BEST BUY CANADA LTD.

BEST BUY CANADA LTD.
c.
PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

Appel no AP-2016-027

Décision et motifs rendus
le mercredi 26 juillet 2017

TABLE DES MATIÈRES

 

EU ÉGARD À un appel entendu le 4 avril 2017 en vertu de l’article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À quatre décisions rendues par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada les 13 juillet, 18 juillet, 26 août et 30 août 2016, concernant des différends termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

BEST BUY CANADA LTD. Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA Intimé

DÉCISION

L’appel est accueilli.

Peter Burn
Peter Burn
Membre présidant

 

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)
Date de l’audience : le 4 avril 2017

Membres du Tribunal : Peter Burn, membre présidant

Personnel de soutien : Rebecca Marshall-Pritchard, conseillère juridique

PARTICIPANTS :

Appelante

Conseillers/représentants

Best Buy Canada Ltd.

Justin Kutyan
Thang Trieu

 

Intimé

Conseiller/représentant

Président de l’Agence des services frontaliers du Canada

Diya Bouchedid

TÉMOINS :

Korry Hoglan
Directeur du design
Z-Line Designs

Celeste Irvine-Jones
Architecte d’intérieur
Creative Friction

Veuillez adresser toutes les communications au :

Greffier
Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario) K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

EXPOSÉ DES MOTIFS

INTRODUCTION

  1. Le présent appel a été interjeté par Best Buy Canada Ltd. (Best Buy) le 6 octobre 2016, aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes[1] à l’égard de quatre décisions rendues par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) entre juillet et août 2016, en application du paragraphe 60(4) de la Loi.
  2. Le litige dans le présent appel concerne le classement tarifaire de supports de télévision à écran plat sur pied « Z-Line Designs » (les marchandises en cause). Il s’agit pour le Tribunal de déterminer si les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9403.20.00 à titre d’autres meubles en métal et dans le numéro tarifaire 9403.60.10 à titre d’autres meubles en bois pour usages domestiques, comme l’a déterminé l’ASFC, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 8529.90.90 à titre d’autres parties reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinées aux appareils des positions nos 85.25 à 85.28, comme le soutient Best Buy.

HISTORIQUE DE LA PROCÉDURE

  1. Le 2 octobre 2014, Best Buy a déposé une demande auprès de l’ASFC visant une décision anticipée aux termes de l’article 43.1 de la Loi à l’égard du classement tarifaire des marchandises en cause dans le numéro tarifaire 8529.90.90.
  2. Le 14 mai 2015, l’ASFC a classé les marchandises en cause dans les numéros tarifaires 9403.20.00 et 9403.60.10 à titre d’autres meubles en métal et d’autres meubles en bois, respectivement, selon le modèle en question. Le 4 août 2015, Best Buy a demandé le réexamen de la décision en application du paragraphe 60(2) de la Loi. L’ASFC a rejeté les demandes à quatre dates différentes : le 13 juillet 2016[2], le 18 juillet 2016[3], le 26 août 2016[4] et le 30 août 2016[5].
  3. Le Tribunal a tenu une audience publique le 4 avril 2017. Best Buy a fait entendre M. Korry Hoglan, directeur du design chez Z-Line Designs, à titre de témoin ordinaire. Best Buy a également demandé à faire reconnaître Mme Celeste Irvine-Jones, architecte d’intérieur chez Creative Friction, à titre de témoin expert. Le Tribunal a jugé satisfaisante la grande expérience de Mme Irvine-Jones dans le domaine de l’architecture intérieure et a reconnu son expertise dans ce domaine pour les besoins de l’instance[6].

