Appels en matière de douanes et d’accise

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EXPOSÉ DES MOTIFS

INTRODUCTION

[1] Le présent appel est interjeté par AEXOS Inc., aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes [1] , à l’égard d’une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), conformément au paragraphe 60(4) de la Loi.

[2] La question en litige dans le présent appel est de savoir si les marchandises en cause sont classées dans le numéro tarifaire 6110.30.00 à titre de « chandails, pull-overs, cardigans, gilets et articles similaires, y compris les sous-pulls, en bonneterie [...] de fibres synthétiques ou artificielles », comme l’a déterminé l’ASFC, ou dans le numéro tarifaire 9506.99.00 à titre « d’autres articles et matériel pour la culture physique, la gymnastique, l’athlétisme, les autres sports (y compris le tennis de table) ou les jeux de plein air », comme le soutient AEXOS.

[3] Pour les motifs qui suivent, le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9506.99.00, comme le soutient AEXOS.

MARCHANDISES EN CAUSE

[4] Les marchandises en cause sont du matériel de compression protecteur HALO d’AEXOS [2] .

[5] Les marchandises comprennent un dispositif breveté de support lombaire (c’est-à-dire un collier de protection) qui est intégré dans une couche de base de compression d’un chandail. En cas de collision, le collier se raidit pour stabiliser le cou. Le collier est fait de polymère sensible à la déformation. Le haut est fait de nylon, de polyester et d’élasthanne tricotés. À l’intérieur du haut, il y a des bandes de silicone conçues pour contrôler le temps de réaction et la posture du porteur. Les bandes travaillent avec le collier de protection pour réduire au minimum les répercussions des collisions.

[6] Les marchandises sont vendues exclusivement sur le site Web d’AEXOS. Le prix de vente au détail des tailles pour enfants est de 145 $ et celui des tailles pour adultes, de 170 $.

HISTORIQUE DE LA PROCÉDURE

[7] Le 7 août 2019, l’ASFC a rendu la décision anticipée SRT no 283225, dans laquelle elle classait les marchandises en cause dans le numéro tarifaire 6110.30.00. AEXOS a interjeté appel de cette décision, soutenant que les marchandises devraient être classées dans le numéro tarifaire 9506.99.00.

[8] Le 3 juin 2020, l’ASFC a rendu sa décision, affirmant que les marchandises en cause étaient classées dans le numéro tarifaire 6110.30.00.

[9] AEXOS a interjeté le présent appel auprès du Tribunal le 25 août 2020.

[10] À la demande des parties, l’affaire devait être instruite par voie d’observations écrites. AEXOS a ensuite eu la possibilité de déposer des observations écrites en réponse, ce qu’elle a fait le 25 janvier 2021 en incluant une déclaration de témoin supplémentaire de M. Daryl Sherman, le président-directeur général d’AEXOS.

[11] Le 1er février 2021, AEXOS a également déposé des éléments de preuve supplémentaires, qui comprenaient deux fichiers vidéo et des éléments de preuve documentaire supplémentaires [3] .

[12] Le 8 février 2021, l’ASFC a déposé une demande, conformément à l’article 23.1 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur, demandant au Tribunal d’exclure la déclaration de témoin supplémentaire de M. Sherman qui a été déposée avec les observations en réponse d’AEXOS et les éléments de preuve supplémentaires déposés par AEXOS le 1er février 2021 [4] .

[13] En réponse, AEXOS a soutenu que les éléments de preuve ont été produits en réponse aux arguments soulevés par l’ASFC [5] .

[14] Le Tribunal était convaincu que les éléments de preuve avaient été produits en réponse au mémoire de l’intimé et n’a pas accueilli la demande de l’ASFC [6] .

[15] L’affaire a été instruite par voie d’observations écrites, sans la présence des parties, le 2 mars 2021. AEXOS a déposé comme pièces des échantillons des marchandises en cause, lesquels ont été examinés par le Tribunal dans le cadre de la présente procédure.

CADRE LÉGISLATIF

[16] La nomenclature tarifaire est énoncée en détail dans l’annexe du Tarif des douanes [7] , qui est conforme au Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (le Système harmonisé) élaboré par l’Organisation mondiale des douanes (OMD). L’annexe est divisée en sections et en chapitres et chaque chapitre de l’annexe contient une liste de marchandises classées dans des positions, sous-positions et numéros tarifaires.

