CANAC MARQUIS GRENIER LTÉE

CANAC MARQUIS GRENIER LTÉE
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Appel no AP-2016-005

Décision et motifs rendus
le mercredi 22 février 2017

TABLE DES MATIÈRES

 

EU ÉGARD À un appel entendu le 15 novembre 2016, en vertu de l’article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 14 avril 2016, concernant une demande de révision aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

CANAC MARQUIS GRENIER LTÉE Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

Jean Bédard
Jean Bédard
Membre présidant

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)
Date de l’audience : le 15 novembre 2016

Membre du Tribunal : Jean Bédard, membre présidant

Personnel de soutien : Eric Wildhaber, conseiller juridique
Dustin Kenall, conseiller juridique

PARTICIPANTS :

Appelante

Conseillers/représentants

Canac Marquis Grenier Ltée

Marco Ouellet
Jeffrey Goernert

 

Intimé

Conseiller/représentant

Président de l’Agence des services frontaliers du Canada

Patricia Nobl

TÉMOIN :

Éric Lacasse
Directeur des finances
Groupe Laberge Inc.

Veuillez adresser toutes les communications au :

Greffier
Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario) K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

EXPOSÉ DES MOTIFS

INTRODUCTION

  1. Le présent appel est interjeté par Canac Marquis Grenier Ltée (Canac) auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes[1] à l’égard d’une révision du classement tarifaire effectuée par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) datée du 14 avril 2016, conformément au paragraphe 60(4).
  2. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les chaises non rembourrées, multipositions pliantes avec bâti en métal et longues (chaises Multipositions) et les chaises bistro (chaises Bistro) (collectivement, les marchandises en cause) sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9401.79.10 de l’annexe du Tarif des douanes[2] à titre d’autres sièges, avec bâti en métal, pour usages domestiques, comme l’a déterminé l’ASFC, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 9401.79.90 à titre d’autres sièges, avec bâti en métal, pour usages principaux autres que domestiques, comme le soutient Canac.

HISTORIQUE DES PROCÉDURES

  1. Le 17 décembre 2010, les marchandises en causes ont été importées en vertu du numéro tarifaire 9401.79.10 à titre de chaises « pour usages domestiques ». Le 6 août 2014, Canac a déposé une demande de réexamen en vertu de l’article 74 de la Loi, alléguant que les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 9401.79.90. Le 29 décembre 2014, l’ASFC a rejeté la demande de révision de Canac.
  2. Le 26 janvier 2015, Canac a interjeté appel du rejet de sa demande à l’ASFC en vertu de l’article 60 de la Loi. L’ASFC a rejeté l’appel le 14 avril 2016. Le 18 mai 2016, Canac a déposé le présent appel auprès du Tribunal, conformément au paragraphe 67(1) de la Loi.
  3. Le 15 novembre 2016, le Tribunal a tenu une audience publique.

DESCRIPTION DES MARCHANDISES EN CAUSE

  1. Les marchandises en cause sont des chaises longues multipositions et des chaises bistro empilables destinées à un usage extérieur. Les chaises Multipositions (commercialisées sous les noms « Zéro‑Gravité » ou « Relax », entre autres, et le numéro d’article Canac 7010117) sont faites d’acier, munies de textile tissé sur le siège et le dossier, ainsi que d’un coussin amovible pour la tête[3]. Leur poids est de 16,5 livres, leur dimension est de 44” – 30” x 25½” x 30” et, bien qu’elles soient pliables, elles ne possèdent pas de poignée, de courroie ou de sac pour le transport[4].
  2. Les chaises Bistro (vendues par Canac dans un ensemble jumelé sous, entre autres, les numéros d’article Canac 102348 et 7011933) ont des bâtis en métal et sont munies de textile tissé sur le siège et le dossier. Elles pèsent 6,8 livres, sont empilables aux fins de l’entreposage et leur dimension est 21” x 26” x 28¾[5]. Elles sont habituellement vendues avec une petite table à ossature en acier, avec un dessus en verre (numéro d’article Canac 7011934)[6].
  3. Un échantillon de chaque chaise Multiposition et Bistro, de même que de multiples photographies couleur, ont été déposés auprès du Tribunal et examinés par celui‑ci.

CADRE LÉGISLATIF

  1. La nomenclature tarifaire est énoncée en détail dans l’annexe du Tarif des douanes, qui est conforme au Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (le Système harmonisé) élaboré par l’Organisation mondiale des douanes (OMD)[7]. L’annexe est divisée en sections et en chapitres et chaque chapitre de l’annexe contient une liste de marchandises classées dans des positions, sous‑positions et numéros tarifaires.
  2. Le paragraphe 10(1) du Tarif des douanes prévoit que le classement des marchandises importées est effectué, sauf indication contraire, en conformité avec les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé[8] et les Règles canadiennes[9] énoncées à l’annexe.
  3. Les Règles générales sont composées de six règles. Le classement commence par la Règle 1, qui prévoit que le classement doit être déterminé d’après les termes des positions et des notes de section ou de chapitre et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et notes, d’après les autres règles.
  4. L’article 11 du Tarif des douanes prévoit que, pour l’interprétation des positions et des sous‑positions, le Tribunal doit tenir compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[10] et des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[11], publiés par l’OMD. Bien que les avis de classement et les notes explicatives n’aient pas force exécutoire pour le Tribunal, celui‑ci les applique à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire[12].
  5. Par conséquent, le Tribunal doit d’abord déterminer si les marchandises en cause peuvent être classées conformément à la Règle 1 des Règles générales, selon les termes de la position et les notes de section ou de chapitre du Tarif des douanes, compte tenu des notes explicatives et des avis de classement pertinents. C’est seulement lorsque la Règle 1 ne permet pas d’arrêter de manière concluante le classement d’une marchandise qu’il faudra recourir aux autres Règles générales[13].
  6. Une fois que le Tribunal a utilisé cette méthode pour déterminer la position dans laquelle les marchandises en cause doivent être classées, l’étape suivante consiste à déterminer la sous‑position appropriée. La Règle 6 des Règles générales prévoit que « [l]e classement des marchandises dans les numéros tarifaires d’une sous‑position ou d’une position est déterminé légalement d’après les termes de ces sous‑positions et des Notes de sous‑position ainsi que, mutatis mutandis, d’après les Règles ci‑dessus [c’est‑à‑dire les Règles 1 à 5] [...] » et que « [...] les Notes de Sections et de Chapitres sont également applicables sauf dispositions contraires ».
  7. Enfin, le Tribunal doit déterminer le classement adéquat des numéros tarifaires. La règle 1 des Règles canadiennes prévoit que « [l]e classement des marchandises dans les numéros tarifaires d’une sous‑position ou d’une position est déterminé légalement d’après les termes de ces numéros tarifaires et des Notes supplémentaires ainsi que, mutatis mutandis, d’après les [Règles générales] et que « [...] les Notes de Sections, de Chapitre et de sous‑positions sont également applicables sauf dispositions contraires ». Les avis de classement et les notes explicatives ne s’appliquent pas au classement au niveau du numéro tarifaire.