DESCRIPTION DES MARCHANDISES EN CAUSE

  1. Huit modèles font l’objet du présent appel :

    Modèle

    Catégorie

    Classement tarifaire
    plaidé par l’ASFC

    Classement tarifaire
    plaidé par Best Buy

    Zen

    Non installable

    9403.20.00

    8529.90.90

    Lyle

    Non installable

    9403.60.10

    8529.90.90

    Alora

    Non installable

    9403.60.10

    8529.90.90

    Barona

    Non installable

    9403.60.10

    8529.90.90

    Cayman

    Non installable

    9403.60.10

    8529.90.90

    Venetian

    Installable

    9403.20.00

    8529.90.90

    Jaguar

    Installable

    9403.60.10

    8529.90.90

    Makena

    Installable

    9403.60.10

    8529.90.90

  2. Les marchandises en cause sont importées démontées, et elles sont conçues pour être assemblées et placées sur le sol pour tenir des télévisions à écran plat. Trois des modèles comprennent des supports de montage (« installables ») tandis que les cinq autres n’en comprennent pas (« non installables »). Les trois modèles installables sont commercialisés en tant que modèles « trois-en-un », étant donné qu’ils peuvent supporter une télévision à écran plat au moyen de trois différentes configurations, soit : i) posée directement sur le meuble; ii) fixée par écrous sur un support de montage pivotant intégré qui, à son tour, est fixé sur la base du meuble; et iii) fixée par écrous directement sur le support mural, lequel est détaché du meuble et apposé au mur[7]. Six des modèles sont pourvus de cadres en bois, tandis que les deux autres sont pourvus de cadres métalliques. Tous les modèles sont munis d’étagères pour les composantes périphériques de divertissement et de systèmes de gestion de fils incorporés pour dissimuler les câbles et les cordons.

CADRE LÉGISLATIF

  1. La nomenclature tarifaire est énoncée en détail dans l’annexe du Tarif des douanes, qui est conforme au Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (le Système harmonisé) élaboré par l’Organisation mondiale des douanes (OMD)[8]. L’annexe est divisée en sections et en chapitres et chaque chapitre de l’annexe contient une liste de marchandises classées dans des positions, sous-positions et numéros tarifaires.
  2. Le paragraphe 10(1) du Tarif des douanes prévoit que, sous réserve du paragraphe 10(2), le classement des marchandises importées est effectué, sauf indication contraire, en conformité avec les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé[9] et les Règles canadiennes[10] énoncées à l’annexe.
  3. Les Règles générales sont composées de six règles. Le classement commence par la règle 1, qui prévoit que le classement doit être déterminé d’après les termes des positions et des notes de section ou de chapitre et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et notes, d’après les autres règles.
  4. L’article 11 du Tarif des douanes prévoit que, pour l’interprétation des positions et des sous-positions, le Tribunal doit tenir compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[11] et des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises[12], publiés par l’OMD. Bien que les avis de classement et les notes explicatives n’aient pas force exécutoire pour le Tribunal, le Tribunal les applique à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire[13].
  5. Par conséquent, le Tribunal doit d’abord déterminer si les marchandises en cause peuvent être classées conformément à la règle 1 des Règles générales, selon les termes de la position et les notes de section ou de chapitre pertinentes du Tarif des douanes, compte tenu des notes explicatives et des avis de classement pertinents. Si les marchandises en cause ne peuvent être classées au niveau de la position par application de la règle 1, le Tribunal doit alors examiner les autres règles[14].
  6. Après que le Tribunal a utilisé cette méthode pour déterminer la position dans laquelle la marchandise en cause doit être classée, l’étape suivante consiste à utiliser une méthode similaire pour déterminer la sous-position appropriée. La règle 6 des Règles générales prévoit que « [l]e classement des marchandises dans les sous-positions d’une même position est déterminé légalement d’après les termes de ces sous-positions et des Notes de sous-positions ainsi que, mutatis mutandis, d’après les [règles 1 à 5] [...] » et que « les Notes de Sections et de Chapitres sont également applicables sauf dispositions contraires ».
  7. Pour finir, le Tribunal doit déterminer le numéro tarifaire approprié. La règle 1 des Règles canadiennes prévoit que « [l]e classement des marchandises dans les numéros tarifaires d’une sous-position ou d’une position est déterminé légalement d’après les termes de ces numéros tarifaires et des Notes supplémentaires ainsi que, mutatis mutandis, d’après les [Règles générales] [...] » et que « les Notes de Sections, de Chapitres et de sous-positions sont également applicables sauf dispositions contraires ». Les avis de classement et les notes explicatives ne sont pas applicables au classement au niveau du numéro tarifaire.