[17] Le paragraphe 10(1) du Tarif des douanes prévoit que le classement des marchandises importées est effectué, sauf indication contraire, en conformité avec les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé [8] et les Règles canadiennes [9] énoncées à l’annexe.

[18] Les Règles générales sont composées de six règles. Le classement commence par la règle 1, qui prévoit que le classement doit être déterminé d’après les termes des positions et des notes de section ou de chapitre et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et notes, d’après les autres règles.

[19] L’article 11 du Tarif des douanes prévoit que, pour l’interprétation des positions et des sous‑positions, le Tribunal doit tenir compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [10] et des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [11] , publiés par l’OMD. Bien que les avis de classement et les notes explicatives n’aient pas force exécutoire pour le Tribunal, le Tribunal les applique à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire [12] .

[20] Le Tribunal doit d’abord déterminer si les marchandises en cause peuvent être classées conformément à la règle 1 des Règles générales, selon les termes de la position et les notes de section ou de chapitre pertinentes du Tarif des douanes, compte tenu des notes explicatives et des avis de classement pertinents. Ce n’est que lorsque la Règle 1 ne permet pas d’arrêter de manière concluante le classement d’une marchandise qu’il faut recourir aux autres règles générales [13] .

[21] Après que le Tribunal a utilisé cette méthode pour déterminer la position dans laquelle les marchandises en cause doivent être classées, l’étape suivante consiste à utiliser une méthode similaire pour déterminer la sous-position appropriée [14] . La dernière étape consiste à déterminer le numéro tarifaire approprié [15] .

[22] Les dispositions pertinentes du Tarif des douanes sont les suivantes :

Section XI : Matières textiles et ouvrages en ces matières

Section XI: Textiles and Textile Articles

Chapitre 61

Chapter 61

VÊTEMENTS ET ACCESSOIRES DU VÊTEMENT, EN BONNETERIE

ARTICLES OF APPAREL AND CLOTHING ACCESSORIES, KNITTED OR CROCHETED

61.10 Chandails, pull-overs, cardigans, gilets et articles similaires, y compris les sous-pulls, en bonneterie.

61.10 Jerseys, pullovers, cardigans, waistcoats and similar articles, knitted or crocheted.

[...]

[...]

6110.30.00 -De fibres synthétiques ou artificielles

6110.30.00 -Of man-made fibres

[...]

 

Section XX : Marchandises et produits divers

[...]

 

Section XX: Miscellaneous Manufactured Articles

Chapitre 95

JOUETS, JEUX, ARTICLES POUR DIVERTISSEMENTS OU POUR SPORTS; LEURS PARTIES ET ACCESSOIRES

Chapter 95

TOYS, GAMES AND SPORTS REQUISITES; PARTS AND ACCESSORIES THEREOF

95.06 Articles et matériel pour la culture physique, la gymnastique, l’athlétisme, les autres sports (y compris le tennis de table) ou les jeux de plein air, non dénommés ni compris ailleurs dans le présent Chapitre; piscines et pataugeoires.

[...]

95.06 Articles and equipment for general physical exercise, gymnastics, athletics, other sports (including table-tennis) or outdoor games, not specified or included elsewhere in this Chapter; swimming pools and paddling pools.

[...]

-Autres

-Other

9506.99.00 - -Autres

9506.99.00 - -Other

[23] Les notes pertinentes de la section XI stipulent ce qui suit :

1. La présente Section ne comprend pas :

t) les articles du Chapitre 95 (jouets, jeux, engins sportifs, filets pour activités sportives, par exemple);

[24] Les notes pertinentes du chapitre 95 stipulent ce qui suit :

1. Le présent Chapitre ne comprend pas :

e) les travestis en matières textiles, des Chapitres 61 ou 62; les vêtements de sport et vêtements spéciaux en matières textiles, des Chapitres 61 ou 62, même incorporant à titre accessoire des éléments de protection tels que des plaques de protection ou un rembourrage dans les parties correspondant aux coudes, aux genoux ou à l’aine (les tenues d’escrimeurs ou les maillots de gardiens de but de football, par exemple);

[25] Les notes explicatives pertinentes de la position n61.10 stipulent ce qui suit :

La présente position couvre une catégorie d’articles en bonneterie [...] destinés à recouvrir la partie supérieure du corps (chandails, pull-overs, cardigans, gilets et articles similaires). Les articles comportant à titre accessoire des éléments de protection tels que des coudières de protection cousues sur les manches et qui sont utilisés pour la pratique de certains sports (maillot de gardien de but de football, par exemple) restent classés dans la présente position.