TERMES DES POSITIONS, DES NOTES DE CHAPITRE ET DES NOTES EXPLICATIVES PERTINENTES

  1. Les dispositions pertinentes de la nomenclature tarifaire prévoient ce qui suit :

    Section XX

    MARCHANDISES ET PRODUITS DIVERS

    Chapitre 94

    MEUBLES; MOBILIER MÉDICO‑CHIRURGICAL; ARTICLES DE LITERIE
    ET SIMILAIRES; APPAREILS D’ÉCLAIRAGE NON DÉNOMMÉS
    NI COMPRIS AILLEURS; LAMPES‑RÉCLAMES, ENSEIGNES LUMINEUSES,
    PLAQUES INDICATRICES LUMINEUSES ET ARTICLES SIMILAIRES;
    CONSTRUCTIONS PRÉFABRIQUÉES

    [...]

    94.01 Sièges (à l’exclusion de ceux du no 94.02), même transformables en lits,
    et leurs parties.

    [...]

    -Autres sièges, avec bâti en métal :

    [...]

    9401.79  - -Autres

    9401.79.10 - - -Pour usages domestiques

    9401.79.90 - - -Autres

  2. Il n’y a aucune note légale, note supplémentaire, note explicative ou avis de classement couvrant le terme « pour usages domestiques » dans la section, le chapitre, la position, la sous‑position ou le numéro tarifaire des marchandises en cause.

ÉLÉMENTS DE PREUVE

  1. Canac a appelé M. Éric Lacasse, directeur des finances chez Gestion Laberge Inc. (la société mère de Canac), à témoigner à titre de témoin ordinaire au sujet du modèle d’affaires de Canac, y compris le prix, le processus d’achat et d’inspection, ainsi que les caractéristiques des marchandises en cause[14]. Dans son témoignage, M. Lacasse a déclaré qu’il était comptable professionnel agréé. Il est notamment chargé de tenir à jour la base de données sur le classement tarifaire utilisée par Canac lors de l’importation de marchandises[15].
  2. Lors de son témoignage, M. Lacasse a déclaré que Canac sert des clients aussi bien dans le secteur commercial que dans celui du marché de la vente au détail[16]. Il a affirmé que les principaux concurrents de Canac étaient The Home Depot, Rona et Lowes[17]. Il a décrit le modèle d’affaires de Canac comme étant une stratégie de « coût majoré » où, pour faire concurrence aux détaillants beaucoup plus grands, Canac tente de minimiser ses marges en fixant une marge qui permettrait à l’entreprise d’être rentable et de poursuivre son expansion[18]. M. Lacasse a comparé le modèle d’établissement des prix de Canac avec celui de Costco[19]. Il a mentionné que le prix constitue un facteur important à prendre en considération dans la stratégie d’affaires générale de Canac[20].
  3. M. Lacasse a aussi expliqué que, dans le cadre de sa stratégie concurrentielle générale, Canac importe directement des marchandises elle‑même, évitant ainsi un intermédiaire[21]. M. Lacasse a également déclaré qu’en même temps, Canac maintient un certain niveau de qualité de ses produits afin de répondre aux exigences de ses clients commerciaux qui constituent un marché essentiel de l’entreprise. Il a affirmé que Canac utilisait une échelle de 1 à 5 pour déterminer le niveau de qualité, et qu’elle visait à se pourvoir de marchandises qui se situeraient entre 3 et 4[22]. Lors de son contre‑interrogatoire, il a expliqué que le niveau 1 serait « le plus résidentiel », tandis que le niveau 5 serait « le plus commercial »[23]. M. Lacasse a également confirmé que cette échelle ne se trouvait dans aucun document commercial, mais qu’il s’agit uniquement de sa propre façon d’expliquer la qualité des marchandises que se procure Canac[24].
  4. M. Lacasse confirme que les échantillons de chaises déposées étaient faites d’un matériau et d’une composition identique à celle des marchandises en cause, sous réserve de couleurs différentes[25]. Il a également confirmé que les rapports préalables à l’inspection qui ont été déposés visaient également les marchandises en cause[26]. Dans son témoignage, il a déclaré que le tissu Textilene® des chaises Multipositions a été choisi en raison de ses qualités pour un usage extérieur, à savoir qu’il sèche rapidement, ne change pas de couleur et est résistant aux flammes[27]. Il a aussi confirmé que les chaises Multipositions sont classées pour soutenir jusqu’à 150 kilogrammes. De la même manière, M. Lacasse a déclaré qu’un revêtement en poudre est appliqué aux chaises Bistro afin d’augmenter leur résistance aux égratignures, à la corrosion, ainsi qu’aux dommages causés par les intempéries[28]. Il a aussi affirmé que les chaises Bistro sont munies d’un siège en osier synthétique imperméable afin d’accroître la longévité[29].
  5. Lors de son contre‑interrogatoire, M. Lacasse a confirmé que Canac ne fabrique pas les marchandises en cause. Il a aussi confirmé qu’il n’était pas l’acheteur de Canac responsable directement du choix et de l’achat des marchandises. Enfin, il a également affirmé que le même enduit de revêtement en poudre serait utilisé pour une chaise d’extérieur pour usages résidentiels (en raison de l’engagement de Canac à l’égard de la satisfaction de la clientèle)[30].
  6. L’ASFC n’a appelé aucun témoin.

ANALYSE DU TRIBUNAL

Fardeau de la preuve dans les appels concernant la question de savoir si une marchandise est « pour usages domestiques »

« Pour usages domestiques »

  1. Le seul terme tarifaire pertinent dans le cadre du présent appel est « pour usages domestiques ». Puisque le fardeau incombe à l’appelante, Canac doit démontrer que le classement des chaises « pour usages domestiques » de l’ASFC est incorrect[31]. En outre, puisque le numéro tarifaire 9401.79.90 est une catégorie résiduelle (« autres »), il ne peut s’appliquer que si les marchandises en cause ne peuvent être classées sous une catégorie plus précise, c’est-à-dire le numéro tarifaire 9401.79.10[32].
  2. Canac peut s’acquitter du fardeau qui lui incombe en établissant soit que les marchandises en cause visaient aussi bien des usages domestiques que des usages non domestiques, soit qu’elles visaient essentiellement des usages non domestiques[33]. Les usages non domestiques visent souvent des fins commerciales, mais peuvent englober tout usage ailleurs qu’à la maison, par exemple, le camping, le sport, les spectacles ou d’autres activités récréatives[34]. Le critère à appliquer est celui de l’usage prévu des marchandises en cause, par opposition à l’usage réel[35]. En l’espèce, et compte tenu de la nature des marchandises en cause, le critère visant à déterminer si les marchandises en cause sont « pour usages domestiques » vise non seulement une résidence principale comme une maison, mais s’étend aussi à une résidence secondaire, comme un chalet.
  3. Afin d’établir l’intention prévue, le Tribunal examine des facteurs tels la conception et les caractéristiques, la commercialisation, ainsi que le prix des marchandises en cause[36]. Lors de cette analyse, le Tribunal considérera l’ensemble de ces facteurs. La question de savoir si une marchandise est prévue « pour usages domestiques » est une question mixte de droit et de fait[37].

