Appels en matière de douanes et d’accise

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Appel AP-2019-021

Scentsy Canada Enterprises ULC

c.

Président de l’Agence des services frontaliers du Canada

Décision et motifs rendus
le mardi 4 octobre 2022

 



EU ÉGARD À un appel entendu les 4 et 5 février 2021 en vertu de l’article 67 de la Loi sur les douanes;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada le 17 juin 2019 concernant une demande de révision aux termes du paragraphe 60(4) de la Loi sur les douanes.

ENTRE

SCENTSY CANADA ENTERPRISES ULC

Appelante

ET

LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

Intimé

DÉCISION

L’appel est accueilli.

Serge Fréchette

Serge Fréchette
Membre présidant


 

Lieu de l’audience :

Par vidéoconférence

Dates de l’audience :

Les 4 et 5 février 2021

Membre du Tribunal :

Serge Fréchette, membre présidant

Personnel du Secrétariat du Tribunal :

Kalyn Eadie, conseillère juridique
Michael Carfagnini, conseiller juridique
Julie Lescom, agente du greffe principale
Kaitlin Fortier, agente du greffe
Geneviève Bruneau, agente du greffe

PARTICIPANTS :

Appelante

Conseillers/représentants

Scentsy Canada Enterprises ULC

Darrel H. Pearson
Jessica B. Horwitz
Ethan Gordon
Kai Ling Wang

Intimé

Conseillers/représentants

Président de l’Agence des services frontaliers du Canada

Marshall Jeske
Jennifer Bond
Kirk Shannon

TÉMOINS :

Cory Stewart
Président
Smart Executive Centre Inc.

Thomas Laws
Vice-président
Scentsy, Inc.

Ryan McFarland
Avocat principal
Scentsy, Inc.

Paul Klassen
Vice-président, Activités mondiales
Scentsy, Inc.

Jeff Dastrup
Directeur de la formation des consultants
Scentsy, Inc.

 

Veuillez adresser toutes les communications à :

La greffière adjointe
Téléphone : 613-993-3595
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

[1] Le 12 septembre 2019, Scentsy Canada Enterprises ULC (SCE) a interjeté le présent appel en application du paragraphe 67(1) de la Loi sur les douanes (la Loi)[1] d’une décision relative à un réexamen rendue le 17 juin 2019 par le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) conformément au paragraphe 60(4).

[2] Les marchandises en cause sont des produits de parfumerie domestique, notamment des cires parfumées et des chauffe-cires en céramique, des assainisseurs d’air, des produits pour le bain, des cosmétiques, des articles de lessive et des jouets en peluche, qui sont vendus au Canada sous la marque Scentsy et qui ont été importés au Canada entre le 1er avril 2013 et le 30 septembre 2016 (la période visée par la révision).

[3] La question en litige dans le cadre du présent appel est celle de savoir si, aux fins de la détermination de la valeur en douane des marchandises en cause selon la méthode fondée sur la valeur transactionnelle au titre de l’article 48 de la Loi, Scentsy, Inc. (SI), une société des États-Unis (É.-U.), a vendu les marchandises en cause pour exportation à sa société affiliée canadienne SCE ou à des consommateurs canadiens, comme l’a déterminé l’ASFC; et, advenant que SCE soit un acheteur au Canada, si le prix payé ou à payer pour les marchandises devrait être ajusté pour tenir compte de tout versement effectué par SCE au vendeur.

HISTORIQUE DE LA PROCÉDURE

[4] Le 13 novembre 2014, l’ASFC a commencé le processus de vérification du classement tarifaire des marchandises importées par SCE pendant la période du 1er janvier au 31 décembre 2013. Le 25 septembre 2015, l’ASFC a avisé SCE qu’elle élargissait la portée de la vérification pour inclure la valeur en douane. La partie de la vérification portant sur la valeur en douane a pris fin le 19 février 2016, et le rapport de vérification a été publié le 31 mars 2017. Dans son rapport de vérification, l’ASFC a conclu qu’il n’y avait pas de vente pour exportation entre SI et SCE, puisque SCE n’avait pas d’établissement stable au Canada et que la valeur en douane serait donc calculée en utilisant le prix payé par les clients canadiens finaux.

[5] Par suite du rapport de vérification, SCE a présenté des corrections visant les déclarations effectuées au cours des quatre années précédentes, comme l’exige l’article 32.2 de la Loi. L’ASFC a donc procédé à des révisions de la valeur en douane en application de l’alinéa 59(1)a) de la Loi.

[6] Le 29 septembre 2017, SCE a demandé un réexamen par le président, conformément au paragraphe 60(1) de la Loi.

[7] Le 17 juin 2019, le président a rejeté la demande de réexamen et a confirmé la décision initiale selon laquelle SCE n’avait pas d’établissement stable au Canada, qu’elle ne remplissait donc pas les conditions requises pour être un acheteur au Canada, et que la vente pour exportation était entre SI et les clients canadiens.

[8] Le 12 septembre 2019, SCE a déposé son avis d’appel auprès du Tribunal.

[9] L’instruction de cette affaire était initialement prévue pour le 24 mars 2020. Le 16 mars 2020, SCE a demandé un report de l’audience en raison du début de la pandémie de COVID-19. SCE prévoyait faire venir des États-Unis quatre témoins pour témoigner à l’audience en personne et, à ce moment-là, les voyages non essentiels entre les États-Unis et le Canada étaient déconseillés (la frontière a été fermée par la suite). La position de SCE était que la tenue d’une audience par voie d’observations écrites ou par vidéoconférence serait susceptible de porter préjudice à sa capacité de présenter sa thèse et que le report de l’audience n’entraînerait aucun préjudice pour elle ou l’ASFC. L’ASFC a accepté de reporter l’audience et le Tribunal a donc annulé l’audience.

[10] L’audience a été à nouveau reportée en juillet 2020, car le Tribunal a prolongé son annulation des audiences en personne et SCE a continué de faire valoir qu’une audience par vidéoconférence serait susceptible de porter préjudice à sa capacité de présenter sa thèse. Toutefois, les parties ont convenu de procéder par vidéoconférence en décembre 2020.

[11] Le Tribunal a tenu une audience par vidéoconférence les 4 et 5 février 2021. SCE a appelé les témoins suivants : Cory Stewart, Thomas Laws, Ryan McFarland, Paul Klassen et Jeff Dastrup. L’ASFC n’a pas appelé de témoins.

[12] Le 17 février 2021, le Tribunal a avisé les parties qu’aucune observation supplémentaire ne serait requise et a donc clos le dossier.

QUESTION PRÉLIMINAIRE

[13] Le 10 février 2020, SCE a déposé une requête visant à faire radier les paragraphes 79 à 92 du mémoire de l’ASFC, au motif que l’ASFC y soulevait de nouvelles questions et qu’elle n’avait déposé aucun élément de preuve à l’appui de ses nouveaux arguments et que SCE n’avait pas été avisée adéquatement des questions soulevées dans les paragraphes contestés, ce qui posait un problème sur le plan de l’équité procédurale. SCE faisait également valoir que comme les arguments de l’ASFC dans les paragraphes contestés ne présentaient aucune possibilité raisonnable de succès, ils auraient dû être rayés du dossier conformément au principe d’économie des ressources judiciaires.

[14] Le 18 février 2020, l’ASFC a répondu que les paragraphes en cause décrivaient les exigences de la législation relativement au calcul du prix payé ou à payer et que le fait que ces arguments aient été soulevés dans son mémoire ne portait pas préjudice à SCE, puisque cette dernière serait en mesure de répondre aux arguments à l’audience. L’ASFC a fait remarquer que les questions soulevées dans la requête portaient, en fait, sur le caractère suffisant et la qualification de la preuve au dossier, et qu’il était plus approprié d’y répondre par un argument juridique que par le dépôt d’une requête en radiation.

[15] Le 24 février 2020, SCE a répliqué que l’ASFC n’avait pas répondu à son argument selon lequel l’ASFC n’avait déposé aucun élément de preuve à l’appui de ses allégations et que la notification tardive de ces questions lui portait préjudice, car les questions n’avaient été soulevées à aucun moment au cours du processus de révision.

[16] Le 4 mars 2020, le Tribunal a rendu une ordonnance par laquelle elle a rejeté la requête en radiation[2]. Le 12 mars 2020, le Tribunal a envoyé une lettre aux parties dans laquelle il les avisait qu’elles devraient être prêtes, lors de l’audience (qui était alors prévue pour le 24 mars 2020), à aborder tous les arguments soulevés dans les paragraphes contestés du mémoire de l’intimé, ainsi que les questions de fond soulevées dans la requête en radiation présentée par l’appelante.

[17] Le 13 mars 2020, SCE a demandé l’autorisation de déposer un recueil de documents supplémentaires au motif que ceux-ci étaient nécessaires pour répondre aux nouvelles questions soulevées dans le mémoire de l’ASFC. Le 26 mars 2020, la demande a été accordée et le recueil de documents supplémentaires a été accepté au dossier.

Motifs de la décision du Tribunal de rejeter la requête en radiation

[18] Dans GFT Mode Canada Inc. c. Sous-ministre du Revenu national[3], le Tribunal a abordé le critère applicable à l’octroi d’une requête en radiation en se référant aux Règles des Cours fédérales (de l’époque)[4] :

Bien que le Tribunal ne soit pas lié par les Règles de la Cour fédérale, il fait observer que les critères appliqués par cette dernière dans de telles circonstances sont très rigoureux. Il ressort de la jurisprudence que les critères à appliquer aux requêtes en radiation d’actes de procédure exigent que la partie requérante démontre que l’issue de l’espèce est « évidente et manifeste » ou qu’il est « hors de tout doute » que les actes de procédure ne révèlent pas de cause d’action valable, et le Tribunal est d’avis qu’il s’agit là de critères qui devraient s’appliquer aux requêtes préliminaires du même type qu’il reçoit.

Il est rare qu’il apparaisse « évident et manifeste » ou « hors de tout doute » qu’un acte de procédure ne révèle aucune cause d’action valable. Cela dit, de temps à autre, le Tribunal est saisi de telles causes. Étant donné que toutes les cours et tous les tribunaux ne disposent que de ressources limitées, il est essentiel que ces ressources soient utilisées judicieusement. Lorsque l’issue d’une cause ne fait guère de doute, il se peut bien qu’il convienne d’en disposer avant la tenue d’une audience en bonne et due forme.

[Note omise]

[19] Le Tribunal a poursuivi en affirmant qu’il n’est pas interdit aux parties de présenter au Tribunal de nouveaux arguments qui n’ont pas été soulevés lors de l’instance précédente, et que « [l]’exercice de la compétence du Tribunal pour statuer sur les appels serait gravement entravé, si, comme l’appelante l’a soutenu, le Tribunal était limité à uniquement tenir compte du dossier dont l’intimé disposait au moment de sa révision[5] ». Il a conclu que puisque l’intimé avait soulevé de nouveaux arguments dans son mémoire, un avis suffisant avait été donné à l’appelante que ces arguments seraient présentés à l’audience et que de permettre à l’intimé de présenter ces arguments ne donnait lieu à aucun déni de justice naturelle pour l’appelante[6].

[20] Après avoir appliqué ce cadre au présent appel, le Tribunal n’a pas considéré qu’il était « évident et manifeste » que les arguments de l’ASFC concernant les ajustements éventuels du prix payé ou à payer ne seraient pas retenus; les dispositions de la Loi citées dans les paragraphes contestés pourraient, du moins, avoir possiblement une incidence sur le prix payé ou à payer comme le soutient l’ASFC. De l’avis du Tribunal, il était loisible à l’ASFC de soulever de nouveaux arguments dans son mémoire pour la première fois, puisque SCE aurait l’occasion d’y répondre à l’audience.

[21] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal a rejeté la requête de SCE visant à radier les paragraphes contestés du mémoire de l’ASFC. Les arguments subsidiaires avancés par l’ASFC sont examinés à la fin de la présente décision.

CADRE LÉGISLATIF

[22] Aux termes de la Loi, pour que les droits de douane soient imposés sur les marchandises importées, une valeur doit d’abord être attribuée aux marchandises. L’article 46 de la Loi précise que la valeur en douane doit être déterminée conformément aux articles 47 à 55.

