Appels en matière de douanes et d’accise

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Contenu de la décision

Appel no AP-2017-047

Tri-Pac Inc.

c.

Président de l’Agence des services frontaliers du Canada

Décision rendue
le mercredi 23 janvier 2019

 

Motifs rendus
le lundi 4 février 2019

 



EU ÉGARD À un appel entendu le 25 septembre 2018, en vertu de l’article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 12 septembre 2017, concernant une demande de révision aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

TRI-PAC INC.

Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

Intimé

DÉCISION

L’appel est rejeté.

















Jean Bédard
Jean Bédard, c.r.
Membre présidant

L’exposé des motifs suivra à une date ultérieure.


Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)
Date de l’audience : 25 septembre 2018

Membre du Tribunal : Jean Bédard, c.r., membre présidant

Personnel de soutien : Sabrina Ottoni, conseillère juridique
Caroline Morgan, conseillère juridique

PARTICIPANTS :

Appelante

Conseillers/représentants

Tri-Pac Inc.

Victor Q. Truong
Behnam A. Borojeni

 

Intimé

Conseiller/représentant

Président de l’agence des services frontaliers du Canada

David Aaron

TÉMOINS :

David F. Wood
Président
David F. Wood Consulting Ltd.

Alex Taylor
Gestionnaire des opérations
Tri-Pac Inc.

Veuillez adresser toutes les communications au :

Greffier
Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario) K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

  1. Le présent appel a été interjeté par Tri-Pac Inc. (Tri-Pac) le 8 décembre 2017, aux termes du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes [1] , contre une décision du président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) rendue le 12 septembre 2017, aux termes du paragraphe 60(4).

  2. Il s’agit pour le Tribunal de déterminer si les marchandises en cause peuvent bénéficier d’un traitement tarifaire préférentiel en vertu du numéro tarifaire 9908.00.00 de l’annexe du Tarif des douanes [2] à titre d’articles devant servir dans 1) les véhicules utilitaires de la position no 87.03 et les chariots ou camions-navettes de la position no 87.04, devant servir à l’usage souterrain dans les mines ou à la mise en valeur de gisements minéraux, 2) les machines de chargement pour charger des minéraux directement au front de taille, ou 3) les machines d’extraction pour l’extraction des minéraux directement au front de taille.

  3. Le 20 janvier 2015, Tri-Pac a demandé une décision anticipée sur le classement tarifaire des marchandises en cause. L’ASFC a répondu à la demande de Tri-Pac le 15 octobre 2015, classant les marchandises en cause dans le numéro tarifaire 6305.32.00 et affirmant que, selon les renseignements fournis, elles ne pouvaient bénéficier d’un traitement tarifaire préférentiel en vertu du numéro tarifaire 9908.00.00.

  4. Le 11 janvier 2016, Tri-Pac a demandé la révision du classement tarifaire, aux termes du paragraphe 60(2) de la Loi, soutenant que les marchandises en cause devraient pouvoir bénéficier d’un traitement tarifaire préférentiel en vertu du numéro tarifaire 9908.00.00.

  5. Le 12 septembre 2017, le président de l’ASFC a rendu une décision, aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi, confirmant sa décision anticipée selon laquelle les marchandises en cause ne pouvaient bénéficier d’un traitement tarifaire préférentiel en vertu du numéro tarifaire 9908.00.00.

  6. Tri-Pac a interjeté le présent appel le 8 décembre 2017, qui a été instruit le 25 septembre 2018.

  7. Les marchandises en cause sont des sacs cubiques souples de couleur blanche mesurant environ 91 cm de côté, composés de plusieurs morceaux de tissu cousus. Il y a deux ouvertures circulaires dans le sac, une sur le dessus et une autre au fond, auxquelles des morceaux de tissu additionnels sont cousus créant une forme tubulaire comportant une fermeture au bout. Le haut du sac comporte quatre sangles de levage. Les marchandises en cause sont conçues pour contenir 1 000 kilogrammes de béton projeté, un matériau sec et meuble, qui est vidé dans une machine (machine à projeter le béton) via un tube au fond du sac; pour ce faire, les marchandises en cause doivent être hissées au-dessus de la machine. Cette machine ajoute de l’eau au contenu des marchandises en cause et le mélange est projeté sur une surface, par exemple sur une paroi rocheuse pour l’empêcher de s’effondrer.

  8. Les parties conviennent du classement des marchandises en cause dans le numéro tarifaire 6305.32.00.

  9. Tri-Pac a fait comparaître deux témoins : M. Alexander Taylor et M. David Wood. M. Taylor est responsable de la gestion et des finances chez Tri-Pac. M. Wood est un ingénieur qui a travaillé en Ontario et en Colombie-Britannique. Tri-Pac a demandé à ce que M. Wood soit reconnu comme témoin expert dans le domaine du génie minier, y compris en matière de stabilité des parois, et dans la conception et la mise en œuvre de structures en béton projeté. À l’audience, le Tribunal a reconnu M. Wood comme expert en mécanique des roches ayant de l’expérience dans l’utilisation du béton projeté, notamment dans les mines.