ANALYSE

Applicabilité de la décision Bri-Chem

  1. Best Buy prétend qu’en plaidant la présente cause, l’ASFC plaide de nouveau l’affaire Sanus Systems[15]. Selon Best Buy, les actions de l’ASFC sont contraires à la décision de la Cour d’appel fédérale dans Bri-Chem, dans laquelle la Cour a tranché que, « s’il est vrai qu’une formation du [T]ribunal n’est pas liée par les décisions de formations antérieures, il est également vrai que cette formation ne devrait pas s’écarter sans raison des décisions antérieures », sauf dans deux cas : 1) les faits sont différents, ou ii) la décision antérieure du Tribunal est mal fondée[16]. En l’espèce, les faits sont différents, tel qu’il est expliqué ci-dessous. L’ASFC est donc en droit de saisir le Tribunal du cas en l’espèce.
  2. Même s’il est vrai que des supports de télévision étaient en cause dans Sanus Systems, et même s’il est également vrai que l’ASFC s’est fondée en grande partie sur les mêmes arguments en l’espèce que ceux qui avaient échoué dans Sanus Systems, il ne s’agit pas d’une situation dans laquelle l’ASFC plaide de nouveau Sanus Systems. Même s’il est reconnu qu’il s’agit également de supports de télévision, les marchandises en cause en l’espèce sont distinctes. Dans Sanus Systems, les marchandises en cause étaient trois modèles de supports de télévision munis d’une plaque de fixation. Toutefois, les marchandises en cause en l’espèce se composent de huit modèles différents, dont trois ont des configurations distinctes (décrites ci-dessus); les cinq autres modèles sont des meubles conçus pour recevoir une télévision. Les faits sont par conséquent distincts. Dans Bri-Chem, l’ASFC a tenté de plaider de nouveau une pure question de droit prévue dans la Loi, laquelle avait déjà été tranchée et ne relevait d’aucune exception adoptée plus tard par la Cour d’appel fédérale. Les questions de classement tarifaire, par contre, sont généralement caractérisées comme impliquant une question de droit et de fait. Par conséquent, le Tribunal rejette l’affirmation de Best Buy selon laquelle Bri-Chem s’applique dans le présent contexte.

Ordre de l’analyse concernant la position tarifaire

  1. Le Tribunal a conclu antérieurement que les marchandises ne peuvent, de prime abord, être classées dans deux positions si, en vertu des notes de section ou de chapitre pertinentes, les termes d’une position sont expressément exclus de l’autre[17]. Le Tribunal a également conclu qu’en présence d’une telle note d’exclusion pertinente, le Tribunal doit commencer son analyse par la position qui n’est pas visée par la note d’exclusion[18].
  2. En l’espèce, la note 1g) du chapitre 94 exclut expressément les articles du chapitre 85. Par conséquent, le Tribunal commencera son analyse en déterminant si les marchandises en cause peuvent, à première vue, être classées dans la position no 85.29 à titre de parties de marchandises des positions nos 85.25 à 85.28. Si le Tribunal conclut que les marchandises en cause peuvent être classées dans cette position, il n’est pas tenu de déterminer si elles peuvent également être classées dans la position no 94.03[19].
  3. Les termes des positions, des notes de chapitre et des notes explicatives pertinentes sont établis dans l’annexe.

Les marchandises en cause sont-elles d’autres parties reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinées aux appareils des positions nos 85.25 à 85.28?