[23] Le paragraphe 47(1) de la Loi prévoit ce qui suit :

La valeur en douane des marchandises est déterminée d’après leur valeur transactionnelle dans les conditions prévues à l’article 48.

The value for duty of goods shall be appraised on the basis of the transaction value of the goods in accordance with the conditions set out in section 48.

[24] L’article 48 de la Loi prévoit ce qui suit :

(1) Sous réserve des paragraphes (6) et (7), la valeur en douane des marchandises est leur valeur transactionnelle si elles sont vendues pour exportation au Canada à un acheteur au Canada, si le prix payé ou à payer est déterminable et si les conditions suivantes sont réunies :

[…]

c) aucune partie du produit de toute revente, cession ou utilisation ultérieure des marchandises par l’acheteur ne revient directement ou indirectement au vendeur, sauf s’il a été tenu compte de cette ristourne dans le prix payé ou à payer ou si ce prix est ajusté conformément à l’alinéa (5)a);

d) l’acheteur et le vendeur ne sont pas liés au moment de la vente des marchandises pour exportation ou, s’ils le sont :

(i) ou bien le lien qui les unit n’a pas influé sur le prix payé ou à payer,

(ii) ou bien l’importateur démontre que la valeur transactionnelle des marchandises à apprécier répond aux exigences visées au paragraphe (3).

[…]

(3) Pour l’application du sous-alinéa (1)d)(ii), la valeur transactionnelle des marchandises à apprécier doit, compte tenu des facteurs pertinents, notamment des facteurs et différences réglementaires, être très proche de l’une des valeurs ci-après prise comme valeur en douane d’autres marchandises identiques ou semblables qui ont été exportées au même moment ou à peu près au même moment que les marchandises à apprécier :

a) la valeur transactionnelle de marchandises identiques ou semblables vendues pour l’exportation au Canada par un vendeur à un acheteur avec qui il n’est pas lié au moment de la vente;

b) la valeur de référence de marchandises identiques ou semblables;

c) la valeur reconstituée de marchandises identiques ou semblables.

(4) Dans le cas d’une vente de marchandises pour exportation au Canada, la valeur transactionnelle est le prix payé ou à payer, ajusté conformément au paragraphe (5).

(1) Subject to subsections (6) and (7), the value for duty of goods is the transaction value of the goods if the goods are sold for export to Canada to a purchaser in Canada and the price paid or payable for the goods can be determined and if

. . .

(c) when any part of the proceeds of any subsequent resale, disposal or use of the goods by the purchaser is to accrue, directly or indirectly, to the vendor, the price paid or payable for the goods includes the value of that part of the proceeds or the price is adjusted in accordance with paragraph (5)(a); and

(d) the purchaser and the vendor of the goods are not related to each other at the time the goods are sold for export or, where the purchaser and the vendor are related to each other at that time,

(i) their relationship did not influence the price paid or payable for the goods, or

(ii) the importer of the goods demonstrates that the transaction value of the goods meets the requirement set out in subsection (3).

. . .

(3) For the purposes of subparagraph (1)(d)(ii), the transaction value of goods being appraised shall, taking into consideration any relevant factors including, without limiting the generality of the foregoing, such factors and differences as may be prescribed, closely approximate one of the following values that is in respect of identical goods or similar goods exported at the same or substantially the same time as the goods being appraised and is the value for duty of the goods to which it relates:

(a) the transaction value of identical goods or similar goods in a sale of those goods for export to Canada between a vendor and purchaser who are not related to each other at the time of the sale;

(b) the deductive value of identical goods or similar goods; or

(c) the computed value of identical goods or similar goods.

(4) The transaction value of goods shall be determined by ascertaining the price paid or payable for the goods when the goods are sold for export to Canada and adjusting the price paid or payable in accordance with subsection (5).

 

(5) Dans le cas d’une vente de marchandises pour exportation au Canada, le prix payé ou à payer est ajusté :

a) par addition, dans la mesure où ils n’y ont pas déjà été inclus, des montants représentant :

[…]

(v) la valeur de toute partie du produit de toute revente, cession ou utilisation ultérieure par l’acheteur des marchandises, qui revient ou doit revenir, directement ou indirectement, au vendeur, […]

(5) The price paid or payable in the sale of goods for export to Canada shall be adjusted

(a) by adding thereto amounts, to the extent that each such amount is not already included in the price paid or payable for the goods, equal to

. . .

(v) the value of any part of the proceeds of any subsequent resale, disposal or use of the goods by the purchaser thereof that accrues or is to accrue, directly or indirectly, to the vendor, and . . .

 

[25] L’expression « prix payé ou à payer » est définie ainsi au paragraphe 45(1) de la Loi :

45 (1) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article et aux articles 46 à 55.

[…]

prix payé ou à payer En cas de vente de marchandises pour exportation au Canada, la somme de tous les versements effectués ou à effectuer par l’acheteur directement ou indirectement au vendeur ou à son profit, en paiement des marchandises.

45 (1) In this section and sections 46 to 55,

. . .

price paid or payable, in respect of the sale of goods for export to Canada, means the aggregate of all payments made or to be made, directly or indirectly, in respect of the goods by the purchaser to or for the benefit of the vendor;

[26] En résumé, l’article 47 de la Loi prévoit que la base principale pour déterminer la valeur en douane est la « valeur transactionnelle » des marchandises importées. Le paragraphe 48(1) confirme qu’il s’agit du point de départ de l’évaluation aux termes de la Loi; il est clair que la valeur en douane doit être appréciée sur la base de cette méthode d’évaluation, sous réserve des conditions énoncées à l’article 48, qui sont les suivantes :

· il doit y avoir une vente pour exportation;

· il doit y avoir un acheteur au Canada;

· le prix payé ou à payer doit être vérifiable.

[27] Si la vente pour exportation a lieu entre des parties liées, la relation entre ces dernières ne doit pas avoir influencé le prix payé ou à payer.

[28] L’expression « acheteur au Canada » est définie ainsi au paragraphe 45(1) de la Loi :

acheteur au Canada S’entend au sens des règlements. (purchaser in Canada)

purchaser in Canadahas the meaning assigned by the regulations;(acheteur au Canada)

[29] Le Règlement sur la détermination de la valeur en douane (Règlement) prévoit ce qui suit :

2.1 Pour l’application du paragraphe 45(1) de la Loi, acheteur au Canada s’entend :

2.1 For the purposes of subsection 45(1) of the Act, purchaser in Canada means

a) d’un résident;

b) d’une personne, autre qu’un résident, qui a un établissement stable au Canada;

c) d’une personne, autre qu’un résident, qui n’a pas d’établissement stable au Canada et qui importe les marchandises faisant l’objet de la détermination de la valeur en douane :

(i) pour sa consommation ou son utilisation personnelles et qui ne les destinent pas à la vente,

(ii) pour les vendre au Canada pourvu que, avant leur achat, elle n’ait pas passé un accord visant leur vente à un résident.

(a) a resident;

(b) a person who is not a resident but who has a permanent establishment in Canada; or

(c) a person who neither is a resident nor has a permanent establishment in Canada, and who imports the goods, for which the value for duty is being determined,

(i) for consumption, use or enjoyment by the person in Canada, but not for sale, or

(ii) for sale by the person in Canada, if, before the purchase of the goods, the person has not entered into an agreement to sell the goods to a resident.

[30] Les expressions « établissement stable » et « résident » sont définies ainsi :

2 Les définitions qui suivent s’appliquent au présent règlement.

établissement stable Lieu d’affaires fixe d’une personne, y compris un siège de direction, une succursale, un bureau, une usine ou un atelier par l’intermédiaire duquel elle exerce son activité. (permanent establishment)

[…]

résident

a) une personne physique qui réside habituellement au Canada;

b) une personne morale qui exerce son activité au Canada et dont la gestion et le contrôle s’exercent au Canada;

c) une société de personnes ou autre organisme non constitué en personne morale qui exerce son activité au Canada, si le membre ou la majorité des membres qui en exercent la gestion et le contrôle résident au Canada. (resident)

2 The definitions in this section apply in these Regulations.

. . .

permanent establishment, in respect of a person, means a fixed place of business of the person and includes a place of management, a branch, an office, a factory or a workshop through which the person carries on business. (établissement stable)

resident means

(a) an individual who ordinarily resides in Canada;

(b) a corporation that carries on business in Canada and of which the management and control is in Canada; and

(c) a partnership or other unincorporated organization that carries on business in Canada, if the member that has the management and control of the partnership or organization, or a majority of such members, resides in Canada. (résident)

 

APERÇU DE L’APPEL

Contexte

[31] Les faits relatifs à l’appel ne sont pas contestés pour l’essentiel; les parties sont plutôt en désaccord sur la qualification et l’importance des faits dans l’application du ou des critères juridiques appropriés.

[32] SCE est une société de vente directe qui vend des produits de parfumerie domestique sous la marque Scentsy par l’intermédiaire d’un réseau de consultants indépendants au Canada. SCE est une filiale à part entière de Scentsy Canada Inc., une société américaine dont le siège social est situé à Meridian, en Idaho. SCE et Scentsy Canada Inc. sont liées par un propriétaire commun, soit SI, une autre société américaine dont le siège social se trouve également à Meridian, en Idaho. SCE a été constituée en société en Colombie-Britannique avant la période visée par la révision[7], mais n’était pas un résident au sens du Règlement, puisque sa gestion et son contrôle ne s’exerçaient pas au Canada.

[33] SCE n’avait pas ses propres employés. Elle fonctionnait en sous-traitant du personnel de SI, sur la base du temps passé pour le travail effectué au Canada au titre d’une entente de dotation intersociétés (Intercompany Staffing Agreement) datée du 1er janvier 2012[8] et, en ce qui concerne le soutien administratif, au titre d’une entente liée aux services et aux ventes (Service and Sales Agreement) datée du 28 mars 2012[9]. SCE a loué des bureaux dans l’immeuble Smart Executive Centre à Calgary, en Alberta, locaux que les employés de SI utiliseraient de temps à autre pour exercer des activités pour SCE conformément à l’entente de dotation intersociétés.

[34] Pendant une grande partie de la période visée par la révision, SCE a acquis les marchandises en cause auprès de SI conformément à l’entente liée aux services et aux ventes de 2012. Le 1er janvier 2016, cette entente a été remplacée par un accord de distribution[10] et un accord de services généraux[11], lesquels étaient en vigueur pendant les neuf derniers mois de la période visée par la révision.

[35] SCE ne maintenait pas de stocks au Canada pour répondre aux commandes des clients. Lorsque SCE recevait une commande d’un client par l’intermédiaire d’un consultant indépendant, elle passait à son tour une commande à SI, qui l’exécutait à partir des stocks américains. Ce processus de commande à la chaîne était automatisé au moyen du système mondial de commande de Scentsy (SAP)[12].

[36] Les marchandises en cause étaient expédiées par SI aux États-Unis sous forme d’envois groupés vers les centres de distribution d’UPS en Alberta et en Ontario[13], où les commandes étaient triées et envoyées à chaque client. UPS agissait en tant que courtier en douane, et SCE n’a jamais pris possession des marchandises.

[37] SCE disposait d’un compte bancaire canadien dans lequel elle déposait les paiements qu’elle recevait des clients et à partir duquel elle payait les commissions des consultants canadiens et le loyer du bureau de Calgary. Les factures établies par SI à l’intention de SCE pour les marchandises en cause étaient générées automatiquement par le système SAP lorsque les commandes étaient passées par l’entremise du site Web. SCE payait SI chaque mois pour les marchandises en cause, ainsi que pour les services, à partir d’un compte bancaire distinct en dollars américains.

[38] SCE a généré des recettes de vente et des revenus tirés de ses activités au Canada, qu’elle a déclarés à l’Agence du revenu du Canada, et elle a payé des impôts sur ses bénéfices.

Positions des parties

[39] Les parties conviennent que la méthode de la valeur transactionnelle est applicable pour déterminer la valeur en douane des marchandises en cause, mais leurs positions divergent quant à savoir quelle transaction constitue la base appropriée pour appliquer cette méthode.

