EASTERN DIVISION HENRY SCHEIN ASH ARCONA INC.

EASTERN DIVISION HENRY SCHEIN ASH ARCONA INC.
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS
Appel no AP-2013-029R

Décision et motifs rendus
le lundi 15 août 2016

TABLE DES MATIÈRES

 

EU ÉGARD À un appel entendu le 27 février 2014, en vertu de l’article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par la Cour d’appel fédérale datée du 20 octobre 2015, laquelle annulait la décision rendue par le Tribunal canadien du commerce extérieur dans l’appel no AP-2013-029 et renvoyait l’affaire au Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

EASTERN DIVISION HENRY SCHEIN ASH ARCONA INC. Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

Jason W. Downey
Jason W. Downey
Membre présidant

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)
Date de l’audience : le 8 juillet 2016

Membre du Tribunal : Jason W. Downey, membre présidant

Conseiller juridique pour le Tribunal : Alexandra Pietrzak

Agent du greffe : Sara Pelletier

PARTICIPANTS :

Appelante

Conseiller/représentant

Eastern Division Henry Schein Ash Arcona Inc.

Michael Kaylor

 

Intimé

Conseiller/représentant

Président de l’Agence des services frontaliers du Canada

Kirk Shannon

Veuillez adresser toutes les communications au :

Greffier
Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario) K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

  1. Le présent renvoi fait suite au jugement[1], en date du 20 octobre 2015, rendu par la Cour d’appel fédérale (la Cour) concernant la décision Eastern Division Henry Schein Ash Arcona Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada[2] du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal). Dans sa décision, le Tribunal a rejeté l’appel dont il était saisi et conclu que les deux types de gants de protection à usage unique en caoutchouc vulcanisé[3] (les marchandises en cause) étaient correctement classés dans le numéro tarifaire 4015.19.90 de l’annexe du Tarif des douanes[4] à titre d’autres vêtements et accessoires du vêtement (y compris les gants, mitaines et moufles) en caoutchouc vulcanisé non durci, pour tous usages.
  2. Eastern Division Henry Schein Ash Arcona Inc. (Henry Schein) a interjeté appel de la décision du Tribunal devant la Cour le 14 août 2014.
  3. Le 20 octobre 2015, la Cour a accueilli l’appel au motif que le Tribunal n’a pas tenu compte de la note 2e) du chapitre 40 et qu’il n’était pas apparent que le Tribunal avait conclu que les marchandises en cause n’étaient pas visées par le chapitre 90[5].
  4. Par conséquent, la Cour a renvoyé l’affaire au Tribunal et lui a donné pour directive de rendre une nouvelle décision au vu du dossier existant.

QUESTION PRÉLIMINAIRE

  1. Le 16 novembre 2015, Henry Schein a demandé au Tribunal d’autoriser les parties à déposer des observations écrites concernant les points soulevés par la Cour dans sa décision du 20 octobre 2015.
  2. Le 19 novembre 2015, le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) s’est opposé, par écrit, à la demande d’Henry Schein. L’ASFC a souligné que la Cour a précisé, lorsqu’elle a renvoyé l’affaire, que le Tribunal devait rendre une nouvelle décision au vu du dossier existant. L’ASFC a fait valoir que le Tribunal n’avait par conséquent pas le droit d’accepter de nouveaux éléments de preuve ou arguments des parties.
  3. Le 20 novembre 2015, après examen des observations des parties ainsi que de la directive de la Cour, le Tribunal a informé par écrit les parties qu’il n’accepterait pas de nouvelles observations écrites. Le Tribunal a expliqué que la Cour lui avait clairement donné comme directive de statuer à nouveau sur l’appel « au vu du dossier existant ». Le Tribunal a conclu que l’admission de nouvelles observations écrites contredirait directement les instructions explicites de la Cour.

ANALYSE

  1. La question en litige dans le cadre du présent renvoi est de savoir si le Tribunal a valablement déterminé que les marchandises en cause ont été correctement classées dans le numéro tarifaire 4015.19.90.
  2. Pour commencer, la note 2e) du chapitre 40 prévoit ce qui suit :

    2. Le présent Chapitre ne comprend pas :

    [...]

    e) les articles des Chapitres 90, 92, 94 ou 96 [...]

  1. Par conséquent, si les marchandises en cause sont classées dans le chapitre 90, elles ne peuvent pas, en vertu de la note 2e) du chapitre 40, être aussi classées dans le chapitre 40. Le Tribunal a déjà indiqué que, lorsqu’il y a une note d’exclusion pertinente qui empêche de prime abord le classement de marchandises dans deux chapitres différents ou dans deux positions différentes, il doit commencer son analyse par le chapitre et la position connexe qui est exclue[6]. Par conséquent, l’analyse du Tribunal doit commencer par le classement proposé dans la position no 90.18.