  10. L’ASFC n’a fait comparaître aucun témoin.

  11. L’ASFC a formulé une objection quant à l’admissibilité du rapport d’expert de M. Wood, soutenant que de grandes portions du rapport portaient sur l’interprétation par M. Wood de dispositions du Tarif des douanes, un domaine dans lequel M. Wood n’a aucune expertise. L’ASFC a aussi fait valoir que d’autres paragraphes du rapport, notamment ceux ayant trait à l’histoire de l’exploitation minière, ne relevaient non plus de l’expertise de M. Wood. L’ASFC a donc demandé à ce que les paragraphes 1.5, 3.1 à 3. 8, 4.3, 4.4 et 4.7 soient rayés du rapport.

  12. Le témoignage d’un expert doit se limiter au domaine d’expertise de celui-ci et ne peut se substituer au rôle adjudicatif du Tribunal. Il est clair que l’interprétation de la législation nationale relève du Tribunal. Par conséquent, un témoin expert ne peut assumer les fonctions du Tribunal à titre d’expert en matière législative.

  13. Le Tribunal convient que certains paragraphes du rapport d’expert de M. Wood pourraient être compris comme une tentative d’interpréter la législation nationale. Néanmoins, le Tribunal a décidé de ne pas rayer les paragraphes susmentionnés du rapport d’expert tout en indiquant que l’importance qui leur serait accordée tiendrait compte de ces remarques.

  14. Le témoignage de M. Wood a porté sur les structures en béton projeté dans les mines souterraines et a affirmé que l’utilisation du béton projeté fait partie intégrante des ouvrages souterrains des mines.

  15. Il a expliqué que le béton projeté est un moyen de mettre en place et de compacter du béton dans les mines, et a indiqué qu’il s’agit d’« un mélange d’agrégats fins, de sable, de ciment, auquel est souvent ajoutée de la fumée de silice, ainsi que d’autres agents réducteurs d’eau, accélérateurs, fibres d’acier, etc. [...], qui est déplacé à l’aide d’une pompe hydraulique et projeté sur une surface par pression d’air où il est compacté » [traduction].

  16. M. Wood a décrit l’exploitation minière comme étant l’extraction d’une matière utile du sous-sol, dans un processus cyclique ( ou par étapes), qui comprend, d’une part, le creusage des galeries et, d’autre part, l’extraction du minerai et autres matières utiles. Dans une mine souterraine, qu’elle soit ou non métallique, le béton projeté est utilisé dans l’exploitation de la mine.

  17. M. Wood a affirmé que, dans des conditions normales, le béton projeté est appliqué sur le toit des galeries. Toutefois, quand les conditions sont mauvaises au front de taille, du béton projeté peut être appliqué sur les parois pour les stabiliser. M. Wood a précisé que, « si les conditions sont très mauvaises, du béton projeté est appliqué sur la paroi qui sera excavée plus tard. Le béton projeté est habituellement appliqué sur le toit d’une galerie et, une fois les débris retirés, des trous peuvent être forés pour y insérer des boulons de renforcement en plus du béton projeté » [3] [traduction].

  18. De plus, M. Wood a expliqué que, dans la plupart des mines souterraines au Canada, les sacs de béton projeté sont descendus sous terre via un puits d’accès. Le béton est ensuite projeté sur une surface à l’aide d’une lance. Habituellement, la longueur de la lance et du tuyau sur lequel elle est fixée ne dépasse pas quelques centaines de mètres. C’est le cas des lances utilisées avec les marchandises en cause.

  19. Les marchandises en cause sont suspendues à une machine permettant d’adapter l’ouverture au fond du sac à la trémie de la machine à projeter le béton. Le béton passe ensuite dans la machine qui le projette sur la paroi de la galerie.

  20. Que les marchandises en cause soient utilisées avec une machine stationnaire ou mobile, un appareil de levage est nécessaire pour les transporter au front de taille et les évacuer. La machine à projeter le béton ne pourrait fonctionner sans les marchandises en cause. M. Wood a aussi précisé que les chariots élévateurs utilisés pour soulever et transporter les marchandises en cause à l’endroit où se trouve la machine à projeter le béton n’ont aucune caractéristique particulière.

  21. M. Taylor a expliqué que Tri-Pac vend les marchandises en cause depuis une décennie exclusivement à l’usine de King (KPM Industries Ltd.) à Dowling, Ontario. King achète les marchandises en cause qui sont utilisées uniquement dans les mines souterraines, expressément pour le transport du béton projeté. Les marchandises en cause sont donc strictement utilisées par les mines de la région de Dowling pour l’approvisionnement en béton projeté.

  22. M. Taylor a précisé que les marchandises en causes sont en grande partie fabriquées à la main afin qu’elles soient suffisamment solides et renforcées pour prévenir qu’elles se fendent.

  23. M. Taylor a aussi expliqué en quoi les marchandises en cause ne sont pas conçues pour être utilisées dans des industries autres que l’industrie minière. Il a affirmé que rien n’empêche que les sacs pour béton projeté soient utilisés dans d’autres industries, mais que, selon lui, la probabilité que cela se produise est faible étant donné que les marchandises en cause sont le double du prix des autres conteneurs souples comparables.

  24. Le Tribunal a conclu que les témoignages de M. Wood et de M. Taylor étaient dignes de foi et fiables. Le Tribunal a donc accepté les faits suivants :

HISTORIQUE DE LA PROCÉDURE

DESCRIPTION DES MARCHANDISES EN CAUSE

TÉMOINS ET ÉLÉMENTS DE PREUVE

Question préliminaire – admissibilité du rapport d’expert

Témoignage de M. Wood

Témoignage de M. Taylor

Conclusion du Tribunal sur la crédibilité des témoins

  • Bien que les marchandises en cause (les sacs) puissent en théorie être utilisées dans un contexte autre que minier, elles sont expressément conçues pour être utilisées dans l’industrie minière et leur prix est fixé en conséquence.