[40] SCE fait valoir que la vente pour exportation est intervenue entre elle et SI, et que dans le cadre de la vente, SCE était considérée comme un acheteur au Canada puisqu’elle possédait un établissement stable au Canada au sens du Règlement. SCE soutient qu’elle avait acheté les marchandises en cause à SI pour son propre compte et qu’elle les avait ensuite revendues à des clients canadiens en vue de réaliser un profit.

[41] L’ASFC fait valoir que la vente pour exportation est intervenue entre SI et les clients canadiens finaux. Selon elle, le transfert des marchandises en cause de SI à SCE ne peut être considéré comme une vente pour exportation, car SCE n’a agi qu’en tant que mandataire de SI dans le cadre des ventes aux clients canadiens. L’ASFC soutient à titre subsidiaire que, si une vente était intervenue entre SI et SCE, cette dernière ne pouvait pas être considérée comme un acheteur au Canada parce qu’elle n’avait pas d’établissement stable au pays, c’est-à-dire un lieu d’affaires fixe par l’intermédiaire duquel elle exerçait son activité.

[42] De plus, encore à titre subsidiaire, l’ASFC fait valoir que si le Tribunal conclut que SCE est l’acheteur au Canada dans le cadre d’une vente pour exportation des marchandises en cause au pays, le Tribunal devrait rendre une ordonnance afin que l’ASFC détermine de nouveau la valeur en douane exacte en évaluant si des ajustements devraient être apportés au prix payé ou à payer.

ANALYSE

[43] Pour déterminer si la valeur transactionnelle entre SI et SCE peut servir de base à la valeur en douane des marchandises en cause, les critères suivants doivent être remplis :

a) il doit y avoir une vente entre SI et SCE;

b) la vente doit être effectuée « pour exportation au Canada »;

c) SCE doit être un « acheteur au Canada »;

d) il doit exister un prix déterminé payé ou à payer par SCE à SI lorsque les marchandises sont vendues pour exportation au Canada.

[44] Le Tribunal abordera successivement chacun de ces éléments.

Une vente est intervenue entre SCE et SI

SCE n’a pas agi en tant que mandataire de SI

[45] À l’audience, l’ASFC a fait valoir que l’article 48 de la Loi ne pouvait être utilisé pour calculer la valeur en douane en fonction de la transaction entre SI et SCE parce qu’il n’y a pas eu de vente, et donc aucune vente pour exportation au Canada, entre SCE et SI.

[46] SCE fait valoir que le titre de propriété des marchandises en cause a été transféré de SI à SCE d’une manière qui satisfait à ces exigences et que cette transaction constitue une vente pour exportation aux fins du paragraphe 48(1) de la Loi. L’ASFC soutient que l’article 48 de la Loi ne peut être utilisé pour calculer la valeur en douane en fonction de la transaction entre SI et SCE parce qu’il n’y a pas de vente pour exportation entre SCE et SI, puisque SCE agissait en tant que mandataire de SI.

[47] Le Tribunal a affirmé par le passé qu’il n’y a aucun fondement en droit permettant de conclure qu’une société est nécessairement le mandataire de l’autre simplement parce que les deux sociétés sont liées. Il a récemment confirmé cette approche dans l’affaire GBG Spyder Canada Holdings ULC c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada, soulignant que l’alinéa 48(1)d) de la Loi prévoit expressément l’utilisation de ventes entre sociétés liées lors de l’application de la méthode de la valeur transactionnelle, ce qui appuie l’idée que le fait que des sociétés soient liées ne signifie pas nécessairement qu’il ne peut y avoir de vente entre elles[14].

[48] Dans l’affaire Brunswick International (Canada) Limited c. Sous-ministre du Revenu national, le Tribunal a reconnu que les sociétés liées sont des entités juridiques distinctes et qu’ainsi, il peut y avoir une vente entre elles, mais qu’il existe des circonstances où une vente ne peut exister entre deux entités liées, notamment lorsqu’elles ont une relation de mandant-mandataire[15] :

Ainsi, d’une façon générale, il peut y avoir une vente entre une corporation et sa société mère, sa succursale ou sa société sœur. Cependant, la présomption de l’existence d’une entité juridique distincte peut être réfutée dans des circonstances exceptionnelles. Lorsque la structure corporative établie a un caractère fictif, lorsqu’une société est entièrement dépendante de l’autre ou sa marionnette ou lorsqu’une filiale est « à la merci de la compagnie mère et doit lui obéir au doigt et à l’œil », les cours canadiennes ont « levé le voile de la compagnie » et ont conclu que les deux corporations ne formaient qu’une seule entité.

[…]

Cependant, même si l’appelante et BB&B sont des entités juridiques distinctes, il pourrait tout de même ne pas y avoir vente entre elles si l’appelante agit à titre de mandataire au nom de BB&B, le mandant.

[Notes omises]

[49] Par conséquent, il ne peut y avoir de vente aux fins du paragraphe 48(1) entre des sociétés dont la relation en est une de mandant-mandataire, dans le cadre de laquelle le mandataire est complètement dépendant de son mandant, car on ne peut pas dire que ces sociétés soient des entités juridiques distinctes qui ont une relation en tant qu’acheteur et vendeur. La relation de mandataire a été décrite comme suit par la Cour suprême du Canada :

Le mandat est le rapport qui existe entre deux personnes dont l’une, l’agent, est en droit considérée comme la représentante de l’autre, le commettant, si bien que cet agent peut, par la conclusion de contrats ou l’aliénation de biens, influer sur la situation juridique du commettant à l’égard de tierces parties. [En italique dans l’original.][16]

[Notes omises]

[50] Le Tribunal a déjà examiné une gamme de facteurs pour évaluer s’il existe une relation de mandataire entre deux entités. La question de savoir si pareille relation existe dépend non pas de la terminologie utilisée par les parties, mais plutôt des modalités exactes de la relation[17]. Comme le Tribunal l’a mentionné dans Brunswick, aucun facteur ne peut être considéré comme déterminant[18]. Les modalités de toute entente entre les entités sont un facteur clé. Toutefois, lorsqu’il n’y a pas d’entente, ou lorsque les intentions des parties et la nature de leur relation ne sont pas claires, le Tribunal se penche sur la preuve extrinsèque concernant le comportement des entités pour établir la nature de leur relation et déterminer si une relation de mandataire peut en être déduite[19].

[51] Parmi les autres facteurs que le Tribunal a pris en compte pour déterminer l’existence d’une relation de mandataire, mentionnons la mesure dans laquelle le prétendu acheteur/importateur :

· négocie les conditions de vente (par exemple, le prix, les politiques de remboursement, les garanties) avec des représentants commerciaux indépendants ou des clients;

· est responsable des profits réalisés par l’autre entité;

· négocie et exécute des accords avec des tiers, notamment des fournisseurs;

· maintient des stocks;

· est responsable de ses employés (paiement des salaires, gestion des ressources humaines, pensions et régimes de santé);

· tient des registres séparés et a des comptes bancaires distincts;

· investit le produit tiré des activités de l’entreprise;

· est responsable des frais d’expédition;

· assume les risques liés aux marchandises et le titre de propriété des marchandises lors de l’importation[20].

[52] L’ASFC fait valoir qu’il n’y a pas eu de vente pour exportation entre SCE et SI puisque SCE agissait en tant que mandataire pour SI, et ce, pour les raisons suivantes :

· C’est SI, et non SCE, qui a établi les conditions et le prix auxquels les marchandises ont été vendues aux clients canadiens;

· SCE ne participait pas directement aux démarches visant à solliciter des ventes auprès des clients canadiens, ce travail étant fait par des consultants indépendants;

· Toutes les marchandises ont été vendues à des clients canadiens avant d’être importées au Canada;

· La commande de marchandises d’un client canadien était une condition préalable à l’approvisionnement de ces marchandises auprès de SI;

· Les marchandises ont été expédiées directement de SI au client canadien en utilisant le même fournisseur de services de messagerie (UPS). SCE n’a jamais pris possession des marchandises;

· Il n’existe aucune preuve démontrant que SCE a acheté des marchandises auprès de sources autres que SI;

· SCE ne tenait aucune marchandise en stock au Canada;

· SCE n’était pas responsable du traitement des remboursements, des retours ou des garanties;

· Le paiement pour les marchandises n’était remis à SI qu’après la réception des marchandises par le client canadien. Les paiements des clients étaient déposés dans le compte de SCE, et cette dernière effectuait des paiements forfaitaires mensuels de ce compte à SI. Toutefois, l’ASFC soutient que seuls les employés de SI avaient accès à ce compte et que cette dernière se payait donc essentiellement par l’intermédiaire de ce compte pour toutes les commandes; par conséquent, SCE n’assumait aucun risque relativement à la transaction en tant que vendeur, tandis que SI assumait tous les risques se rapportant à la vente auprès des clients canadiens. De plus, SI n’a pas été facturée pour des marchandises précises, et les paiements forfaitaires comprenaient d’autres dépenses non comptabilisées.

· SCE n’a pas, et ne pouvait pas, majorer le prix des marchandises;

· SCE n’avait pas ses propres employés;

· Toutes les décisions concernant les pratiques commerciales de SCE, y compris ses activités courantes, ainsi que ses actifs, étaient exclusivement contrôlées et gérées par SI.

[53] À l’audience, SCE a fait valoir qu’une vente pour exportation était intervenue entre elle et SI et qu’elle n’agissait pas en tant que mandataire de SI. SCE a fait valoir qu’il n’y avait aucune preuve qu’elle et SI aient eu l’intention d’établir une relation de mandataire, ni qu’elle était dotée du pouvoir d’influer sur les droits et les obligations de SI à l’égard de tierces parties. Elle a affirmé avoir entrepris ses activités pour réaliser des profits sur les ventes au Canada pour elle-même, et non pour obtenir des ventes au nom d’une autre entité en contrepartie de commissions comme le ferait un mandataire.

[54] Le Tribunal commence par souligner que l’entente de dotation intersociétés et l’entente liée aux services et aux ventes conclues en 2012, ainsi que les accords de 2016 qui les ont remplacés (les accords intersociétés), énoncent tous explicitement l’intention des sociétés de ne pas s’engager dans une relation de mandant-mandataire[21]. Bien que, de l’avis du Tribunal, ce facteur ne soit pas déterminant, il s’agit d’une preuve qui démontre clairement que pareille relation n’existe pas et qui présente beaucoup moins d’ambiguïté quant aux intentions des parties que la preuve documentaire qui a été produite dans les jugements cités par l’ASFC.

[55] Selon le Tribunal, l’existence d’une telle entente non ambiguë entre les parties distingue le présent appel des jugements cités par l’ASFC. Dans l’affaire JewelWay, l’entente entre les sociétés était beaucoup moins explicite sur la question du mandat, et les formulaires de commande utilisés par les représentants indépendants pour commander des bijoux à JewelWay Canada étaient ceux de JewelWay US et renvoyaient à la politique de retour de cette société[22]. Dans le présent appel, les formulaires de commande utilisés par les consultants de SCE mentionnent clairement SCE (et seulement SCE), y compris en ce qui concerne les retours[23]. Dans DMG, comme le fait remarquer SCE, non seulement il n’y avait pas d’entente écrite définissant la relation entre les parties, mais l’appelante avait admis avoir agi en tant que mandataire de l’exportateur[24].

[56] En ce qui concerne le fait que SCE ne tient pas de stocks au Canada, le Tribunal juge convaincante l’explication de SCE selon laquelle cette situation est inhérente à la nature particulière de l’entreprise de vente directe qu’elle exploite et au système de commande à la chaîne qu’elle utilise. En ce qui a trait à la comptabilité financière des stocks, Thomas Laws a témoigné que les factures étaient créées une fois que les clients avaient passé leurs commandes en ligne, et que les montants des ventes de SI à SCE étaient immédiatement inscrits par cette dernière dans le coût des marchandises vendues[25].

[57] En ce qui concerne le partage du personnel entre SI et SCE, le Tribunal convient avec SCE que le partage de la gestion et du contrôle n’indique pas automatiquement que deux sociétés sont « pieds et poings liés » [traduction] au point de devoir être traitées comme une seule entité[26]. La question du partage du personnel, qui touche de beaucoup plus près le contrôle opérationnel des activités courantes examiné dans Brunswick et les autres jugements cités précédemment, est plus nuancée. Outre le travail de vente effectué par les consultants indépendants, toutes les fonctions opérationnelles de SCE relevaient des employés de SI[27].