  1. La position no 85.29 vise les pièces reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinées aux appareils des nos 85.25 à 85.28, cette dernière position visant les appareils récepteurs de télévision (y compris les télévisions à écran plat).
  2. De façon analogue à l’appelant dans Sanus Systems, à l’appui de sa prétention selon laquelle les marchandises en cause constituent des « parties » au sens attribué à ce terme à la position no 85.29, Best Buy soutient qu’elles forment des unités complètes avec ces télévisions, n’ont aucune autre fonction, sont nécessaires pour l’usage sécuritaire et prudent des télévisions à écran plat et sont conçues pour être utilisées avec de tels appareils[20].
  3. En outre, et aussi dans le sens de ce que l’appelant a affirmé dans Sanus Systems, Best Buy fait valoir ce qui suit : i) les notes explicatives de la position no 85.29 prévoient que les meubles spéciaux conçus pour recevoir les appareils des nos 85.25 à 85.28 doivent être classés dans la position no 85.29 à titre de parties; ii) le meuble qui supporte physiquement une télévision est admissible à titre de partie, et les marchandises en cause sont de la même nature que le meuble qui supporte physiquement une télévision à écran plat; iii) l’éventail des pièces figurant dans les notes explicatives à la position no 85.29 n’est pas exhaustif; et iv) les parties de meuble ne sont pas limitées à celles qui enferment ou complètent une télévision à écran plat[21].
  4. Concernant l’exigence de la position no 85.29 selon laquelle les parties doivent être reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinées aux appareils de la position no 85.28, Best Buy soutient que les marchandises en cause sont conçues pour être utilisées avec des télévisions à écran plat, comme l’indiquent les caractéristiques suivantes : i) l’épaisseur précise du verre; ii) la longueur précise des étagères métalliques et en bois conçues de manière à s’adapter à la taille, au poids et à la profondeur des télévisions à écran plat; iii) l’architecture ouverte visant à assurer une circulation d’air optimale pour les composantes abritées, notamment les consoles de jeu et les lecteurs de DVD; et iv) un « pilier » central qui non seulement fournit un support intégral au meuble, mais qui gère également les fils[22].
  5. L’ASFC soutient que le terme « parties », lorsqu’on le lit à la lumière du renvoi aux « meubles spéciaux conçus pour recevoir les appareils des nos 85.25 à 85.28 » [nos italiques] dans la note 3 des notes explicatives de la position no 85.29, doit être considéré comme étant limité aux articles qui enferment ou complètent l’appareil. Puisque les marchandises en cause ne peuvent être correctement considérées comme des meubles constituant des parties précises d’appareils de la position no 85.28 (au sens de les enfermer ou de les compléter), l’ASFC soutient qu’elles ne sont pas exclues de la portée du chapitre 94 en vertu de la note 1g). Bref, les marchandises en cause n’ont pas été correctement décrites comme des parties de télévision.
  6. Concédant que les marchandises en cause sont destinées aux télévisions à écran plat, l’ASFC soutient que ce fait à lui seul ne suffisait pas pour faire des marchandises en cause des « parties » de télévision[23]. Elle fait valoir, comme elle l’a fait dans Sanus Systems, que, puisque les marchandises en cause ne sont pas essentielles au fonctionnement des télévisions ni ne font partie intégrante de leur conception, elles ne pouvaient pas être classées à titre de parties. Le fait que les marchandises en cause nécessitent des télévisions pour réaliser leur fonction prévue n’est pas pertinent puisque la question consiste à savoir si le support est essentiel au fonctionnement de la télévision et non pas l’inverse[24].
  7. Dans Sanus Systems, le Tribunal a rejeté ces arguments de l’ASFC. Il le fait encore en l’espèce. Répétant son point de vue dans Sanus Systems, le Tribunal conclut que le renvoi à « parties » de la position no 85.29 comprend l’ameublement destiné de par sa conception à être utilisé exclusivement ou principalement avec des télévisions à écran plat[25]. Cette conclusion découle nécessairement de l’interprétation de cette position conjointement avec la note 1g) du chapitre 94 et à la lumière de cette note. À cet égard, le Tribunal adopte le raisonnement énoncé dans Sanus Systems tel qu’il est établi aux paragraphes 53 à 55 de cette décision, où il a été déterminé que les supports conçus pour supporter des télévisions à écran plat entraient clairement dans la catégorie des « meubles spéciaux conçus pour recevoir les appareils des nos 85.25 à 85.28 », comme il est décrit dans les notes explicatives à la position no 85.29.