  • Les marchandises en cause peuvent être utilisées avec une machine stationnaire ou mobile.

  • Les machines à projeter le béton ne pourraient fonctionner sans les sacs pour béton projeté, qu’ils soient ou non fixés directement à la machine.

  • La longueur de la lance et du tuyau connectés aux marchandises en cause habituellement ne dépasse pas quelques centaines de mètres et pourrait aussi être considérablement moindre.

  • Le béton projeté est principalement utilisé sur le toit des galeries. Toutefois, dans certaines circonstances, il peut aussi être utilisé sur le front de taille. Une fois la paroi solidifiée par le béton projeté, celle-ci sera défaite lors de la poursuite du forage et l’avancement du front de taille.

CADRE LÉGISLATIF

  1. La nomenclature tarifaire est énoncée en détail dans l’annexe du Tarif des douanes, qui est conforme au Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (le Système harmonisé) élaboré par l’Organisation mondiale des douanes (OMD). L’annexe est divisée en sections et en chapitres et chaque chapitre de l’annexe contient une liste de marchandises classées dans des positions, souspositions et numéros tarifaires.

  2. Le paragraphe 10(1) du Tarif des douanes prévoit que, sous réserve du paragraphe 10(2), le classement des marchandises importées est effectué, sauf indication contraire, en conformité avec les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé et les Règles canadiennes énoncées à l’annexe.

  3. Les Règles générales sont composées de six règles. Le classement commence par la règle 1, qui prévoit que le classement doit être déterminé d’après les termes des positions et des notes de section ou de chapitre et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et notes, d’après les autres règles.

  4. L’article 11 du Tarif des douanes prévoit que pour l’interprétation des positions et des sous‑positions, le Tribunal doit tenir compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises et des Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, publiés par l’OMD. Bien que les avis de classement et les notes explicatives n’aient pas force exécutoire pour le Tribunal, le Tribunal les applique à moins qu’il n’existe un motif valable de ne pas le faire.

  5. Le chapitre 99, qui comprend le numéro tarifaire 9908.00.00, prévoit des dispositions de classement spéciales qui permettent que certaines marchandises soient importées au Canada en franchise de droits. Puisqu’aucune des positions du chapitre 99 n’est subdivisée au niveau des sous-positions ou des numéros tarifaires, il suffit que le Tribunal tienne compte, dans la mesure nécessaire, des règles 1 à 5 des Règles générales pour déterminer si des marchandises peuvent être classées dans ce chapitre.

  6. Dans les appels en matière de tarification douanière, aux termes du paragraphe 152(3) de la Loi, il incombe à l’appelant de démontrer que l’ASFC a commis une erreur dans sa décision. En l’espèce, Tri-Pac doit démontrer selon la prépondérance des probabilités que les marchandises en cause peuvent bénéficier d’un traitement tarifaire préférentiel en vertu du numéro tarifaire 9908.00.00.

  7. Tri-Pac invoque Sandvik [4] et SMS Equipment [5] , causes dans lesquelles l’interprétation et l’application du numéro tarifaire 9908.00.00 ont été examinées par le Tribunal et la Cour d’appel fédérale (CAF). Des cinq catégories dont le numéro tarifaire 9908.00.00 est composé selon le Tribunal et la CAF, Tri-Pac soutient que les marchandises en cause satisfont à trois d’entre elles :

  8. Tri-Pac n’aborde pas la question de savoir en quoi les marchandises en cause peuvent être considérées comme des articles devant servir dans les véhicules utilitaires, les chariots et camions-navettes des positions nos 87.03 et 87.04, devant servir à l’usage souterrain dans les mines ou à la mise en valeur de gisements minéraux.

  9. Tri-Pac soutient que les marchandises en cause sont utilisées avec diverses machines de chargement. Les marchandises en cause sont utilisées avec les machines à projeter le béton dans les mines souterraines au cours du creusement des galeries et de l’extraction, le béton projeté étant le « matériau parfait » [traduction] pour stabiliser les parois. Tri-Pac a expliqué que les marchandises en cause sont chargées sur les machines à projeter le béton par des machines de chargement utilisées pour charger les minéraux au front de taille. Tri-Pac se fonde sur les définitions de « loading machinery » (machines de chargement) et de « face » of a mine (front d’attaque) qui figurent dans le Dictionary of Mining, Mineral, and Related Terms (Dictionnaire de l’exploitation minière, des minéraux et des termes connexes) pour étayer son argument sur la façon dont les termes utilisés dans le numéro tarifaire 9908.00.00 devraient être interprétés.

  10. Tri-Pac soutient que les machines à projeter le béton avec lesquelles les marchandises en cause sont utilisées sont des machines d’extraction au sens du numéro tarifaire 9908.00.00. Tri-Pac soutient que le terme « machines d’extraction » devrait être interprété dans un sens large et soutient que cet argument est appuyé par la décision de la CAF dans Sandvik et par celle du Tribunal dans SMS Equipment. Le Dictionary of Mining, Mineral, and Related Terms définit « extraction » (extraction) comme « l’action d’exploiter une mine et d’en extraire le charbon ou le minerai [...] » et Tri-Pac soutient que les machines à projeter le béton utilisées dans les mines souterraines font partie intégrante du processus d’extraction étant donné qu’elles empêchent les parois de s’effondrer.