[58] Paul Klassen a témoigné que le travail effectué par les employés de SI lorsqu’ils étaient au Canada était axé sur le perfectionnement de consultants indépendants, la formation et les événements connexes dans divers endroits au Canada. Thomas Laws a témoigné que ce travail était comptabilisé sur une base journalière, les salaires de ces employés étant payés par SCE à SI pour le temps qu’ils passaient au Canada[28]. Paul Klassen a témoigné qu’il se rendait à Calgary plusieurs fois par année, où lui et d’autres employés utilisaient les locaux loués comme centre opérationnel, à savoir principalement pour les communications par téléphone, par courriel et par médias sociaux dans le contexte du perfectionnement des consultants. Paul Klassen rencontrait également ses contacts chez UPS, un autre fournisseur de services douaniers, et à l’installation de retours lorsqu’il était à Calgary, et se rendait ailleurs au Canada pour rencontrer des consultants indépendants de haut niveau (« tier one leaders ») afin de recueillir des renseignements sur le marché et des commentaires. Jeff Dastrup a confirmé qu’à titre de directeur national, il avait les mêmes fonctions[29].

[59] Thomas Laws a en outre témoigné que les fonctions administratives pour SCE, notamment le soutien à la clientèle, le soutien à la commercialisation, la recherche, la gestion logistique, la comptabilité et les services juridiques, étaient exécutées par des employés de SI travaillant dans les bureaux de cette dernière en Idaho. Contrairement aux frais de dotation en personnel payés par SCE pour le temps passé par les employés de SI en sous-traitance au Canada, ces services étaient fournis moyennant des frais de gestion prévus conformément à l’entente liée aux services et aux ventes de 2012 et à l’accord de services généraux de 2016[30]. Paul Klassen a témoigné que l’impartition de ces fonctions était l’approche la plus logique sur le plan commercial étant donné le modèle d’affaires de SCE fondé sur la vente directe, dont la stratégie en matière de vente était axée sur le perfectionnement des consultants, et que les activités de SCE n’auraient été aucunement différentes si l’entreprise avait effectué ces services en interne (outre des coûts administratifs plus élevés à assumer)[31].

[60] Le Tribunal reconnaît que les faits relatifs au présent appel contiennent de nombreux éléments qu’il a déjà jugés comme militant en faveur de l’existence d’une relation de mandataire. SCE ne tient pas de stocks, n’a pas d’employés et semble assumer peu de risques dans la mesure où elle ne commande des produits à SI qu’une fois les commandes passées par les consultants indépendants ou leurs clients[32]. Sur le plan pratique, SCE dépend fortement des services fournis par SI (sur le plan administratif) et de ses consultants indépendants (sur le plan commercial) pour exercer ses activités de manière rentable.

[61] D’autre part, SCE assume plusieurs fonctions que le Tribunal a déjà jugées comme militant contre l’existence d’une relation de mandataire. Comme dans Moda, le prétendu mandataire dans le cadre du présent appel (c’est-à-dire SCE) a tenu des comptes bancaires et des registres financiers distincts de ceux du prétendu mandant[33], des factures distinctes ont été produites pour les transferts intersociétés par opposition aux ventes aux clients [34] et le prétendu mandataire a réalisé et conservé des profits sur la vente des marchandises[35]. Il a passé un contrat avec UPS pour fournir des services de transport et de courtage en douane et était responsable du paiement des frais de transport, des droits de douane et des taxes[36]. SCE semble également avoir acquis le titre de propriété des marchandises lors de leur transport au Canada, comme l’a affirmé Thomas Laws et comme l’indiquent les accords intersociétés, ainsi que l’échantillon de facture commerciale et le connaissement fournis par SCE[37]. Elle a payé elle-même le temps que les employés ont passé en sous-traitance au Canada à travailler au perfectionnement de consultants et à gérer les relations avec d’autres tierces parties et a payé les retenues d’impôt canadiennes sur ces montants, même si les employés en question étaient des membres du personnel de SI en sous-traitance. Tous ces arrangements étaient prévus par les accords intersociétés.

[62] En fin de compte, comme il est appelé à concentrer son analyse sur ces accords intersociétés, le Tribunal ne peut tout simplement pas ignorer le libellé non équivoque des accords selon lequel les parties n’avaient pas l’intention que SCE agisse en tant que mandataire de SI. Le Tribunal souligne qu’il ne s’agit pas ici de « s’en remett[re] exclusivement à des documents et à des formulaires » sans tenir dûment compte de la réalité de la situation[38], mais plutôt de soupeser les éléments de preuve documentaires attestant les intentions des parties à la lumière de l’ensemble de la preuve. En l’espèce, le Tribunal est d’avis que la nature non équivoque des accords intersociétés est très convaincante quant au fait que les parties n’avaient pas l’intention de former une relation de mandataire et que les dispositions de ces accords concordent avec le comportement des parties.

[63] Par conséquent, le Tribunal conclut, selon la prépondérance des probabilités, que SCE n’agissait pas simplement comme mandataire de SI dans le cadre de la vente des marchandises en cause à des clients canadiens et que les deux sociétés étaient des entités juridiques distinctes quant à la question de savoir si elles étaient parties à une vente pour exportation au Canada.

Les critères d’une vente étaient par ailleurs remplis

[64] Comme il a été souligné précédemment, dans Brunswick, le Tribunal a énoncé les trois éléments nécessaires pour conclure à l’existence d’une vente :

a) il doit y avoir deux parties, établies dans une relation de type acheteur-vendeur l’une par rapport à l’autre;

b) les deux parties doivent être d’accord sur une même proposition;

c) il doit y avoir cession de titre et considération en contrepartie[39].

[65] Comme il est indiqué tout juste précédemment, SI et SCE sont des entités juridiques distinctes établies dans une relation de type acheteur-vendeur l’une par rapport à l’autre. De plus, l’entente liée aux services et aux ventes conclue en 2012 par SI et SCE, et l’accord de distribution qui l’a remplacé en 2016, appuient fortement la position de SCE selon laquelle elle et SI était d’accord sur une même proposition régissant la cession du titre de propriété des marchandises en cause entre elles et considération en contrepartie[40].

[66] Compte tenu de ces conclusions, le Tribunal est d’avis que les critères applicables pour conclure à l’existence d’une vente énoncés dans Brunswick ont été remplis. SI a vendu les marchandises en cause à SCE.

[67] Ayant conclu que SI a vendu les marchandises en cause à SCE, le Tribunal doit maintenant déterminer si ces ventes constituaient des ventes « pour exportation au Canada » aux fins de l’article 48 de la Loi.

La vente entre SCE et SI était une « vente pour exportation au Canada »

[68] Pour déterminer si la transaction constituait une « vente pour exportation » aux termes l’article 48 de la Loi, le Tribunal a renvoyé, dans des affaires antérieures, à l’arrêt Canada (Sous-ministre du Revenu national) c. Mattel Canada Inc.[41], dans lequel la Cour suprême du Canada a souligné que le transfert du titre de propriété était un indicateur clé. La Cour a déclaré ce qui suit :

Aux fins de détermination de la valeur en douane de marchandises pour l’application de l’art. 48 de la Loi sur les douanes, la vente pour exportation pertinente est celle qui a pour effet de transférer à l’importateur le titre relatif aux marchandises. L’importateur est la partie qui détient ce titre au moment où les marchandises sont introduites au Canada et il peut s’agir de l’intermédiaire ou de l’acheteur final, selon l’identité de la partie qui importe les marchandises au pays. Pour déterminer si une vente est faite pour exportation, le lieu de résidence de l’acheteur ou de la partie qui transporte les marchandises est sans importance[42].

[Nos caractères gras]

[69] Comme il a été mentionné précédemment, les éléments de preuve démontrent que le titre de propriété des marchandises en cause est transféré à SCE à leur entrée au Canada et n’est transféré aux clients canadiens qu’au moment de leur livraison. Le Tribunal juge que le témoignage de Thomas Laws à cet effet était crédible, ce qui est conforme aux ententes intersociétés et aux échantillons de facture commerciale et de connaissement fournis par SCE[43].

[70] Le Tribunal conclut donc que SCE était l’importateur visé dans le cadre de la vente pour exportation au Canada aux fins de l’article 48 de la Loi.

[71] De plus, le Tribunal conclut que les clients canadiens ne peuvent pas avoir été les importateurs dans le cadre de la vente pour exportation au Canada, puisque rien n’indique qu’ils détenaient le titre de propriété des marchandises en cause au moment de l’importation. En conséquence, même si le Tribunal avait conclu que SCE agissait simplement à titre de mandataire de SI dans le cadre d’une vente à des clients canadiens, la méthode de la valeur transactionnelle ne serait pas applicable pour déterminer la valeur en douane des marchandises en cause parce que la transaction ne constituerait pas une vente pour exportation au Canada, selon la définition de cette expression prévue à l’article 48 de la Loi et l’interprétation qu’en a donné la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Mattel.

[72] Ayant conclu que SCE n’agissait pas en tant que mandataire de SI, et que la vente pour exportation au Canada pertinente est intervenue entre ces deux entités, le Tribunal se penchera maintenant sur la question de savoir si SCE pouvait être considérée comme un « acheteur au Canada » au sens du Règlement.

SCE était un « acheteur au Canada » dans la vente pour exportation au Canada.

[73] Les parties reconnaissent toutes deux que SCE n’est pas un « résident » du Canada au sens du Règlement. Aux termes de l’article 2.1, pour qu’un non-résident puisse être considéré comme un « acheteur au Canada », il doit avoir un « établissement stable au Canada » au sens de l’article 2 du Règlement, c’est-à-dire un « [l]ieu d’affaires fixe », y compris « un siège de direction, une succursale, un bureau, une usine ou un atelier par l’intermédiaire duquel [il] exerce son activité ».

[74] SCE fait valoir que l’historique législatif de l’article 48 de la Loi démontre que l’ajout de l’expression « acheteur au Canada » à cet article et la définition d’« établissement stable » dans le Règlement n’avaient pas pour but d’imposer une exigence en matière de résidence aux importateurs. Plus précisément, SCE soutient que la modification de l’article 48 a été introduite pour empêcher les entreprises étrangères de tenter de prétendre que les transactions qui ont eu lieu entièrement à l’extérieur du Canada, et qui n’ont pas entraîné le transport des marchandises au Canada, étaient des « ventes pour exportation ». Selon SCE, au cours du débat en troisième lecture, les législateurs ont expressément déclaré que l’ajout de l’expression « acheteur au Canada » ne visait pas à imposer une exigence en matière de résidence canadienne effective aux importateurs, soulignant que pareille mesure serait en conflit avec les pratiques des partenaires commerciaux du Canada[44]. SCE affirme que c’est la raison pour laquelle « établissement stable » a été incluse dans le Règlement à titre de mesure de rechange.

[75] SCE soutient que l’ASFC a mal interprété les termes « par l’intermédiaire duquel elle [la personne] exerce son activité » dans la définition d’« établissement stable » comme renvoyant expressément à des employés ou à des mandataires dépendants, comme en témoigne le libellé du Mémorandum D13-1-3, Valeur en douane – Acheteur au Canada, et que cette interprétation élargit indûment la portée de la disposition à quelque chose qui s’apparente à une exigence de résidence. Subsidiairement, SCE soutient que l’ASFC a mal interprété le sens du terme « mandataire dépendant ».

[76] SCE fait également valoir que l’ASFC a appliqué un critère juridique erroné dans l’interprétation de l’expression « [l]ieu fixe d’affaires » et a mal interprété les éléments de preuve concernant le contrat de location des bureaux de Calgary.

Lieu d’affaires fixe

[77] SCE soutient que les bureaux de Calgary qu’elle a loués devraient être considérés comme son lieu d’affaires fixe pour les raisons suivantes :

· SCE avait un bail commercial à durée déterminée pour un bureau privé désigné. SCE avait un accès exclusif au bureau qui lui était attribué, exerçait seule le contrôle sur ce bureau et avait le droit de disposer de celui-ci.