[26] Les notes explicatives pertinentes de la position n95.06 stipulent ce qui suit :

Parmi les articles relevant de la présente position, on peut citer :

B) Le matériel pour autres sports et jeux de plein air (autres que les articles-jouets, présentés sous forme de panoplies ou séparément, du no 9503), tel que :

13) Équipement de protection pour les jeux ou les sports tel que masques, plastrons pour la pratique de l’escrime, coudières et genouillères, jambières, protège-tibias, pantalons pour la pratique du hockey sur glace avec plaques de protection incorporées et similaires.

[...]

Sont exclus de cette position :

e) Les vêtements de sport en matières textiles des Chapitres 61 ou 62, même incorporant à titre accessoire des éléments de protection tels que des plaques de protection ou un rembourrage dans les parties correspondant aux coudes, aux genoux ou à l’aine (par exemple, les tenues d’escrimeurs ou les maillots de gardiens de but de football).

POSITIONS DES PARTIES

[27] AEXOS affirme que les marchandises en cause sont classées dans la position no 95.06. L’ASFC affirme que les marchandises sont classées dans la position no 61.10.

[28] Comme il est expliqué plus en détail ci-dessous, le présent appel vise à déterminer si la fonction principale des marchandises est de servir d’équipement de protection, comme le soutient AEXOS, ou de vêtements, comme le soutient l’ASFC.

[29] AEXOS a affirmé que la conception et la commercialisation des marchandises en cause indiquent que leurs éléments de protection constituent la caractéristique distinctive des marchandises. AEXOS a également affirmé que les marchandises sont spécifiquement conçues pour protéger les porteurs en prévenant les blessures causées par un coup de fouet cervical et les blessures liées à des commotions cérébrales.

[30] Pour sa part, l’ASFC a affirmé que les éléments de protection sont accessoires, car les marchandises ressemblent à des vêtements et assument les fonctions prédominantes des vêtements.

ANALYSE DU TRIBUNAL

Cadre analytique

[31] Dans les appels interjetés aux termes de l’article 67 de la Loi, il incombe à l’appelante de démontrer que l’ASFC a incorrectement classé les marchandises [16] .

[32] Ce litige se situe au niveau de la position.

[33] Les deux positions en cause sont mutuellement exclusives : la note 1t) de la section XI exclut les articles du chapitre 95 et la note 1e) du chapitre 95 exclut les « vêtements de sport [...] d[u] Chapitr[e] 61 [...], même incorporant à titre accessoire des éléments de protection ».

[34] Dans les affaires de classement tarifaire comme celle en l’espèce, le Tribunal a toujours soutenu ce qui suit [17] :

· Les marchandises ne peuvent être classées de prime abord dans deux positions qui s’excluent mutuellement en vertu de notes légales pertinentes [18] . En vertu de l’article 1 des Règles générales, le Tribunal doit examiner les deux positions et déterminer celle qui convient le mieux aux marchandises [19] . Contrairement aux situations où il n’y a qu’une seule note d’exclusion, le Tribunal n’a pas besoin de commencer à examiner les positions concurrentes dans un ordre particulier [20] ;

· Lorsqu’il examine des positions qui s’excluent mutuellement, le Tribunal préfère généralement une position plus précise à une position générale [21] .

[35] En outre, ensemble, les notes explicatives des positions en cause établissent que les vêtements de sport « incorporant à titre accessoire des éléments de protection » sont classés dans la position no 61.10, tandis que les « équipements de protection pour les jeux ou les sports » sont classés dans la position no 95.06.