  11. Enfin, Tri-Pac soutient que la formulation moins restrictive du code tarifaire 1344 [6] , qui a précédé le numéro tarifaire 9908.00.00, indique l’intention du législateur à ce que le numéro tarifaire 9908.00.00, et le sens du terme « extracting » (extraction) en particulier, soient interprétés largement et inclusivement.

  12. Il est à noter qu’au cours de l’audience Tri-Pac a surtout voulu démontrer que les marchandises en cause satisfont aux conditions de la catégorie 5, c’est-à-dire qu’elles sont des articles devant servir dans les machines d’extraction pour l’extraction des minéraux directement au front de taille.

  13. L’ASFC soutient que les marchandises en cause ne peuvent bénéficier d’un traitement tarifaire préférentiel en vertu du numéro tarifaire 9908.00.00 étant donné qu’elles ne satisfont pas aux conditions pour être classées dans ce numéro tarifaire.

  14. L’ASFC soutient que les marchandises en cause ne sont pas utilisées avec des véhicules classés dans les positions nos 87.03 ou 87.04. La position no 87.03 concerne les « [v]oitures de tourisme et autres véhicules automobiles principalement conçus pour le transport de personnes (autres que ceux du no 87.02), y compris les voitures du type « break » et les voitures de course ». Cependant, ni les appareils de levage ou de manutention utilisés pour soulever les marchandises en cause, ni les machines utilisées pour appliquer le contenu des marchandises en cause sur les parois de la mine ne sont conçus pour le transport de personnes. Par ailleurs, la position no 87.04 comprend les « [v]éhicules automobiles pour le transport de marchandises ». L’ASFC soutient que les appareils de levage ou de manutention utilisés pour soulever les marchandises en cause au-dessus de la machine à projeter le béton sont des chariots-gerbeurs classés dans la position no 84.27 ou un bras mécanique fixé sur la machine à projeter le béton, qui est classé dans la position no 84.28.

  15. L’ASFC soutient aussi que les machines utilisées pour projeter le béton ne peuvent non plus être classées dans la position no 87.04. Les machines à projeter le béton stationnaires ne correspondent pas à la description de véhicules automobiles et sont classées dans la position no 84.13 selon les termes de cette position et les notes explicatives pertinentes. Par ailleurs, les machines à projeter le béton mobiles ne peuvent être classées dans la position no 87.04 parce qu’elles ne transportent pas le béton projeté, mais plutôt le préparent et l’appliquent. L’ASFC soutient que, selon les notes explicatives de la position no 87.05, les machines à projeter le béton mobiles correspondent à la description de camions-bétonnières de la position no 87.05 et qu’elles doivent donc être classées dans cette position.

  16. En ce qui concerne la question de savoir si les marchandises en cause sont des articles devant servir dans les machines de chargement pour charger des minéraux directement au front de taille, l’ASFC soutient qu’il n’y a aucune preuve selon laquelle le béton projeté peut être classé à titre de minéral ou qu’il est chargé au front de taille. Au contraire, le béton projeté est appliqué sur le toit et les parois des galeries.

  17. Enfin, l’ASFC soutient que les marchandises en cause ne sont pas des articles devant servir dans les machines d’extraction pour l’extraction des minéraux directement au front de taille. L’ASFC concède que les marchandises en cause sont utiles à l’exploitation minière dans son ensemble, mais soutient que le numéro tarifaire 9908.00.00 fait référence à une activité en particulier, soit le « processus d’extraction ».

  18. L’ASFC soutient que la présente cause doit être distinguée de Sandvik et de SMS Equipment, lesquelles sont invoquées par Tri-Pac à l’appui de son argument selon lequel le terme « extraction » doit être interprété dans son sens large. Notamment, il y a une différence majeure entre la machinerie avec laquelle les marchandises en cause dans Sandvik ou SMS Equipment étaient utilisées et celle avec laquelle les marchandises en cause en l’espèce sont utilisées.Dans Sandvik, les parties ont convenu que le terme « extraction » signifie l’action de retirer un minerai d’une mine ainsi que les étapes pour séparer le minéral du minerai. L’ASFC soutient que Tri-Pac n’a présenté aucune preuve démontrant l’utilisation des marchandises en cause dans l’un ou l’autre de ces processus.

  19. Les deux parties conviennent que les marchandises en cause sont correctement classées dans le numéro tarifaire 6305.32.00. Il s’agit donc pour le Tribunal de déterminer si les marchandises en cause peuvent bénéficier d’un traitement tarifaire préférentiel en vertu du numéro tarifaire 9908.00.00. Ce numéro tarifaire a fait l’objet d’une décision de la CAF dans Sandvik.

  20. Le numéro tarifaire 9908.00 est formulé comme suit :

POSITION DES PARTIES

Tri-Pac

a) les marchandises en cause sont des articles devant servir dans les véhicules utilitaires de la position no 87.03 ou les chariots et camions-navettes de la position no 87.04, devant servir à l’usage souterrain dans les mines ou à la mise en valeur de gisements minéraux (catégorie 2);

b) les marchandises en cause sont des articles devant servir dans les machines de chargement pour charger des minéraux directement au front de taille (catégorie 4);

c) les marchandises en cause sont des articles devant servir dans les machines d’extraction pour l’extraction des minéraux directement au front de taille (catégorie 5).