· La durée initiale du bail de SCE était d’un an, et SCE a conservé son bail au Smart Executive Centre pendant plus de quatre ans. Elle a déménagé une fois au cours de cette période en raison de rénovations, mais elle aurait pu refuser de le faire selon les modalités de son bail. SCE est restée dans le même immeuble en tout temps, avec la même réception, et son adresse postale n’a jamais changé.

· Le bureau était concrètement identifié à l’activité de SCE. Pendant que SCE occupait les lieux, son logo était gravé sur un écriteau de verre à la réception du Smart Executive Centre. L’adresse du bureau de Calgary de SCE était imprimée sur les bons de commande des clients, sur les emballages des produits canadiens et sur les cartes d’identité des licences provinciales de vente directe des consultants.

· Le bureau de Calgary était le siège social de SCE et le centre opérationnel pour le personnel au Canada. Le personnel engagé par contrat pour travailler au nom de SCE se rendait périodiquement au bureau de Calgary et utilisait l’espace pour effectuer des tâches visant à développer le réseau de consultants canadiens et à stimuler les ventes, comme les appels téléphoniques et les téléconférences, la correspondance par courriel avec les consultants, la réception et le paiement des factures des fournisseurs de services, et la correspondance avec les gouvernements provinciaux canadiens sur les questions de licence de vente directe.

[78] À l’audience, l’ASFC a admis que le bureau de Calgary de SCE constituait un lieu d’affaires fixe et a fait remarquer que, même si la question du lieu d’affaires fixe avait été soulevée dans le cadre de la procédure devant le président, elle n’avait jamais présenté d’argument à ce sujet devant le Tribunal[45].

[79] Par conséquent, pour des raisons d’économie de ressources judiciaires, le Tribunal reconnaît que le bureau de Calgary de SCE constitue un lieu d’affaires fixe aux fins de la définition d’« établissement stable » prévue dans le Règlement.

Exercice des activités de l’entreprise

[80] Dans l’arrêt Canada c. Dudney[46], la Cour d’appel fédérale (CAF) a examiné la description suivante de l’expression « exercice des activités de l’entreprise » dans le commentaire de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur le Modèle de Convention fiscale concernant le revenu et la fortune de l’OCDE :

[L]’exercice des activités de l’entreprise par l’intermédiaire de cette installation fixe d’affaires […] signifie habituellement que les personnes qui, d’une façon ou d’une autre, dépendent de l’entreprise (le personnel) exercent les activités de l’entreprise dans l’État où est située l’installation fixe.

[81] SCE a souligné que l’extrait du commentaire de l’OCDE cité dans l’arrêt Dudney et reproduit ci-dessus figurait dans la version de 1977[47], mais pas dans celle de 2017[48]. Toutefois, SCE a également noté que le passage suivant apparaît dans les deux versions[49] :

39. Il existe différentes manières, pour une entreprise, d’exercer son activité. Dans la plupart des cas, l’activité de l’entreprise est exercée principalement par l’entrepreneur ou par des personnes qui ont avec l’entreprise des relations de salarié à employeur (personnel). Ce personnel inclut les employés et autres personnes qui reçoivent des instructions de l’entreprise (agents dépendants). Les pouvoirs dont disposent ces personnes dans leurs relations avec les tiers n’entrent pas en ligne de compte. Il importe peu que l’agent dépendant soit ou non habilité à conclure des contrats s’il travaille dans l’installation fixe d’affaires elle-même […]

[82] SCE fait valoir que l’utilisation des qualificatifs « habituellement » et « [d]ans la plupart des cas » indique que l’activité n’est pas nécessairement exercée par des personnes dépendant de l’entreprise dans tous les cas. De plus, SCE fait valoir que dans son commentaire, l’OCDE indique que l’activité d’une entreprise peut être « exercée » par des particuliers ou des sociétés et que des particuliers peuvent exercer des activités pour plusieurs sociétés liées en même temps[50]. Sur ce fondement, SCE soutient que le fait que ses activités étaient exercées par des employés d’une autre entité engagés par contrat pour travailler en son nom n’est pas pertinent aux fins du critère relatif à l’exercice d’activités par l’entreprise.

[83] SCE soutient également que, dans la décision American Income Life Insurance Company c. La Reine[51], la Cour canadienne de l’impôt a établi à titre indicatif une liste de facteurs à prendre en considération pour déterminer si des activités sont exercées :

4. Il devait être tenu compte des facteurs suivants pour déterminer si l’activité d’AIL est exercée à partir d’une installation fixe d’affaires :

- l’utilisation des locaux par AIL

- le contrôle par AIL à l’égard des locaux

- le droit d’exercer le contrôle sur les locaux

- le degré auquel les locaux sont identifiés à l’activité d’AIL

- qui payait les dépenses liées aux locaux

- qui payait l’équipement utilisé dans les locaux

- qui prenait les décisions administratives

- quels étaient les contrats conclus à partir des locaux

- quels produits AIL gardait-elle dans les locaux

- AIL avait-elle des employés canadiens

- qui assumait les risques liés à l’exploitation à partir de locaux

- combien d’entreprises l’agent représentait-il

- les agents devaient-ils suivre des instructions détaillées ou étaient-ils assujettis à un contrôle complet

[84] Dans le contexte douanier, pour déterminer si l’acheteur non-résident « exerce son activité » à partir de son lieu d’affaires fixe, la CAF a indiqué, dans l’arrêt AAi. Fostergrant of Canada Co. c. Canada (Commissaire de l’Agence des Douanes et du Revenu), qu’une entreprise qui achète et vend des marchandises dans un but lucratif « exerce une activité »[52]. De plus, il est faux de dire qu’une entreprise « n’exerce pas d’activités » si elle fait l’objet d’un contrôle de fait par une autre entité.

[…] Essentiellement, le TCCE a adopté le principe selon lequel une société n’exerce pas d’activités si ses affaires sont l’objet d’un important contrôle de fait exercé par sa société mère. Cette affirmation ne s’appuie sur aucun précédent et, à mon avis, elle est juridiquement erronée. Aucune disposition de la Loi sur les douanes ne requiert ni n’autorise une telle manière de voir[53].

[85] SCE affirme qu’elle a satisfait au critère établi dans l’arrêt Fostergrant relatif à l’exercice d’une activité pendant la période visée par la révision parce qu’elle a acheté et vendu des marchandises pour son propre compte dans un but lucratif, comme en témoignent les documents commerciaux et comptables versés au dossier. SCE affirme également qu’elle a réalisé des profits entre 2012 et 2016 et qu’elle a déclaré ces revenus à l’Agence du revenu du Canada. Elle soutient que le personnel contractuel qui utilisait le bureau de Calgary exerçait une activité à son lieu d’affaires fixe et qu’il n’y a pas de durée minimale prescrite pendant laquelle l’activité devait être exercée au lieu d’affaires fixe pour satisfaire aux exigences du critère.

[86] L’ASFC fait valoir que SCE n’exerçait pas d’activité par l’intermédiaire de son bureau de Calgary, car l’activité qui y était exercée n’était pas liée à l’achat et à la vente des marchandises. Selon l’ASFC, la preuve démontre que SCE ne disposait pas de l’infrastructure ou des ressources nécessaires au bureau de Calgary pour effectuer efficacement l’achat et la vente des marchandises importées. L’achat et la vente des marchandises étaient effectués par les consultants indépendants, qui ne travaillaient pas au bureau de Calgary.

[87] Dans Brunswick, le Tribunal a conclu que l’appelante avait un établissement stable au Canada en se fondant sur les cinq facteurs suivants :

1) les employés de l’appelante sollicitent la clientèle pour obtenir des commandes au Canada;

2) les employés de l’appelante ont le pouvoir de négocier les modalités de la vente de biens d’équipement de jeu de quilles sans obtenir la confirmation de BB&B et ils ont le pouvoir de conclure des contrats au nom de l’appelante;

3) une facture est établie au nom de l’appelante, et tous les paiements versés par les clients canadiens sont reçus par l’appelante dans ses comptes de banque canadiens;

4) les clients canadiens traitent avec l’appelante en ce qui concerne les réclamations afférentes à la garantie sur les marchandises en cause;

5) l’appelante produit des déclarations canadiennes de revenu[54].

[88] L’ASFC fait valoir que la principale distinction entre cette affaire et le présent appel réside dans le fait que l’appelante dans Brunswick avait ses propres employés qui exerçaient en son nom des activités commerciales clés directement liées à la vente pour exportation en question. Dans le cadre du présent appel, les employés en sous-traitance de SCE n’ont pas sollicité de commandes au Canada; ils n’ont pas négocié les prix avec le vendeur des marchandises; n’ont pas participé aux commandes, à la facturation ou au recouvrement des paiements; et n’ont pas participé au traitement des remboursements ou des demandes de garantie.

[89] En appliquant les principes énoncés ci-dessus aux faits de la présente affaire, le Tribunal conclut que la preuve démontre que SCE « exerce son activité par l’intermédiaire » de son lieu d’affaires fixe pour les motifs qui suivent.

[90] Tout d’abord, les employés de SCE (en sous-traitance ou non) n’ont pas directement sollicité de commandes au Canada par l’intermédiaire du bureau loué de Calgary ou de tout autre endroit; ce sont les consultants indépendants qui l’ont fait. Toutefois, les employés de SCE, prêtés par SI selon l’entente de dotation intersociétés, ont utilisé le bureau lorsqu’ils étaient au Canada, principalement pour le perfectionnement et la gestion des consultants ainsi que pour le maintien des relations avec les fournisseurs de services au Canada. Paul Klassen et Jeff Dastrup ont témoigné de ces faits[55]. Selon le Tribunal, il existe un lien évident entre le travail effectué au bureau loué de Calgary et les activités de SCE au Canada, tant en ce qui concerne l’importation et la livraison des marchandises que le travail crucial de mise en place et de maintien du réseau de consultants indépendants qui est essentiel à la rentabilité du modèle d’affaires de SCE.

[91] Il faut reconnaître que seule une petite partie du travail de SCE au Canada a été effectuée en présence à partir du bureau, par seulement une petite partie de son personnel en sous-traitance : deux employés (Jeff Dastrup et Paul Klassen) ont témoigné qu’ils – et eux seuls – ont utilisé le bureau de Calgary pendant une dizaine de jours au cours de la période visée par la révision. La preuve révèle que SCE n’a pas exercé une quantité importante d’activités à son lieu d’affaires fixe pendant la période visée par la révision[56]. Se pose alors la question de savoir quel volume d’activités doit être effectué par l’intermédiaire d’un lieu d’affaires fixe pour satisfaire à la définition d’« établissement stable » dans le Règlement.

[92] Le Tribunal est d’avis que le libellé de la disposition ne permet pas à l’ASFC d’imposer le genre d’exigences qu’elle a imposées pour déterminer si SCE exerçait des activités conformément à l’article 2.1 du Règlement. Le libellé n’impose aucune exigence particulière, que ce soit en ce qui concerne la forme sous laquelle les activités commerciales doivent être exercées ou le volume ou l’ampleur réel des activités qui doivent être exercées par l’intermédiaire du lieu d’affaires.

[93] Selon le libellé, la « personne » doit exercer son activité par l’intermédiaire du lieu d’affaires fixe. Il est donc clair que cette personne doive exercer un contrôle sur l’exploitation de l’entreprise. Le fait que la plupart des tâches opérationnelles, y compris celles qui étaient essentielles à l’exploitation de l’entreprise, étaient effectuées aux États-Unis par des employés de SI qui étaient confiés à SCE en sous-traitance, sans être officiellement employés par cette dernière, était déterminant pour l’ASFC lorsqu’elle a refusé à SCE le statut d’acheteur au Canada.

[94] Il ne fait aucun doute que SCE exerçait une activité. Son activité consistait à acheter et à vendre des marchandises au Canada dans un but lucratif. Elle importait des produits de SI et les vendait au Canada par l’intermédiaire de consultants indépendants. Elle payait des impôts au Canada[57]. Elle avait associé le bureau de Calgary à son activité au moyen d’écriteaux physiques placés dans les locaux[58], et d’inscriptions sur les formulaires de commande[59], sur les emballages des produits[60] et sur les cartes d’identité[61]. Elle a choisi et payé les locaux et en a eu l’usage exclusif[62]. Tous ces facteurs portent à croire qu’elle exerçait des activités, comme l’a reconnu la Cour dans AIL.