  8. Le Tribunal a entendu le long témoignage de M. Hoglan concernant la conception de chaque modèle de support en cause. En tenant compte de plusieurs facteurs, il est clair que les supports sont conçus expressément pour supporter des télévisions à écran plat. Ces facteurs sont les suivants : (i) l’épaisseur du verre[26]; (ii) le poids que peut soutenir chaque support (entre 130 à 160 livres); (iii) l’épaisseur du métal ou du bois[27]; (iv) le test consistant à incliner chaque support de 15 pouces pour s’assurer que la télévision ne tombera pas facilement du support[28]; (v) l’architecture ouverte des étagères conçue pour permettre la circulation d’air et la co-installation de composantes assorties (p. ex. boîte de connexion, consoles de jeu)[29]; et vi) le « pilier », qui est conçu pour la gestion des fils, mais qui fait également partie intégrante de la structure du support[30]. Toutes ces caractéristiques de conception servent à accommoder des télévisions à écran plat.
  9. Lors de son témoignage, M. Hoglan a par ailleurs donné de multiples détails concernant l’évolution de la conception du pied support dans un délai relativement court, évolution qui a eu lieu afin de refléter la réalité sans cesse changeante des télévisions qui deviennent plus légères, plus minces et plus grandes[31]. Par exemple, la longueur des supports a augmenté avec le temps afin d’accommoder les télévisions de 65 pouces, comparativement aux télévisions de 42 pouces pour lesquelles ils avaient été conçus à l’origine. Cela illustre la mesure dans laquelle la conception de ces pieds supports est adaptée au marché en mutation des télévisions à écran plat. Les marchandises en cause répondent par conséquent au critère de la position no 85.29 d’être exclusivement ou principalement destinées aux marchandises des positions nos 85.28 à 85.28.
  10. Cette conclusion vaut pour tous les modèles des marchandises en cause, peu importe s’ils sont installables ou non installables. Le fait qu’une télévision à écran plat puisse être installée au mur, et ainsi être affichée indépendamment de tous les huit modèles de marchandises en cause, ne prive pas les supports de leur but.
  11. Le Tribunal fait encore une fois écho à ses conclusions dans Sanus Systems, où il a conclu que, à la lumière de la description photographique des marchandises en cause[32] et du témoignage de Mme Irvine-Jones, qui était en grande partie une réplique de son témoignage dans Sanus Systems, les marchandises en cause n’ont aucun attrait esthétique ni aucune valeur utilitaire à titre de meubles, hormis la fin très précise pour laquelle elles sont conçues[33]. En fait, le Tribunal a entendu que la conception de ces supports est limitée par le fait qu’ils doivent être placés contre un mur et qu’ils offrent un espace de rangement limité comparativement à d’autres meubles. Mme Irvine-Jones a indiqué qu’elle ne recommanderait pas ces supports à des clients pour une utilisation différente de celle pour laquelle ils sont conçus, soit de supporter une télévision à écran plat. Pour tout autre usage, tel que le rangement, il existe d’autres solutions plus appropriées.[34] Ces faits indiquent la nature et le but véritable de ces supports, et ils illustrent l’absence d’autres utilisations pour ceux-ci.
  12. Dans son argument subsidiaire, l’ASFC s’appuie sur deux avis de classement récents qui, selon elle, ont supplanté la décision du Tribunal rendue dans Sanus Systems et qui ordonnent que les supports de télévision à écran plat soient classés sous la position no 94.03 à titre de meubles. Les opinions décrivent deux supports/chariots pour télévision distincts. Le premier est un support audio/vidéo sur pied pour télévision à écran plat, conçu pour les salles de conférence, les salles de classe, les réunions de conseils d’administration, les salles de formation, les salons professionnels et les événements promotionnels. Le second est un support audio/vidéo sur pied pour télévision à écran plat, décrit comme étant un chariot pour télévision à écran large. Ces deux supports sont dotés de quatre roulettes pivotantes, et ils ne sont pas conçus pour un usage domestique. Ces opinions s’appliquent clairement aux marchandises qui sont distinctes des marchandises en cause; elles ne sont donc pas pertinentes en l’espèce.
  13. Compte tenu des considérations qui précèdent et vu l’application de la Règle 2 a) des Règles générales aux marchandises en cause démontées, le Tribunal est d’avis que les marchandises en cause constituent des « parties » au sens attribué à ce terme dans la position no 85.29 et qu’en vertu de la note 1g) du chapitre 94, elles ne peuvent pas être classées dans la position no 94.03.
  14. Il y a deux sous-positions au même niveau dans la position no 85.29. La sous-position no 8529.10 vise les antennes, les réflecteurs d’antenne ou leurs parties. Puisque les marchandises en cause ne respectent manifestement pas les termes de cette sous-position, le Tribunal conclut que les marchandises en cause doivent être classées dans la sous-position résiduelle no 8529.90 à titre d’autres parties et, en particulier, dans le numéro tarifaire résiduel 8529.90.90 à titre d’autres parties.