ASFC

ANALYSE

9908.00.00 Véhicules utilitaires de la position 87.03 et chariots ou camions-navettes de la position 87.04, devant servir à l’usage souterrain dans les mines ou à la mise en valeur de gisements minéraux;

Articles (à l’exclusion des pneumatiques et chambres à air) devant servir dans les équipements qui précèdent, ou devant servir dans des machines de chargement pour charger du charbon ou pour charger des minéraux directement au front de taille, ou devant servir dans des machines d’extraction pour l’extraction des minéraux directement au front de taille.

  1. Le chapitre 99 contient des dispositions de classement spéciales qui permettent que certaines marchandises soient importées au Canada en franchise de droits. Étant donné que le chapitre 99 est réservé à l’usage particulier des adhérents, il n’y a pas d’avis de classement ni de notes explicatives de l’OMD qui peuvent guider le Tribunal dans l’interprétation des numéros tarifaire de ce chapitre.

  2. Dans ce contexte, la décision de la CAF dans Sandvik, qui concerne expressément le numéro tarifaire 9908.00.00, est d’une importance cruciale pour l’interprétation de ce numéro tarifaire. Dans Sandvik [7] , qui a par la suite fait l’objet d’un appel devant la CAF, le Tribunal a décomposé le numéro tarifaire 9908.00.00 en cinq catégories, qui ont été conservées par la CAF :

1) les véhicules utilitaires de la position no 87.03 et les chariots et camions-navettes de la position no 87.04 devant servir à l’usage souterrain dans les mines ou à la mise en valeur de gisements minéraux;

2) les articles devant servir dans les équipements énumérés en 1);

3) les articles devant servir dans des machines de chargement pour charger du charbon;

4) les articles devant servir dans des machines de chargement pour charger des minéraux directement au front de taille;

5) les articles devant servir dans des machines d’extraction pour l’extraction des minéraux directement au front de taille.

  1. Premièrement, le Tribunal déterminera si les marchandises en cause peuvent être classées dans le numéro tarifaire 9908.00.00 à titre d’articles devant servir dans les chariots de la position no 87.04 devant servir à l’usage souterrain dans les mines ou à la mise en valeur de gisements minéraux (catégorie 2).

  2. Deuxièmement, le Tribunal déterminera si les marchandises en cause peuvent être classées dans le numéro tarifaire 9908.00.00 à titre d’articles devant servir dans des machines d’extraction pour l’extraction des minéraux directement au front de taille (catégorie 5).

  3. Si les marchandises en cause satisfont aux conditions de la catégorie 2 ou de la catégorie 5, celles-ci peuvent donc être classées dans le numéro tarifaire 9908.00.00 et être importées en franchise de droits.

  4. Il est à noter qu’au cours de l’audience, les conseillers juridiques de Tri-Pac ont indiqué ne plus soutenir que les marchandises en cause satisfaisaient aux conditions de la catégorie 4. Quoi qu’il en soit, le Tribunal a conclu qu’aucun élément de preuve n’a été présenté laissant entendre que les marchandises en cause sont des articles devant servir dans des machines de chargement pour charger des minéraux (catégorie 4).

  5. Selon la catégorie 2, les marchandises en cause doivent être des « articles devant servir dans les véhicules utilitaires de la position no 87.03 ou les chariots et camions-navettes de la position no 87.04 devant servir à l’usage souterrain dans les mines ou à la mise en valeur de gisements minéraux » (catégorie 1).

  6. La position no 87.03 comprend les « [v]oitures de tourisme et autres véhicules automobiles principalement conçus pour le transport de personnes (autres que ceux du no 87.02), y compris les voitures du type « break » et les voitures de course ». Cette position n’est donc pas applicable. La position no 87.04 comprend les « [v]éhicules automobiles pour le transport de marchandises », et elle est potentiellement pertinente en l’espèce.

  7. En ce qui concerne la question de savoir si les marchandises en cause sont considérées comme « devant servir dans » les chariots de la position no 87.04, le Tribunal souligne que l’expression « devant servir dans » est définie au paragraphe 2(1) du Tarif des douanes comme suit :

Catégorie 2

devant servir dans ou devant servir à Mention dans un numéro tarifaire, applicable aux marchandises qui y sont classées et qui doivent entrer dans la composition d’autres marchandises mentionnées dans ce numéro tarifaire par voie d’ouvraison, de fixation ou d’incorporation. (for use in)

  1. Le Tribunal fait remarquer que le chapitre 87, qui comprend les « [v]oitures automobiles, tracteurs, cycles et autres véhicules terrestres », contient plusieurs positions, dont la position no 87.05, qui comprend les « [v]éhicules automobiles à usages spéciaux, autres que ceux principalement conçus pour le transport de personnes ou de marchandises (dépanneuses, camions-grues, voitures de lutte contre l’incendie, camions-bétonnières, voitures balayeuses, voitures épandeuses, voitures-ateliers, voitures radiologiques, par exemple) ». Il y a donc plusieurs positions dans le chapitre 87 dans lesquelles des véhicules peuvent être classés. Par conséquent, ce n’est pas parce qu’un véhicule en particulier n’est pas utilisé pour le transport de personnes (position no 87.03) qu’il sera nécessairement classé dans la position no 87.04. Autrement dit, il ne s’agit pas d’un simple classement dichotomique voulant que si les marchandises ne peuvent être classées dans la position no 87.03, elles soient classées automatiquement dans la position no 87.04, et vice-versa.