[95] Le fait que la grande majorité des affaires de SCE étaient en fait gérées par des personnes qui n’étaient pas des employés officiels de l’entreprise ne change rien au fait que ces affaires étaient celles de SCE. SCE avait mis en place des accords commerciaux par lesquels elle sous-traitait l’exécution de la plupart de ses activités. Les fonctions de gestion et d’administration étaient assurées par des employés de SI qui étaient affectés à SCE précisément à cette fin selon des ententes intersociétés. À toutes fins utiles, ces fonctions étaient juridiquement liées aux activités d’achat et de vente de SCE. Lorsqu’il exerçait ces fonctions pour SCE, le personnel de SI les exerçait en fait légalement, sous contrat, pour SCE. Rien dans la preuve ne vient contredire ce fait.

[96] Il n’y a pas non plus d’élément de preuve établissant que les décisions ou les mesures de gestion et d’administration relatives aux activités de SCE ont été prises ou exécutées en dehors des paramètres établis dans les ententes intersociétés. Selon le Tribunal, il n’y a rien dans ces ententes qui viendrait enlever à l’entité juridique distincte au Canada que constitue SCE le contrôle de ces activités. Certes, il peut y avoir confusion lorsqu’il s’agit d’examiner l’identité des personnes qui prennent des décisions et exercent des fonctions, dans la mesure où ces personnes peuvent également avoir des responsabilités similaires au sein de SI. Mais cela ne permet pas d’établir que, lorsqu’elles agissent au nom de SCE, elles agissent en fait au nom de SI comme le suggère l’ASFC.

[97] Il en va de même pour d’autres fonctions opérationnelles importantes de SCE. Les fonctions d’expédition, de dédouanement et de logistique sont assurées par des parties qui ne sont pas employées par SCE. Ces fonctions sont également sous-traitées à des parties qui fournissent ces services à SCE. UPS agit selon les modalités d’accords, établis sous l’autorité de SCE, qui définissent les paramètres de la relation entre UPS et SCE pour la prestation de ces services[63].

[98] Une logique similaire s’applique aux activités de vente. SCE n’a pas de relation directe avec les acheteurs finaux des marchandises en cause. SCE conclut des accords avec des consultants indépendants qui commercialisent et vendent les produits Scentsy par l’entremise de réseaux de vente de personne à personne en échange d’une commission. Ces consultants indépendants organisent leurs propres affaires, mais ils travaillent dans les limites des paramètres généraux fixés par SCE[64]. Grâce à des réunions et à des mesures de contrôle régulières, SCE gère cette relation d’une manière qui satisfait à ses exigences et à ses normes opérationnelles[65]. Bien que Paul Klassen ait témoigné qu’ils ne rencontraient jamais physiquement les consultants indépendants au bureau de Calgary, il a néanmoins affirmé que ce bureau avait été choisi expressément parce qu’il offrait l’espace pour le faire en cas de besoin[66]. Quoi qu’il en soit, dans leurs témoignages, les témoins de SCE ont clairement affirmé que le bureau était utilisé pour des activités liées aux relations avec ces fournisseurs de services, notamment pour communiquer directement avec eux[67].

[99] Bien qu’un lien d’emploi ou de dépendance entre la personne qui exerce une fonction opérationnelle donnée et la partie qui prétend exploiter l’entreprise puisse contribuer à établir que cette partie exerce effectivement cette activité, il ne s’agit pas d’une exigence absolue aux termes du Règlement. Il suffit que les faits démontrent que l’activité est effectivement exercée par la partie qui prétend l’exercer; aucun modèle d’entreprise particulier n’est imposé dans le cadre du régime prévu par la réglementation. Les personnes et les entités sont libres d’organiser leur activité de la manière qu’elles jugent la plus appropriée d’un point de vue opérationnel, pourvu qu’elles puissent établir qu’elles exercent l’activité qu’elles prétendent exercer par l’intermédiaire d’un lieu d’affaires fixe au Canada.

[100] En l’espèce, le Tribunal est convaincu que le travail effectué à partir du bureau de Calgary avait un lien suffisant avec l’activité que SCE exerçait au Canada pour satisfaire à la définition d’établissement stable prévue dans le Règlement. Le personnel de SCE, sous-traité par SI, utilisait le bureau pour communiquer avec des fournisseurs de services canadiens et des consultants indépendants dans le cadre de son activité d’achat et de vente des marchandises en cause. SCE associait systématiquement le bureau à l’activité qu’elle exerçait, que ce soit au moyen d’écriteaux physiques dans le bureau lui-même ou d’inscriptions sur les documents distribués aux consultants indépendants et aux clients, tels que les bons de commande, les cartes d’identité des consultants et les emballages des produits.

[101] Le Règlement n’établit pas de durée minimale pendant laquelle une activité doit être exercée par l’intermédiaire d’un lieu d’affaires fixe, ni de type ou de volume de travail qui doit s’y dérouler, pour satisfaire à la définition d’« établissement stable ». Le Tribunal reconnaît que la portée et le volume des activités exercées par SCE au bureau de Calgary n’étaient pas considérables, et il souligne que cette conclusion est propre aux faits relatifs au présent appel et au modèle d’affaires particulier de SCE. Ce modèle d’affaires permet à SCE d’exploiter son entreprise sans employés directs, et de faire appel à des employés en sous-traitance pour effectuer certaines de ses activités au Canada par l’intermédiaire du bureau de Calgary au cours de la période visée par la révision. En exerçant ces activités à cet endroit, les employés en sous-traitance (et par leur intermédiaire, SCE) exerçaient l’activité de SCE par l’intermédiaire de son lieu d’affaires fixe.

[102] Cette analyse demeure inchangée à la lumière du libellé français du Règlement, qui prévoit que l’établissement stable d’une personne est le lieu d’affaires fixe « par l’entremise duquel elle exerce son activité ». L’ASFC a interprété le libellé français comme signifiant un lieu d’affaires fixe « à partir duquel » [traduction] (from which) la personne exerce son activité, par opposition à « through which » dans la version anglaise. Bien qu’il soit possible qu’une telle nuance soit pertinente dans d’autres appels présentant des faits différents, le Tribunal considère qu’en l’espèce, il s’agit d’une distinction sans incidence; comme le Tribunal est d’avis que les activités exercées au bureau de Calgary et leur lien avec l’entreprise canadienne de SCE sont suffisants pour conclure que celle-ci exerçait une activité « à partir » [traduction] de cet endroit, il est satisfait au critère relatif à l’« établissement stable », selon le sens de ce terme dans l’une ou l’autre des langues officielles.

[103] L’ASFC fait également valoir que la manière dont SCE interprète le terme « établissement stable » n’est pas appuyée par le libellé du reste de la définition du terme « acheteur au Canada », en particulier l’alinéa 2.1c) du Règlement, qui prévoit que ce terme s’entend :

d’une personne, autre qu’un résident, qui n’a pas d’établissement stable au Canada et qui importe les marchandises faisant l’objet de la détermination de la valeur en douane :

(i) pour sa consommation ou son utilisation personnelles et qui ne les destinent pas à la vente,

(ii) pour les vendre au Canada pourvu que, avant leur achat, elle n’ait pas passé un accord visant leur vente à un résident.

[104] Selon l’ASFC, cette disposition établit clairement l’intention du législateur de faire en sorte qu’une entité étrangère ne puisse pas être qualifiée d’acheteur au Canada en utilisant une vente entre elle-même et une autre entité étrangère ou non-résidente, lorsqu’il existe déjà un accord visant à vendre les marchandises à un résident canadien. L’ASFC soutient que, logiquement, pareille intention empêcherait également les entités étrangères, particulièrement les entités liées, d’utiliser des transactions sur papier qui ne sont pas des ventes à l’exportation de bonne foi ou des transactions avec lien de dépendance, afin d’évaluer les marchandises importées selon la méthode de la valeur transactionnelle à la place d’une vente ou d’un accord de vente existante avec un résident canadien. Selon l’ASFC, pareille interprétation ferait perdre tout sens à l’alinéa 2.1(c) du Règlement.

[105] Le Tribunal est d’avis que le raisonnement de l’ASFC est circulaire. L’alinéa 2.1c) du Règlement énonce les circonstances dans lesquelles une personne peut être considérée comme un acheteur au Canada lorsqu’elle n’est pas un résident et qu’elle n’a pas d’établissement stable au Canada. Si le législateur avait voulu empêcher, en toutes circonstances, les entités non-résidentes de pouvoir être considérées comme des acheteurs au Canada de marchandises pour lesquelles il existe déjà un accord de vente avec des résidents canadiens, il ne leur aurait pas fourni un moyen clair de le faire par l’intermédiaire d’un établissement stable en vertu de l’alinéa 2.1b). Rien ne permet d’inférer que le législateur avait l’intention de considérer les sous-alinéas 2.1c)(i) et 2.1c)(ii) comme étant implicites aux alinéas 2.1a) ou b) ou à la définition du terme « établissement stable » prévue à l’article 2.

[106] L’argument de l’ASFC, selon lequel le sous‑alinéa 2.1c)(ii) prévoit qu’il suffit qu’il existe un accord visant à vendre des marchandises à un résident avant que celles-ci ne soient achetées par l’importateur non-résident pour que ce dernier ne puisse pas être considéré comme un acheteur au Canada, est tout simplement faux. L’alinéa 2.1c) ne fait qu’exclure l’importateur non-résident qui n’a pas d’établissement stable au Canada et n’a aucune incidence sur la définition d’établissement stable en tant que telle. L’interpréter autrement reviendrait à enlever tout sens à l’alinéa 2.1b), ainsi qu’à la définition d’« établissement stable » à l’article 2. Cette analyse est appuyée par l’échec, souligné précédemment dans les présents motifs, de l’argument connexe de l’ASFC selon lequel les ventes pour exportation pertinentes étaient celles intervenues entre le vendeur étranger et les clients canadiens.

[107] Comme il est indiqué dans l’arrêt Mattel, aux fins de détermination de la valeur en douane de marchandises pour l’application de l’article 48 de la Loi, la vente pour exportation pertinente est celle qui a pour effet de transférer à l’importateur le titre relatif aux marchandises et dans le cadre de laquelle l’importateur est la partie qui détient ce titre au moment où les marchandises sont introduites au Canada. Comme il a été mentionné précédemment, les clients canadiens ne peuvent pas avoir eu la qualité d’importateur dans la vente pour exportation au Canada, puisque rien n’indique qu’ils détenaient le titre de propriété des marchandises en cause au moment de l’importation[68]. Par conséquent, dans son interprétation du Règlement, l’ASFC semble contredire directement le sens de la Loi tel qu’elle est interprétée par la Cour suprême du Canada. Le Tribunal ne voit absolument aucune raison de l’adopter.

[108] Pour les motifs exposés précédemment, le Tribunal conclut que SCE avait un lieu d’affaires fixe au Canada par l’intermédiaire duquel elle exerçait son activité d’importation et de vente des marchandises en cause, conformément à la définition d’établissement stable énoncée à l’article 2 du Règlement. SCE répond donc à la définition d’acheteur au Canada dans la vente pour exportation au Canada des marchandises en cause.

Le prix payé ou à payer est déterminable

[109] L’ASFC fait valoir que, si le Tribunal devait conclure que SCE était l’acheteur au Canada dans le cadre d’une vente pour exportation au Canada des marchandises en cause, le Tribunal devrait rendre une ordonnance pour que l’ASFC procède à une révision de la valeur en douane en évaluant si des ajustements devraient être apportés au prix payé ou à payer pour les marchandises. Plus précisément, l’ASFC s’est demandé si certains versements effectués par SCE à SI, tels qu’ils sont indiqués dans les déclarations d’impôt sur le revenu des sociétés canadiennes de SCE[69], devraient possiblement être inclus dans le prix payé ou à payer, soit en application de la définition de ce terme au paragraphe 45(1) de la Loi, soit à titre d’ajustement en application du sous-alinéa 48(5)a)(v); et, plus généralement, si le lien qui unit les parties a influé sur le prix payé ou à payer tel qu’il est prévu à l’alinéa 48(1)d).