Fardeau de la preuve lors d’appels

  1. Les appels devant le Tribunal donnent lieu à une audience de novo. Cela signifie que le Tribunal peut accepter de nouveaux éléments de preuve et entendre de nouveaux arguments durant l’appel[38]. L’appelant n’est pas restreint aux faits et aux arguments présentés initialement à l’ASFC. Cependant, cela n’exonère pas l’appelant de s’acquitter du fardeau de la preuve qui lui incombe conformément au paragraphe 152(3) de la Loi sur les douanes[39], qui s’applique en l’espèce puisque la responsabilité du paiement des droits au titre des marchandises importées dépend de leur classement tarifaire, et le classement tarifaire est une question « relative » au paiement des droits afférents, au sens de l’alinéa 152(3)c)[40]. Le défaut de s’acquitter du fardeau de la preuve selon la prépondérance des probabilités sera fatal pour Canac[41].
  2. Afin de s’acquitter du fardeau de la preuve auquel il est tenu dans un cas comme le présent dossier, un appelant doit présenter des éléments de preuve qui fournissent un fondement factuel solide au Tribunal pour conclure que le dossier démontre que l’usage non domestique des marchandises est plus que simplement potentiel, accessoire, occasionnel ou auxiliaire[42]. Parce que Canac demande essentiellement au Tribunal de tirer des conclusions de fait et de définir ces conclusions sur le fondement des éléments de preuve, plutôt que de répondre à une question de droit, il est essentiel que Canac présente un dossier bien fondé au Tribunal. Il doit comprendre plus que des photographies et des définitions tirées du dictionnaire.
  3. En particulier, lorsqu’un appelant demande au Tribunal de conclure que l’usage prévu d’une marchandise est double (aussi bien domestique que non domestique), il demande au Tribunal de rendre une décision concernant le marché d’une marchandise où les usages domestiques ou autres peuvent se chevaucher à certains égards[43]. Afin d’établir le degré de chevauchement et de déterminer s’il est suffisant pour être qualifié d’égal, le Tribunal doit être saisi d’une preuve factuelle complète de la conception, des caractéristiques, de la commercialisation et du prix de la marchandise.
  4. Si l’objet des marchandises est véritablement double, le Tribunal peut s’attendre à trouver au moins certains éléments de preuve écrits corroborant les arguments. Cela pourrait prendre plusieurs formes, notamment des plans d’affaires, de la correspondance entre fournisseur et vendeur ou des comptes-rendus de leurs rencontres, des documents concernant la commercialisation ou la conception, des documents financiers ou des registres des ventes, ou d’autres documents contemporains pertinents qui démontrent que Canac ou d’autres parties qui fabriquent et/ou vendent les marchandises ont sérieusement pris en compte à la fois le marché où les marchandises sont destinées à un usage domestique et les marchés où les marchandises visent des usages autres que domestiques, et qu’elles ont concentré leur attention sur ceux‑ci[44].
  5. En outre, il arrive souvent que les éléments de preuve par témoignage les plus utiles sont le témoignage de personnes ayant une connaissance directe des marchandises, comme un fabricant, un concepteur ou un client[45]. Les éléments de preuve présentés par les témoins ayant une connaissance indépendante de l’industrie ou une expertise peuvent également jeter un regard objectif et fournir une aide spécialisée utile pour établir qu’une marchandise possède une double fonction dans les faits et non simplement en théorie. En somme, dans la préparation de sa cause, Canac doit faire preuve d’un minimum de diligence raisonnable pour enquêter sur les faits du marché en ce qui concerne les marchandises en cause et ensuite présenter les résultats de cette enquête au Tribunal.

Éléments de preuve de Canac

  1. En l’espèce, Canac n’allègue pas que les marchandises en cause visent principalement des usages non domestiques, mais plutôt qu’elles sont aussi bien consacrées à des usages domestiques que non domestiques.
  2. Afin d’étayer sa position, outre un mémoire de huit pages, les seuls éléments de preuve déposés par Canac, à l’exception des échantillons des chaises en question, sont les suivants :
    • i) pour les chaises Bistro : six pages d’extraits de blogues Internet dans lesquels on discute de l’origine du terme « bistro »; une définition tirée d’un dictionnaire en ligne des termes « bistro » et « portable »; sept pages de photographies de sections extérieures de restaurants; douze factures de ventes pour 56 chaises Bistro pour des hôtels et d’autres clients non résidentiels;
    • ii) pour les chaises Multipositions : un imprimé au sujet du tissu utilisé dans la fabrication des chaises Multipositions par le fabricant, ainsi que la définition d’un dictionnaire en ligne des mots « bistro » et « portable »;
    • iii) pour les deux marchandises en cause : plusieurs photographies annotées détaillant le processus d’inspection de Canac pour les marchandises avant leur importation.
  3. En somme, les éléments de preuve matériels consistent en grande partie en simples échantillons et photographies des marchandises, en définitions du dictionnaire sur des termes relatifs au tarif, ainsi qu’un ensemble de factures envoyées à des clients commerciaux. Ces éléments de preuve ne sont pas suffisants quant au type, à la quantité ou au caractère persuasif pour exonérer Canac du fardeau de la preuve qui lui incombe, selon la prépondérance des probabilités (c’est‑à‑dire plus probable que non), de démontrer que les marchandises visent aussi bien des usages non domestiques. Canac a essentiellement demandé au Tribunal de tirer des déductions basées sur la terminologie (par exemple, l’image de marque des chaises Bistro comme étant simplement « bistro », plutôt que des chaises de « style bistro ») ou sur des caractéristiques prétendues qui ne sont pas appuyées par les éléments de preuve (par exemple, décrire les chaises Multipositions pesant plus de quinze livres comme étant facilement « portables »).
  4. Comme il a été mentionné précédemment, Canac se fonde également sur le témoignage du directeur des finances de sa société mère. Alors que le témoin connaît le modèle d’affaires de Canac, qu’il a décrit comme étant concurrentiel en matière de prix et de qualité, il n’a que peu ou pas participé directement au processus d’approvisionnement des marchandises en cause. Le témoignage de M. Lacasse était crédible, étayé et utile pour ce qui est d’expliquer la stratégie d’affaires et les procédures d’importation générales de Canac, mais celui‑ci ne possédait pas de connaissances uniques (soit fondées sur une expérience personnelle, des responsabilités organisationnelles, ou sa propre enquête) en ce qui concerne la fabrication, la conception, les caractéristiques, la commercialisation ou les acheteurs (internationaux) finaux des marchandises en cause. Plus essentiel encore, il n’a fourni aucun élément de preuve grâce auquel le Tribunal pourrait comparer les marchandises en cause avec d’autres marchandises destinées à des usages essentiellement domestiques, essentiellement non domestiques ou doubles. En ce qui concerne les marchandises en cause, son témoignage était anecdotique et général, plutôt que précis et fondé sur des connaissances personnelles. Par conséquent, même si son témoignage était utile pour la description de la qualité des marchandises vendues par Canac et pour son créneau commercial, il n’étayait pas qualitativement ou quantitativement le niveau réel d’usages domestiques par rapport aux usages non domestiques, les applications et les utilisations des marchandises en cause.
  5. Pour les raisons qui suivent, le Tribunal détermine que, tout au plus, Canac a prouvé que les marchandises ont occasionnellement été vendues à des clients non résidentiels – principalement dans le secteur de l’hôtellerie. Canac n’a pas prouvé qu’il est plus probable que non que les marchandises soient tout aussi bien destinées à des usages non domestiques.