  2. Afin de s’acquitter de son fardeau de preuve en l’espèce, il incombe à Tri-Pac de fournir tous les éléments de preuve requis pour permettre au Tribunal de classer le pulvérisateur ou la machine à projeter le béton la position no 87.03 ou 87.04.

  3. Dans son mémoire, Tri-Pac a inclus des photos de machines auxquelles les marchandises en cause sont fixées [8] . Certaines semblent stationnaires [9] . Il y a deux machines qui comportent des roues : une est décrite comme un pulvérisateur [10] et l’autre comme une machine à projeter le béton [11] .

  4. Après examen des photos fournies par Tri-Pac dans son mémoire, le Tribunal conclut que, dans certains cas, rien ne différencie fondamentalement les machines stationnaires des machines mobiles autre que les roues dont certaines sont munies.

  5. D’autres machines, toutefois, comme la MineMaster R20S et la Cybermine Spraymec 1050 [12] , semblent être des véhicules automobiles comportant une cabine. Rien dans la documentation fournie par Tri-Pac dans son mémoire n’indique que ces véhicules, ou d’autres machines mobiles, sont destinés au transport du béton projeté ou qu’ils sont utilisés à cette fin.

  6. De plus, ni les photos ni la description des machines mobiles s’y rapportant n’indiquent que celles-ci servent au transport de marchandises. Au contraire, les photos confirment la description qu’il s’agit plutôt de pulvérisateurs (ou de machines à projeter le béton) et rien d’autre.

  7. Le Tribunal conclut que Tri-Pac n’a pas présenté des éléments de preuve suffisants pour démontrer que les pulvérisateurs ou les machines à projeter le béton avec lesquelles les marchandises en cause sont censées être utilisées sont des véhicules des positions nos 87.03 ou 87.04. Par conséquent, il n’est pas nécessaire de déterminer si ces machines sont des véhicules « devant servir à l’usage souterrain dans les mines ou à la mise en valeur de gisements minéraux ».

  8. À ce titre, le Tribunal conclut que les marchandises en cause ne sont pas des articles devant servir dans les « véhicules utilitaires » de la position no 87.03 ou les « chariots ou camions-navettes » de la position no 87.04.

  9. La catégorie 4 concerne les articles devant servir dans des machines de chargement pour charger des minéraux directement au front de taille.

  10. Au cours de l’audience, les conseillers juridiques de Tri-Pac ont indiqué ne plus soutenir que les marchandises en cause satisfaisaient aux conditions de la catégorie 4. Quoi qu’il en soit, il n’y a aucun élément de preuve qui laisse entendre que les marchandises en cause sont des articles devant servir dans des machines de chargement pour charger des minéraux. Par conséquent, la catégorie 4 ne s’applique pas.

  11. Selon la catégorie 5, les marchandises en cause doivent être des articles « devant servir dans des machines d’extraction pour l’extraction des minéraux directement au front de taille ».

  12. La catégorie 5 du numéro tarifaire 9908.00.00 a été analysée par la CAF dans Sandvik et dans une décision subséquente du Tribunal dans SMS Equipment. Dans Sandvik, la CAF a indiqué que, dans l’interprétation du numéro tarifaire, un sens large doit être attribué au terme « machinery » (machines). En tenant compte de diverses définitions de dictionnaire du terme « machinery », la CAF a conclu de la façon suivante :

Catégorie 4

Catégorie 5

Il est clair selon ces définitions que le mot « machinery » (machines) par opposition au mot « machine » désigne un ensemble de machines plutôt qu’une seule. La même interprétation peut être tirée de la version française du numéro tarifaire qui fait référence au mot « machines » au pluriel. Il s’ensuit que le mot « machinery » (machines) dans le numéro tarifaire 9908.00.00 ne peut être interprété comme faisant référence à une seule machine [...] [13] .

  1. De plus, la CAF a affirmé ce qui suit concernant le terme « extraction » :

Les éléments de preuve non contredits dont disposait le TCCE indiquaient que dans le contexte minier l’extraction est un processus, et toutes les parties étaient d’accord pour dire que ce processus comprend le retrait du minerai et les étapes requises pour séparer le minéral du minerai. Il s’ensuit qu’en l’absence de certaines limites dans le numéro tarifaire, les machines utilisées pour extraire les minéraux lors de ce processus sont des « machines d’extraction ». [...] [14]

  1. Toutefois, la CAF a indiqué que le numéro tarifaire comportait une limite :

La seule limite du numéro tarifaire pour ce qui est des articles en cause porte sur l’utilisation des machines d’extraction. Parmi les catégories définies par le TCCE dans ses motifs, la cinquième catégorie (comme la quatrième) porte sur des machines utilisées « directement au front de taille ». Il s’ensuit que pour relever de cette catégorie, les machines doivent être utilisées à cet endroit. [...] [15]

[Soulignement dans l’original]

  1. La CAF a de plus souligné, en ce qui concerne les remarques citées ci-dessus, que « les termes utilisés [dans le numéro tarifaire 9908.00.00] incluent toutes les machines d’extraction, la seule limite portant sur l’endroit de leur utilisation » [16] .