DÉCISION

  1. Pour les motifs qui précèdent, conformément à la Règle 2 a) des Règles générales, les marchandises en cause doivent être classées dans le numéro tarifaire 8529.90.90.
  2. L’appel est accueilli.

ANNEXE

TERMES DES POSITIONS, DES NOTES DE SECTION ET DE CHAPITRE ET DES NOTES EXPLICATIVES PERTINENTES

Dispositions pertinentes de classement relatives à la position nº 85.29

Section XVI

MACHINES ET APPAREILS, MATÉRIEL ÉLECTRIQUE ET LEURS PARTIES;
APPAREILS D’ENREGISTREMENT OU DE REPRODUCTION DU SON,
APPAREILS D’ENREGISTREMENT OU DE REPRODUCTION DES IMAGES
ET DU SON EN TÉLÉVISION, ET PARTIES ET ACCESSOIRES
DE CES APPAREILS

Chapitre 85

MACHINES, APPAREILS ET MATÉRIELS ÉLECTRIQUES ET LEURS PARTIES;
APPAREILS D’ENREGISTREMENT OU DE REPRODUCTION DU SON,
APPAREILS D’ENREGISTREMENT OU DE REPRODUCTION
DES IMAGES ET DU SON EN TÉLÉVISION, ET
PARTIES ET ACCESSOIRES DE CES APPAREILS

85.29 Parties reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement
destinées aux appareils des nos 85.25 à 85.28.

8529.90 -Autres

8529.90.90 - - -Autres p>

  1. Les dispositions pertinentes concernant la section XVI prévoient ce qui suit :

    2. Sous réserve des dispositions de la Note 1 de la présente Section et de la Note 1 des Chapitres 84 et 85, les parties de machines (à l’exception des parties des articles des nos 84.84, 85.44, 85.45, 85.46 ou 85.47) sont classées conformément aux règles ci-après :

    a) les parties consistant en articles compris dans l’une quelconque des positions des Chapitres 84 ou 85 (à l’exception des nos 84.09, 84.31, 84.48, 84.66, 84.73, 84.87, 85.03, 85.22, 85.29, 85.38 et 85.48) relèvent de ladite position, quelle que soit la machine à laquelle elles sont destinées;

    b) lorsqu’elles sont reconnaissables comme exclusivement ou principalement destinées à une machine particulière ou à plusieurs machines d’une même position (même des nos 84.79 ou 85.43), les parties, autres que celles visées au paragraphe précédent, sont classées dans la position afférente à cette ou à ces machines ou, selon les cas, dans les nos 84.09, 84.31, 84.48, 84.66, 84.73, 85.03, 85.22, 85.29 ou 85.38; toutefois, les parties destinées principalement aussi bien aux articles du no 85.17 qu’à ceux des nos 85.25 à 85.28, sont rangées au no 85.17;

  2. Les notes explicatives pertinentes de la section XVI prévoient ce qui suit :

    CONSIDERATIONS GENERALES

    II.- PARTIES

    (Note 2 de la Section)

    En règle générale, sous réserve des exclusions reprises au chiffre I ci-dessus, les parties reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement conçues pour une machine ou un appareil déterminé ou pour plusieurs machines ou appareils compris dans une même position (même les nos 84.79 ou 85.43) sont classées à la position afférente à cette ou à ces machines. Relèvent toutefois de positions particulières, distinctes de celles des machines :

    H) Les parties des appareils des nos 85.25 à 85.28 (n° 85.29).

  3. Les notes explicatives pertinentes du chapitre 85 prévoient ce qui suit :

    CONSIDERATIONS GENERALES

    B.- PARTIES

    En ce qui concerne les Règles générales relatives au classement des parties, se reporter aux Considérations générales de la Section.

    Les parties non électriques de machines ou appareils du présent Chapitre sont classées comme suit :

    2°) Les autres parties non électriques reconnaissables comme étant destinées exclusivement ou principalement aux machines ou appareils électriques, etc., du présent Chapitre suivent le régime des articles auxquels elles sont destinées ou, le cas échéant, sont classées aux nos 85.03, 85.22, 85.29 ou 85.38.

  4. Les notes explicatives pertinentes de la position no 85.28 prévoient ce qui suit :

    PARTIES

    Sous réserve des dispositions générales relatives au classement des parties (voir les Considérations générales de la Section XVI), les parties des appareils de la présente position relèvent du no 85.29.

  5. Les notes explicatives pertinentes de la position no 85.29 prévoient ce qui suit :

    Sous réserve des dispositions générales relatives au classement des parties (voir les Considérations générales de la Section), la présente position comprend les parties des appareils relevant des quatre positions précédentes. Parmi les parties dont il s’agit, on peut citer :

    (3) Les meubles spéciaux conçus pour recevoir les appareils des nos 85.25 à 85.28.