Chaises Multipositions

Conception et caractéristiques

  1. Canac fait valoir que les chaises Multipositions sont pliables, compactes, légères et faciles à ranger; par conséquent, elles sont portables n’importe où ailleurs qu’à la maison (par exemple, en camping, à la plage, dans les parcs publics, en pique‑nique, etc.)[46]. Elle soutient que les chaises Multipositions sont, ainsi, analogues aux chaises pliables et portables de l’appel no AP‑2003‑020[47]. Dans cette affaire, le Tribunal a conclu que les marchandises – qui étaient conçues pour créer des places assises temporaires dans un lieu – pouvaient être utilisées n’importe où parce qu’elles pouvaient être rétractables et rangées dans un sac, comme un parapluie[48].
  2. L’ASFC fait remarquer que les chaises Multipositions pèsent environ 16,5 livres, qu’elles ne sont pas munies de poignées de transport, de courroies ou de sacs pour faciliter le transport, et qu’elles sont plus grandes que les chaises pliables dont il est question dans la décision Ro-Na. Le fait que les chaises soient pliables n’en fait pas des chaises portables – cela ne les rend que plus faciles à ranger (c’est‑à‑dire dans une remise) pendant l’hiver[49]. De plus, elles sont conçues pour le confort (d’où le nom « Zéro‑Gravité »), et non la portabilité. Dans sa décision, l’ASFC a noté que les chaises Multipositions étaient conçues pour être « des chaises inclinables confortables et ergonomiques pour s’asseoir à la maison pendant de longues périodes » [traduction], selon le site Web du fabricant original (Lafuma Mobilier)[50]. Elles sont également plus chères que les chaises portables bon marché figurant sur le site Web de Canac, par exemple, entre 33 $CAN et 46 $CAN, par comparaison avec 6,99 $CAN pour une « chaise pliante »[51]. L’ASFC a aussi souligné qu’aucune des caractéristiques d’une marchandise destinée à un usage commercial n’a été mise en preuve ici, par exemple, la durabilité, le peu d’entretien requis, le coût plus élevé, la taille plus grande, le traitement antibactérien ou toute autre caractéristique unique[52].
  3. Pour les raisons énoncées ci-dessous, le Tribunal conclut que le poids et les dimensions des chaises Multipositions les rendent pliables afin d’être rangées pour l’hiver, mais non portables ailleurs que dans les environs de la maison ou du chalet.
  4. Les chaises Multipositions pèsent plus de 15 livres chacune et leur dimension a été conçue pour accommoder un adulte dans une position inclinée. Elles ne peuvent être pliées pour être transportées dans un sac comme les chaises visées dans la décision Ro‑Na. Canac fait valoir que les chaises Multipositions pourraient être apportées pour un voyage en camping, un pique‑nique ou à la plage. Cependant, Canac n’a présenté aucun élément de preuve pour appuyer cet argument – c’est‑à‑dire aucun document de commercialisation, aucune photographie de plage ou de site de terrain de camping, aucun témoignage de clients – à part un diagramme de Venn créé par le conseiller de Canac uniquement à partir de déductions non étayées[53]. Ce diagramme de Venn peut être considéré comme étayant une thèse, mais il ne constitue pas un élément de preuve. Compte tenu de leur taille, les chaises Multipositions ne sont pas le type de chaises pliables qui peuvent être facilement transportées plus loin que sur de courtes distances autour de la maison ou du le chalet (même une seule chaise, et encore moins plusieurs) ou placées dans un véhicule familial sans déplacer des bagages ou de l’équipement, ce qui est peu pratique. Bien qu’il ne soit pas impossible de transporter ces chaises, le Tribunal conclut que ce n’est pas leur objet.
  5. En outre, tandis que Canac décrit les marchandises comme des chaises « pliantes » dans son mémoire, elles sont en fait décrites par Canac dans les cartons d’importation, sur l’étiquette de produit et dans les documents de commercialisation seulement comme « multipositions » (qui fait référence aux différentes positions d’inclinaison des chaises), et non « pliables » ou « rétractables ». En effet, le catalogue en ligne de Canac utilise le terme « pliante » pour décrire des chaises génériques, minces, légères et à faible coût, qui s’apparentent davantage à celles visées par la décision Ro‑Na[54]. Le Tribunal conclut que le nom, l’apparence, la stabilité et le style général des chaises appuient une conclusion selon laquelle on vise à mettre l’accent sur le confort et l’esthétique en vue d’un usage dans un lieu en particulier ou autour de celui‑ci, et non pour être transporté d’un endroit à un autre.
  6. Le témoin de Canac a signalé que les chaises Multipositions contenaient du Textilene® qui, parce qu’il sèche rapidement, ne change pas de couleur et est résistant aux flammes, ce qui permet une utilisation à l’extérieur. Canac a également présenté un imprimé tiré d’un site Web de Twitchell Corporation, le fabricant de Textilene®, y compris une page contenant une photographie d’un échantillon du tissu et une norme d’inflammabilité CS-191-53 et CA 117 E ainsi qu’une norme de résistance à l’abrasion CS10/500. Canac a également déclaré que la chaise était classée pour soutenir jusqu’à 150 kilogrammes. Cependant, Canac n’a présenté aucun élément de preuve pour établir la signification de ces normes, en particulier si elles sont considérées comme étant des normes commerciales (acceptables dans le secteur de l’hôtellerie), ou alors si d’autres chaises longues multipositions sont conçues conformément à des normes moins élevées[55]. En eux‑mêmes, les éléments de preuve ne permettent pas de soutenir une inférence d’usage autre qu’à la maison ou au chalet, comme leur usage dans un hôtel ou un terrain de camping autour d’une piscine. En l’absence d’éléments de preuve liés aux normes commerciales, le Tribunal conclut que ces caractéristiques démontrent simplement une conception destinée à un usage extérieur, notamment sur la terrasse d’une résidence[56].
  7. Canac s’est aussi fondée sur la garantie d’un an accompagnant les marchandises comme gage de qualité. Cependant, dans les faits, les modalités de la garantie vont à l’encontre de l’usage non domestique, parce que les modalités prévoient expressément que la garantie ne s’applique pas lorsque « le produit est utilisé à des fins autres que résidentielles ou à des fins autres que celles déterminées par le fabricant »[57]. Lorsqu’interrogé à ce sujet, le témoin de Canac n’était pas au courant d’usages autres que résidentiels qui auraient pu être déterminés par le fabricant[58]. Puisque la garantie est fournie par Novelca[59], qui est un nom commercial utilisé par Canac[60], les modalités de la garantie étaient sous le contrôle de Canac. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que le libellé de la garantie, qui exclut expressément la couverture pour des usages autres que résidentiels, constitue un indice très solide que, d’après sa conception, la marchandise n’est pas destinée à d’autres usages.
  8. En somme, la conception et les caractéristiques des chaises Multipositions ne visent pas un double usage, parce qu’une preuve selon laquelle une chaise peut être pliée et transportée, puis placée dans le coffre d’une voiture, n’est pas la même preuve que si une chaise était conçue pour être portable et utilisée pour s’asseoir ailleurs qu’à la maison ou au chalet. De même, une preuve selon laquelle une chaise est conçue pour résister aux intempéries n’est pas en soi une preuve qu’elle a été conçue pour des usages non domestiques pour le secteur de l’hôtellerie ou d’autres secteurs. Même si Canac avait réussi à établir que les marchandises en cause sont des chaises haut de gamme destinées à des usages domestiques, cela en soi ne permet pas de conclure que ces chaises sont aussi destinées à d’autres usages.