[110] L’ASFC soutient qu’elle n’avait pas auparavant contesté la méthode d’établissement des prix de transfert parce qu’elle avait déterminé qu’il n’y avait pas de vente pour exportation entre SI et SCE et que SCE ne répondait pas à la définition d’acheteur au Canada. Elle fait également valoir que la documentation de l’OCDE a été préparée aux fins de l’impôt sur le revenu et qu’elle pourrait être insuffisante pour démontrer la nature de pleine concurrence des transactions aux fins douanières. Enfin, elle fait remarquer que les documents se rapportent aux années 2015 et 2016 et qu’il n’existe aucune documentation sur les transactions effectuées en 2013 et en 2014.

[111] Dans la requête qu’elle a présentée en vue de faire radier cet argument du mémoire de l’ASFC, SCE fait valoir que ces versements sont des paiements de frais de service et ne sont donc pas directement liés aux marchandises importées. SCE souligne que dans les déclarations de revenus, une distinction est effectuée entre les paiements effectués au titre des marchandises (« Articles de commerce et matières brutes ») et les autres paiements qui ne se rapportent pas aux marchandises, c’est‑à‑dire les services et le remboursement des dépenses[70]. De plus, SCE fait valoir que la nature et les conditions des services achetés à SI sont précisées dans l’entente liée aux services et aux ventes et dans l’accord de services généraux, ce qui démontre que les services ne sont pas liés aux marchandises importées[71].

[112] SCE renvoie également à d’autres éléments de preuve au dossier qui, selon elle, portent à croire que le lien entre elle et SI n’a pas influé sur le prix des marchandises :

· une analyse des prix de transfert de 2011 qui expose une méthode permettant à SCE et SI d’établir des prix de transfert de pleine concurrence[72];

· un mémorandum fiscal interne de 2013 qui décrit la structure des ventes intersociétés entre SI et SCE, y compris son utilisation des prix de transfert de pleine concurrence[73];

· un mémorandum fiscal interne de 2015 contenant une analyse complète des frais de gestion facturés par SI à SCE à des fins de prix de transfert[74];

· une analyse comparative des transferts et des frais de gestion réalisée en 2016 par Deloitte[75];

· des résumés des rapports de Deloitte sur les prix de transfert pour les exercices 2015 et 2016, dans lesquels la méthode d’établissement des prix de transfert intersociétés de SI est comparée aux Principes de l’OCDE applicables en matière de prix de transfert à l’intention des entreprises multinationales et des administrations fiscales de 2010 (Principes de l’OCDE applicables en matière de prix de transfert)[76].

[113] À l’audience, l’avocat de SCE a contesté la demande de l’ASFC voulant que le Tribunal renvoie l’affaire à l’ASFC, au motif que cela reviendrait, pour le Tribunal, à renoncer à son pouvoir de déterminer la valeur en douane.

[114] Selon le paragraphe 45(1) de la Loi, le prix payé ou à payer s’entend de « la somme de tous les versements effectués ou à effectuer par l’acheteur directement ou indirectement au vendeur ou à son profit, en paiement des marchandises ».

[115] Le sous-alinéa 48(5)a)(v) prévoit ce qui suit :

(5) Dans le cas d’une vente de marchandises pour exportation au Canada, le prix payé ou à payer est ajusté :

a) par addition, dans la mesure où ils n’y ont pas déjà été inclus, des montants représentant :

[…]

(v) la valeur de toute partie du produit de toute revente, cession ou utilisation ultérieure par l’acheteur des marchandises, qui revient ou doit revenir, directement ou indirectement, au vendeur,

[Nos italiques]

[116] L’extrait pertinent du mémorandum D13-4-5 de l’ASFC, Méthode de la valeur transactionnelle pour les personnes liées, prévoit ce qui suit :

4. […] L’alinéa 48(1)d) de la Loi prévoit deux options pour établir l’acceptabilité de la valeur transactionnelle :

a) en examinant les circonstances propres à la vente afin de déterminer si le lien a influencé le prix; ou

b) que l’importateur démontre que le prix est très proche d’une « valeur critère ».

5. En d’autres termes, l’importateur doit être convaincu que le lien entre le vendeur et l’acheteur n’a pas influencé le prix de vente des marchandises. Pour ce faire, l’importateur doit examiner la manière dont le prix a été déterminé entre les parties liées et conserver les éléments de preuve qui appuient la décision d’utiliser la méthode de la valeur transactionnelle. Le but de l’auto-examen est d’établir que le prix de vente n’est pas considérablement différent du prix qui aurait été exigé à un acheteur non lié dans des circonstances identiques.

Circonstances propres à la vente

6. Ni la Loi, ni l’accord international sur l’évaluation en douane de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), sur lesquels sont fondées les dispositions de la Loi concernant la valeur en douane, ne contiennent de détails quant aux renseignements nécessaires pour établir qu’un lien n’a pas influencé le prix lors de la vente de marchandises pour exportation. Quelle que soit la manière choisie par un importateur pour établir l’acceptabilité du prix, la conclusion de l’importateur selon laquelle le prix est acceptable doit être étayée de preuves factuelles. Par exemple, en faisant la preuve que le prix est suffisant pour permettre le recouvrement de tous les coûts, majoré d’un profit représentatif de la marge bénéficiaire globale de l’entreprise sur une période représentative découlant des ventes de marchandises de la même nature ou de la même espèce, cela démontrerait que le prix n’a pas été influencé.

[…]

8. Une entente de prix de transfert présentée par l’importateur peut constituer une bonne source d’information si elle contient des informations pertinentes au sujet des circonstances propres à la vente. Un prix de transfert (c’est-à-dire, un prix exigé pour les marchandises par une entité liée) est un bon point de départ pour déterminer la valeur en douane de marchandises importées.

[…]

Ajustements au prix de transfert

20. Lorsqu’il existe une entente de prix de transfert entre un vendeur et un acheteur lié, qu’elle est écrite et en vigueur au moment de l’importation, l’ASFC considère le prix de transfert comme étant le prix payé ou à payer « non influencé » des marchandises importées[77].

[…]

[Traduction]

[117] La disposition correspondante dans l’Accord international sur l’évaluation en douane est la suivante :

Article 8

1. Pour déterminer la valeur en douane par application des dispositions de l’article premier, on ajoutera au prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises importées

[…]

d) la valeur de toute partie du produit de toute revente, cession ou utilisation ultérieure des marchandises importées qui revient directement ou indirectement au vendeur.

[…]

Annexe I : Notes Interprétatives

[…]

Note relative à l’article premier : Prix effectivement payé ou à payer

[…]

4. Le prix effectivement payé ou à payer s’entend du prix des marchandises importées. Ainsi, les transferts de dividendes et les autres paiements de l’acheteur au vendeur qui ne se rapportent pas aux marchandises importées ne font pas partie de la valeur en douane[78].

[Nos italiques]

[118] Le Tribunal ne partage pas l’avis de SCE selon lequel compte tenu de la nature de sa compétence, il ne peut pas renvoyer à l’ASFC certaines questions ou certains points soulevés dans le cadre d’un appel afin qu’elle les tranche si elle estime que l’ASFC serait mieux placée pour le faire. Le paragraphe 67(3) de la Loi prévoit que le Tribunal peut statuer sur l’appel prévu à l’article 67 « selon la nature de l’espèce, par ordonnance, constatation ou déclaration », tandis que le sous‑alinéa 61(1)a)(iii) permet à l’ASFC de procéder au réexamen de la valeur en douane des marchandises importées à tout moment, dans le cas où le réexamen donnerait effet à une décision du Tribunal rendue au sujet des marchandises. En l’espèce, toutefois, le Tribunal ne voit aucune raison de renvoyer l’affaire à l’ASFC.

[119] L’ASFC fait valoir que le lien qui unit SI et SCE peut avoir influé sur le prix payé ou à payer et que la nature ou l’origine des renseignements fournis par SCE à l’égard de certains montants payés à SI peut être discutable lorsqu’elle est considérée dans le contexte de l’établissement de la valeur en douane. L’ASFC n’a pas fourni d’indication concrète ou d’élément de preuve propre à l’espèce sur la façon dont le lien aurait pu influer sur le prix payé ou à payer ou sur la raison pour laquelle l’information fournie pourrait ne pas être fiable.

[120] La simple existence d’un lien de dépendance entre deux parties ne signifie pas forcément que leurs relations d’affaires ne s’inscrivent pas dans des conditions commerciales. En d’autres termes, à lui seul, un tel lien ne soulève pas de questions quant à savoir s’il a influé sur les conditions d’une transaction entre les parties. À cet égard, l’ASFC ne fait rien d’autre que de vagues allégations d’une possible influence. Cela n’est pas suffisant.

[121] Quant à la question de savoir si certains versements par SCE à SI devraient être ajoutés au prix payé ou à payer, soit à titre de produits ultérieurs au titre du sous-alinéa 48(5)a)(v) de la Loi, soit autrement en application de l’alinéa 48(5)a), le Tribunal ne voit aucune raison de mettre en doute l’explication de SCE selon laquelle ces paiements ne se rapportaient pas à la valeur des marchandises, mais plutôt à des services administratifs et/ou de gestion intersociétés fournis au titre des ententes intersociétés. De plus, le fait que les renseignements fournis par SCE pour justifier sa position sont contenus dans des documents préparés principalement aux fins de l’impôt sur le revenu ne soulève pas, à lui seul, de préoccupations quant à la nature probante de cette preuve pour démontrer que ces paiements ne sont pas liés à la valeur des marchandises ou ne sont pas fondés sur des considérations purement commerciales[79].

[122] De plus, dans ses observations écrites, l’ASFC elle-même semble suggérer que sa demande d’évaluation des ajustements possibles au prix payé ou à payer est fondée sur une vague impression que d’autres renseignements pourraient être révélés une fois qu’un examen détaillé aura été entrepris :

D’autres ajustements pourraient être effectués conformément à l’alinéa 48(5)a) de la Loi, mais les éléments de preuve dans le dossier actuel sont insuffisants pour rendre une telle décision. De même, il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve pour déterminer si le lien qui unit l’acheteur et le vendeur a influé sur le [prix payé ou à payer] des marchandises, aux termes de l’alinéa 48(1)d) de la Loi […][80]

[Notes omises, traduction]

[123] SCE a renvoyé à de nombreux éléments de preuve documentaires[81] et a présenté des témoignages (principalement le témoignage confidentiel de Thomas Laws)[82] sur la façon dont elle a établi les prix de transfert et les frais de gestion, dont aucun n’a été contesté par l’ASFC. Selon le Tribunal, rien qui suggère que ces frais ont été établis autrement qu’en conformité avec les ententes intersociétés ou les méthodes applicables en matière de prix de transfert, qu’ils sont effectués en paiement des marchandises comme le prévoit la définition de « prix payé ou à payer » au paragraphe 45(1) de la Loi, ou qu’ils devraient autrement être ajoutés au prix payé ou à payer en application du paragraphe 48(5).

[124] Les parties ne s’entendent pas sur la question de savoir à qui incombe le fardeau de la preuve en ce qui concerne les arguments de l’ASFC à cet égard, puisqu’ils ont été soulevés pour la première fois dans le cadre du présent appel. Le Tribunal estime suffisant de souligner qu’il considère que SCE s’est acquittée du fardeau de la preuve prévu au paragraphe 152(3) de la Loi, compte tenu de la preuve documentaire et des témoignages concernant la façon dont les prix de transfert et les services de gestion entre SI et SCE ont été établis et payés. En fin de compte, il n’y a rien de concret dans la preuve présentée au Tribunal ou dans les arguments de l’ASFC qui soulève des questions quant à savoir si le prix payé ou à payer est déterminable ou devrait être ajusté, soit en raison du lien qui unit SCE et SI, soit en raison des montants payés versés par SCE à SI.

[125] Par conséquent, le Tribunal conclut que le prix payé ou à payer par SCE pour les marchandises en cause est déterminable. Pour les motifs exposés dans les sections précédentes de la présente décision, ce prix payé ou à payer était le prix de vente entre SI et SCE.

Conclusion

[126] Pour les motifs exposés précédemment, le Tribunal conclut que la valeur en douane des marchandises est correctement déterminée au moyen de la méthode de la valeur transactionnelle prévue au paragraphe 48(1) de la Loi. Les marchandises en cause ont été vendues pour exportation au Canada par SI à SCE, qui répondait à la définition d’acheteur au Canada aux termes de l’alinéa 2.1b) du Règlement. Le prix payé ou à payer pour les marchandises peut être déterminé comme ayant été le prix de transfert payé par SCE à SI.