[36] Le Tribunal a précédemment examiné les deux positions en cause dans Bauer Hockey, sur lequel les deux parties se sont appuyées dans le présent appel [22] . Dans cette affaire, le Tribunal a présenté un résumé utile du cadre analytique [23] :

Bien que les vêtements de sport incorporant à titre accessoire des éléments de protection soient explicitement exclus de la position no 95.06 conformément aux Notes explicatives de ladite position, ces articles sont visés par la position no 61.10. À cet égard, les Notes explicatives de la position no 61.10 prévoient ce qui suit : « La présente position couvre une catégorie d’articles en bonneterie, sans distinction quant au sexe, destinés à recouvrir la partie supérieure du corps (chandails, pull-overs, cardigans, gilets et articles similaires). Les articles comportant à titre accessoire des éléments de protection tels que des coudières de protection cousues sur les manches et qui sont utilisés pour la pratique de certains sports (maillot de gardien de but de football, par exemple) restent classés dans la présente position ».

[...] Toutefois, les équipements de protection pour [...] les sports tels que masques et plastrons pour la pratique de l’escrime, pantalons de hockey sur glace, etc. » [...] sont visés par la position no 95.06, conformément aux Notes explicatives de ladite position.

Par conséquent, le Tribunal est d’accord avec l’avis partagé par les parties selon lequel le classement des marchandises en cause repose sur le sens de l’expression « incorporant à titre accessoire des éléments de protection ».

Le Tribunal admet également l’argument de Bauer selon lequel l’expression « à titre accessoire », dans le contexte de son utilisation dans les Notes explicatives, est un concept indiquant une position d’importance subordonnée ou secondaire. Il est donc logique de penser que pour déterminer si la protection offerte par un élément particulier est accessoire, il faut d’abord établir la fonction principale de l’article duquel l’élément en question fait partie intégrante. En résumé, la question de savoir si les protège-cou en KevlarMD intégrés [...] sont à titre accessoire des éléments de protection des marchandises en cause dépend de la question de savoir si les hauts et les vêtements une pièce servent essentiellement de vêtements de dessous ou d’équipement de protection pour la pratique du hockey sur glace.

Bien qu’il ne tente pas de minimiser l’importance absolue des protège-cous et des coquilles, qui sont clairement essentiels à la protection des joueurs de hockey contre les blessures pouvant s’avérer catastrophiques, le Tribunal est d’avis que la question n’est pas celle de savoir si la protection offerte par ces éléments est d’importance fondamentale en soi, mais plutôt celle de savoir si cette protection se rapporte à la fonction principale des marchandises en cause.

[Italiques dans l’original, notes omises]

[37] Compte tenu de la jurisprudence susmentionnée, le principal point en litige dans le présent appel est de savoir si les éléments de protection des marchandises en cause sont accessoires ou non. Cette question est tranchée en examinant la fonction principale des marchandises, à savoir si les marchandises servent principalement comme équipement de protection, comme le soutient AEXOS, ou comme vêtements, comme le soutient l’ASFC.

Analyse

Les marchandises sont de l’équipement de protection classé dans la position no 95.06

[38] Les parties s’entendent pour dire que les marchandises en cause ont des éléments de protection. Toutefois, l’ASFC a affirmé que les éléments de protection ne sont qu’accessoires et que les marchandises sont analogues à celles en cause dans Bauer Hockey.

[39] Dans Bauer Hockey, le Tribunal a examiné le classement de vêtements destinés à recouvrir la partie supérieure du corps avec des protège-cous intégrés. En se fondant sur le principe de longue date selon lequel « la conception, la meilleure utilisation, la commercialisation et la distribution des marchandises en cause constituent des critères indicatifs du classement tarifaire approprié des marchandises » [24] , le Tribunal a conclu que la conception et la commercialisation des marchandises indiquaient que leur fonction principale était de servir de couche vestimentaire de base et que les protège-cous étaient des éléments de protection accessoires.

[40] Ce faisant, le Tribunal a souligné que les protège-cous pouvaient être achetés séparément et que leur incorporation dans la couche de base n’était pas nécessaire à leur utilisation [25] . Bauer a reconnu que les protège-cous ont été introduits pour distinguer les couches vestimentaires de base de Bauer de ceux des concurrents. Les marchandises ont également été commercialisées en tant que vêtements de performance, avec des couches de base n’incorporant aucun élément de protection, et leurs prix étaient similaires. Le Tribunal a également souligné que, si les éléments de protection étaient la « qualité déterminante » des marchandises, Bauer aurait vraisemblablement commercialisé les marchandises dans la catégorie « Équipement protecteur » de son catalogue. Dans l’ensemble, le Tribunal a conclu que l’incorporation des éléments de protection dans les couches de base n’a pas privé les marchandises de leur caractère fondamental en tant que vêtements de sport [26] .