Commercialisation

  1. Canac fait valoir que les chaises Multipositions sont commercialisées comme mobilier extérieur, sans indication quant à l’usage prévu[61]. Le site Web de Canac est conçu pour attirer autant d’acheteurs potentiels que possible. Comme dans Stylus (sofas, fauteuils, tabourets haut de gamme, etc.), les chaises ne sont pas commercialisées « [...] précisément pour des usages domestiques »[62] [traduction].
  2. L’ASFC fait remarquer que les chaises Multipositions sont vendues dans la quincaillerie de Canac, qui vend directement aux consommateurs résidentiels dans divers lieux. Les chaises Multipositions sont annoncées sur son site Web sous les mots‑clés « ameublement d’extérieur » et « saisonnier »[63]. Aucun élément de preuve ne permet d’établir que les chaises Multipositions sont commercialisées à des fins autres pour des usages résidentiels.
  3. Encore ici, le Tribunal conclut que Canac a omis de s’acquitter du fardeau de la preuve qui lui incombe. Canac n’a présenté aucun élément de preuve quant à la commercialisation des chaises au‑delà de ses magasins au détail ou de son site Web. Le Tribunal accepte les éléments de preuve fournis par M. Lacasse portant que Canac détenait des clients du secteur commercial en plus du secteur de la vente au détail[64]. Cela ne signifie pas, cependant, que tous les produits offerts et vendus par Canac sont destinés à la fois pour des usages domestiques et non domestiques. Le Tribunal reconnaît que certains consommateurs non domestiques (petites entreprises, entrepreneurs, etc.) font des achats dans des magasins Canac et peuvent avoir acheté certaines des marchandises pour des usages non domestiques. Cependant, le Tribunal ne peut se fonder sur des hypothèses générales au sujet des transactions de consommateurs n’étant pas liées à des éléments de preuve concrets au sujet des marchandises en cause. Le simple fait que les consommateurs commerciaux et institutionnels aient accès à un site Web général et qu’ils fassent leurs achats dans un magasin local ne suffit pas en soi à conclure que les marchandises sur le site Web ou disponibles dans le magasin local sont destinées à la fois à des usages domestiques et non domestiques[65].
  4. Le Tribunal accepte également le témoignage de M. Lacasse quant au fait que toutes les transactions commerciales ou institutionnelles ne peuvent être établies lorsque certains clients institutionnels ou commerciaux paient en personne au moyen d’une carte de crédit à la caisse plutôt que par l’entremise de facturation entre entreprises et de bons de commande. Cependant, contrairement aux éléments de preuve présentés relativement aux chaises Bistro, pas une seule facture n’a été déposée par Canac à partir de sa base de données de clients commerciaux et institutionnels au sujet des ventes de chaises Multipositions. Canac demande essentiellement au Tribunal de faire acte de foi et de présumer qu’un certain nombre de chaises Multipositions ont été achetées par des clients institutionnels et commerciaux au moyen d’une carte de crédit. Cela ne respecte pas la norme de preuve requise pour s’acquitter du fardeau de la preuve établie dans la Loi sur les douanes.
  5. Canac aurait pu démontrer un usage égal en soumettant des éléments de preuve précis faisant la lumière sur les exigences des clients du secteur de l’hôtellerie ou des éléments de preuve démontrant des efforts de commercialisation précis à l’intention des clients commerciaux ou institutionnels. Aucun tel élément de preuve n’a été présenté au Tribunal. Par conséquent, le Tribunal conclut que Canac ne s’est pas acquittée du fardeau de la preuve qui lui incombe relativement à la commercialisation.

Prix

  1. Canac fait valoir que les chaises Multipositions sont « [...] la moitié du prix des chaises longues non portables et leur prix se situe dans la fourchette de prix des chaises pliantes [...] »[66][traduction].
  2. En fait, les éléments de preuve concernant le prix démontrent que le prix des chaises Multipositions est supérieur à celui des chaises pliantes bon marché, portables, mais bien inférieur à celui des fauteuils inclinables vendus aux clients du secteur de l’hôtellerie. D’après son site Web, Canac vend les chaises Multipositions entre 33 $CAN et 46 $CAN, tandis qu’il vend les chaises plus petites, rétractables et pliantes entre 6,50 $CAN et 24 $CAN[67]. D’après les éléments de preuve, les chaises vendues par une entreprise d’approvisionnement d’hôtels se situent dans une gamme de prix allant de 200 $CAN à 400 $CAN[68]. Les prix fixés par Canac sont conformes à ceux des chaises Multipositions utilisées essentiellement pour la maison ou le chalet, pour offrir un confort à prix abordable.
  3. Le Tribunal reconnaît que Canac ne considère pas qu’il fait concurrence directement à des détaillants présentant des prix plus élevés, et que son modèle d’affaires peut lui permettre de vendre à un prix moins élevé que les distributeurs qui œuvrent dans le secteur de l’hôtellerie. Cependant, ce seul élément, en l’absence d’éléments de preuve convaincants concernant la conception, les caractéristiques et la commercialisation des chaises Multipositions, ne suffit pas pour que Canac puisse s’acquitter du fardeau de la preuve qui lui incombe afin d’avoir gain de cause dans le présent appel.

Conclusion

  1. Par conséquent, compte tenu de l’ensemble des éléments de preuve qui précèdent, le Tribunal conclut que Canac ne s’est pas acquittée du fardeau de la preuve auquel elle est tenue à l’égard des chaises Multipositions.