DÉCISION

[127] L’appel est accueilli.

Serge Fréchette

Serge Fréchette
Membre présidant

 



[1] L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

[2] Pièce AP-2019-021-19.

[3] (18 mai 2000), AP-96-046 et AP-96-074 (TCCE) [GFT Mode].

[4] DORS/98-106. Le Tribunal fait remarquer que la partie pertinente des Règles des Cours fédérales est la même, au moment de rendre la présente décision, que lorsque le Tribunal l’a examinée dans l’affaire GFT Mode. Voir le paragraphe 221(1) des Règles des Cours fédérales; GFT Mode à la p. 3, à la note 10.

[5] GFT Mode à la p. 4.

[6] Ibid. aux p. 6–7.

[7] Pièce AP-2019-021-03B à la p. 39.

[8] Ibid. à la p. 41; pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 41–49.

[9] Ibid. à la p. 45; pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 76–91.

[10] Ibid. à la p. 47; pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 93–105.

[11] Ibid. à la p. 49; pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 107–118.

[12] Transcription de l’audience publique aux p. 49–50. Les témoins appelés par SCE y ont également fait référence comme à un système de planification des ressources de l’entreprise.

[13] Ibid. à la p. 54.

[14] GBG Spyder Canada Holdings ULC c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (2 août 2022), AP‑2019‑033 (TCCE) [Spyder] aux par. 48–49.

[15] Brunswick International (Canada) Limited c. Sous-ministre du Revenu national (14 décembre 1999), AP-98-100 (TCCE) [Brunswick] aux p. 8–9.

[16] Brunswick à la p. 9, citant R. c. Kelly, [1992] 2 R.C.S. 170, citant avec approbation G.H.L. Fridman, The Law of Agency, 5e éd., London, Butterworths, 1983 à la p. 9. Voir aussi Spyder au par. 49.

[17] Clothes Line Apparel, Division of 2810221 Canada Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (14 juillet 2008), AP-2007-006 (TCCE) [Clothes Line] au par. 17.

[18] Brunswick à la p. 12.

[19] Voir JewelWay International Canada Inc. et JewelWay International, Inc. c. Sous-ministre du Revenu national (26 mars 1996), AP-94-359 et AP-94-360 (TCCE) [JewelWay]. Dans Clothes Line aux par. 46-49, le Tribunal a conclu que les modalités d’une « convention d’achat » échue ne reflétaient pas les ententes en vigueur entre l’appelante canadienne et sa société affiliée étrangère, en examinant attentivement les faits et la nature de la relation après avoir constaté que les témoins de l’appelante ne semblaient pas bien connaître la structure juridique de leur relation d’affaires quotidienne.

[20] Dans Moda Imports Inc. c. Sous-ministre du Revenu national (3 septembre 1997), AP-95-296 (TCCE) [Moda], en concluant que l’appelant n’était pas un mandataire de l’entité étrangère liée, le Tribunal a fait remarquer que l’appelant a assumé les risques et le titre de propriété des marchandises importées au Canada. Voir Moda aux p. 4, 5. Voir aussi JewelWay; DMG Trading Co. Ltd. c. Sous-ministre du Revenu national (28 August 1997), AP-96-076 (TCCE) [DMG]; Brunswick à la p. 10.

[21] Pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 41–42, 78, 101, 113.

[22] JewelWay aux p. 11–12.

[23] Pièce AP-2019-021-03B aux p. 169–170. Le Tribunal estime que les ententes avec les consultants indépendants sont moins convaincantes à cet égard, mais il considère que la définition plus large de « Scentsy » dans ces documents est, au mieux, ambiguë; voir la pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 120, 121.

[24] DMG à la p. 3.

[25] Transcription de l’audience publique à la p. 70.

[26] Brunswick à la p. 9; voir Moda à la p. 1, où il a été établi que l’importateur et l’exportateur, dont le Tribunal a estimé qu’ils n’étaient pas dans une relation mandant-mandataire, avaient les mêmes agents.

[27] Paul Klassen a déclaré qu’environ 45 employés de SI ont fourni des services à SCE pendant la période visée par la révision. Cela comprenait le poste de directeur national pour le Canada, qui a toujours été un cadre de SI. Paul Klassen a occupé ce poste jusqu’en janvier 2014, date à laquelle Jeff Dastrup l’a remplacé pour le reste de la période visée par la révision. Transcription de l’audience publique aux p. 31, 78.

[28] Thomas Laws a déclaré que ces salaires gagnés au Canada étaient également comptabilisés et déclarés à l’Agence du revenu du Canada aux fins de la retenue d’impôt. Transcription de l’audience publique aux p. 77–80, 83.

[29] Transcription de l’audience publique aux p. 84–87.

[30] Ibid. aux p. 81–82.

[31] Ibid. aux p. 82–83.

[32] Thomas Laws a déclaré que SCE assume le risque de transit des marchandises au Canada avant leur livraison aux clients canadiens. Le Tribunal reconnaît ce fait. Voir Transcription de l’audience publique à la p. 72; pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 96–97.

[33] Transcription de l’audience publique aux p. 52–53, 66–67, 68, 69–70, 102, 103; pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 866–883.

[34] Ibid. aux p. 49–50, 69; Pièce AP-2019-021-03C (protégée) à la p. 542; pièce AP-2019-021-24C (protégée) aux p. 34–38, 47. Le Tribunal accepte l’explication de SCE selon laquelle le nom de la société initialement associé au numéro de société 1510 dans ces documents était le résultat d’une erreur dans la saisie des données, ainsi que l’erratum qui en a résulté et qui identifie cette société comme étant SCE. Voir Transcription de l’audience publique aux p. 51–52; pièce AP-2019-021-03C (protégée) à la p. 543; pièce AP-2019-021-24C (protégée) à la p. 47.

[35] Ibid. aux p. 65, 67, 99. Bien qu’il ne soit pas déterminant sur la question du mandat, le Tribunal accepte la valeur probante des renseignements relatifs à l’impôt sur le revenu soumis par SCE à l’appui de sa position selon laquelle elle a généré un revenu de la vente des marchandises; pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 180–188, 195, 209–217, 224, 243–250, 252.

[36] Ibid. aux p. 54–55; pièce AP-2019-021-03E (protégée).

[37] Ibid. aux p. 55–56, 71–72; pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 76, 86, 94–95, 96–97, 535–536. En concluant que l’appelant dans l’affaire Moda n’était pas un mandataire de l’entité étrangère liée, le Tribunal fait remarquer que l’appelant assumait les risques et le titre des marchandises importées au Canada. Voir Moda aux p. 4, 5; Brunswick à la p. 10; JewelWay; DMG.

[38] Continental Bank Leasing Corp. c. Canada, [1998] 2 R.C.S. 298 au par. 20.

[39] Brunswick à la p. 8.

[40] Pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 76, 86, 93–96.

[41] 2001 CSC 36, [2001] 2 RCS 100 [Mattel]. Voir Delta Galil USA Inc. c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (25 mars 2021), AP-2020-002 (TCCE) [Delta Galil] au par. 27.

[42] Mattel au par. 45.

[43] Transcription de l’audience publique aux p. 55–56, 71–72; pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 76, 86, 94–95, 96–97, 535–536.

[44] Canada, Parlement, Débats de la Chambre des communes, 35e parlement, 1re session, vol. 133 (31 octobre 1995), en ligne : <https://www.ourcommons.ca/DocumentViewer/en/35-1/house/sitting-251/hansard#15990>.

[45] Transcription de l’argumentation publique aux p. 97–98.

[46] 54 DTC 6169, [2000] 2 CTC 56, 2000 CanLII 14932 (CAF) [Dudney] au par. 15.

[49] Pièce AP-2019-021-03D à la p. 54.

[50] Ibid. aux p. 75, 82, 85.

[51] 2008 CCI 306 [AIL] au par. 47.

[52] Dans cette affaire, la CAF a déterminé que le Tribunal n’aurait pas dû conclure que l’entité canadienne n’était pas un acheteur au Canada en raison du fait qu’elle était contrôlée par une entité étrangère, c’est-à-dire que la filiale ne pouvait pas vendre de marchandises sans l’approbation de sa société mère étrangère et qu’elle n’exerçait pas un « certain contrôle » sur ses bénéfices. Une telle conclusion serait fondée sur une « intention non exprimée par le législateur ». AAi. Fostergrant of Canada Co. c. Canada (Commissaire de l’Agence des Douanes et du Revenu), 2004 CAF 259 [Fostergrant] aux par. 18, 19.

[53] Fostergrant au par. 19.

[54] Brunswick à la p. 11.

[55] Transcription de l’audience publique aux p. 84–87.

[56] Ibid. aux p. 125–127.

[57] Comme il est indiqué dans Delta Galil, le fait qu’un importateur paie des impôts sur le revenu relativement aux marchandises en cause n’est pas déterminant quant au lieu où il exerce son activité. Le Tribunal doit tenir compte de l’ensemble des éléments de preuve au dossier dans le présent appel afin de déterminer si SCE exerce son activité par l’intermédiaire de son lieu fixe d’affaires. En l’espèce, le Tribunal estime que le fait que SCE a payé de l’impôt sur le revenu au Canada (bien que cela ne soit pas déterminant) appuie la position selon laquelle elle exerce son activité au Canada; voir Delta Galil au par. 78. Le fait que SCE ait payé des retenues d’impôt sur la rémunération des services fournis par des employés en sous-traitance alors qu’elle se trouvait au Canada constitue un argument encore plus fort en faveur de cette position; Transcription de l’audience publique à la p. 77; pièce AP-2019-021-47B.

[58] Transcription de l’audience publique aux p. 12–14.

[59] Ibid. aux p. 44–45; pièce AP-2019-021-03B aux p. 169–170.

[60] Ibid. à la p. 96; pièce AP-2019-021-03B aux p. 156–167.

[61] Ibid. aux p. 90–91.

[62] Ibid. aux p. 92–96.

[63] Ibid. aux p. 46, 60, 85, 87–88; pièce AP-2019-021-03C (protégée) à la p. 65.

[64] Voir spécifiquement la pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 122–123, clauses 10–13.

[65] Transcription de l’audience publique aux p. 60–62, 64, 84, 85–86.

[66] Ibid. à la p. 96.

[67] Ibid. aux p. 84–85, 95, 97, 127–129.

[68] Mattel au par. 45.

[69] Pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 180–321.

[70] Pièce AP-2019-021-09; Pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 204, 238, 279, 318.

[71] Pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 84-85, 108-109.

[72] Ibid. (protégée) aux p. 396–418.

[73] Ibid. (protégée) aux p. 420–425.

[74] Ibid. (protégée) aux p. 427–440.

[75] Ibid. (protégée) aux p. 442–510.

[76] Ibid. (protégée) aux p. 512–516, 518–523.

[77] Pièce AP-2019-021-07 aux p. 55, 56, 58.

[78] OMC, Accord sur la mise en œuvre de l’article VII de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 <https://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/20-val_01_f.htm>. Voir aussi la pièce AP-2019-021-07 aux p. 47–48.

[79] Voir Jockey Canada Copmany c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada (20 décembre 2012), AP-2011-008 (TCCE). Le Tribunal a reconnu que les déclarations d’impôt sur le revenu de l’appelante, y compris la documentation sur les prix de transfert, reflètent la réalité commerciale des transactions en question, soulignant (au par. 160) « l’argument quelque peu particulier de JCC selon lequel, somme toute, il ne faut tenir aucun compte de ses livres et registres comptables aux fins de l’évaluation en douane puisque ce sont les documents internes d’une société fermée qui visent à respecter ses obligations en matière d’impôt sur le revenu. Le Tribunal estime que cet argument n’est pas fondé. Pour l’admettre, le Tribunal devrait conclure que les livres et registres de JCC ne reflètent pas la réalité commerciale, ce qui n’est pas crédible. »

[80] Pièce AP-2019-021-07 au par. 80.

[81] Voir la pièce AP-2019-021-03C (protégée) aux p. 180–321, 396–523.

[82] Transcription de l’audience à huis clos aux p. 5–13, 33–34.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.