[41] Il existe des similitudes entre les marchandises en cause dans le présent appel et les marchandises en cause dans Bauer Hockey. En effet, elles sont toutes deux des couches de base de compression avec des éléments de protection intégrés et brevetés pour protéger le cou. Toutefois, après avoir examiné les éléments de preuve relatifs à la conception, à la meilleure utilisation, à la commercialisation et à la distribution des marchandises en cause, le Tribunal est convaincu que leurs éléments de protection ne sont pas qu’accessoires et que les marchandises sont suffisamment distinctes de celles en cause dans Bauer Hockey.

[42] Dans le présent appel, les éléments de preuve indiquent que les marchandises étaient initialement conçues en tant que dispositif entièrement exosquelettique visant à protéger le cou contre les impacts. La couche de base de compression a ensuite été développée comme « mécanisme d’activation » [traduction] du collier de protection [27] . Contrairement à Bauer Hockey, rien n’indique que le collier de protection, dans l’état actuel du produit, peut être utilisé sans la couche de base.

[43] Les marchandises ont également fait l’objet d’essais par des laboratoires et des chercheurs indépendants afin de démontrer l’efficacité du produit en tant que dispositif de protection. Selon M. Sherman, les essais ont « constamment démontré » [traduction] une corrélation entre l’utilisation des marchandises et la réduction des blessures par coup de fouet cervical et liées à des commotions cérébrales [28] .

[44] Les marchandises sont également beaucoup plus chères que les chandails de compression standards. Les marchandises en cause coûtent 170 $ pour les tailles pour adultes et 145 $ pour les tailles pour enfants. En comparaison, AEXOS a affirmé que les chandails de compression standards des principales marques de l’industrie du sport se vendent généralement au détail entre 25 $ et 80 $, ce qui est conforme aux éléments de preuve présentés par l’ASFC [29] .

[45] Dans l’ensemble, ces éléments de preuve laissent entendre que la fonction principale des marchandises est de protéger contre les blessures au cou et à la tête. Selon le Tribunal, la portabilité, le confort et le rendement de la couche de base ne nuisent pas à cette fonction principale de protection, comme l’a laissé entendre l’ASFC.

[46] Cette conclusion est étayée par la commercialisation des marchandises par AEXOS, qui est principalement axée sur les éléments de protection, en particulier pour les athlètes.

[47] Sur son site Web, AEXOS décrit les marchandises comme de l’« équipement de compression conçu pour réduire les coups de fouet cervicaux et nucaux lors d’impacts dans la pratique de sports de contact » [traduction], une « couche de base avancée [qui] fournit un soutien de la posture qui fonctionne avec les mouvements naturels d’un athlète » [traduction], et une « technologie portable [qui] permet aux athlètes de repousser leurs limites physiques, tout en réduisant le risque de blessures » [traduction] [30] .

[48] Une page Web Kickstarter pour AEXOS décrit également les marchandises en cause comme « un chandail de compression avancé, conçu pour travailler en temps réel afin de réduire instantanément le mouvement de coup de fouet cervical et nucal lors d’impacts » [traduction] et un « équipement de protection qui améliore la résistance d’un athlète aux blessures » [traduction] [31] .

[49] Des tiers se sont également concentrés sur les éléments de protection des marchandises en cause [32] , y compris Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC). AEXOS a proposé les marchandises en réponse à un appel d’offres publié par SPAC relativement à des essais menés par le ministère de la Défense nationale (MDN). Lors de l’évaluation de la soumission, SPAC a souligné que la « caractéristique clé [des marchandises] est l’éventail de mouvements permis, tout en agissant encore comme pièce d’équipement de protection » [traduction] [33] . SPAC a également souligné que l’« essentiel de la conception est un collier à plusieurs composants [...] » [traduction] et que la « technologie fonctionne comme un exosquelette, mais plutôt qu’un appareil mécanique lourd et coûteux, la conception est un système de couche de base légère » [traduction] [34] .

[50] Les éléments de preuve montrent également une nette différence entre la commercialisation des marchandises en cause et la commercialisation des chandails de compression standards. Cette dernière est axée sur le confort et la performance physique du porteur, sans mentionner la protection contre les blessures [35] .