Chaises Bistro

Chaises Bistro ou chaises de style bistro

  1. Canac fait valoir que les chaises Bistro sont conçues pour être petites, empilables et légères, avec un revêtement de protection en poudre – ces caractéristiques étant toutes conformes à leur désignation « bistro » ainsi qu’à l’utilisation dans un bistro, c’est‑à‑dire un petit restaurant, une taverne, etc. L’ASFC fait valoir que le terme « bistro » fait simplement référence à un style de chaise. Tout comme une chaise « Adirondack » est un style de chaise et non une chaise destinée à être utilisée dans la région des Adirondack, une chaise bistro est un style de chaise fondée sur une mode, et non un lieu prévu. L’ASFC fait aussi remarquer que le terme « bistro » – lorsqu’il fait référence à des meubles de jardin – signifie souvent simplement un ensemble de deux chaises avec une petite table. L’ASFC a soutenu ce point de vue en déposant des imprimés de sites Web de différents détaillants. L’ASFC soutient aussi qu’aucune preuve ne permet d’établir que les chaises Bistro sont plus solides, durables ou qu’elles possèdent d’autres caractéristiques visant à répondre aux besoins commerciaux et/ou du secteur de l’hôtellerie au‑delà des exigences du marché résidentiel.
  2. Au début de l’audience, Canac s’est objectée à la caractérisation des chaises comme étant « de style bistro » plutôt que simplement des « chaises Bistro ». Canac a fourni des définitions du mot « bistro » tirées du dictionnaire[69]. L’une des définitions prévoit ce qui suit : « 1. Restaurant modeste de style européen ou café »[70] [traduction]. Une autre définition fait référence à un « petit restaurant »[71] [traduction]. La preuve documentaire déposée par Canac comprend également une petite histoire des meubles bistro, qui présente une histoire intéressante de l’évolution des meubles de style bistro[72].
  3. La théorie de la cause de Canac repose en grande partie sur le fait qu’un bistro est un petit restaurant et que, par conséquent, une chaise bistro est une chaise destinée à être utilisée dans un petit restaurant et, ainsi, qu’elle est, par définition, conçue pour un usage autre que domestique. Le Tribunal note, cependant, qu’aucun élément de preuve ne démontre que la chaise Bistro est le seul modèle de chaise utilisé dans les petits restaurants, ou que tous les petits restaurants utilisent la chaise Bistro ou des chaises de modèle similaire.
  4. L’histoire des meubles bistro, qui fait aussi partie de la preuve documentaire de Canac[73], présente un aperçu de l’évolution du style bistro au fil des ans. D’après l’article, le style bistro, tel que nous le connaissons, a été créé à la fin du 19e siècle, vers l’époque de l’Exposition universelle de Paris de 1889. C’est à cette époque que le style, qui rappelle la Belle Époque, est devenu populaire dans les établissements parisiens. En outre, l’article fait référence à divers modèles de chaises et de tables utilisées dans les établissements parisiens ayant adopté le style bistro[74]. À cet égard, le Tribunal note également que les extraits du site Web de Canac déposés par celle‑ci dans le cadre de sa preuve documentaire illustrent différents modèles de chaises et de tables faisant partie des ensembles bistro offerts[75]. Cela est conforme au point de vue selon lequel le terme bistro fait référence à un style. Le Tribunal conclut que les éléments de preuve qui figurent dans la petite histoire des meubles bistro sont plus convaincants que les définitions tirées de dictionnaires fournies par Canac, puisque la petite histoire correspond davantage à la perception générale des meubles « bistro » du 21e siècle en Amérique du Nord.
  5. Pour ces motifs, le Tribunal conclut que les chaises Bistro sont conçues en fonction d’une esthétique de style bistro et que l’utilisation du terme « bistro » ne suppose pas une utilisation prévue. Par conséquent, Canac n’a toujours pas prouvé l’usage projeté des chaises afin d’avoir gain de cause dans le présent appel.

Conception et caractéristiques

  1. À l’audience, le conseiller juridique de Canac a déclaré que les chaises Bistro sont classées pour soutenir jusqu’à 150 kilogrammes. Cependant, aucun élément de preuve documentaire au dossier des chaises Bistro ne le démontre, par opposition aux chaises Multipositions[76]. Canac a aussi fourni un certain nombre de photographies générales de patios de restaurants ayant un mobilier de style bistro. Toutefois, Canac n’a fourni aucun élément de preuve quant aux exigences des secteurs de l’hôtellerie ou de la restauration pour ce qui est des chaises de style bistro et si les chaises Bistro répondent à ces exigences. Tout ce dont dispose le Tribunal est la cote subjective de 1 à 5 déjà abordée relativement aux chaises Multipositions.
  2. Bien que les éléments de preuve appuient l’argument selon lequel la conception des chaises Bistro est conforme à une conception utilisée par les restaurants dans leur terrasse extérieure, il n’y a aucun élément de preuve quant aux caractéristiques qui appuieraient une conclusion selon laquelle les chaises Bistro sont conçues tout autant pour un usage autre que domestique. Le seul élément de preuve fourni concernant les caractéristiques est lié au fait que les chaises Bistro peuvent résister aux intempéries. Comme il en a déjà été question au regard des chaises Multipositions, cela n’est pas, en soi, une preuve que les chaises sont conçues pour usages autres que domestiques, à l’intention des secteurs de l’hôtellerie ou d’autres secteurs. Même si Canac a clairement établi que les chaises Bistro sont des chaises haut de gamme pour usages domestiques, ce seul fait ne peut, en soi, permettre de conclure qu’elles sont aussi destinées à un autre usage.

Commercialisation

  1. Le fait que les chaises Bistro puissent être achetées chez des détaillants résidentiels comme Canadian Tire, Rona et Walmart n’est pas pertinent, selon les observations de Canac, en raison des conclusions et de la décision du Tribunal dans l’affaire IKEA, qui concernait des chaises de travail.
  2. L’ASFC constate que les chaises Bistro sont commercialisées au moyen du site Web général de vente au détail de Canac sous les mots‑clés « ameublement d’extérieur » et « meubles de jardin ». Il n’existe aucune preuve de commercialisation à des fins non résidentielles. La seule preuve de ventes commerciales consiste en un petit nombre de factures sur une période de deux ans, de 2011 à 2013, totalisant seulement un infime pourcentage de toutes les marchandises importées[77].
  3. Le simple fait que les clients commerciaux et institutionnels aient accès à un site Web général et font leurs achats dans un magasin local ne suffit pas, en soi, à établir clairement que les marchandises qui figurent sur le site Web ou qui sont offerts en magasin sont destinées à un usage domestique et non domestique. En l’espèce, les éléments de preuve démontrent que la commercialisation était principalement axée sur les consommateurs. À cet égard, le Tribunal note que la preuve documentaire présentée par Canac démontre que les chaises Bistro sont commercialisées dans le cadre de la vente de meubles saisonniers et qu’elles figurent parmi différentes chaises pliantes pour enfants et ensembles pour balcon[78].
  4. Par conséquent, la présente affaire se distingue nettement de la décision Stylus, où l’appelante a démontré avoir établi des relations avec des acheteurs du secteur de l’hôtellerie, des décorateurs d’intérieur et des propriétaires hôteliers, participé à des foires commerciales et tenu compte des spécifications demandées par des clients potentiels (et a inclus au dossier de nombreuses copies de ces demandes en matière de spécifications et bons de commande). La présente affaire se distingue également de la décision IKEA, où l’appelante a indiqué au Tribunal que les marchandises en cause étaient commercialisées à la fois dans la section de la vente au détail et dans la section commerciale de son site Web[79].
  5. Le Tribunal fait aussi remarquer qu’aucune preuve n’a été fournie au sujet de la garantie couvrant les chaises Bistro. Les seuls documents au dossier sont une garantie pour les chaises Multipositions (discutée précédemment) et une garantie pour les tables bistro. L’existence d’une garantie pour les chaises n’a pas été établie clairement.
  6. Comme preuve supplémentaire de la commercialisation destinée aux acheteurs commerciaux et institutionnels, Canac a inclus 12 factures de ventes faites à des comptes commerciaux et institutionnels. Le Tribunal fait remarquer que les quantités figurant sur les factures sont petites (généralement deux ou trois ensembles par commande; une facture pour 25 ensembles) et s’échelonnent sur une longue période (2011‑2013)[80]. Il n’est pas nécessaire pour une appelante de présenter toutes les commandes ou factures, mais s’il ne soumet qu’un petit échantillon montrant une petite quantité de marchandise sur une aussi longue période, il faut compléter avec des éléments de preuve additionnels (par exemple, un résumé d’une base de données) afin d’aider le Tribunal pour qu’il puisse au moins établir une échelle ou une proportion moyenne démontrant que les ventes faites à des clients non résidentiels sont importantes par rapport aux ventes faites à des clients résidentiels. Les éléments de preuve présentés au Tribunal en l’espèce sont, au mieux, anecdotiques et ne peuvent constituer le fondement d’une conclusion selon la prépondérance des probabilités. Par conséquent, le Tribunal conclut que Canac ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombe au titre de la commercialisation des chaises Bistro.

