient dû entrer au Canada en franchise de droits peu importe leur pays d’origine[9] et peu importe le code de traitement tarifaire inscrit par Ever Green sur le formulaire, parce que les marchandises en cause étaient également exemptes de droits en vertu de tous les autres traitements tarifaires préférentiels, que ce soit dans le cadre d’un accord de libre-échange ou non. Autrement dit, les marchandises en cause bénéficiaient d’un accès en franchise de droits généralisé.
  8. Le 10 décembre 2013, l’ASFC a fait parvenir à Ever Green un avis de vérification de l’observation commerciale l’informant que l’ASFC effectuerait une vérification du classement tarifaire pour la période d’importation des marchandises en cause[10].
  9. Le 3 mars 2014, l’ASFC a informé Ever Green qu’aucun problème n’avait été relevé dans le classement tarifaire des marchandises qu’elle avait vérifiées.
  10. Toutefois, le 17 mars 2014, l’ASFC a modifié sa position en émettant un rapport provisoire informant Ever Green que le classement correct des marchandises en cause était le numéro tarifaire 8704.22.00 (autres véhicules pour le transport de marchandises, d’un poids en charge maximal excédant 5 tonnes métriques, mais n’excédant pas 20 tonnes métriques) plutôt que le numéro tarifaire 8705.90.90[11].
  11. Contrairement aux marchandises importées en vertu du numéro tarifaire 8705.90.90 (accès en franchise de droits généralisé), les marchandises importées en vertu du numéro tarifaire 8704.22.00 sont passibles de droits de 6,1 p. 100 ad valorem selon le tarif de la nation la plus favorisée (NPF), mais sont exemptes de droits selon le tarif des États‑Unis (TEU/ALENA). Les marchandises en cause étaient toujours originaires des États-Unis.
  12. Le 16 avril 2014, en fonction de ce qu’elle venait d’apprendre sur le classement tarifaire des marchandises, Ever Green a apporté des corrections, aux termes du paragraphe 32.2(2) de la Loi. Elle a modifié le classement tarifaire des marchandises en cause pour indiquer le numéro tarifaire 8704.22.00 et inscrit le code 10 (pour tarif des États‑Unis) à la case no 14 (où est indiqué le traitement tarifaire)[12].
  13. L’ASFC a émis un rapport final le 29 avril 2014, dans lequel elle confirmait le contenu du rapport provisoire[13].
  14. Le 1er mai 2014, l’ASFC a émis 12 relevés détaillés de rajustement donnant avis qu’elle acceptait les corrections apportées par Ever Green au classement tarifaire, mais rejetait le traitement tarifaire[14].
  15. Le 30 mai 2014, Ever Green a demandé le réexamen de ces décisions[15].
  16. Le 11 août 2014, l’ASFC a émis un avis de rejet B2 dans lequel elle rejetait la demande d’Ever Green[16]. L’ASFC affirmait qu’elle n’avait pas procédé à la révision de l’origine aux termes du paragraphe 59(2) de la Loi et que, par conséquent, l’ASFC n’avait pas le pouvoir législatif de se pencher sur une demande de réexamen présentée aux termes de l’article 60. Bien entendu, en adoptant cette position, l’ASFC faisait délibérément abstraction du paragraphe 32.2(3). Cette question a d’ailleurs été réglée par le Tribunal dans l’affaire Frito-Lay[17].
  17. Le 12 novembre 2014, Ever Green a interjeté appel auprès du Tribunal.
  18. Pour les mêmes motifs que ceux donnés dans l’affaire Bri-Chem, le Tribunal conclut qu’il a compétence pour trancher l’appel et qu’Ever Green a apporté des corrections au classement tarifaire qui sont sans incidence sur les recettes, le code 10 (pour tarif des États‑Unis) étant dorénavant requis pour maintenir l’admissibilité à la franchise de droits demandée auparavant. Les marchandises en cause ont toujours été des importations originaires des États-Unis admissibles à la franchise de droits et admissibles, depuis le début, au traitement tarifaire TEU/ALENA. Comme dans l’affaire Frito-Lay, cela n’a jamais placé Ever Green dans une situation de remboursement telle qu’imaginée par l’ASFC; l’article 74 de la Loi ne s’applique pas.
  19. Pour les mêmes motifs que ceux donnés dans l’affaire Bri-Chem, le Tribunal conclut également que les mesures prises par l’ASFC dans cette affaire constituent un abus de procédure.

DÉCISION

  1. L’appel est admis. Les montants payés par Ever Green, afin de pouvoir procéder au présent appel, doivent être remboursés par l’ASFC.
 

[1].      L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.) [Loi].

[2].      Pièce AP-2014-027-12C (protégée), onglet A6, vol. 2.

[3].      L’ASFC ne conteste pas la validité des certificats d’origine. Transcription de l’audience publique, vol. 2, 8 mai 2015, aux pp. 210, 214.

[4].      (18 septembre 2015), AP-2014-017 (TCCE) [Bri-Chem].

[5].      Le dossier est demeuré ouvert jusqu’au 22 mai 2105 pour permettre le dépôt de certaines pièces révisées, conformément à la directive donnée par le Tribunal à l’audience. Pièce AP-2014-027-30, vol. 1D.

[6].      (18 septembre 2015), AP-2014-028 (TCCE) [Southern Pacific]. L’instruction de cette affaire a eu lieu le 2 juin 2015.

[7].      (21 décembre 2012), AP-2010-002 (TCCE) [Frito-Lay].

[8].      L.C. 1997, ch. 36.

[9].      L’unique exception concerne les marchandises originaires de la République populaire de Corée, le seul pays visé par le tarif général.

[10].    Pièce AP-2014-027-12C (protégée), onglet A8, vol. 2.

[11].    Ibid., onglet A12.

[12].    Ibid., onglet A14.

[13].    Ibid., onglet A16.

[14].    Ibid., onglet A18.

[15].    Ibid., onglet A20.

[16].    Ibid., onglet A22.

[17].    Frito-Lay au par. 49.