[51] L’ASFC a soutenu que les marchandises sont appelées des vêtements (c’est-à-dire des « hauts de compression », des « chandails de compression » ou des « chandails d’entraînement » [traduction]) dans des rapports de tiers, mais le Tribunal remarque que ces mentions se trouvent dans des articles axés sur les éléments de protection des marchandises dans le domaine des sports de contact (c’est-à-dire un « collier intelligent Halo conçu pour protéger les athlètes contre les commotions cérébrales » et « [l]e chandail de compression “HALO” d’AEXOS [qui] réduit les blessures sportives » [traduction]) [36] .

[52] Après avoir examiné l’ensemble de la preuve, le Tribunal conclut que la fonction principale des marchandises en cause est de servir d’équipement de protection dans les sports de contact.

[53] À cet égard, les parties s’entendent pour dire que les marchandises visent à protéger. Le Tribunal est également convaincu que les marchandises répondent à la définition d’« équipement », qui a été interprétée de façon large comme signifiant des « outils, articles, vêtements, etc. utilisés ou requis à une fin particulière [37] ». Bien qu’il ne soit pas contesté que les marchandises sont utilisées dans le domaine du sport, l’ASFC a affirmé que les marchandises sont également commercialisées en vue d’une utilisation à l’extérieur du domaine du sport, comme dans les forces armées et un milieu de travail.

[54] Comme il est mentionné précédemment, les marchandises ont effectivement été acceptées par le MDN pour mener des essais, et il n’est pas contesté que les marchandises pourraient avoir des applications dans un domaine autre que le sport. Toutefois, dans l’ensemble, le Tribunal est convaincu que les éléments de preuve montrent que les marchandises sont principalement destinées à être utilisées dans les sports de contact. En plus des éléments de preuve susmentionnés, les photographies figurant à la fois dans les documents d’AEXOS et les rapports de tiers portent principalement sur l’utilisation des marchandises par les athlètes, en particulier dans les sports de contact ou les sports extrêmes [38] . AEXOS a également établi des partenariats avec plusieurs événements sportifs et organismes de sport en lien avec les marchandises en cause [39] . De façon plus large, M. Sherman a expliqué que AEXOS a été fondée par d’anciens athlètes afin de créer de meilleurs équipements sportifs [40] .

[55] Par conséquent, le Tribunal est convaincu que les marchandises en cause sont classées dans la position no 95.06 à titre d’« équipement de protection pour les jeux ou les sports », comme il est indiqué dans les notes explicatives de cette position.

[56] Enfin, le Tribunal constate que certains vêtements de sport en matières textiles incorporant des éléments de protection sont classés dans les chapitres 61 ou 62, comme les « tenues d’escrimeurs » [41] , les maillots de gardiens de but de football [42] et les pantalons pour la pratique du paintball [43] . Toutefois, le Tribunal n’était pas convaincu que les marchandises en cause étaient suffisamment similaires à l’un de ces trois exemples, de sorte qu’elles devraient orienter le classement des marchandises vers la position no 61.10, compte tenu des éléments de preuve concernant la conception, la commercialisation et la meilleure utilisation des marchandises en cause.

Conclusion

[57] Le Tribunal conclut que les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 9506.99.00, comme le soutient AEXOS.

DÉCISION

[58] L’appel est accueilli.

 



[18] Canac Marquis Grenier Ltée c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (11 septembre 2017), AP‑2016-026 (TCCE) [Canac Marquis] au par. 30 et à la note 13; Sher-Wood Hockey Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (10 février 2011), AP-2009-045 (TCCE) au par. 37.

[20] Canac Marquis au par. 31.

[37] La Société Canadian Tire Limitée c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada, (12 avril 2012), AP‑2011-020 (TCCE) au par. 30 et à la note 43.

[41] Les « tenues d’escrimeurs » sont classées dans les chapitres 61 et 62 conformément aux notes du chapitre 95 et aux notes explicatives de la position no 95.06.

[42] Les « maillots de gardiens de but de football » sont classés dans les chapitres 61 et 62 conformément aux notes du chapitre 95 et aux notes explicatives de la position no 61.10 et de la position no 95.06, ainsi que l’avis de classement 6110.30/1 de l’OMD.

[43] Les « pantalons pour la pratique du paintball » sont classés dans la sous-position no 6211.33 conformément à l’avis de classement 6211.33/1 de l’OMD.

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