Prix

  1. Canac fait valoir que le prix et l’acheteur final ne sont pas pertinents. L’ASFC soutient que les chaises de style bistro vendues à des clients du secteur de l’hôtellerie sont plus chères que celles vendues à des clients résidentiels citant, par comparaison, le prix le plus faible de chaise de style bistro à restaurant-furniture.ca, soit 47 $CAN, par rapport à l’ensemble bistro (incluant deux chaises et une petite table) offert par Canac à 69 $CAN[81]. Dans sa décision, l’ASFC alléguait que le fait que les chaises Bistro étaient vendues comme ensemble, et que la petite table ne coûtait que 21 $US (à l’époque – elles ont été importées il y a six ans), démontre qu’elles n’étaient pas « [...] fabriquées en vue d’un usage intensif requis par les normes commerciales »[82] [traduction]. L’ASFC a également soumis des imprimés de site Web d’autres détaillants qui montrent une vaste gamme de prix pour des ensembles bistro, par exemple 336 $CAN (Walmart), 109 $CAN (Réno‑Dépôt), 129,99 $CAN (Home Hardware) et 198 $CAN (The Home Depot)[83].
  2. Là encore, Canac a choisi de se fonder uniquement sur la preuve qu’elle a déposée quant à son modèle d’affaires et n’a soumis aucun élément de preuve à l’égard des prix comparatifs des chaises Bistro pour usages domestiques ou non domestiques. La preuve concernant les prix soumise par l’ASFC n’est pas non plus exhaustive ni concluante. Elle laisse cependant entendre que les prix fixés par Canac pour les chaises Bistro se situent au bas de l’échelle de prix du marché, ce qui, en l’absence de toute preuve contraire, est habituellement conforme au prix du marché résidentiel, mais non commercial[84].
  3. Les faits présentés par Canac relativement à son modèle d’affaires et à sa stratégie d’établissement des prix s’appliquent aussi bien aux chaises Multipositions qu’aux chaises Bistro. Par conséquent, les conclusions du Tribunal sont identiques à cet égard. Le Tribunal reconnaît que le modèle d’affaires de Canac peut lui permettre de vendre à un prix inférieur que les distributeurs répondant aux besoins du secteur de l’hôtellerie. Cependant, en l’absence d’une preuve satisfaisante relativement à la conception, aux caractéristiques et à la commercialisation des chaises Bistro, les éléments de preuve fournis quant au modèle d’affaires et à la stratégie d’établissement des prix ne sont pas en soi suffisants pour permettre à Canac de s’acquitter du fardeau qui lui incombe afin d’avoir gain de cause en appel.

Conclusion

  1. Par conséquent, compte tenu de l’ensemble des éléments de preuve susmentionnés, le Tribunal conclut que Canac ne s’est pas acquittée du fardeau de la preuve qui lui incombe relativement aux chaises Bistro.

DÉCISION

  1. Canac ne s’est pas acquittée du fardeau de la preuve qui lui incombe eu égard à l’un ou l’autre des facteurs pertinents des marchandises en cause.
  2. Par conséquent, l’appel est rejeté.
 

[1].      L.R.C., 1985, c. 1 (2e suppl.) [Loi].

[2].      L.C. 1997, ch. 36.

[3].      Pièce AP-2016-005-13B, onglet 1 aux pp. 4, 9, 11, vol. 1B.

[4].      Pièce AP-2016-005-11A, onglet 21 à la p. 153, vol. 1A.

[5].      Pièce AP-2016-005-13B, onglet 2 aux pp. 46, 50, vol. 1B.

[6].      Ibid., onglet 3 aux pp. 100-101.

[7].      Le Canada est l’un des pays signataires de la Convention internationale sur le Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, qui régit le Système harmonisé.

[8].      L.C. 1997, ch. 36, annexe [Règles générales].

[9].      L.C. 1997, ch. 36, annexe.

[10].    Organisation mondiale des douanes, 2e éd., Bruxelles, 2003.

[11].    Organisation mondiale des douanes, 5e éd., Bruxelles, 2012.

[12].    Voir Canada (Procureur général) c. Suzuki Canada Inc., 2004 CAF 131 (CanLII) aux par. 13, 17, où la Cour d’appel fédérale a interprété l’article 11 du Tarif des douanes comme signifiant que les notes explicatives doivent être respectées, à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire. Le Tribunal est d’avis que cette interprétation s’applique également aux avis de classement.

[13].    Canada (Procureur général) c. Igloo Vikski Inc., 2016 CSC 38 (CanLII) au par. 21.

[14].    Bien que M. Lacasse ait témoigné (et qu’il ait été interrogé) en français, les mémoires des parties ainsi que les plaidoiries à l’audience ont été faits en anglais (conformément à la préférence de Canac). Transcription de l’audience publique, 15 novembre 2016, aux pp. 3-4.

[15].    Ibid. aux pp. 8-9.

[16].    Ibid. aux pp. 37-38.

[17].    Ibid. à la p. 9.

[18].    Ibid. à la p. 10.

[19].    Ibid.

[20].    Ibid. aux pp. 10, 38-39.

[21].    Ibid. à la p. 9.

[22].    Ibid. aux pp. 11, 37-38.

[23].    Ibid. à la p. 47.

[24].    Ibid. aux pp. 47-48.

[25].    Ibid. à la p. 19.

[26].    Ibid. aux pp. 17-18.

[27].    Ibid. à la p. 24.

[28].    Ibid. à la p. 31.

[29].    Ibid. à la p. 32.

[30].    Ibid. aux pp. 42, 49, 76.

[31].    Stylus Sofas Inc., Stylus Atlantic, Stylus Ltd. et Terravest (SF Subco) Limited Parternship c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (19 août 2015), AP-2013-021, AP-2013-022, AP-2013-023 et AP‑2013‑024 (TCCE) [Stylus] au par. 62.