Position no 90.18

  1. Comme le Tribunal l’indique dans la décision initiale, pour être classées dans la position no 90.18, les marchandises en cause doivent être des « [i]nstruments et appareils pour la médecine, la chirurgie, l’art dentaire ou l’art vétérinaire, y compris les appareils de scintigraphie et autres appareils électromédicaux ainsi que les appareils pour tests visuels ». De plus, selon les notes explicatives de la position no 90.18, cette « position couvre un ensemble – particulièrement vaste – d’instruments et d’appareils, en toutes matières (y compris les métaux précieux), caractérisés essentiellement par le fait que leur emploi normal exige, dans la presque totalité des cas, l’intervention d’un praticien (médecin, chirurgien, dentiste, vétérinaire, sage‑femme, etc.), qu’il s’agisse d’établir un diagnostic, de prévenir ou de traiter une maladie, d’opérer, etc. » [nos italiques]. Les marchandises en cause semblent donc être utilisées principalement par des dentistes pour les examens qu’ils effectuent dans le cadre de leur pratique professionnelle, mais la question cruciale est de savoir si ces marchandises peuvent être considérées comme des instruments ou des appareils.
  2. Le Tarif des douanes ne contient aucune définition générale des termes « instrument » ou « appareil ». Toutefois, les termes « instrument » (instrument) et « appliance » (appareil) sont définis dans le Merriam-Webster’s Collegiate Dictionary[7] de la façon suivante :

    instrument 2 b : objet utilisé comme moyen ou aide : DUPE, TOOL. 3 : IMPLEMENT; spécialt. : conçu pour un travail de précision[8].

    appareil 2 a : pièce d’équipement servant à adapter un outil ou une machine à une fin particulière [...] b : instrument ou objet conçu pour une utilisation ou une fonction particulière [...][9].

    [Traduction]

    Les termes « tool » (outil) et « implement » (instrument) sont quant à eux définis comme suit :

    outil 1 a : objet portatif aidant à accomplir une tâche 2 a : chose (instrument ou équipement) utilisée pour exécuter une opération ou essentielle à la pratique d’un métier ou d’une profession [...][10]

    instrument 2 : objet utilisé pour exécuter une tâche [...]  syn IMPLEMENT, TOOL, INSTRUMENT, APPLIANCE, UTENSIL signifient un objet relativement simple servant à exécuter un travail[11].

    [Traduction]

  1. Le Canadian Oxford Dictionary[12] contient des définitions essentiellement similaires des mots « instrument » et « appliance », mais les termes « tool » et « implement » sont définis comme suit :

    outil 1 a tout objet ou instrument utilisé pour accomplir des fonctions mécaniques, manuellement ou au moyen d’une machine. 2 chose utilisée dans le cadre d’un métier ou d’une recherche [...][13]

    instrument 1 outil, instrument ou ustensile[14].

    [Traduction]

  1. Le Tribunal estime que les définitions susmentionnées démontrent qu’un « instrument » est un outil qui permet d’effectuer un travail délicat ou précis, alors qu’un « appareil » renvoie à un outil plus complexe[15]. Les termes « tool » et « implement » semblent être synonymes, alors que le terme « tool » seul semble est défini comme étant un objet portatif utilisé pour accomplir une tâche précise, qui peut être mécanique.
  2. Comme l’a affirmé le témoin d’Henry Schein lors de l’audience tenue le 27 février 2014, les marchandises en cause sont conçues pour être portées par des dentistes comme barrière protectrice pour empêcher le transfert de liquides entre le patient et le dentiste lors des traitements dentaires; elles n’effectuent pas elles-mêmes le travail[16]. Par conséquent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne sont pas des objets ou instruments conçus pour effectuer un travail de précision, ni des appareils ou des outils au sens de la position no 90.18. Les marchandises en cause ont peut-être été conçues pour être utilisées conjointement avec des instruments ou outils dentaires, mais elles ne sont pas elles-mêmes de tels objets.
  3. Après examen des éléments de preuve contenus dans le dossier existant, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne peuvent être classées dans le numéro tarifaire 90.18.

Position no 40.15

  1. Pour les motifs énoncés dans sa décision du 20 mai 2014, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 40.15 à titre d’autres vêtements et accessoires du vêtement (y compris les gants, mitaines et moufles) en caoutchouc vulcanisé non durci, pour tous usages.

CONCLUSION

  1. Conformément à l’article 1 des Règles générales, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont correctement classées dans la position no 40.15, plus précisément dans le numéro tarifaire 4015.19.90, à titre d’autres vêtements et accessoires du vêtement (y compris les gants, mitaines et moufles) en caoutchouc vulcanisé non durci, pour tous usages.

DÉCISION

  1. L’appel est rejeté.
 

[1].      Eastern Division Henry Schein Ash Arcona Inc. c. Canada (Agence des services frontaliers), 2015 CAF 220 (CanLII).

[2].      (20 mai 2014), AP-2013-029 (TCCE) [Eastern Division].

[3].      Les types de gants sont are des gants d’examen médical en nitrile Microflex Xceed et des gants d’examen médical en latex Diamond Grip.

[4].      L.C. 1997, ch. 36.

[5].      Eastern Division au par. 2.

[6].      Oceaneering Canada Limited c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (28 février 2014), AP‑2012‑017 (TCCE) au par. 29; HBC Imports a/s Zellers Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (6 avril 2011), AP-2010-005 (TCCE) aux par. 41-74; Costco Wholesale Canada Ltd. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (29 juillet 2013), AP-2012-041 et AP-2012-042 (TCCE) au par. 47.

[7].      Onzième éd..

[8].      S.v. « instrument ».

[9].      S.v. « appliance ».

[10].    S.v. « tool ».

[11].    S.v. « implement ».

[12].    Deuxième éd.

[13].    S.v. « tool ».

[14].    S.v. « implement ».

[15].    Cette interprétation est conforme à l’analyse du Tribunal dans Bionova Medical Inc. c. Commissaire de l’Agence des douanes et du revenu du Canada (24 février 2004), AP-2002-111 (TCCE) aux pp. 7-8.

[16].    Transcription de l’audience publique, 27 février 2014, aux pp. 33-34.