  2. Dans SMS Equipment, le Tribunal a indiqué ne pas avoir adopté une interprétation étroite de l’arrêt Sandvik :

L’ASFC soutient que la portée des machines d’extraction dans Sandvik se limite aux machines qui retirent le minerai du sol, les déplacent vers d’autres machines et entament les premières étapes de leur utilisation. Le Tribunal n’interprète pas l’arrêt Sandvik comme limité à ce sens [17] .

[Nos italiques]

  1. Le Tribunal a ajouté qu’« [i]l ressort clairement des définitions ci-dessus et du raisonnement de la Cour d’appel fédérale dans Sandvik que l’expression “machines d’extraction”, lorsqu’elle est utilisée dans ce contexte, peut faire référence à un large éventail d’équipement utilisé dans le processus d’extraction » [18] .

  2. Le Tribunal a de plus indiqué ce qui suit dans SMS Equipment :

[I]l semble qu’exiger que les machines d’extraction soient des appareils qui retirent physiquement des minerais du sol pour être considérées comme servant à « l’extraction des minéraux directement au front de taille » soit incompatible avec plusieurs des types de machines que la Cour d’appel fédérale mentionne expressément dans Sandvik comme pouvant être considérées comme des « machines d’extraction », par exemple les machines pour la fonte et l’affinage [19] .

  1. Le Tribunal a aussi réitéré dans SMS Equipment que, « [p]our être comprises dans la portée de cette disposition, les machines d’extraction en question doivent extraire le minerai directement au front de taille » [20] . À cet égard, le Tribunal s’en était remis à des témoignages décrivant le front de taille comme l’endroit « où se passe l’action », en particulier « où sont extraits les stériles ou le charbon » [21] .

  2. Par conséquent, l’interprétation large de l’expression « machines d’extraction » doit être tempérée par la limite voulant que ces machines soient utilisées « directement au front de taille ».

  3. Dans SMS Equipment, le Tribunal a adopté les définitions de « working face » (front de taille) et de « face » (front d’attaque) qui figurent dans le Dictionary of Mining, Mineral and Related Terms:

Working face » (front de taille) :] « Endroit où a lieu l’extraction dans un passage souterrain, une galerie de roulage, une galerie d’aération, un puits, une galerie principale, une galerie de traçage, une galerie d’accès, une galerie transversale, etc. Voir aussi : “face” » [traduction]. L’expression « face » (front d’attaque) est définie comme suit : « a. Surface d’un filon de houille intact à l’endroit où ont lieu les travaux d’extraction. [...] d. Surface exposée d’un gisement de houille ou de minerai à l’endroit où l’exploitation a lieu » [traduction] [22] .

  1. Comme mentionné précédemment, dans son témoignage, M. Wood a indiqué ce qui différencie le front d’attaque du toit (« crown » ou « roof ») d’une galerie. Tri-Pac n’a avancé aucun argument selon lequel le « front de taille » (« working face ») comprend autre chose que le « front d’attaque » (« face » of the mine). En fait, la simple lecture des définitions de ces termes qui figurent dans le Dictionary of Mining, Mineral and Related Terms nous amène à conclure qu’il y a peu de différence entre le « front de taille » et le « front d’attaque ». Selon la simple lecture des définitions – retenue précédemment par le Tribunal dans SMS Equipment – le front d’attaque peut couvrir une plus grande superficie que le front de taille, qui est l’endroit où est pratiquée la coupe.

  2. De plus, comme indiqué ci-dessus, la définition de « face » (front d’attaque) mentionne à deux reprises « working place » (« l’endroit où ont lieu les travaux d’extraction » et « l’endroit où l’exploitation a lieu » [23] . L’expression « working place » comprend le « front d’attaque » (face) ou le « front de taille » (working face) ainsi que le « toit » (crown ou roof) en ce qui a trait à une mine souterraine. Le front de taille ne concerne pas uniquement les mines souterraines, mais aussi les mines à ciel ouvert (où il n’y a pas de toit de galerie). Cette interprétation de « working face » dans la version anglaise du numéro tarifaire 9908.00.00 correspond aussi celle de l’expression « front de taille » dans la version française. Cela dit, le Tribunal fait remarquer que le terme « front » évoque une surface verticale.

  3. Dans la catégorie 5, quatre conditions doivent être remplies : les marchandises en cause doivent être 1) des articles 2) devant servir 3) dans des machines d’extraction pour l’extraction des minéraux 4) directement au front de taille. Il n’est pas nécessaire de les examiner dans cet ordre.

  4. À la lumière des éléments de preuve présentés en l’espèce, il ne peut être affirmé que les machines à projeter le béton ou les pulvérisateurs sont des machines d’extraction « pour l’extraction des minéraux directement au front de taille ». Comme M. Wood l’a clairement indiqué dans son témoignage, le béton projeté est surtout utilisé pour stabiliser le toit d’une galerie. Bien qu’il ait indiqué que le béton projeté « peut être appliqué sur le front de taille » [traduction] dans certaines circonstances, il a clairement affirmé que le béton projeté est « habituellement » [traduction] appliqué sur le « toit » [traduction] d’une galerie [24] . Tri-Pac n’a présenté aucun élément de preuve sur l’utilisation du béton projeté avec les machines d’extraction pour l’extraction des minéraux « directement au front de taille ».