[32].    Cycles Lambert Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (28 novembre 2013), AP‑2012‑060 (TCCE) au par. 29; Partylite Gifts Ltd. c. Le Commissaire de l’Agence des douanes et du Revenu du Canada (16 février 2004), AP-2003-008 (TCCE) à la p. 8, notant qu’un « numéro tarifaire résiduel [...] ne serait utilisé que s’il n’y avait aucun autre numéro tarifaire approprié pour classer des marchandises. »

[33].    Stylus au par. 63.

[34].    Ibid. aux par. 60-61 (reconnaissant des marchandises comme étant « pour usages domestiques » même si elles se trouvent ailleurs qu’à la maison, pourvu que leur but premier est de servir à des personnes dans un environnement domestique »).

[35].    Ibid. au par. 64.

[36].    Ibid. au par. 65.

[37].    IKEA Supply AG c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (18 septembre 2014), AP‑2013‑053 (TCCE) [IKEA] au par. 19.

[38].    La Société Canadian Tire Limitée c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (12 juin 2014), AP‑2013-042 (TCCE) [Canadian Tire] au par. 23.

[39].    Costco Wholesale Canada Ltd. (faisant affaires au Québec sous le nom Les entrepôts Costco) c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (23 mai 2014), AP‑2011‑033 (TCCE) au par. 25; Canada (Agence des services frontaliers) c. Miner, 2012 CAF 81 (CanLII); Jakks Pacific Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (30 mars 2016), AP-2015-012 (TCCE) au par. 33; J. Cheese Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (13 septembre 2016), AP-2015-011 (TCCE) [J. Cheese] au par. 63.

[40].    Ibid.

[41].    Il convient également de noter que le Tribunal n’a pas à choisir entre le classement tarifaire établi par l’ASFC et celui proposé par Canac. Le Tribunal peut, sur le fondement des éléments de preuve dont il a été saisi, classer les marchandises en cause selon un classement tarifaire différent.

[42].    Canadian Tire au par. 23; 6572243 Canada Ltd. s/n Kwality Imports c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (3 août 2012), AP-2010-068 (TCCE) [Kwality] au par. 44.

[43].    IKEA au par. 38, qui discute des chaises de travail pour n’importe quel environnement, commercial ou résidentiel; Kwality au par. 46, qui traite de la pertinence des meubles résidentiels génériques fabriqués en série et à bas prix destinés aux hôtels à rabais et aux cafés‑restaurants.

[44].    Voir, par exemple, Stylus au par. 66 où le vice‑président des ventes et du marketing (secteurs résidentiel et hôtelier) de l’appelante (un fabricant de meubles) a témoigné au sujet de la réunion auprès des clients du secteur de l’hôtellerie afin de déterminer leurs besoins et de créer une collection de meubles visant à cibler le secteur du milieu et du bas de gamme de ce marché.

[45].    Voir, par exemple, Stylus au par. 26 où l’appelante a déposé un rapport provenant du directeur de l’approvisionnement d’une chaîne d’hôtels à laquelle l’appelante fournissait des meubles et a appelé comme témoin ce directeur.

[46].    Pièce AP-2016-005-06A à la p. 5, vol. 1.

[47].    Alliance Ro-Na Home Inc. c. Commissaire de l’Agence des douanes et du revenu du Canada (25 mai 2004) [Ro‑Na].

[48].    Pièce AP-2016-005-06A à la p. 5, vol. 1.

[49].    Pièce AP-2016-005-11A aux par. 37-39, vol. 1A.

[50].    Pièce AP-2016-005-06A, onglet 1 à la p. 3, vol. 1 (« Fruit d’une collaboration étroite avec le corps médical, il a été spécialement conçu pour offrir à ses utilisateurs la position idéale de relaxation dans un format fauteuil pliable »).

[51].    Pièce AP-2016-005-06A, onglet 7 à la p. 123, vol. 1.

[52].    Pièce AP-2016-005-11A au par. 61, vol. 1A, citant Kwality au par. 54.

[53].    Transcription de l’audience publique, 15 novembre 2016, à la p. 63.

[54].    Pièce AP-2016-005-06A, onglet 7 à la p. 123, vol. 1; pièce AP-2016-005-13B, onglet 1 aux pp. 4, 9, vol. 1B.

[55].    Transcription de l’audience publique, 15 novembre 2016, aux pp. 53-54.

[56].    Dans la décision Stylus, le Tribunal a conclu qu’un indice d’inflammabilité conforme au CAL 117 (dont la pertinence a été expliquée au moyen d’un témoignage averti) appuyait la conclusion selon laquelle les marchandises étaient destinées au secteur de l’hôtellerie, mais les marchandises en cause dans cette affaire étaient des mobiliers haut de gamme de styles variés, notamment des sofas, des fauteuils, des chaises et tabourets de salle à manger, et des ottomanes – et non des meubles d’extérieur faits de tissu synthétique résistant au soleil pour usage extérieur.

[57].    Pièce AP-2016-005-13B, onglet 1 à la p. 10, vol. 1B.

[58].    Transcription de l’audience publique, 15 novembre 2016, aux pp. 50, 77.

[59].    Pièce AP-2016-005-13B, onglet 1 à la p. 10, vol. 1B.

[60].    Transcription de l’audience publique, 15 novembre 2016, aux pp. 40-41.

[61].    Pièce AP-2016-005-06A au par. 28, vol. 1.

[62].    Ibid. aux par. 28-30.

[63].    Pièce AP-2016-005-11A, onglet 23 à la p. 164, vol. 1A.

[64].    Transcription de l’audience publique, 15 novembre 2016, à la p. 11.

[65].    Kwality au par. 64.

[66].    Pièce AP-2016-005-06A au par. 31, vol. 1.

[67].    Ibid., onglet 7 à la p. 123.

[68].    Pièce AP-2016-005-11A, onglet 26 aux pp. 180-185, vol. 1A.

[69].    Pièce AP-2016-005-06A, onglet 9, vol. 1.

[70].    Ibid. à la p. 133.

[71].    Ibid. à la p. 135.

[72].    Ibid., onglet 8 aux pp. 128-132.

[73].    Ibid.

[74].    Ibid. à la p. 129.

[75].    Ibid. aux pp. 124-125.

[76].    Transcription de l’audience publique, 15 novembre 2016, à la p. 85.

[77].    Pièce AP-2016-005-11B (protégée) aux par. 64-65, onglet 27 à la p. 188, vol. 2.

[78].    Pièce AP-2016-005-06A, onglet 7 aux pp. 124-125, vol. 1.

[79].    IKEA aux par. 28-30.

[80].    Pièce AP-2016-005-06A, onglet 12, vol. 1.

[81].    Pièce AP-2016-005-11A au par. 57, vol. 1A.

[82].    Pièce AP-2016-005-06A, onglet 1 à la p. 3, vol. 1.

[83].    Pièce AP-2016-005-11A, onglet 15 à la p. 134, onglet 16 à la p. 136, onglet 17 à la p. 139 et onglet 20 à la p. 144, vol. 1A.

[84].    Kwality au par. 54; IKEA aux par. 32-36, décrivant les éléments de preuve à l’appui de la conclusion selon laquelle le détaillant a ciblé des clients d’affaires conscients des coûts.