Dispositions pertinentes de classement relatives à la position nº 94.03

Section XX

MARCHANDISES ET PRODUITS DIVERS

Chapitre 94

MEUBLES; MOBILIER MÉDICO-CHIRURGICAL; ARTICLES DE LITERIE
ET SIMILAIRES; APPAREILS D'ÉCLAIRAGE NON DÉNOMMÉS
NI COMPRIS AILLEURS; LAMPES-RÉCLAMES, ENSEIGNES LUMINEUSES,
PLAQUES INDICATRICES LUMINEUSES ET ARTICLES SIMILAIRES;
CONSTRUCTIONS PRÉFABRIQUÉES

94.03 Autres meubles et leurs parties.

9403.20.00 -Autres meubles en métal

9403.60 -Autres meubles en bois

9403.60.10 - - -Pour usages domestiques

  1. Les notes de chapitre pertinentes du chapitre 94 prévoient ce qui suit :

    1. Le présent Chapitre ne comprend pas :

    g) les meubles constituant des parties spécifiques d’appareils des nos 85.18 (no 85.18), 85.19 ou 85.21 (no 85.22) ou des nos 85.25 à 85.28 (no 85.29);

    2. Les articles (autres que les parties) visés dans les nos 94.01 à 94.03 doivent être conçus pour se poser sur le sol.

    Restent toutefois compris dans ces positions, même s’ils sont conçus pour être suspendus, fixés au mur ou posés les uns sur les autres :

    (a) les armoires, les bibliothèques, les étagères et les meubles à éléments complémentaires;

  2. Les notes explicatives pertinentes du chapitre 94 prévoient ce qui suit :

    CONSIDERATIONS GENERALES

    Le présent Chapitre englobe, sous réserve des exceptions mentionnées dans les Notes explicatives de ce Chapitre :

    1) L’ensemble des meubles, ainsi que leurs parties (nos 94.01 à 94.03).

    Au sens du présent Chapitre, on entend par meubles ou mobilier :

    A) Les divers objets mobiles, non compris dans des positions plus spécifiques de la Nomenclature qui sont conçus pour se poser sur le sol (même si dans certains cas particuliers – meubles et sièges de navires, par exemple – ils sont appelés à être fixés ou assujettis au sol) et qui servent à garnir, dans un but principalement utilitaire, les appartements, hôtels, théâtres, cinémas, bureaux, églises, écoles, cafés, restaurants, laboratoires, hôpitaux, cliniques, cabinets dentaires, etc., ainsi que les navires, avions, voitures de chemin de fer, voitures automobiles, remorques-camping et engins de transport analogues. Les articles de même nature (bancs, chaises, etc.) utilisés dans les jardins, squares, promenades publiques, sont également compris ici.

    Les meubles présentés à l’état démonté ou non assemblé sont classés de la même manière que les meubles montés lorsque les diverses parties sont présentées ensemble, même si certaines de ces parties consistent en plaques, parties ou accessoires en verre, marbre ou autres matières (tel est le cas, par exemple, d’une table en bois avec le dessus en verre, d’une armoire de chambre, en bois, avec sa glace, d’un buffet de salle à manger, en bois, avec sa plaque de marbre).

    PARTIES

    Le présent Chapitre ne couvre que les parties des produits des nos 94.01 à 94.03 et 94.05. Sont considérés comme telles les articles, même simplement ébauchés qui, par leur forme ou d’autres caractéristiques, sont reconnaissables comme étant conçus exclusivement ou principalement pour un article de ces positions et qui ne sont pas repris plus spécifiquement ailleurs.

  3. Les notes explicatives pertinentes de la position no 94.03 prévoient ce qui suit :

    Parmi les meubles de cette position, dans laquelle sont groupés, non seulement les articles eux­mêmes non repris dans les positions précédentes, mais aussi leurs parties, il y a lieu de mentionner tout d’abord ceux qui se prêtent généralement à l’utilisation en différents lieux, tels qu’armoires, vitrines, tables, porte-téléphone, bureaux, secrétaires, bibliothèques, étagères.