  5. Le Tribunal conclut que les éléments de preuve confirment tout au plus que le béton projeté est appliqué occasionnellement sur le front de taille. L’utilisation occasionnelle d’une marchandise ou d’un procédé en dehors de son utilisation normale n’atteste pas que la marchandise est destinée à cet usage. À la simple lecture du poste tarifaire dans lequel Tri-Pac voudrait que les marchandises en cause soient classées, il est manifeste que les marchandises doivent être utilisées au front de taille de façon plus qu’occasionnelle. À ce titre, Tri-Pac n’a pas présenté d’éléments de preuve suffisants pour démontrer que les machines à projeter le béton ou les pulvérisateurs sont des machines d’extraction « pour l’extraction des minéraux directement au front de taille ».

  6. De plus, la CAF dans Sandvik et le Tribunal dans SMS Equipment ont reconnu que les choses avaient évolué dans l’industrie minière et que, par conséquent, le numéro tarifaire 9908.00.00 devait être interprété de façon à ce que de nouveaux processus puissent être pris en considération pour l’exonération des droits de douane en vertu de ce numéro tarifaire. Toutefois, la limite imposée par les termes « directement au front de taille » prête beaucoup moins à interprétation. Bien que les processus et les machines puissent évoluer, la signification de « front de taille » ne change pas lorsque de nouveaux processus sont adoptés.

  7. À cet égard, il est sous-entendu dans la catégorie 5 que les « machines d’extraction » peuvent être utilisées à différents endroits dans une mine. Toutefois, il est spécifié que les machines d’extraction comprises dans le numéro tarifaire doivent être pour « l’extraction des minéraux directement au front de taille ». En fait, les catégories 3 et 4 sont de bons exemples illustrant la façon dont chaque mot a été choisi soigneusement selon une signification et une intention précises.

  8. La catégorie 3 désigne les « articles devant servir dans des machines de chargement pour charger du charbon ». En autant que les machines de chargement soient utilisées pour charger du charbon, il n’y a aucune restriction. En revanche, la catégorie 4 désigne les « articles devant servir dans des machines de chargement pour charger des minéraux directement au front de taille ». Autrement dit, comme le soutient l’ASFC, si les machines sont utilisées pour charger autre chose que du charbon [25] , cela doit être fait « directement au front de taille ».

  9. Comme mentionné précédemment, pour satisfaire aux conditions de la catégorie 5, les machines doivent surtout être utilisées pour « l’extraction des minéraux directement au front de taille ». La machine à projeter le béton et le pulvérisateur ne satisfont pas à ces conditions. Par conséquent, les articles devant servir dans ces machines ne peuvent être classés dans le numéro tarifaire 9908.00.00.

  10. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal n’a pas à déterminer si les marchandises en cause sont des articles devant servir dans des machines d’extraction.

  11. Les marchandises en cause importées par Tri-Pac ne peuvent bénéficier de la franchise de droits de douane étant donné qu’elles ne satisfont pas aux conditions du numéro tarifaire 9908.00.00.

  12. Pour les motifs qui précèdent, l’appel est rejeté.

CONCLUSION

DÉCISION




Jean Bédard
Jean Bédard, c.r.
Membre présidant



[1] . L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.) [Loi].

[2] . L.C. 1997, ch. 36.

[3] . Transcription de l’audience publique à la p. 48; Rapport du témoin expert David F. Wood, pièce AP-2017-047-12 aux par. 4.2-4.4, vol. 1A.

[4] . Sandvik Tamrock Canada Ltd. c. Canada (Sous-ministre du revenu national), 2001 CAF 340 (CanLII) [Sandvik].

[5] . SMS Equipment Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (28 mars 2014), AP-2013-006 (TCCE) [SMS Equipment].

[6] . « Ce qui suit devant être utilisé dans les mines, dans les carrières ou à la mise en valeur de gisements minéraux : Chariots ou camions-navettes de la position no 87.04 et véhicules utilitaires de la position no 87.03 (tout ce qui précède devant servir à l’usage souterrain); articles devant servir dans ce qui précède (à l’exclusion des pneumatiques et chambres à air). »

[7] . Sandvik Tamrock Canada Inc. c. Le sous-ministre du Revenu national (30 juin 2000), AP-99-083 (TCCE).

[8] . Pièce AP-2017-047-03A aux p. 32, 33 et 34, vol. 1.

[9] . Ibid. aux p. 33 et 34.

[10] . Ibid. à la p. 32.

[11] . Ibid. à la p. 34.

[12] . Ibid. à la p. 22.

[13] . Sandvik au par. 24.

[14] . Ibid. au par. 14.

[15] . Ibid. au par. 15.

[16] . Ibid. au par. 20.

[17] . SMS Equipment au par. 56.

[18] . Ibid. au par. 57.

[19] . Ibid. au par. 61.

[20] . Ibid. au par. 58.

[21] . Ibid.

[22] . Ibid. au par. 59.

[23] . Voir la citation au paragraphe 74 des présents motifs.

[24] . Transcription de l’audience publique aux p. 47-48.

[25] . En autant qu’il s’agisse d’un minéral.

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