  4. Les avis de classement sur les supports de télévision à écran plat prévoient ce qui suit :

    9403.20 5. Meuble audio/vidéo de sol en aluminium (dimensions (H x L x l) : 195 cm x 89 cm x 69 cm) sur roulettes, aussi appelé « chariot de conférence pour TV ».

    Le meuble est présenté non assemblé. Il est conçu pour être utilisé dans des salles de conférence, des salles de classe, des salles de réunion, des salles d’exercice, des foires, des expositions, etc.

    6. Meuble audio/vidéo de sol (hauteur totale : 180 cm) sur roulettes, aussi appelé « chariot pour TV à profil élargi », principalement en acier. Le meuble est présenté non assemblé et sans l’écran plat. Il est conçu pour recevoir un écran plat de maximum 42 pouces (106,7 cm) pouvant peser 68 kg.


[1].      L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.) [Loi].

[2].      Modèles Zen, Lyle, Alora et Barona.

[3].      Modèle Cayman.

[4].      Modèles Venetian et Jaguar.

[5].      Modèle Makena.

[6].      Transcription de l’audience publique, 4 avril 2017, à la p. 84.

[7].      Ceux-ci comprennent les modèles Venetian, Jaguar et Makena. Voir pièce AP-2016-027-06A, onglets 5 et 6.

[8].      Le Canada est l’un des pays signataires de la Convention internationale sur le Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, qui régit le Système harmonisé.

[9].      L.C. 1997, ch. 36, annexe [Règles générales].

[10].    L.C. 1997, ch. 36, annexe.

[11].    Organisation mondiale des douanes, 2e éd., Bruxelles, 2003.

[12].    Organisation mondiale des douanes, 5e éd., Bruxelles, 2012.

[13]     Voir Canada (Procureur général) c. Suzuki Canada Inc., 2004 CAF 131 (CanLII) aux par. 13, 17, où la Cour d’appel fédérale a interprété l’article 11 du Tarif des douanes comme signifiant que les notes explicatives doivent être respectées, à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire. Le Tribunal est d’avis que cette interprétation s’applique également aux avis de classement.

[14].    Canada (Procureur général) c. Igloo Vikski Inc., 2016 CSC 38 (CanLII) au par. 21.

[15].    Sanus Systems c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (8 juillet 2010) AP-2009-007 (TCCE) [Sanus Systems].

[16].    Canada (Attorney General) c. Bri-Chem Supply Ltd., 2016 FCA 257 (CanLII) aux par. 44, 46-52.

[17]     Sanus Systems au par. 35; HBC Imports a/s Zellers Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (6 avril 2011), AP-2010-005 (TCCE) [Zellers] au par. 49.

[18].    Costco Wholesale Canada Ltd. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (29 juillet 2013), AP-2012-041 et AP-2012-042 (TCCE) [Costco] au par. 46; Zellers aux par. 41-74; Sanus Systems au par. 35; Korhani Canada Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (18 novembre 2008), AP-2007-008 (TCCE) [Korhani] aux par. 27-28.

[19].    Costco au par. 72; Korhani aux par. 28, 44.

[20].    AP-2016-027-04A au par. 38, vol. 1.

[21].    AP-2016-027-04A au par. 38, vol. 1.

[22].    Pièce AP-2016-027-04A au par. 39, vol. 1; Transcription de l’audience publique, 4 avril 2017, p. 42.

[23].    Transcription de l’audience publique, 4 avril 2017, p. 58.

[24].    Pièce AP-2016-027-06A aux par. 39-42, vol. 1B.

[25].    Sanus Systems au par. 52.

[26].    Transcription de l’audience publique, 4 avril 2017, p. 46.

[27].    Transcription de l’audience publique, 4 avril 2017, p. 45.

[28].    Transcription de l’audience publique, 4 avril 2017, p. 21.

[29].    Transcription de l’audience publique, 4 avril 2017, pp. 26, 44, 46, 48, 51, 54.

[30].    Transcription de l’audience publique, 4 avril 2017, pp. 26-27, 40.

[31].    Transcription de l’audience publique, 4 avril 2017, pp. 46-47, 49.

[32].    Pièce AP-2016-027-04A, onglets 2-9, vol. 1.

[33].    Transcription de l’audience publique, 4 avril 2017, pp. 91-92, 94-95.

[34].    Transcription de l’audience publique, 4 avril 2017, p. 100.